A la recherche de la valeur perdue : construire les processus créateurs de valeur dans le secteur public - article ; n°2 ; vol.17, pg 21-34
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Politiques et management public - Année 1999 - Volume 17 - Numéro 2 - Pages 21-34
La performance d'une organisation est le jugement porté par la société (clients, usagers, riverains) sur le rapport entre valeur produite (besoins satisfaits) et coûts encourus (ressources consommées). Piloter la performance d'une organisation suppose donc de résoudre deux problèmes : définir les besoins auxquels elle doit répondre (le contenu de la valeur), déployer le couple valeur-coût à l'intérieur de l'organisation, dans ses divers rouages.
Les deux questions sont liées. La définition du besoin social servi par l'organisation influence la problématique du déploiement du couple valeur-coût à l'intérieur de l'entreprise, notamment par deux caractéristiques fondamentales : son degré de stabilité et son degré de complexité et de personnalisation. Cet article émet l'hypothèse selon laquelle les modes de pilotage traditionnels de la performance publique en France étaient fondés sur des hypothèses de stabilité et de simplicité (degré élevé de standardisation) du besoin social.
Dans le cas du secteur public, la définition du besoin ne ressort pas seulement du marché, mais reflète une volonté générale, interprétée et explicitée par la puissance publique. En France, c'est l'Etat qui définit traditionnellement les besoins et donc le contenu de la valeur. Il prévoit les évolutions de la demande et planifie l'adaptation correspondante de la production, pour laquelle il fournit des moyens financiers.
Le caractère standardisé du service favorise la centralisation hiérarchique de la connaissance et de l'apprentissage. La stabilité dans la définition du service permet de supposer que l'expérience importante accumulée a permis depuis longtemps d'optimiser et de stabiliser les processus de travail. Le pilotage devient alors un contrôle de conformité par rapport à une norme optimale. La performance prend deux visages : centralement, et à intervalles très espacés, la performance technique dans la redéfinition de nouvelles normes de service ; dans l'épaisseur de l'organisation et au fil du temps, la performance s'identifie à la discipline dans l'exécution des consignes. La régulation se fait essentiellement par la ressource, a priori, à travers l'assignation de moyens budgétaires. La stabilité du produit et du process permet de stabiliser la division du travail et la définition des métiers. Ce cadre encourage une culture de territoire, de normes et de conformité, de métiers plus ou moins corporatistes.
Désormais, la demande sociale servie par le secteur public est, tout à la fois, fortement différenciée (personnalisation) et rapidement évolutive. Il faut donc construire de nouveaux modes de pilotage. Mais cela n'est possible que si l'on dispose d'une définition claire des besoins auxquels on cherche à répondre, c'est-à-dire d'une définition claire des fonctions du secteur public. Or celle-ci ne peut qu'être évolutive : il faut donc procéder à une réingénierie continue des services à rendre. Cela suppose des mécanismes de définition de la valeur publique plus complexes qu'un Etat normalisateur et fmanceur, articulant des pôles multiples organisateurs de la demande sociale.
A l'intérieur de l'entreprise, les métiers doivent se décloisonner et se mettre à l'écoute permanente du client. On passe d'un pilotage fondé sur le binôme pouvoir hiérarchique - dotation en ressources à un pilotage fondé sur le binôme compétence - pilotage de chaînes de valeur et de processus d'action. Rien de très original à cela : avec l'annulation des deux hypothèses de standardisation et de stabilité, disparaît d'une certaine manière la spécificité de la performance publique, dans son acception traditionnelle. Soit elle se dissout dans les notions de marché et de client, cohérentes avec une logique de privatisation généralisée. Soit elle se retranche dans les notions de service public universel, corporatisme social (protection des statuts), ce qui la condamne à terme à l'identification fatale performance publique = contre-performance. Soit elle trouve des voies nouvelles en redéfinissant d'abord les sources et les contenus de la valeur, au carrefour d'expressions sociales multiples et changeantes.
14 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1999
Nombre de lectures 38
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Philippe Lorino
A la recherche de la valeur perdue : construire les processus
créateurs de valeur dans le secteur public
In: Politiques et management public, vol. 17 n° 2, 1999. La performance publique. Actes du neuvième colloque
international organisé en collaboration avec l'IUP management public, Institut d'Etudes Politiques d'Aix-en-Provence
et avec le concours du ministère de l'Education nationale, de l'Enseignement supérieur et de la Recherche. Aix-en-
Provence - 28/29 mai 1998 - Tome 1 - A la recherche de la performance publique. pp. 21-34.
Citer ce document / Cite this document :
Lorino Philippe. A la recherche de la valeur perdue : construire les processus créateurs de valeur dans le secteur public. In:
Politiques et management public, vol. 17 n° 2, 1999. La performance publique. Actes du neuvième colloque international
organisé en collaboration avec l'IUP management public, Institut d'Etudes Politiques d'Aix-en-Provence et avec le concours du
ministère de l'Education nationale, de l'Enseignement supérieur et de la Recherche. Aix-en-Provence - 28/29 mai 1998 - Tome
1 - A la recherche de la performance publique. pp. 21-34.
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/pomap_0758-1726_1999_num_17_2_2228Résumé
La performance d'une organisation est le jugement porté par "la société" (clients, usagers, riverains) sur
le rapport entre valeur produite (besoins satisfaits) et coûts encourus (ressources consommées). Piloter
la performance d'une organisation suppose donc de résoudre deux problèmes : définir les besoins
auxquels elle doit répondre (le contenu de la valeur), déployer le couple "valeur-coût" à l'intérieur de
l'organisation, dans ses divers rouages.
Les deux questions sont liées. La définition du besoin social servi par l'organisation influence la
problématique du déploiement du couple valeur-coût à l'intérieur de l'entreprise, notamment par deux
caractéristiques fondamentales : son degré de stabilité et son degré de complexité et de
personnalisation. Cet article émet l'hypothèse selon laquelle les modes de pilotage traditionnels de la
performance publique en France étaient fondés sur des hypothèses de stabilité et de simplicité (degré
élevé de standardisation) du besoin social.
Dans le cas du secteur public, la définition du besoin ne ressort pas seulement du marché, mais reflète
une volonté générale, interprétée et explicitée par la puissance publique. En France, c'est l'Etat qui
définit traditionnellement les besoins et donc le contenu de la valeur. Il prévoit les évolutions de la
demande et planifie l'adaptation correspondante de la production, pour laquelle il fournit des moyens
financiers.
Le caractère standardisé du service favorise la centralisation hiérarchique de la connaissance et de
l'apprentissage. La stabilité dans la définition du service permet de supposer que l'expérience
importante accumulée a permis depuis longtemps d'optimiser et de stabiliser les processus de travail.
Le pilotage devient alors un contrôle de conformité par rapport à une norme optimale. La performance
prend deux visages : centralement, et à intervalles très espacés, la performance technique dans la
redéfinition de nouvelles normes de service ; dans l'épaisseur de l'organisation et au fil du temps, la
performance s'identifie à la discipline dans l'exécution des consignes. La régulation se fait
essentiellement par la ressource, a priori, à travers l'assignation de moyens budgétaires. La stabilité du
produit et du process permet de stabiliser la division du travail et la définition des métiers. Ce cadre
encourage une culture de territoire, de normes et de conformité, de métiers plus ou moins corporatistes.
Désormais, la demande sociale servie par le secteur public est, tout à la fois, fortement différenciée
(personnalisation) et rapidement évolutive. Il faut donc construire de nouveaux modes de pilotage. Mais
cela n'est possible que si l'on dispose d'une définition claire des besoins auxquels on cherche à
répondre, c'est-à-dire d'une définition claire des fonctions du secteur public. Or celle-ci ne peut qu'être
évolutive : il faut donc procéder à une "réingénierie continue" des services à rendre. Cela suppose des
mécanismes de définition de "la valeur publique" plus complexes qu'un Etat normalisateur et fmanceur,
articulant des pôles multiples organisateurs de la demande sociale.
A l'intérieur de l'entreprise, les métiers doivent se décloisonner et se mettre à l'écoute permanente du
client. On passe d'un pilotage fondé sur le binôme "pouvoir hiérarchique - dotation en ressources" à un
pilotage fondé sur le binôme "compétence - pilotage de chaînes de valeur et de processus d'action".
Rien de très original à cela : avec l'annulation des deux hypothèses de standardisation et de stabilité,
disparaît d'une certaine manière la spécificité de la performance publique, dans son acception
traditionnelle. Soit elle se dissout dans les notions de marché et de client, cohérentes avec une logique
de privatisation généralisée. Soit elle se retranche dans les notions de "service public universel,
corporatisme social (protection des statuts)", ce qui la condamne à terme à l'identification fatale
"performance publique = contre-performance". Soit elle trouve des voies nouvelles en redéfinissant
d'abord les sources et les contenus de la valeur, au carrefour d'expressions sociales multiples et
changeantes.A LA RECHERCHE DE LA VALEUR PERDUE :
CONSTRUIRE LES PROCESSUS CRÉATEURS DE VALEUR
DANS LE SECTEUR PUBLIC
Philippe LORINO*
Résumé La performance d'une organisation est le jugement porté par 'la société' (clients,
usagers, riverains) sur le rapport entre valeur produite (besoins satisfaits) et coûts
encourus (ressources consommées). Piloter la performance d'une organisation
suppose donc de résoudre deux problèmes : définir les besoins auxquels elle doit
répondre (le contenu de la valeur), déployer le couple 'valeur-coût' à l'intérieur de
l'organisation, dans ses divers rouages.
Les deux questions sont liées. La définition du besoin social servi par l'organisation
influence la problématique du déploiement du couple valeur-coût à l'intérieur de
l'entreprise, notamment par deux caractéristiques fondamentales : son degré de
stabilité et son degré de complexité et de personnalisation. Cet article émet
l'hypothèse selon laquelle les modes de pilotage traditionnels de la performance
publique en France étaient fondés sur des hypothèses de stabilité et de simplicité
(degré élevé de standardisation) du besoin social.
Dans le cas du secteur public, la définition du besoin ne ressort pas seulement du
marché, mais reflète une volonté générale, interprétée et explicitée par la puissance
publique. En France, c'est l'Etat qui définit traditionnellement les besoins et donc le
contenu de la valeur. Il prévoit les évolutions de la demande et planifie l'adaptation
correspondante de la production, pour laquelle il fournit des moyens financiers.
Le caractère standardisé du service favorise la centralisation hiérarchique de la
connaissance et de l'apprentissage. La stabilité dans la définition du service permet
de supposer que l'expérience importante accumulée a permis depuis longtemps
d'optimiser et de stabiliser les processus de travail. Le pilotage devient alors un
contrôle de conformité par rapport à une norme optimale. La performance prend deux
visages : centralement, et à intervalles très espacés, la technique dans
la redéfinition de nouvelles normes de service ; dans l'épaisseur de l'organisation et
au fil du temps, la performance s'identifie à la discipline dans l'exécution des
consignes. La régulation se fait essentiellement par la ressource, a priori, à travers
l'assignation de moyens budgétaires. La stabilité du produit et du process permet de
stabiliser la division du travail et la définition des métiers. Ce cadre encourage une
culture de territoire, de normes et de conformité, de métiers plus ou moins
corporatistes.
* ESSEC
Revue POLITIQUES ET MANAGEMENT PUBLIC, Volume 17, n° 2, juin 1999.
© Institut de Management Public - 1999. 22 Philippe LORINO

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