Entrées de femmes en politique. L irréductibilité du genre à l heure de la parité - article ; n°60 ; vol.15, pg 113-146
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Entrées de femmes en politique. L'irréductibilité du genre à l'heure de la parité - article ; n°60 ; vol.15, pg 113-146

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Politix - Année 2002 - Volume 15 - Numéro 60 - Pages 113-146
Women Entering Politics. The Specificity of Gender at the Time of Parity Christine Guionnet While the idea of a female art of politics is broadly spreading, the empirical observation of newly elected women's relation with politics since March 2001 shows that their practices and approaches of politics are no less determined by their positions as newcomers. Processes similar to those characterising other outsiders in the past can be observed among them, such as reversing a stigma or affirming a strategie identity - in this case, gender - in order to legitimise their introduction to politics. However, gender identifies are specifie enough that this variable can at the same time be an exceptional resource, in a context which tends to open the circuits of political legitimacy (with the idea of a necessary renovation of political practices), and inseparably be transformed in some contexts into a paradoxical handicap.
Entrées de femmes en politique. L'irréductibilité du genre à l'heure de la parité Christine Guionnet Alors que se diffuse largement la rhétorique d'un art féminin de la politique, l'observation empirique du rapport des nouvelles élues de mars 2001 à la politique conduit à souligner le rôle non moins déterminant de leur position de néophytes dans le modelage de leurs pratiques et approches de la politique. On retrouve chez de nombreuses élues des processus repérables chez d'autres outsiders, dans le passé, de retournement du stigmate et d'affirmation d'une identité stratégique - ici, le genre -, afin de légitimer leur insertion dans le champ politique. Pour autant, la singularité des identités de genre contribue à ce que cette variable puisse à la fois constituer une ressource historiquement inégalée pour entrer en politique, dans un contexte par ailleurs favorable à l'ouverture des circuits de la légitimation politique (idée d'une nécessaire rénovation des pratiques politiques), et indissociablement se muer en un handicap paradoxal dans certaines configurations.
34 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 2002
Nombre de lectures 29
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Christine Guionnet
Entrées de femmes en politique. L'irréductibilité du genre à
l'heure de la parité
In: Politix. Vol. 15, N°60. Quatrième trimestre 2002. pp. 113-146.
Abstract
Women Entering Politics. The Specificity of Gender at the Time of Parity
Christine Guionnet
While the idea of a female art of politics is broadly spreading, the empirical observation of newly elected women's relation with
politics since March 2001 shows that their practices and approaches of politics are no less determined by their positions as
newcomers. Processes similar to those characterising other outsiders in the past can be observed among them, such as
reversing a stigma or affirming a strategie identity - in this case, gender - in order to legitimise their introduction to politics.
However, gender identifies are specifie enough that this variable can at the same time be an exceptional resource, in a context
which tends to open the circuits of political legitimacy (with the idea of a necessary renovation of political practices), and
inseparably be transformed in some contexts into a paradoxical handicap.
Résumé
Entrées de femmes en politique. L'irréductibilité du genre à l'heure de la parité
Christine Guionnet
Alors que se diffuse largement la rhétorique d'un art féminin de la politique, l'observation empirique du rapport des nouvelles
élues de mars 2001 à la politique conduit à souligner le rôle non moins déterminant de leur position de néophytes dans le
modelage de leurs pratiques et approches de la politique. On retrouve chez de nombreuses élues des processus repérables
chez d'autres outsiders, dans le passé, de retournement du stigmate et d'affirmation d'une identité stratégique - ici, le genre -,
afin de légitimer leur insertion dans le champ politique. Pour autant, la singularité des identités de genre contribue à ce que cette
variable puisse à la fois constituer une ressource historiquement inégalée pour entrer en politique, dans un contexte par ailleurs
favorable à l'ouverture des circuits de la légitimation politique (idée d'une nécessaire rénovation des pratiques politiques), et
indissociablement se muer en un handicap paradoxal dans certaines configurations.
Citer ce document / Cite this document :
Guionnet Christine. Entrées de femmes en politique. L'irréductibilité du genre à l'heure de la parité. In: Politix. Vol. 15, N°60.
Quatrième trimestre 2002. pp. 113-146.
doi : 10.3406/polix.2002.1243
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/polix_0295-2319_2002_num_15_60_1243Entrées de femmes en politique
L'irréductibilité du genre à l'heure de la parité
Christine GuiONNET
Les premières mises en œuvre de la loi sur la parité, lors des élections
municipales françaises de 2001, furent l'occasion d'une surenchère
autour de l'idée selon laquelle les femmes feraient de la politique
différemment des hommes. Le discours, largement véhiculé jusqu'alors par
certaines militantes féministes et relayé par des publications universitaires
françaises ou étrangères - notamment dans le monde anglo-saxon, cultivant
une approche utilitariste de la citoyenneté1 -, fut mis en avant pour justifier,
entre autres arguments, l'adoption de la loi sur la parité2. L'argument d'un
savoir-faire féminin spécifique fut alors défendu par de nombreux acteurs, et
1. La connexion entre féminisme et idée d'une approche féminine de la politique dans le monde
anglo-saxon est particulièrement bien analysée dans Mackay (F.), Love and Politics. Women
Politicians and the Ethics of Care, Londres, Continuum, 2001 ; l'idée d'une approche utilitariste
typiquement anglaise, mobilisée en faveur de l'égalité politique hommes /femmes est par
ailleurs explorée par P. Rosanvallon, dans « L'histoire du vote des femmes. Réflexions sur la
spécificité française », in Duby (G.), Perrot (M.), dir., Femmes et histoire, Paris, Pion, 1993, et dans
Le sacre du citoyen. Histoire du suffrage universel en France, Paris, Gallimard, 1992. Enfin, sur le lien
entre recherche universitaire et engagement féministe en France, on peut se reporter à Riot-
Sarcey (M.), Histoire du féminisme, Paris, La Découverte, 2002, p. 102 sq.
2. Pour un rappel des débats précédant le vote de la loi sur la parité et mobilisant l'argument de
savoir-faire spécifiquement féminins, cf. Lagrave (R.-M.), « Une étrange défaite. La loi
constitutionnelle sur la parité », Politix, 51, 2000, notamment p. 130 sq.
Politix. Volume 15 - n° 60/2002, pages 113 à 146 114 Politixn°60
largement repris par la presse3. Au sein de la classe politique même, l'idée
fut admise, à tel point qu'une grande partie des états-majors
partisans et têtes de listes déclara placer de fortes attentes en une
participation accrue des femmes aux fonctions électives4. Dans un contexte
de dénonciation quasi-générale d'une « crise du politique », l'arrivée des
femmes, considérées comme novices, fut à maintes reprises présentée
comme une occasion de renouveler le personnel politique, mais également
d'introduire de nouvelles pratiques. Les femmes sont censées adopter une
approche spécifique de la politique : un plus grand pragmatisme, un rapport
moins ambitieux, moins carriériste à la politique - en liaison avec une
moindre séparation entre vie privée et vie publique -, une volonté d'être
plus efficaces dans leur rapport au temps, à la prise de parole, à l'action, une grande faculté à entretenir des relations de proximité avec les autres -
collègues et citoyens - et à demeurer à l'écoute de leurs interlocuteurs, une
appétence singulière pour les domaines sociaux, de service aux personnes et,
a contrario, un moindre intérêt pour les considérations partisanes, les
dossiers techniques, les prises de parole et les relations violentes et
conflictuelles5, etc. Ce discours, non spécifique au cas français6, privilégiant
3. Pour une analyse des visions de la femme en politique dans la presse, cf. Dulong (D.),
Matonti (F.), « L'indépassable féminité. La mise en récit des femmes en campagne »,
Communication au colloque « La mobilisation électorale municipale : permanence et
mutations », Lille, 10-11 janvier 2002. Concernant le rôle important de la presse américaine dans
la diffusion de l'idée d'un « gender gap » - parfois exagéré - entre hommes et femmes en
politique, lire Carroll (S.J.), Norris (P.), « The Dynamics of the Framing Process. From Reagan's
Gender Gap to Clinton's Soccer Moms », Southern Political Science Association Annual
Meeting, Norfolk Virginia, 5-8 Novembre 1997 (disponible sur le site internet :
www.pippanorris.com).
4. Dans son rapport sur la parité, C. Génisson note ainsi que 80 % des têtes de liste aux
municipales interrogées ont estimé que la féminisation des assemblées municipales allait
améliorer le dialogue et la concertation avec les habitants, la prise en compte de leurs
préoccupations, la qualité du débat au sein des conseils municipaux, et que cela aurait
globalement des effets positifs sur le fonctionnement de la démocratie (73 %) et la confiance des
habitants envers les élus (67 %) (« La parité entre femmes et hommes : une avancée décisive
pour la démocratie. Rapport au Premier ministre », Observatoire de la parité entre les femmes et les
hommes, mars 2002, p. 18). Sur les attentes importantes placées par la population française dans
la féminisation des conseils municipaux, cf. l'analyse d'un sondage CSA/Lunes dans Sineau
(M.), « La parité à l'épreuve des municipales », Lunes, 14, 2001.
5. Cf. Sineau (M.), Profession, femme politique. Sexe et pouvoir sous la Ve République, Paris, Presses
de Sciences Po, 2001. Des témoignages de candidates aux élections législatives de 1997 sont
également analysés dans Bataille (P.), Gaspard (F.), Comment les femmes changent la politique et
pourquoi les hommes résistent, Paris, La Découverte, 1999.
6. L'idée d'approches politiques féminines distinctes et rénovatrices, en raison de l'appétence
particulière des femmes pour la proximité et l'attention portée à autrui est particulièrement bien
analysée, dans le cas de la Grande-Bretagne, par F. Mackay, dans Love and Politics, op. cit., à la
suite notamment des travaux inauguraux de C. Gilligan sur 1'« ethic of care » féminine - éthique

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