L arme nucléaire française devant le droit international - L ARME ...
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L'arme nucléaire française devant le droit international - L'ARME ...

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CENTRE LYONNAIS D’ETUDES DE SECURITE INTERNATIONALE ET DE DEFENSE L’ARME NUCLEAIRE FRANÇAISE DEVANT LE DROIT INTERNATIONAL ET LE DROIT CONSTITUTIONNEL David CUMIN Maître de conférences en Droit public à l’Université Jean Moulin Lyon 3 CLESID – Université Jean Moulin Lyon 3 15 Quai Claude Bernard – 69007 LYON – France David Cumin, L’arme nucléaire française devant le droit international et le droit constitutionnel, Lyon, CLESID – Université Jean Moulin Lyon 3, 2000, révisée en 2005. 2 Il n’existe pas de document exhaustif sur les argumentations favorables ou défavorables à la licéité ou à l’illicéité de l’arme nucléaire française, du point de vue de sa doctrine stratégique et de son organisation politique, I en droit international, II en droit constitutionnel. Notre étude entend combler cette lacune par l’examen de la validité du décret n°96-520 du 12 juin 1 2 1996 , succédant au décret n°64-46 du 14 janvier 1964 , qui régit l’emploi des forces nucléaires françaises. Les griefs formulés devant la Cour internationale de Justice (avis consultatif du 8 juillet 1996) et devant le Conseil d’Etat (arrêt Lavaurs du 8 décembre 1995) constituent le point de départ de la recherche. 1. La France, l’arme nucléaire, le droit Ayant fondé sa sécurité sur l’atome, la France ne peut admettre que l’arme nucléaire soit dévalorisée politiquement, stratégiquement, juridiquement ou moralement. Que vaudrait la dissuasion si l’autorité détentrice de la menace nucléaire devait admettre que son pouvoir et/ou cette menace sont prohibés par le droit positif ? Or, l’arme nucléaire fait l’objet de 3puissantes tentatives de disqualification, tant sur le plan politico-stratégique que juridico- 4moral. La pratique de la dissuasion -largement acceptée en France mais largement dénoncée ailleurs- suppose la licéité de la menace ou de l’emploi des armes atomiques. Or, cette présomption est fortement contestée. Avec la résolution du chef politique, la légitimité de l’arme et le consensus de l’opinion publique, qui permet de convaincre le Parlement de voter les crédits nécessaires, sont les éléments essentiels de la crédibilité politique de la stratégie de dissuasion. Que devient cette légitimité face au mouvement international de désarmement nucléaire ? Que devient le « consensus national » sur l’atome (tant militaire que civil) ? La force de conviction de la dissuasion venait de la cohérence entre la situation objective du rapport des forces et la posture stratégique retenue : la France avait un ennemi -l’URSS- qui lui était supérieur tant conventionnellement que nucléairement ; mais en raison de son « pouvoir égalisateur », l’atome restituait à notre pays une capacité de défense d’une efficacité jugée sans équivalent. Depuis la fin de la guerre froide, se pose la question de savoir s’il existe un ennemi à dissuader. La réponse à cette question stratégique ne préjuge cependant en rien de la réponse à la question juridique de la licéité de la dissuasion. Comment légitimer la possession et l’emploi d’une arme dont la fragilité des bases juridiques contraste avec l’ampleur de la dénonciation internationale ? Le combat juridique pour ou contre la licéité de 1 JO, 15 juin 1996, p.8921. 2 JO, 19 janvier 1964, p.643. 3 Via les concepts de « révolution dans les affaires militaires », « dissuasion conventionnelle-technologique » ou « défense antimissiles ». 4 De l’avis général, la France doit conserver la capacité d’infliger des dommages intolérables à tout agresseur mettant en jeu les intérêts vitaux de la nation. 3 l’arme nucléaire est un combat politique, et vice-versa, car la légitimation de la dissuasion fait partie de la stratégie de dissuasion, laquelle a une dimension normative. Devant la CIJ, les puissances nucléaires ont ainsi dû fournir un effort de justification sans précédent. a) L’ISOLEMENT DE LA FRANCE La France, en tant que puissance nucléaire, est isolée, comme l’ont montré les débats devant la Cour internationale de Justice en 1995 ou, plus avant, les négociations sur le droit des traités en 1969 et sur le droit des conflits armés en 1977. Elle ne signa à l’époque ni la convention de Vienne de 1969 ni le protocole additionnel I de 1977 aux conventions de 1 Genève de 1949 relatif aux conflits armés internationaux . Or, on sait qu’en droit international, la souveraineté doit se soucier des alliances : vae soli ! Cet isolement juridique s’explique de la manière suivante. Du fait de la limitation de ses capacités de défense classiques, la France est le seul Etat doté d’armes nucléaire (EDAN) à adhérer officiellement à une stratégie anticités d’emploi en premier de l’arme atomique en riposte à une attaque classique. Les Etats-Unis, eux, grâce à leur supériorité conventionnelle-technologique, tendent à souscrire à une stratégie de non emploi en premier (no first use), c’est-à-dire à la doctrine selon laquelle l’arme nucléaire ne peut être utilisée qu’en réponse à une attaque nucléaire. Du moins entretiennent-ils l’ambiguïté sur leur riposte nucléaire à une attaque conventionnelle, pour garder leur liberté d’action, mais aussi en raison des doutes sur la licéité d’une telle riposte. Parallèlement, ils invoquent la précision des armes et ils soutiennent, avec la Grande-Bretagne, la possibilité d’une « guerre nucléaire limitée » qui substituerait les options antiforces, contre-valeurs ou 2 contre-C3I à l’option anticités. La Chine, de son côté, adhère depuis longtemps au no first use (NFU) et à une doctrine de dissuasion contre-forces et contre-valeurs (bien qu’elle n’en ait pas les moyens technologiques). La Russie, enfin, a certes renoncé au no first use, mais pas à la stratégie contre-forces et contre-valeurs. La récusation de la riposte atomique à une attaque classique étant le plus petit dénominateur commun des tenants de l’illicéité de l’emploi des armes nucléaires et de ceux qui font dépendre cette licéité du respect du jus in bello -c’est-à-dire tous les Etats sauf la France-, la doctrine française est de loin la plus vulnérable et la plus exposée à la contestation antinucléaire internationale. C’est pourquoi elle en est la cible privilégiée, au moins à titre « préliminaire ». 1 Elle adhéra le 27 février 1984 au protocole II sur les conflits armés non internationaux. 2 Control, command, communications, intelligence. 4 Les alignements opérés lors de la procédure devant la CIJ ont été extrêmement révélateurs. La 3Chine n’a pas participé aux débats, pas plus que le Pakistan ou Israël . Seuls six Etats ont osé soutenir, dans la phase orale, que les armes nucléaires étaient licites, quatre EDAN, les Etats- Unis, la Grande-Bretagne, la Russie et la France -mais l’argumentation de la délégation française, isolée, différait de celle des trois autres pays-, plus l’Allemagne et l’Italie. Ils étaient un peu plus nombreux lors de la phase écrite. On a noté le silence d’un grand nombre de pays de l’Alliance atlantique ou de l’Union européenne ; certains, comme la Suède, s’étant 4 même prononcés contre la licéité , avec l’Australie, la Nouvelle-Zélande ou le Japon. Alors qu’en France, la procédure devant la Cour n’a guère eu de retentissement en dehors des milieux spécialisés, les audiences ont été largement diffusées dans d’autres pays. La presse allemande a réagi très négativement à la prise de position du représentant de Berlin en faveur de la licéité, ce qui en dit long sur l’état de l’opinion publique outre-Rhin. Il ne fait pas de doute que si les Etats-Unis, hostiles au « pouvoir égalisateur de l’atome », se ralliaient à une offensive associant les Etats non dotés d’armes nucléaires (ENDAN) -Etats non alignés du « Sud » ou Etats antinucléaires du « Nord »-, les organisations internationales et les ONG, le statut de l’atome militaire français s’en trouverait fortement déstabilisé. b) LA CONTESTATION DE L’ARME NUCLEAIRE La contestation du nucléaire militaire (et civil) va croissante depuis Tchernobyl, relayée par les associations de juristes, de médecins ou de scientifiques, les Eglises, la mouvance pacifiste 5et écologiste, les partis communistes ou rebaptisés, le mouvement Pugwash et la commission 6de Canberra . Tous exigent l’abolition des armes atomiques (et l’élimination des matières fissiles) pour aboutir à un Nuclear Weapon Free World. Le problème qui se pose donc au nucléaire militaire en général et français en particulier, est celui de sa licéité et de son acceptabilité au regard des opinions publiques. La question de la relation entre l’atome et le droit est restée pour l’essentiel une question théorique en France... jusqu’à ce que deux procédures judiciaires quasi simultanées, quoique de très inégale importance et répercussion, aient mis la question du statut juridique de l’arme nucléaire en général et française en particulier, au centre de l’actualité internationale et constitutionnelle. Ces deux procédures, 3 Pays détenteurs de facto d’armes atomiques. 4 Lors de la dernière campagne des essais nucléaires français en 1995, sur les dix membres de l’Union de l’Europe occidentale, huit s’étaient déclarés contre ces essais, et sur les quinze membres de l’Union européenne, treize, par leur vote aux Nations Unies, avaient pris position contre la France ou s’étaient abstenus. 5 Cf. Conférences Pugwash sur la science et les affaires mondiales : Eliminer les armes nucléaires. Est-ce souhaitable ? Est-ce réalisable ?, Paris, Transition, 1997 (1993), avant-propos d’A. Jacquard. 6 Cf. Rapport de la Commission de Canberra : Eliminer les armes nucléaires, Paris, O. Jacob, 1997, intro. de M. Rocard. 5 1l’une (retentissante) devant la CIJ (du 14 septembre 1993 au 8 juillet 1996) , l’autre (discrète) 2devant le Conseil d’Etat (
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