Al-Qaida au Maghreb en 2008

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Al-Qaida au Maghreb en 2008

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Politiques méditerranéennes |Maghreb Al-QaidaauMaghreben2008

Jean-Pierre Filiu Professeurassocié Institutd’étudespolitiques(SciencesPo),Paris

La prolongation de l’occupation américaine en Irak a encouragé le développement de réseaux djihadistes en Méditerranée, en leur offrant une nouvelle théma- tique de mobilisation et des possibilités accrues de recrutement. C’est ainsi que des combattants aguer- ris en Irak ont pu implanter Fath al-Islam dans les camps palestiniens du Nord-Liban. Et c’est comme plate-forme de formation et de transfert vers l’Irak que le Groupe Salafiste pour la Prédication et le Combat (GSPC) a entamé sa transformation en branche nord- africaine d’Al-Qaida, transformation parachevée en 2007. Al-Qaida poursuit sa campagne terroriste au Maghreb en 2008, sans vraiment pouvoir dépasser les limites nationales de sa filiale algérienne.

Les limites du « Maghreb Islamique »

2007aétél’annéedulancementsanglantd’Al-Qaida au Maghreb Islamique (AQMI). Le 11 avril, trois atten- tats-suicides coordonnés frappent la capitale algé- rienne, une des explosions visant le palais du gou- vernement, en plein centre ville. Le 11 juillet, une camionnette bourrée d’explosifs est lancée contre une caserne à Lakhdaria. Le 11 décembre, ce sont les bureaux des Nations unies à Alger et le Conseil constitutionnel qui sont la cible d’un nouvel attentat. Cette sinistre litanie d’attentats perpétrés le onzième jour du mois, en écho au 11 septembre américain, s’inscrit dans le fétichisme chronologique de l’orga- nisation de Ben Laden. Mais elle s’accompagne de toute une série d’attaques kamikazes aléatoires et meurtrières, notamment contre le cortège du prési- dent Abdelaziz Bouteflika, à Batna, le 6 septembre 2007.

2007 est donc l’année sombre où l’ Algérie trauma- tisée voit se réveiller les pires démons de la décen- nie précédente, de sa guerre civile et de son terro- risme aveugle. Dix ans plus tôt, le Groupe Islamique Armé (GIA) multipliait les massacres de civils. Cette spirale de violences suscitait une rafale de purges, de dissensions et de règlements de comptes, dont émergeait en 1998-99 le GSPC. Mais la politique de « réconciliation nationale » du président Bouteflika jeta le trouble jusque dans les rangs du groupe sala- fiste. Abdelmalek Droukdal, qui se présente sous le nom de guerre d’Abou Moussab Abdelwadoud, prit le contrôle du GSPC en 2003 sur la base du refus absolu de tout contact avec le régime « impie ». Il accentua sa fuite en avant en prêtant publiquement allégeance à Oussama Ben Laden en octobre 2006. Le GSPC était dès lors intégré à Al-Qaida, dont il devenait la branche pour le « Maghreb Islamique ». C’est cette ambition maghrébine qui marque visi - blement le pas en 2008, car le GSPC semble inca- pable de dépasser sa structure profondément algé- rienne pour acquérir une véritable dimension nord-africaine. Certes des centaines de militants maro- cains, tunisiens, libyens ou mauritaniens ont transité par les camps d’entraînement du GSPC depuis 2003, mais la plupart d’entre eux espéraient rejoindre l’Irak pour y mener le Djihad contre l’occupation américai- ne, et fort peu sont demeurés en Algérie pour se fondre dans Al-Qaida au Maghreb Islamique. Le Groupe islamique combattant libyen (GICL), très bien représentéauseindelahiérarchied’Al-Qaida,conser- ve son autonomie opérationnelle et les cellules djiha- distes au Maroc comme en Tunisie semblent tout à fait indépendantes des diktats de Droukdal. Le seul pays maghrébin où l’AQMI prétend impulser une dynamique terroriste est la République islamique de Mauritanie. L’AQMI y revendique l’assassinat de quatretouristesfrançais,le24décembre2007,l’at- taque contre l’ambassade d’Israël à Nouakchott, le