Du caractère de quelques innovations dans le lexique français de l époque révolutionnaire et impériale - article ; n°1 ; vol.81, pg 47-64
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Comptes-rendus des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres - Année 1937 - Volume 81 - Numéro 1 - Pages 47-64
18 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1937
Nombre de lectures 27
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Ferdinand Brunot
Du caractère de quelques innovations dans le lexique français
de l'époque révolutionnaire et impériale
In: Comptes-rendus des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, 81e année, N. 1, 1937. pp. 47-64.
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Brunot Ferdinand. Du caractère de quelques innovations dans le lexique français de l'époque révolutionnaire et impériale. In:
Comptes-rendus des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, 81e année, N. 1, 1937. pp. 47-64.
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/crai_0065-0536_1937_num_81_1_76830QUELQUES INNOVATIONS DANS LE LEXIQUE FRANÇAIS 47
ont changé. Ils n'y ont pas manqué clans le cas particulier de Ay,
et pour le reconnaître, il suffit de renoncer à corriger Josiié,
VII, '2, comme on a coutume de la faire à la suite des Septante.
Dès lors il apparaît que le nom ancien de Ay est Beth-Awen, qui
cache un primitif Beth-Hadad, c'est-à-dire « Temple de Hadad ».
M. Adolphe Lods présente une observation.
M. Ferdinand Brunot entretient l'Académie des caractères de
quelques innovations dans le lexique français à l'époque de la
Révolution et de l'Empire J.
MM. Mario Roquks et William Marçais présentent des
observations.
COMMUNICATION
du caractère de quelques innovations dans le lexique fran
çais de lépoque révolutionnaire et impériale, par m. fer
dinand brunot, membre de l'aca demie.
Messieurs,
En vous apportant le 17e volume (Tome IX, 2e par
tie) de mon Histoire de la Langue Française, intitulé « La
Révolution et l'Empire, Les Événements, Les Institutions
et la Langue », il m'a semblé bon, non seulement de vous
en offrir l'hommage en quelques mots, comme il est d'usage,
mais de vous marquer l'importance extraordinaire de ces
quelques années pour notre histoire linguistique. J'essaierai
pour cela, de mettre en lumière quelques traits des phéno
mènes qui se produisirent alors, qui leur donnent une
importance exceptionnelle.
I. Une tempête d'idées dans une langue étroitement
fixée. — Un problème se posait d'abord : Comment une
langue aussi étroitement réglée que le français du χνπΐθ
1 . Voir ci-après . 48 COMPTES RENDUS DE l'aCADÉMIE DES INSCRIPTIONS
siècle, dont le vocabulaire était minutieusement défini et
fixé, allait-elle pouvoir, en quelques années, s'accommod
er à une société nouvelle où tout était bouleversé : gou
vernement, institutions, lois, croyances, mœurs, habitudes?
Jamais, nulle part, tempête semblable n'avait changé aussi
brusquement tout ce qui était la vie séculaire d'un peuple.
Il m'apparut bientôt que le trouble n'était guère que dans
le lexique, et que les principaux éléments nouveaux, qui
étaient des mots, s'étaient intégrés sans peine, malgré les
résistances, dans l'usage général, de sorte que si, à l'époque,
certains auteurs ont protesté contre une néologie tapageuse
qui altérait la langue, des observateurs postérieurs ont cru
pouvoir affirmer au contraire que la langue était restée pure.
Illusion singulière, mais explicable, parce que nous vivons
pour ainsi dire dans le lexique législatif et administratif créé
alors et que sa nouveauté n'apparaît plus. Il est inutile de
dresser une liste qui commencerait à Assemblée Nationale,
département, tribunal correctionnel, et qui ne finirait pas. La
langue révolutionnaire est, comme la Révolution elle-même,
toujours vivante. On n'a dès lors pas conscience du grand
renouvellement qui s'est opéré.
II. Comment le caractère des nouveautés nécessite une
philologie spéciale. — Je vis aussi tout de suite que tout
ce qui fait l'objet des recherches ordinaires des philologues :
étymologie, formes, orthographe, signification des mots, tout
en restant nécessaire à connaître, n'était souvent que peu de
chose auprès de leur vie morale et sociale, je veux dire
auprès du rôle que certains d'entre eux prirent dans le lan
gage, la pensée et les sentiments publics'1. Deux exemples
1. Déjà il est tout à fait insuffisant de dire qu'on a emprunté à l'anglais
le nom de Convention, si on ne précise pas qu'on a calqué sur le nom que
les Américains avaient donné à une Assemblée munie de tous les pouvoirs,
celui de l'Assemblée convoquée chez nous après le dix Août, quand tout
l'ancien Gouvernement el la Constitution récente s'étant écroulés, rien ne
restait plus debout. QUELQUES INNOVATIONS DANS LE LEXIQTE FRANÇAIS 49
montreront ce que je veux dire : les mots de guillotine et
de responsabilité.
Gomment et pourquoi le médecin Guillotin inventa la
machine à exécuter les sentences capitales, qui, dans sa pen
sée, devait sauver les suppliciés de la maladresse des bour
reaux, c'est chose nécessaire à savoir sans doute. On peut
aussi noter qu'elle faillit s'appeler « Louisette », du nom
du médecin au rapport de qui elle fut soumise.
Mais ce qui importe beaucoup plus, c'est de rechercher
comment tout un vocabulaire se forma autour de l'instr
ument érigé place de la Révolution, et quel caractère avaient
les mots qui composaient ce vocabulaire.
Certains d'entre eux sont purement techniques : écha-
faud, charrette, etc.
Mais une série d'autres, qui composent un véritable argot,
expriment les sentiments qui animaient l'assistance, nomb
reuse, au début du moins. Ce sont de sinistres sobriquets :
la lunette est le vasistas, la petite fenêtre ; le couperet, le
rasoir national, etc. Quand le condamné monte les degrés,
les mains liées derrière le dos, il va jouer à la main chaude ;
sa tête tombe, il éternue dans le son, ou dans le sac.
J'abrège, mais j'en ai dit assez pour qu'on comprenne
combien ces railleries sentent la haine, comment elles tra
duisent des sentiments, ou, si l'on veut, une absence de sen
timents, et qu'en observant la popularité de ces mots,
ensuite le dégoût qu'ils inspirent, on pénètre dans la psychol
ogie de la foule ou d'une partie de la foule.
Mais j'ai hâte de sortir de cette boue sanglante, pour con
sidérer le second mot que j'ai allégué : responsabilité. Il
n'a pour ainsi dire pas d'historique dans Littré. Oscar
Bloch en signale l'apparition en 1787-1788, à la veille du
grand mouvement.
On devine, mais il serait bon de le savoir de science cer
taine, que le type anglais : responsibility , a dû contribuer
à faire naître son correspondant français, mais j'ose dire que
1937 4 50 COMPTES RENDUS DE l'aCADÉMIE DES INSCRIPTIONS
quand on saura cela, on ne saura à peu près rien de la valeur
de ce mot, des espoirs et des chimères que l'idée de la res
ponsabilité des ministres avait fait naître dans l'esprit fran
çais. Je lui ai consacré tout un chapitre (p. 104-9-1 053), voici
pourquoi : II s'agissait de faire voir comment un mot à lui
seul peut exprimer le désir d'une nation qui s'éveille à la
vie publique, et veut avoir en face d'elle des personnages
à qui à l'occasion elle pourra s'en prendre. Le Roi est
écarté, par sa grandeur même, pour un moment. Mais
dès 1787, Responsabilité des ministres! est le cri général ;
des Cahiers la réclament, les constituants, les journalistes
s'accordent sur cette revendication fondamentale, Mirabeau,
Madame Roland, vingt autres, proclament qu'il y a là vin
principe « qui doit changer toute la constitution de l'Etat ».
Ce principe s'applique à tous ceux qui, des ministres au
dernier garde-champêtre, exercent une autorité. Il ne doit
plus y avoir d'offices, mais il y aura des fonctions. Personne
ne les exercera sans être obligé d'en rendre compte. Des
huissiers à cheval de la municipalité portent chacun une
enseigne, à laquelle est suspendue une chaîne de couronne
civique et cette enseigne porte : « Liberté, Egalité, Consti
tution, Patrie », au-dessous : « Publicité, Responsabilité ».
Ce mot exprime donc à lui seul une révolution totale dans
l'administration : sa naissance est le signe d'un changement
abso

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