Le terrorisme domestique, une menace réelle ?
28 pages
Français

Le terrorisme domestique, une menace réelle ?

Le téléchargement nécessite un accès à la bibliothèque YouScribe
Tout savoir sur nos offres
28 pages
Français
Le téléchargement nécessite un accès à la bibliothèque YouScribe
Tout savoir sur nos offres

Description

Le terrorisme domestique, une menace réelle ?

Informations

Publié par
Nombre de lectures 169
Langue Français
Poids de l'ouvrage 6 Mo

Extrait

LE JOURNAL DES HAUTES ÉTUDES INTERNA TIONALES
société civile et taxe bancaire au G8-G20 P.16 et 17
le narcotrafic au Mexique P.23
entrevue avec le Professeur raPoPort   P.25
VOLUME 5 NUMÉRO 3 OCTOBRE 2010
fR.aCadeMIC.Ru
Que faut-il craindre des terrorismes ? CORIM LZeb igmnoiendwe  Bsrezleozni n skiLe terrorisme domestique, Jeux et enjeuxune menace réelle ? géopolitiquesEn août dernier, la Gendarmerie royale du Canada (GRC) arrêtait troistoutefois pas à établir une définition har -hommes soupçonnés de fomenter une attaque terroriste. Consternation :en fait, il existe une myriade demonisée : un des suspects, Khurram Syed Sher, était un ancien étudiant de méde -définitions du terrorisme puisque le phé -états-unienscine de l’Université McGill. Né au Canada de parents pakistanais, voisinnomène est pluriel et complexe. Notons Zbignie B zezinski est unmodèle et père de famille, son arrestation a suscité surprise et crainte : sique les notions d’« action menée dans le mbut de provoquer la terreur » et de « vio-w r savoir où se terre la mentde sa trempe devient terroriste, coun citoyen lence asymétrique » reviennent fréquem-idnatenlsl elcat ugeél odpeo rleitniqoume  sept élcéiatluisdée  prochaine menace ?ment dans la littérature. des relations internationales.EmiliE DEsmarais-GirarD Ainsi, l’ajout du mot « domestique » à ce Il fut le conseiller à la Sécuritécnddte à  îte en tde ntentone  du ésident amtype de phénomène sous-tend l’idée d’une ncaaitino nJialmemy Cparrter de 1977é rià- ee ed.venv tc. -gd.1@vmenace intérieure, une menace qui pro -viendrait de citoyens. Si ce concept n’est ni 1981. En avril dernier, il a été rare ni nouveau – pensons simplement aux l invité du Conseil des relationsLehomegrown terrorism dénomméD dfi mpactes terroristes commis en octobre 1970 internationales de Montréal« terrorisme domestique » ou « terro-p  phmè mpau Québec ou aux événements d’Oklahoma pour donner une allocution sur Lerisme intérieur » en français est un City US Law Code définit le terrorisme de 1995 –, il a ceci d’inquiétant que les dilemmes géopolitiquesnos jours, il est associé à une certaine  de « un acte de violence prémédité commephénomène que les autorités croient en des États-Unis.de radicalisation religieuse et à des  forme motivé de façon politique, perpétré etexpansion. Il représenterait la menace la plus probable d’attentat terroriste au contre des cibles non-combattantes par P.21 groupes sous-nationaux ou des agentsCanada, selon des officiels des services desP.2 secrets canadiens (SCRS). clandestins ». Les experts ne parviennent
brûler des Corans en commémoration des « mythiques » que projettent les dirigeants attentats du 11 septembre, est probant : acte d’Al-Qaïda, ils n’y sont pas nécessairement Éditorial Et s’il est vrai que leur portée d’action liés.discriminatoire en soi, il a suscité colère, indignation et révoltes... avant même d’être pourrait engendrer des conséquences ch ,perpétré. Même le président Obama est désastreuses, ils ne risquent toutefois pas l’p dRegard critique,  j d h d ,intervenu publiquement afin que l’homme en mesure de fomenter une prise d’être  fiè d  p   m d  hèm  deuxd’Église ne mène pas son projet à terme, du 11 septembre. Unhomegrown   m.craignant des réactions massives autantterrorist menaçant en serait réellement aux États-Unis que sur les différents fronts un qui se lie à un groupe établi qui peut « La seule chose que nous ayons à craindre est la crainte elle-même. » Dans son où se trouvent des soldats américains. l’entraîner et lui donner les moyens de discours à la Convention de 1933, Franklin Delano Roosevelt n’imaginait peut- ses ambitions. Or, arriver à établir de tels être pas la portée de cette phrase aujourd’hui. Car si de son temps le danger était En outre, le rapport de l’étude des uni - liens est dangereux et difficile. identifié – une guerre entre deux ou plusieurs Etats – et laissait place à un contrôle versités Duke et NCU, commandité par le relatif sur la peur, aujourd’hui, on sait la menace existante, mais elle n’a pas de Département de la Justice américain, arrive Également, l’étude des universités Duke visage et frappe sans prévenir, et cela fait d’autant plus peur. C’est l’une des carac - aux conclusions suivantes : les programmes et NCU faisait état, au moment de sa publi -téristiques du terrorisme moderne. Mais qu’est-ce au juste que le terrorisme, ce gouvernementaux d’intégration des com - cation en janvier 2010, de 139 musulmans concept actuellement très à la mode mais antérieur aux attentats du 11 septembre munautés musulmanes, de bonnes rela - américains qui avaient, depuis le 11 sep -2001 ? Entre la nébuleuse Al Qaïda, l’IRA indépendantiste ou la secte Aum, ses tions entre elles et les autorités publiques tembre 2001, commis un acte de terrorisme, implications sont très différentes et bien d’autres aspects sont en jeu. Peut-être ainsi que la dénonciation de la radicalisa - tenté de le faire ou été arrêtés pour ce motif. est-ce pour cela qu’on parle de « terrorismes » au pluriel ? C’est autour de telles tion par des membres de la communauté Dans 70% des cas, les autorités ont mis fin questions que nos contributeurs tentent d’apporter quelques éclairages. elle-même ont largement contribué à limiter aux projets avant même qu’ils n’aient atteint la menace de terrorisme domestique tel que un stade dangereux. Le sociologue Charles Cette édition de Regard critique nous offre aussi de porter notre attention sur nous le percevons aujourd’hui. Il souligne Kuzman, de l’Université de Caroline du d’autres questions d’actualité, dont le Sommet du G8-G20, qui s’est déroulé au par ailleurs le rôle des leaders musulmans Nord mentionnait d’ailleurs au TIME maga -mois de juin dernier sur le sol canadien. Comme à l’habitude, Regard critique occidentaux qui, conscients que les phé - zine que, des 136 000 meurtres commis au s’efforce de mettre en avant une variété de sujets et de points de vue, dans des nomènes de radicalisation et de terrorisme États-Unis depuis le 11 septembre 2001, un articles rédigés par des étudiants désireux de vous informer sur les problémati - nuisent à l’entièreté des pratiquants de leur peu moins de 36 pouvaient être liés à des ques internationales. religion, travaillent d’arrache-pied à lutter actes de terrorisme. contre ces phénomènes. Eben Kaplan en Bonne lecture, vient aux mêmes conclusions. Enfin, Bruce Hoffmann, spécialiste H a. rabearivelole domaine, ne nie pas les dangersdans rd  h u m  ?liés au terrorisme intérieur, mais reste L’arrestation, en 2006, des 18 Torontois, intimement persuadé que la plus grande le « Toronto 18 » qui planifiaient de faire menace demeure les réseaux organisés problématiques qui, le croyait-on, nous ainsi que le sentiment d’appartenir à un exploser le Toronto Stock Exchange et plu - et bien établis et qu’une action de contre-étaient extérieures et ne pouvaient tra - groupe. Cependant, des individus tels que sieurs autres monuments de la ville, a ouvert terrorisme qui se veut efficace doit se verser les frontières. Khurram Syed Sher, le Major Nidal Malik les yeux des Canadiens sur la menace terro - concentrer sur ces derniers. Hassan (auteur de la tuerie de Fort Hood) riste au Canada. Il importe de se conscien -q d   p ? tiserFaisal Shahzad (à l’origine de l’attentatou  par rapport à ces problèmes; mais laP d p Toute personne navigant sur Internet raté de Times Square en mai dernier), ne ligne est mince entre inquiétude collective Éviter la paranoïa semble donc faire ne devient pas un fervent défenseur d’Al- correspondent pas à cette classification. et paranoïa. Après l’opération qui a mené à partie de la solution contre le terrorisme Qaïda. Cependant, l’accès facile à l’informa - l’arrestation de 3 jeunes hommes qui pro - sous toute ses formes. Également, il importe tion et à la propagande extrémiste ainsi que De fait, une situation précaire ou un iso - jetaient un attentat à Ottawa - groupe dont de se conscientiser par rapport au phéno -l’évolution des moyens de communication lement accru ne sont pas les seuls déclen - faisait partie Khurram Syed Sher -, la GRC mène de terrorisme domestique. Contrai -ne sont pas étrangers à la radicalisation de cheurs d’un comportement radical. Selon déclarait que le terrorisme domestique au rement à l’image que nous renvoie journaux certains citoyens « modèles » occidentaux. une étude menée par des chercheurs de Canada constituait une menace « réelle et et reportages, lehomegrown terrorismn’est l’Université Duke et l’Université de la Caro - grave ». Le Vancouver Sun titrait, quant à pas nouveau en soi : c’est plutôt ce qui pro-L’extrémisme et la radicalisation des line du Nord à Chapel Hill (NCU), des stra - lui «Homegrown terrorism in the heart of thevoque le phénomène, soient les motivations idées – de nature religieuse ou pas – repré - tégies employées en contre-terrorismenation des terroristes domestiques telles profondes», une declaration plutôt alarmiste. sentent parfois les réponses aux questions seraient susceptibles d’influencer la radi - que nous les concevons aujourd’hui, qui de jeunes « laissés pour compte » qui n’ar- calisation de certains individus. En effet, la Cependant, il est primordial de rela - nous étaient, jusqu’à récemment, incon -rivent pas, pour de multiples raisons, à marginalisation des communautés musul - tiviser ces menaces et de les remettre nues. Partant de ce point, une meilleure trouver une place qui leur sied dans la manes et l’association presque immédiate dans leur contexte, rappelle Lydia Khalil, compréhension de ce qu’est le terrorisme société. Eben Kaplan, collaborateur au entre la religion islamique et le terrorisme ancienne analyste en contre-terrorisme intérieur – à défaut de pouvoir produire une Council on Foreign Relations, soulignait – image largement diffusée par les médias à la police de New York et collaboratrice meilleure définition – s’impose. Et, sou -le dénominateur commun aux nouveaux – contribueraient à alimenter une haine de au Council on Foreign Relations. Mme haitons le, la compréhension amènera des adeptes du terrorisme : ils sont jeunes, sou- l’Occident et pourraient susciter un désir de Khalil mentionne que les terroristes inté - pistes de solutions qui pourraient, après vent chômeurs, désabusés, ils recherchent violence et de représailles. Le cas récent du rieurs ont souvent peu de moyens et pas tout, sembler inaccessibles à toute personne un catalyseur de valorisation personnelle pasteur Jones aux États-Unis, qui voulait de leader. Bien qu’inspirés par les figures en proie à une crise de panique. l’équiPe Du reMDei rgpm d d à  mî   d  d  ré  h : r .H a PrésiDente : adey ac :rpb x  vG c m vice-PrésiDente aux affaires socioculturelles : Jnne Tho-Doet :rpb x   à  bé m Dm-Gd vice PrésiDente aux affaires aca DéMiques :lence Hoo :c  évè  véf  bdy-vg vice-PrésiDent aux affaires externes : sn a-shc-pb   pbé : mf d b, e Mzkh, M s vice-PrésiDente À l’aDMinistration : Jhne lo :cp gphqPhpp f  vice-PrésiDent aux finances : mtn Donnec: ém Dm-Gd rePrésentant au D octorat : Dne Nvo-Ctno rePrésentante D e 1Èreannée À la M aÎtrise : mye Conoye , rgd p d ph m dv hz  à mz  hèm à a d-h..1@. n m  à dd  ê d  mm, à pm   d   d pgmm, à    d pgmm  d P  , mm    dz  d rgd ,  dpôm,   d p  mm pè d   p pè d  gd@h...   p d  à ’ d  j. n’hz p à   p     pgmm    d. l p p d  d  ’gg   . 2www.egdcte.v.c Voe 5 - No 3 - Octobe 2010
Regards d’experts
Regards d’experts donne la parole à un membre du corps professoralment, ou des parties d’infrastructures ;dè m,  é-u de l’université Laval pour qu’il partage son point de vue sur le thèmeet ceux qui ont des visées beaucoup plus hg  p d « g central de l’édition. Cette fois-ci, nous vous proposons une entrevue queépiques et conçoivent leur travail en le -  m » p   plaçant dans une perspective mondiale,    ,  Stéphane Leman-Langlois, Directeur de lÉquipe de recherceh.e sur le ter-vers la gloire, etc. – cela peut être l’isla -d m é d ’u e-rorisme et l’antiterrorisme (ERTA), a accordée à notre équipmisme, comme ça peut être autre chose,p    mm  Pro os recueillis par Hobivola A. RABEARIVELO, Rédacteur en chefn’y a pas que les islamistes qui font ceil   d’   genre de terrorisme – et qui vont justifier . l m  - sTéPHaNE lEmaN-laNGlOisdes attaques beaucoup plus meurtrièresgd  cd ? pofee à ’coe d evce ocet indiscriminées. Cela dépend vraiment nvet v - une vision très large, si on consi Dansde la façon dont les acteurs conçoivent Tte de  Che de echeche d Cnd enleurs objectifs. dère des actes de faible intensité, comme vence et contcton oce d es’en prendre à une ambassade, ou à une tephne.en-lngo@v.v.co   p  p       d   école juive, par exemple, sur l’ensemble m d      m dm   du territoire, le risque est assez élevé. l  ’d p d ’Étant donné qu’on parle de terrorismes g  w ( g, hm      -Cependant, pour le Canadien moyen, il  dfi d d  dfiau pluriel, il est difficile de dire qu’il y a un p     p    ’ m),est infinitésimalement bas. Quant à des m d m. c phénomène qui évolue dans l’histoire ; il    p q ’   -       .de ceux du 11 septembre, laactes du type p d’  p, d’y a plusieurs phénomènes dans l’histoire ? phmè probabilité est essentiellement à zéro.  g. q qu’on a qualifiés de terrorisme. Ils n’ont p- m  p  - L’appellation est trompeuse. Pendant un Pour ce qui est des personnes arrêtéesd’ailleurs pas porté le nom de terrorisme   phmè ? on a très peu d’information dernièrement, et surtout après le 11 septembreà l’époque même ; c’est plus tard que des moment, analystes ont caractérisé ces phénomènes 2001, on s’est imaginé découvrir un terro - sur l’usage prévu de leur matériel. Si elles Effectivement, on peut en parler au plu - comme tels. Ce fut le cas par exemple risme qui venait de l’extérieur, le terroriste avaient mené à bien leur projet, il semble riel car les groupes, les motivations, les des zélotes sous l’Empire romain, ou international qui s’installe clandestine - qu’elles auraient envoyé du matériel en techniques, les résultats du terrorisme des assassins au Moyen-Orient. On peut ment dans le pays, fomente un coup et fait Afghanistan pour soutenir des attaques sont tellement différents d’un cas à l’autre mettre le label terroriste dessus, mais ça exploser quelque chose. Quand on s’est contre les Forces canadiennes. Or, ce qu’il est difficile de généraliser, qu’on fasse ne nous apporte pas grand chose dans la aperçu, que des citoyens ou des immigrés type d’activité pourrait bien tomber car -des théories ou des observations. On peut compréhension des faits d’aujourd’hui ni déjà intégrés à la population depuis des rément hors des définitions dominantes faire la comparaison avec le crime. Les dans celle des faits de l’époque. années, qui ne sont pas venus juste pour du terrorisme, ressemblant davantage à vols à l’étalage, un mari qui tue sa femme, perpétrer une attaque, menaient tout à coup l’insurrection et à la guerre, une guerre un meurtre entre bandes rivales, etc., tout On peut toutefois faire un historique une action terroriste, on a appelé ça du ter - civile contre un envahisseur – ce qui ne cela est tellement différent qu’on ne peut rapproché dans le temps où on dirait rorisme domestique, en pensant qu’on était doit absolument pas être compris comme pas faire une théorie pour unifier tout quels ont été les changements dans les arrivé à une nouvelle phase où le terrorisme une légitimation du projet. Seulement, dans une même catégorie. Le fait qu’on ne actes terroristes entre les années 1960 viendrait de l’intérieur. Mais si on regarde c’est un un élément important pour notre puisse pas créer une catégorie homogène et aujourd’hui. Là, c’est plus intéressant les actions depuis les années 1960, 99% du évaluation du risque pour la population n’est donc pas particulier aux terrorismes. car il y a des caractéristiques communes terrorisme vient de l’intérieur et attaque des canadienne. S’il s’agit ici de techniques qu’on peut dégager, ou des changements cibles à l’intérieur du territoire. généralement assimilées au terrorisme, il Cependant, si on le réduit à sa plus simple spécifiques dans les différentes actions semble qu’on prévoyait les utiliser contre expression, l’utilisation de la violence est qui ont lieu depuis ce temps. A cette Ce qui est vraiment intéressant des cibles militaires à l’étranger. L’im -l’une des caractéristiques les plus impor- échelle, ça peut être utile pour com - aujourd’hui, c’est qu’on a davantage de portant ici est de faire très attention de tantes ; et la deuxième est la présence de prendre le phénomène terroriste contem - terroristes locaux qui sont motivés par des ne pas identifier des actes comme « terro-motivations politiques, et non l’appât du porain. Mais si on parle des nihilistes du évènements extérieurs (donc, l’inverse du ristes » parce qu’on est en désaccord avec gain, comme c’est le cas du crime organisé 19ème idéologie, projet politique ou com - conceptsiècle, on arrive à quelque chose de leur standard de « homegrown »). La par exemple, qui utilise des techniques tellement différent que ça n’apporterait motivation politique, la façon dont ils plot de tuer des soldats canadiens. Bref, similaires mais pour d’autres raisons. Je n’en que peu d’information. conçoivent leur mission est fortement à mon sens ces attaques ne modifient pas ajouterai pas plus. Tout comme il n’y a pas influencée par ce qui se passe ailleurs. Au le calcul du risque d’attentat terroriste une définition homogène du crime, il n’y al    y   le Canada.Canada, il y avait plus de terrorisme dans pour pas une définition uniforme du terrorisme,d    àles années 1970 qu’il n’y en a aujourd’hui, mais ça n’empêche pas pour autant de faire d  p. Dp Celamais ces terroristes étaient motivés par ladit, tout le monde veut savoir si de la recherche sur ces phénomènes. g d’,  dpolitique locale, et agissaient localement. le Canada est à risque quant au terro -à ’    « -Aujourd’hui, des groupes attaquent loca - C’est une question à fort contenu risme. On peut toutefois aborder l’impact du» subjectif,lement mais sont motivés par des choses puisque nous avons chacun g   pp, mm  terrorisme sur la population pour com - d  m d Pqui se passent à l’autre bout du monde. notre seuil personnel de tolérance au pléter ces propos. Le terroriste essaie d’en d tky  1995,   d risque. Une chose est certaine, dans unCela découle probablement de notre nou -avoir un qui va dépasser les conséquences11 pm 2001. c mm - pvelle société de l’information, de la rapi - où les ressources sont limi contexte -immédiates de son acte pour obtenir un ?  gmdité et de la quantité des informations tées et qu’une dépense dans un champ effet maximal. Provoquer plus de morts, qu’on reçoit sur des conflits qui se passent signifie une coupure ailleurs (ou une faire la une des journaux pendant plu - On ne peut pas parler de phase à cet à l’extérieur ; ceci a un effet important sur augmentation de nos impôts), s’engager sieurs jours est toujours mieux. Plus on en égard car les attaques de cibles pré - la radicalisation de certaines personnes. dans une spira le sécuritaire inf lation -parle, mieux c’est. Le terrorisme vise effec- cises persistent et coexistent avec les La plupart s’en tiendront à un discours niste à cause du risque terroriste est un tivement cela, tandis que pour le crime attaques indiscriminées. Si on regarde radical ; une petite minorité passera effec - ca lcul peu rationnel pour le Canada. organisé, moins on en parle et mieux c’est. la façon dont les gens conçoivent leurs tivement aux actes. Dans une échelle de risques comparés, Va-t-il avoir cet impact médiatique ? Très motivations politiques, on observe que le terrorisme se positionne tout au bas. certainement. Mais va-t-il effectivement les groupes qui ont des revendications Bref, il n’y a pas plus de terrorisme domes - Ceci ne veut pas dire qu’il ne faut rien terroriser ? Quand on fait des sondages, la précises, qui veulent un changement tique qu’il n’y en avait avant, ces terroristes faire, mais je crois qu’on en fait déjà population canadienne en est peu préoc - assez ponctuel dans l’espace et dans le ont toujours été avec nous. Par contre, si trop, si on considère la menace réelle cupée et se sent passablement en sécurité. temps, visent des cibles ponctuelles éga - avant ils avaient des motivations locales, qu’il représente. Par exemple, un Cana-Il est certain que dans un autre contexte, lement. A l’inverse, les groupes qui ont elles leur viennent maintenant de l’exté - dien sur deu x sera v ictime de cyber -comme à Tel Aviv par exemple, la percep - des idéologies beaucoup plus larges, voire rieur. Donc, l’usage qu’on fait du terme crime d’ici 10 ans (340 000 v ictimes tion sera différente. abstraites, vont viser beaucoup plus large terrorisme domestique est une mauvaise québécoises chaque année), contre une également. Donc, le terrorisme de reven - manière de le conceptualiser. proportion minime pour le terrorisme ; l m ’ p  ph - on dépense énormément plus pourtantdication et le terrorisme révolutionnaire mè , mm -continuent d’exister et vont viser desc ’,  cd contre le terrorisme que pour lutter --  à  ’h ? -cibles comme les agences du gouvernem   d’ contre la cybercriminalité.
Voe 5 - No 3 - Octobe 2010 www.egdcte.v.c
3
La violence structurelle L’une des composantes du terrorisme
Depuis la crise des otages en Iran, la guerre du Golfe et les att tats du 11 septembre, force est de constater que jamais le te « terrorisme » n’a pris une telle ampleur. Cet article, cependant, référence à un autre type de terreur, plus « cachée » aux yeux décideurs politiques, mais vivement répandue dans les sociétés voie de développement : celle issue de la violence structurelle e désé uilibre de pouvoir, qui entraîne l’injustice sociale et potentia conflits. FErNaNDa KuNDráT Brasil cnddte à  îte en tde ntentone nvet v fennd.b.1@v.c
 son ouvrageCoveringtions, menant à des conséquences op Islam, parlait déjà de la diffusion d’une sives et souvent régressives. L’on peut certaine « culture du terrorisme » trop les tentatives successives, et avortée monolithique. L’auteur fait référence à reconstruction économique et social une approche idéologique, culturellement l’Irak par les États-Unis, ourdies de la déterminée par l’alliance « media-gou - teresse hautement sécurisée et encl vernement-experts », qui réduit des pays à au centre de Bagdad par l’administr majorité islamique à plusieurs stéréotypes Bush. Alors que dans cette « zone ve et généralisations négatives, provoquant décrite par le journaliste Rajiv Chandra -Des enfants des écoles soutenues par l’ONG Central Asia Institute,www.gRegMORtensOn.COM des sentiments de repli et d’intolérance sekaran, les yankees reproduisent le quo -bâties entre le Pakistan et l’Afghanistan parmi le grand public. Les analyses super - tidien américain en s’isolant de la réalité ficielles et décontextualisées des phéno - irakienne, l’absence d’empathie et de curio -l’Organisation des Nations Unies sur lescieux d’intégrer, plutôt que d’opposer, les mènes religieux et des cultures diverses sité envers ceux qu’ils prétendent sauver a -objectifs du Millénaire pour le développevaleurs contradictoires qui caractérisent limitent donc la connaissance de la très enchaîné la séquence d’erreurs dans le dos -ment, 2010 les sociétés modernes. De cette façon, il) n’est peut-être autre chose que grande complexité qu’entourent les diffé - sier. C’est également le cas de l’entreprise du terrorisme. Là où les droits fondamen - serait erroné de vouloir transplanter un rentes réalités sociales. C’est n’est pas pour d’aide au développement mise en place taux des individus ne sont pas respectés modèle occidental unique de « développe-rien que l’Islam, par exemple, est largement au Rwanda, tel que détaillé par Peter Uvin – indépendamment du sexe, de l’ethnie ou ment » comme une solution « mythique » perçu, particulièrement par les Améri - dansAiding Violence conviendrait économiquement, ou, qui a ignoré le clien- quiclasse sociale – le terrorisme social la  de cains, comme « oppressif », « extrémiste » télisme des élites, la corruption, les inéga - s’étend, constituant une inquiétante forme politiquement à la « gamme de modernités ou « dangereux », et est tenu comme le vec- lités sociales, voire l’exclusion et l’insécurité de violence qui prend des proportions alternatives » en œuvre dans différentes teur responsable de toute sorte de conflits; présentes dans la vie sociale et économique alarmantes. parties du monde. L’amnésie des ques -des antagonismes israélo-palestiniens ou rwandaise, poussant les bailleurs de fonds tions socioculturelles des affaires inter -des crises en Tchétchénie, au Darfour, au de l’effroyable génocide. S’il est vrai que le Le pouvoir illusoire de l’égalité formelle, nationales ne fait que rendre les processus Pakistan, en Afghanistan et ailleurs. Ainsi, Rwanda et l’Irak illustrent bien les effets iné - du développement ancré dans la notion de démocratisation et de combat au terro -en focalisant de manière excessive l’aspect vitables d’interventions politiques frappées prioritaire d’accroissement économique risme, quels qu’ils soient, voués à l’échec. dramatique et conflictuel des affaires inter - d’aveuglement, il y en a sûrement beaucoup et du discours démagogique de la démo - La formation de l’individu se fait dans un nationales, les médias créent un climat de d’autres, partout dans le monde. cratie ouvrent la porte à une série illimitée rapport à l’autre, en respect de l’hétérogé -plus en plus déshumanisé envers la religion de conflits inextricables. C’est ainsi que néité. Alors, l’ignorance et le peu d’intérêt musulmane et coopèrent à l’impérialisme Ce qu’il faut dire, c’est que la question le fossé entre riches et pauvres s’accroît, pour les valeurs et les dynamiques sociales des États-Unis dans le monde arabe. du terrorisme ne peut pas être facilement l’ignorance persiste et que des milliers incitent aux préjugés et à la haine, suscep -résolue par des mesures inscrites dans un d’enfants sont recrutés par des milices ou tibles de déboucher en extrémismes, radi -Certes, on ne peut pas nier l’existence champ du pouvoir qui les rendent techni - des gangs dans les communautés les plus calismes et fondamentalismes. Plutôt que  de groupes extrémistes qui menacent la ques et minimisent les chances d’intervenir pauvres. De cette façon, plutôt qu’envoyer de feindre une « guerre mondiale au ter-sécurité mondiale. Mais, alors qu’on pro - effectivement dans les processus politico- des troupes militaires ou définir des bud - rorisme », la communauté internationale meut de manière effrénée la chasse au économique-sociales clés qui les fondent. gets de guerre, il faudrait s’attaquer aux a la chance de se comporter de manière terrorisme comme un ennemi extérieur Selon le prix Nobel de la paix, Muhammad causes de l’extrémisme religieux. Ceux-ci plus cohérente, en mettant le pouvoir au commun, des politiques insensibles aux Yunus, l’action militaire serait inopérante seraient l’ignorance, l’analphabétisme et service de la communauté, du dialogue questions socioculturelles et aux déséqui - pour s’attaquer à un phénomène tel que le chômage, susceptibles d’être affrontés et du sens moral. Lorsque les cadres de libres de pouvoir solidifient la base struc - le terrorisme, poussé par un profond sen - par l’éducation, la tolérance et la paix, domination, d’aliénation et des forces turelle sur laquelle des actes de violence timent d’injustice économique, politique, avec l’appui de la population locale. C’est latentes qui renforcent les inégalités et les sont construits. Ceci ne saurait vouloir sociale et religieuse. Lorsque les moyens du moins l’avis de Greg Mortenson qui, distinctions entre les différents groupes, tisser, il faut souligner, une relation sim - rationnels pour atteindre un minimum de à la tête de l’organisation non gouverne - classes et ethnies sont perçus, on peut pliste entre la responsabilité par l’escalade condition de vie semblent inefficaces, des mentale Central Asia Institute, a bâtit plus accroître l’effectivité des politiques et pra -de terreur et certaines politiques étran - gens exaspérés se versent dans l’irrationa - d’une centaine d’écoles entre le Pakistan et tiques gouvernementales. gères. Il n’y a pas de cause unique, ni des lité. En échange de trois repas par jour, plu - l’Afghanistan. Activiste sur le terrain, cet vraies coupables. Ce qui apparaît clair, sieurs sont prêts à combattre n’importe qui américain ne peut que constater les effets On peut avancer, enfin, que la meilleure toutefois, c’est l’existence d’une interaction avec un pistolet. Dans ce sens, l’on pourrait contradictoires de la politique de son pays, manière de réduire les attentats – que  entre la potentialisation des conflits et des tout aussi bien mettre l’injustice sociale en étant donné que les actions militaires ce soit les bombardements ou d’autres politiques « aveugles », dont les situations avant comme une des racines des conflits, qui font fuir les populations génèrent des formes de violence quotidienne – réside d’inégalité, d’exclusion, et d’humiliation des actes violents et des terrorismes. Cela camps de réfugiés d’où de futurs extré - dans la compréhension de la complexité restent invisibles et créent un terrain favo - nous amène donc à réfléchir davantage sur mistes seront recrutés. des êtres humains et de leurs modes de rable aux actions autrement impensées. le concept de terrorisme. Qu’est-ce que le vie. Si ces ingrédients indispensables à terrorisme ? Si on le conçoit comme toute Il faut à l’évidence un changement d’ap - l’établissement démocratique ne sont pas On observe plusieurs cas d’incapacité action inspirant la crainte, ou faisant du proche de la communauté internationale. intégrés dans les diagnostics et prescrip -manifeste des politiques venant du haut et mal à l’ennemi, alors, le fait que des mil - Si l’on suit les réflexions du philosophe et tions politiques, l’avenir risque de débou -de l’extérieur à promouvoir des réelles amé - liards de personnes vivent encore avec politologue québécois, Charles Taylor, le cher sur une situation encore plus violente liorations dans la qualité de vie des popula - moins de 1,25 dollar par jour (Rapport de et instable.défi est celui d’un pluralisme éclairé, sou -Hamdoulilah.
45 - No 3 - Octobe 2010 www.egdcte.v.c Voe  
Droits et libertés dans la lutte contre le terrorisme
Les attaques terroristes du 11 septembre 2001 ont provoqué 2 996du système de certificat de sécurité utilisé rant la définition des concepts de sécurité morts et plusieurs milliers de blessés. Ce n’est toutefois pas l’ampleur -entre autres en matière de contre-terro au Canada doit être amorcé. On nationale  de ces pertes physiques qui continue d’attirer l’attention sur ces atten - doit bien comprendre ce que l’on entendrisme à l’égard Adil Charkaoui, résident tats, mais plutôt les répercussions tant politiques que sociales quipermanent canadien d’origine maro « sécurité nationale » afin d’éviter que - par dépassant les frontières américaines qu’eurent ces évènements. Dans notion ne soit utilisée abusivement cettecaine. La plus haute instance juridique le climat « post-11 septembre » de guerre contre le terrorisme, de nom - parcanadienne, la Cour suprême, a d’ailleurs le gouvernement. Alors, lorsqu’on parle breux États n’ont pas hésité à affirmer fortement la primauté de la sécu -la sécurité nationale au Canada, on parle  dereformulé ainsi l’un des plus importants rité nationale sur certaines de leurs obligations internationales relatives de  finalementla sécurité de qui, de quoi ?dilemmes du contre-terrorisme, à savoir  « la tension qui existe entre les mesures aux droits de lhomme. oNnotsr dlreo ittesr reotr ilisbmeret »é s? ont-ils été les premières prises, au nom de la sécurité nationale, C’est ici que le bât blesse, puisque les guerre c e utilisées en matière de contre- législations -pour lutter contre le terrorisme, et le res pect des droits et libertés ». terrorisme – comme dans la Loi antiterro - émiliE GrENiErriste canadienne et la Loi sur l’immigration  veen dto dt  ntenbetco àn  ont  et la protection Cette image très puissante de deux pla -des réfugiés – ainsi que les nnyte pote et jde f canadiens restent de façon géné - tribunauxteaux d’une balance, où les impératifs de tochtone d bec e ela sécurité nationale et la protection des rale silencieux à ce sujet laissant au gouver -gene.e@g.codroits de la personne sont en équilibre, nement le soin de définir les « menaces à la s’est donc imposée, notamment de l’avis de nation ». En effet, comme l’indique Craig  ien du renseignement Guantanamo Bay ainsi que les différents Weslay Clark, professeur au Munk Centre Forcese, professeur à l’Université d’Ottawa, de sécurité (SCRS) affirmait dans la Presse jugements des cours de justice cana - for International Studies, au Canada dans les tribunaux canadiens qui se basent sur Canadienne du 13 septembre 2010 qu’il diennes l’enjoignant de le faire. On refuse le discours public et politique depuis le 11 une vision classique de la séparation des exploiterait des renseignements obtenus également d’offrir des excuses officielles septembre 2001. Ainsi, selon ce dernier, pouvoirs, ont traditionnellement octroyé grâce à la torture si cela lui permettait de à Adil Charkaoui dont les droits et libertés nous avons peut-être été induits en erreur un plus large pouvoir discrétionnaire au prévenir une éventuelle attaque terroriste. civils ont été longtemps réprimés par le par l’image commode et rassurante de « la gouvernement lié à la prérogative consti -Pourtant, cette position controversée va à certificat de sécurité émis contre lui, cer - balance de la justice » dans notre recherche tutionnelle de la Couronne en matière de l’encontre des engagements internationaux tificat pourtant déclaré nul le 14 octobre d’une conception nouvelle de la sécurité « politiques de haute importance » ; c’est-à-du Canada en matière de protection des 2009 par la Cour fédérale du Canada vu nationale et des droits dans le monde de dire en matière de politique étrangère, de droits humains et d’interdiction de la tor - l’admission par les ministres, survenue le l’après-11 septembre. défense et de sécurité nationales. L’ambi -ture. On ne peut effectivement pas invoquer 31 juillet 2009, de l’insuffisance des preuves guïté entourant ce concept octroie alors, de les nécessités de la lutte contre le terrorisme au dossier pour justifier l’existence du cer - Cette question d’équilibre à atteindre l’avis de Forcese, un important pouvoir dis -face à l’interdiction absolue de la torture, tificat. Devant de telles controverses, on est également omniprésente au niveau crétionnaire à l’exécutif de définir la « sécu-reconnue comme une norme impérative de se demande si nos droits et libertés indi - international depuis les évènements du rité nationale » comme il le veut, et ce, de droit international (jus cogens parfois incohérente ou exagérée. 11 - manière septembre 2001. D’après Mme Kalliopi), imposant à sont finalement les premières vic viduels l’État non seulement de s’abstenir de com - times de la guerre contre le terrorisme. Koufa, ancienne Rapporteuse spéciale mettre lui-même la torture, mais aussi de sur le terrorisme et les droits de l’homme Une piste de solution pour éviter ces prendre avec diligence les mesures voulues C’est l’avis que partagent certains orga - de la Sous-commission de la promotion écueils et relativiser cette dangereuse pour éviter qu’un individu en situation de nismes de protection des droits et libertés et de la protection des droits de l’homme métaphore de l’équilibre entre sécurité et risque soit soumis à un tel traitement dans civils tels qu’Amnistie internationale et la des Nations Unies, avec les évènements droits humains se trouve du côté des études un État tiers. Ligue des droits et libertés qui ont critiqué du 11 septembre 2001, le conflit entre les critiques de sécurité dans le domaine des les actions du Canada en réponse aux évè - exigences constitutionnelles de protec - Relations internationales. En effet, ces D’autres cas d’actualité tels que les nements du 11 septembre 2001. Notam - tion des libertés et le resserrement des écoles de pensée ont critiqué la définition affaires Omar Kahdr, Maher Arar, ou Adil ment, la Ligue des droits et libertés s’est mesures sécuritaires est apparu au grand standard de la sécurité nationale centrée Charkaoui ont également démontré cer - fortement opposée à l’adoption précipitée jour : « since 9/11 the words ‘security’ and sur l’État et sur la puissance militaire pour tains manquements du gouvernement en décembre 2001 de la Loi antiterroriste ‘human rights’ have, in the collective ima - tenter d’inclure d’autres notions telles que canadien en matière de protection des canadienne considérée comme « une loi gination, now come to connote an almost l’individu, ses droits et libertés fondamen -droits et libertés individuels au nom de inutile, trompeuse et dangereuse ». Cer- insuperable opposition ». taux. Cette préoccupation première envers guerre contre le terrorisme et de la sécurité tains aspects de cette loi, telle que la défi - la sécurité de l’individu et de ses droits nationale. À l’heure actuelle, le gouverne - nition des actes terroristes qui inciterait Devant la balance, cette image de l’équi - peut alors remettre en question l’idée que ment refuse toujours de rapatrier Omar au profilage racial, ont par ailleurs, été libre qui pourrait avoir d’importantes l’État pourrait brimer les droits et libertés Kahdr malgré la torture et les traitements condamnés par les tribunaux canadiens, répercussions sur la pleine jouissance des de ses citoyens pour assurer sa sécurité ou inhumains dont il aurait été victime à comme dans l’affaire Khawaja, à l’instar droits humains, un important débat entou - celle de la nation au sens large.
Al-Qaïda au Maghreb Islamique Portrait d’une alliance stratégique
Depuis 2008, vingt Occidentaux ont été enlevés au Sahel. En juillet dernier,tique et un important moyen de finance -Michel Germaneau, otage français, était enlevé en Mauritanie puis assas -ment, auquel s’ajoutent la contrebande et siné. Plus récemment encore, cinq Français étaient retenus captifs au -les contributions des Maghrébins d’Eu Niger. Ces enlèvements sont tous revendiqués par Al-Qaïda au Maghrebes dou mssoiceanL .erc apor donc tres sestijahidtsevemtn sfae véoue télici Islamique, dont les menaces contre la France se sont affirmées ces der -par niers jours. Il y a quelques années, les actions de l’AQMI étaient confinéest an Eenopure.s eld neituoirac-dfaporéni srémiext norstes à un espace beaucoup plus restreint, essentiellement l’Algérie. Depuis la fin de la décennie, elles s’étendent au Maghreb et au Sahel, et semblentLe ralliement du GSPC à Al-menacer l’Europe. Comment des groupes jihadistes « nationaux » sont-ilso jbl seadsnne tfs ectirauq enuc ahgnmeQaïda m devenus une organisation internationale ? Comment évaluer le pouvoir dedu groupe : le passage de velléités insur-nuisance de l’AQMI ? -rectionnelles nationales à l’objectif (net auDrEY auClair ET JiHaNE lamOuritement plus abstrait) de mondialisation cnddte à  îte en tde ntentoneir de plate-froema xuo grnasia-udj  .Lhidamb aMIAQe nnioitiamroséds « ed s nvet verv dey.c.1@v.ctions terroristes régionales », souligne jhne.o.1@v.cLuis Martinez, spécialiste du Maghreb et du Moyen-Orient. Néanmoins, l’AQMI a g d ’aqMi conjuguer ses nouvelles ambitions doitSahel ». La matrice de l’AQMI demeure Al-Qaïda au Maghreb Islamique (AQMI) cependant intrinsèquement algérienne. internationales à ses origines très locales. s’inscrit dans la mouvance salafiste de C’est ainsi que l’affiliation à Al-Qaïda, À sa lutte contre les régimes nord-afri -l’Islam. À l’origine, le salafisme constitue fait passer le GSPC, autrefois confiné au cains se greffe la guerre envers les puis -un mouvement fondamentaliste de retour territoire algérien, d’organisation terro - sances occidentales, plus particulière -aux origines de cette religion. Au fil du riste à vocation nationale à organisation ment contre ses ennemis historiques, les temps, sa définition a évolué, pour dési - terroriste transnationale. États-Unis, la France et l’Espagne. Toute -gner, aux X Xe X XI ete alors que l’Islam, religion à vocation un phéno- fois, siècles, mène réunissant toute une génération de ?u mg d universaliste, se veut vecteur d’union, les jeunes radicaux opposés aux gouverne - Cette association entre groupes jiha - appétences nationalistes peuvent être ments arabes. Le Groupe Salafiste pour distes locaux et l’organisation terro - perçues comme facteur de désunion, la Prédication et le Combat (GSPC), né au riste internationale revêt les allures d’un allant à l’encontre de l’Umma. Jean-Luc cours des années 1990 d’une scission du mariage de convenance, une union des - Marret, spécialiste du terrorisme et des Groupe Islamique Armé, s’inscrit dans ce tinée à compenser les échecs du passé conflits, recourt au concept de « glocal » mouvement insurrectionnel. À la veille et à pallier les difficultés du présent. pour désigner cette nouvelle réalité, des attentats du 11 septembre 2001, et Cette alliance permet en effet à Al-Qaïda mariage subtil entre une idéologie se à l’instar d’autres groupes similaires, le d’étendre sa sphère d’influence et son voulant fédératrice, unissant diverses GSPC, fortement affaibli par la lutte que champ de bataille au Maghreb, tout en cellules à travers le monde, et un enra -mènent les gouvernements nord-afri - profitant de la proximité géographique, cinement local profond des factions affi -cains contre les islamistes, est à bout de économique et politique avec l’« ennemi liées. Ainsi, tout en aspirant à « dépasser souffle. L’organisation se replie toujours proche », l’Europe. L’organisation-mère les déterminations culturelles et les plus au Sud, vers le Mali, le Tchad et la tire également profit de la forte démogra - contingences locales », Benoit Lucquiaud Mauritanie, pour finalement se dissé - phie des pays du Maghreb qui représentent rappelle qu’Al-Qaïda « n’en cherche pas miner sur un vaste territoire à cheval sur un vivier de recrutement non négligeable. moins à se “territorialiser” ». plusieurs États, dessinant une géographie De son côté, le GSPC en devenant AQMI, davantage sahélienne que maghrébine. trouve un second souffle depuis l’échec del Mgh,    L’étendue et la porosité des frontières de son projet fondateur (le renversement du L’AQMI trouve au Maghreb un terreau cette région la rendent difficile à maî - régime algérien). Ce nouveau label confère fertile à son développement : transition triser et facilitent la contrebande et les effectivement une médiatisation à grande démocratique bloquée par une élite sclé -opérations des groupes de guérillas. Ce échelle et, au niveau local, une légitimité rosée, société civile à l’agonie et jeunesse n’est certainement pas un hasard si les nouvelle à ce groupe armé réprouvé après découragée par le chômage (jusqu’à 66% groupes, qui prendront plus tard la déno - la concorde civile du président algérien et 68% en Algérie et en Tunisie)… autant mination d’AQMI, se sont alors placés sur Bouteflika. De surcroît, l’AQMI bénéficie d’éléments d’États en déliquescence qui les routes de ces nombreux trafics, notam - maintenant d’un meilleur financement, permettent à l’AQMI d’exploiter le mécon -ment le trafic d’armes, de drogues, mais d’un réseau transnational et de l’expé - tentement de la population. En outre, la également de migrants ou d’otages. rience d’Al-Qaïda, devenue une organisa - violence terroriste de l’AQMI décuple le res -tion parapluie chapeautant diverses cel - sentiment à l’égard de l’État, démontrant C’est dans ce contexte que le GSPC lules à travers le monde. son incapacité à assurer la paix civile. annonce, au début de 2007, qu’il change son nom pour Organisation d’Al-Qaïdan m,  Si l’AQMI exploite les failles des États au Pays du Maghreb Islamique. Mais les Ce changement de nom et d’idéologie a de la sous-région, les gouvernements liens entre Al-Qaïda et le GSPC ne sont entraîné, au sein de l’AQMI, une réorien - nord-africains ne sont pas en reste : l’ex-pas nouveaux : dès les années 1990, plu - tation stratégique et tactique. L’AQMI ne ploitation par l’instrumentalisation de la sieurs Maghrébins sont allés combattre cible plus seulement les représentants « menace terroriste » répond à des inté -les Soviétiques en Afghanistan. Toute - de l’autorité nationale, mais s’attaque rêts politiques. En effet, la légitimation de fois, l’AQMI ne se réduit pas à une évo - désormais aux intérêts internationaux : certaines politiques du pouvoir en place lution du GSPC, elle est l’expression plus en témoigne la symbolique du double par l’impératif de sécurité permet de ren - générale de tout un ensemble de mouve - attentat de décembre 2007 à Alger qui forcer l’emprise des dirigeants sur l’appa -ments salafistes nord-africains : comme visait le Conseil constitutionnel et un reil étatique. De plus, la menace terroriste l’indique Mathieu Guidère, professeur à bâtiment de l’ONU. Triste nouveauté, le « nourrit une double rente sécuritaire : l’Université de Genève, « la création d’Al- recours aux attentats-suicides s’ajoute au rente qui légitime un pouvoir, mais aussi Qaïda au Maghreb constitue un élément modus operandi de l’AQMI. A contrario, rente financière mise à disposition des fédérateur et une base arrière pour tous la pratique de l’enlèvement n’est pas nou - pays occidentaux dans le cadre de la lutte les islamistes en Afrique du Nord et au velle et représente une vitrine média - contre le terrorisme », indique Lucquiaud.
6
www.egdcte.v.c Voe 5 - No 3 - Octobe 2010
Cette lutte sert également les intérêts américains puisse qu’elle contribue à accroître la pression exercée par les États-Unis pour la coopération militaire contre le terrorisme. Pp d’ p ’aqMi La portée réelle de l’alliance entre Al-Qaïda et le GSPC est plutôt difficile à évaluer. D’une part, plusieurs arguent que l’AQMI constitue une menace plus sérieuse aux régimes en place, dans la mesure où son action transcende désor -mais les idées nationalistes. Par ailleurs, les conflits et tensions interethniques de la région catalysent le développement de l’AQMI, qui tire profit de l’instabilité environnante pour vaquer à ses acti -vités illicites. Le manque de coopération politique entre gouvernements affectés n’aide en rien l’endiguement de cette menace. Aussi, l’élargissement géogra -phique de l’AQMI et d’Al-Qaïda ne semble pas irréaliste; une contamination liée au développement du fondamentalisme dans plusieurs pays d’Afrique subsa -harienne est crainte par de nombreux analystes. Tout récemment, le président somalien Sharif Cheikh Ahmed sollici -tait, à l’Assemblée générale des Nations Unies, un soutien international accru, en raison de l’alliance entre Al-Qaïda et les milices islamistes shebab. En contrepartie, de nombreuses que -relles intestines menacent la cohésion de l’AQMI. Plusieurs membres du GSPC désirant se concentrer du l’« algérianité » du combat craignaient de diluer celui-ci en l’arrimant à une idéologie plus vaste. D’ailleurs, les tentatives d’implantation infructueuses au Maroc et en Tunisie illustrent les difficultés d’enracinement d’Al-Qaïda dans la région. En outre, les différentes mesures mises en œuvre par l’Algérie ont incité plusieurs membres à quitter le groupe pour devenir de précieux informateurs. Enfin, selon Jean-François Daguzan, maître de recherche à la Fon -dation pour la Recherche Stratégique, il semblerait que l’AQMI, à l’instar d’Al-Qaïda, « ne peut pas dépasser un certain niveau de nuisance ». u m mp En somme, l’ampleur de la menace que représente réellement l’AQMI demeure incertaine. La réponse militaire n’est certainement pas l’unique stratégie à adopter : si un recours à la force s’impose, alors un délicat équilibre doit être atteint afin d’endiguer la menace sans toutefois l’attiser. Mais à moyen et long termes, une lutte efficace contre l’AQMI ne pourra se faire sans l’établissement de régimes transparents intégrant les différentes composantes des spectres politique, culturel et ethnique. De surcroît, face à une menace désormais transnationale, l’impératif de coopération régionale est de plus en plus pressant. Or, l’union du Maghreb arabe est loin d’être achevée…
  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents