La nouvelle Hongrie - article ; n°161 ; vol.29, pg 321-333

Louis Eisenmann

Description

Annales de Géographie - Année 1920 - Volume 29 - Numéro 161 - Pages 321-333
13 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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• Publié par: ANNALES_DE_GEOGRAPHIE
• Publié le: 01 janvier 1920
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Louis Eisenmann
La nouvelle Hongrie
In: Annales de Géographie. 1920, t. 29, n°161. pp. 321-333.
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Eisenmann Louis. La nouvelle Hongrie. In: Annales de Géographie. 1920, t. 29, n°161. pp. 321-333.
doi : 10.3406/geo.1920.9075
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/geo_0003-4010_1920_num_29_161_9075XXIX année septembre 1920 161
ANNALES
DE
OGRAPHIE
LA NOUVELLE HONGRIE
Le dernier recensement décennal hongrois qui été fait en 1910
accusait surun territoire de 325411 km2 une population totale de
20886447 habitants Les frontières nouvelles que vient de lui fixer
le traité du Grand Trianon ramènent la Hongrie environ 91 000 km
et 400 000 Au simple rapprochement de ces chiffres on me
sure le prix dont les Magyars paient leur responsabilité dans la guerre
Avec empire turc et avec Autriche surtout son associée depuis
tantôt quatre siècles le royaume de Saint Etienne est la grande vic
time du cataclysme européen déchaîné en 1914
une et autre Autriche et la Hongrie-portent la peine une
erreur criminelle Elles ont cru pouvoir au xix siècle et au xx
après la révolution de 1848 et éveil des nationalités maintenir par
la Violence et la ruse des tats où la majorité était livrée la domi
nation de minorités ethniques et sociales
existence de Autriche semblait un défi la géographie phy
sique La Galicie et la Dalmatie apparaissaient comme les bras iné
gaux un tronc difforme dont les deux parties le bassin de Bohême
et les pays des Alpes ont que bien peu de traits communs Il fallait
recourir la géographie économique et influence dominante du
Danube pour trouver la durée de tat autrichien une demi-
justification unité physique de la Hongrie au contraire est si
puissante si éclatante elle est un exemple classique la carte
parle trop clair pour il soit besoin de la commenter est aussi
AMM UB OSOO XXIX* ANNEB 21 LA NOUVELLE HONGRIE
bien îe grand argument invoquent les Magyars pour protester
contre le démembrement de tëur patrie historique Mais il est sans
valeur contre la volonté des peuples et il est pas douteux que sauf
une partie des Allemands les allogènes de Hongrie sont unanimes
ne plus vouloir demeurer dans unité politique hongroise Pas plus
que la doctrine allemande de la nationalité obligatoire au nom de la
Tangue la conscience moderne ne peut admettre la nationalité con
séquence forcée du relief de hydrographie ou du climat
tat hongrois auquel le Compromis de 1867 donna ou rendit
existence se proclama unitaire et magyar Or en 1910 plus de qua
rante ans après le Compromis la majorité de la population 519 100
était encore allogène1 Mais dans les fonctions publiques et les pro
fessions libérales il avait 82 100 de-Magyars contre 18 100
allogènes dont 100 Allemands de telle sorte que les 34 100
Slaves et Roumains de la population étaient représentés dans cette
catégorie que par 10 100 La propriété foncière moyenne de 50
500 était pour 69 100 entre mains magyares et la grande
pour 92 100 Industrie commercé et finance étaient domaines
magyars dans la moyenne et grande industrie 63 100 des pro
priétaires 82 100 du personnel administratif 87 100 du person
nel technique dans le commerce 64 100 de effectif 24 100
aux Allemands dans les sociétés anonymes de banque et épargne
100 du nombre 97 100 du capital et des réserves 94 100
des dépôts et 95 100 des bénéfices Effet une supériorité naturelle
dans la libre concurrence Non point mais conséquence nécessaire
une structure sociale et un système politique qui dans la Hongrie
dualiste apparence si moderne ont maintenu esprit les tendances
et les abus de la Hongrie ancien régime et même en les aggravant
Un tat parlementaire dont le Parlement se vantait être côté
de anglais le plus vieux Europe et se montrait un des plus
jaloux de ses droits une législation très libérale et souvent très
avancée une administration ordonnée des finances réglées un
réseau de chemins de fer tat qui sur certains points marchait en
tête du progrès un service de statistique précis et ponctuel une
agriculture et une industrie en essor continu largement encouragées
par tat des établissements instruction nombreux divers bien
1.Uaii-i cc cliil re est comprise il est vrai la Croatie-Slavonie qui jouissait
uoe cerlaine autoiiomie administrative et linguistique mais les champions de
Etat hongrois ont trop mvent insisté sur le caractère purement provincial de
.ette autonomie pour étce re us hui ils pourraient trouver leur
compte mfti.re îï part la Croatie-Slavonie Et ailleurs si même on le
paasalt il resterait dana la Hongrie propre avec la Transylvanie mais sans la
Cro itie- ltivonie 5 100 allogènes est-à-dire consllérant que le recen-
em nt St flit ilii Vl.igyiM puur tat hongrois magyar la moitié
Kw.teiuent lc 100 lOüü arpents soit ha. )75 ha NOUVELLE HONGRIE 323 LA
outillés la plus parfaite égalité des religions et des nationalités
garantie par les lois telle est la fa ade de la Hongrie du dualisme
Mais cette majestueuse architecture moderne presque trop moderne
est du Poteinkin Derrière est la corruption électorale parlemen
taire et administrative les libertés dont on fait tant de bruit consti
tuées en monopole des minorités ethnique et sociale privilégiées
inégalité de impôt et de la justice la statistique souvent trop
habile aide de tat la production moyen de maintenir la grande
propriété et de faire la fortune industriels ou de politiciens bien en
cour après trente ans instruction obligatoire le tiers de la popu
lation âge scolaire encore illettré surtout la plus brutale et la plus
cynique oppression des nationalités par la loi par administration
par glise par école million élèves magyars dans 12800 écoles
primaires avec 26 000 maîtres 850000 élèves allogènes serrés sous
5500 maîtres dans 3700 écoles et enseignement secondaire et
supérieur réservé pour les dix-sept vingtièmes aux Magyars
loin de apparence brillante la sombre réalité est que sous les
dehors modernes le fond était toujours féodal Dans la Hongrie
avant 1848 il avait une noblesse toute magyare et une plèbe
tout ce qui était pas noble magyar ou non magyar La barrière
qui les séparait est légèrement déplacée mais sans abaisser an
cienne noblesse haute aristocratie titrée et simples gentilshommes
continué posséder la terre accaparer les mandats électifs
remplir les fonctions publiques Elle fait alliance avec les puis-
saijrèes nouvelles du capitalisme la grande industrie et la haute
finance et ensemble elles ont domestiqué une très grande partie
des intellectuels Il fal it en Hongrie du courage ou de abnégation
pour résister aux séductions du pouvoir ou lui faire de opposition
Jusque dans le premier quart du xix siècle une politique de
dénationalisation nette et énergique eût pu sans doute réussir Mais
la noblesse en avait même pas idée Sous un régime féodal et
patrimonial quoi bon tat qui était magyar la noblesse qui
était tat parlaient latin dans la vie publique Avec les serfs on
entendait dans leur idiome Le développement économique essor
des villes qui sont les grands moyens assimilation nationale
étaient entravés par la persistance des vieilles institutions féodales
Plus tard en 1848 après 1867 quand les Magyars apercevant los
risques de leur position ont voulu parer en magyarisant il était
trop tard les allogènes étaient trop conscients désormais de leur
nationalité trop encouragés par le spectacle des progrès de leurs
frères Tchèques de Bohême et de Moravie Roumains des Principau
tés Serbes affranchis du joug turc La politique de magyarisation
donc été un anachronisme Sur des populations éveillées la vie
nationale élevées par le progrès économique de tat même qui les LA NOUVELLE HONGRIE 324
opprimait soutenues par le mouvement général de la pensée euro
péenne ses violences ne pouvaient agir que comme un stimulant
Elle discipliné leurs énergies commandé organisation de leur
défensive consommé le divorce des allogènes avec tat hongrois
En 1867 vers 1880 encore une politique de largest généreux libé
ralisme national comme ont préconisée Deak et Eötvös aurait pu sans
doute consolider et peut-être jamais la Hongrie de Saint Etienne
Mais idée de l