Aux sources de l égyptologie européenne : Champollion, Young, Rosellini, Lepsius - article ; n°4 ; vol.135, pg 743-762
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Aux sources de l'égyptologie européenne : Champollion, Young, Rosellini, Lepsius - article ; n°4 ; vol.135, pg 743-762

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Comptes-rendus des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres - Année 1991 - Volume 135 - Numéro 4 - Pages 743-762
20 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1991
Nombre de lectures 35
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Monsieur Jean Leclant
Aux sources de l'égyptologie européenne : Champollion, Young,
Rosellini, Lepsius
In: Comptes-rendus des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, 135e année, N. 4, 1991. pp. 743-
762.
Citer ce document / Cite this document :
Leclant Jean. Aux sources de l'égyptologie européenne : Champollion, Young, Rosellini, Lepsius. In: Comptes-rendus des
séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, 135e année, N. 4, 1991. pp. 743-762.
doi : 10.3406/crai.1991.15043
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/crai_0065-0536_1991_num_135_4_15043T
AUX SOURCES
DE L'ÉGYPTOLOGIE EUROPÉENNE
CHAMPOLLION, YOUNG,
ROSELLINI, LEPSIUS
PAR
M. JEANLECLANT
SECRÉTAIRE PERPÉTUEL
Mes chers confrères, Mesdames, Messieurs,
Peut-être pourrait-il paraître à certains quelque peu abusif qu'une
séance solennelle de rentrée de notre Académie des Inscriptions et
Belles-Lettres soit une nouvelle fois l'occasion d'évoquer les débuts
de l'Égyptologie. Mais il était sans doute difficile que ne soit pas pro
noncé, sous la Coupole de l'Institut de France, le nom de Jean-François
Champollion, alors que le monde entier vient de célébrer avec faste
le bicentenaire de sa naissance — le déchifTreur des hiéroglyphes est
né le 23 décembre 1790. Des expositions, des colloques l'ont magnif
ié, que ce soit en première place à Figeac, lieu de sa naissance, et
à Grenoble où, adolescent, il entreprit ses enquêtes passionnées. C'est
sous son invocation que le VIe Congrès international d'Égyptologie
vient de se tenir à Turin où, de longs mois durant, de juin 1824 à
la fin de février 1825, puis à nouveau de juillet au 4 novembre 1825,
il avait pu se consacrer à l'étude acharnée de la collection que le roi
de Piémont Carlo-Felice avait eu le bonheur d'acquérir du consul de
France Drovetti ; il y vérifia à loisir les clefs de son système de lec
ture ; comme il l'a écrit lui-même : « le chemin de Memphis passait
par Turin ». Accusant le caractère européen de l'œuvre de Champoll
ion, une magnifique exposition a groupé nombre de chefs-d'œuvre
de l'art pharaonique, successivement présentée à Strasbourg, au cœur
de l'Europe, où elle a reçu plus de 200 000 visiteurs, puis à Paris à
la Bibliothèque Nationale, actuellement à Berlin où se réunifient les COMPTES RENDUS DE L'ACADÉMIE DES INSCRIPTIONS 744
Musées de l'Est et de l'Ouest. En Egypte bien entendu, mais aussi
au loin, en Russie, jusqu'en Amérique du Sud, réunions, confé
rences, livres ou articles ont célébré son œuvre. En ce moment,
les collections égyptiennes de l'Institut de France, conservées au
Musée Jacquemart-André et au Château de Chaalis, grâce à un prêt
exceptionnel participent, en compagnie de pièces des collections ita
liennes, à l'hommage que rendent à Champollion les cités de Rimini
et de Turin. Pour le choix du sujet de la présente communication,
nous pouvons donc invoquer l'actualité, comme c'était le cas en
1989 pour commémorer le bicentenaire de la Révolution française
ou, l'an dernier, le centenaire de l'École biblique et archéologique
de Jérusalem.
Mais dans notre cadre solennel, nous avons aussi à nous acquitter
d'un devoir. En effet, nous prêterions à l'accusation de non-assistance
à une science en danger, si nous ne faisions pas savoir publiquement
notre réaction à la suppression récente par un de nos plus importants
organismes scientifiques d'un des fleurons de la recherche française :
l'orientalisme. Et pourtant nos savants — les jeunes en particulier —
perpétuent, au sein de la communauté orientaliste internationale, une
tradition où notre pays a toujours excellé et dont Champollion fut
précisément un acteur illustre. Un juste cri d'alarme a été lancé entre
autres, dans la grande presse, par notre confrère le professeur André
Caquot, président de cette glorieuse Société Asiatique fondée à Paris
en 1823 et qui, depuis lors, jouit, de par les travaux et les publica
tions de ses membres, d'une admiration universelle.
Parmi tant d'aspects auxquels nous pourrions nous attacher dans
l'œuvre immense de Jean-François Champollion, nous voudrions
aujourd'hui souligner l'un d'entre eux dont le caractère est part
iculièrement moderne, voire contemporain : l'aspect profondément
européen de sa personnalité et de son action. Ceci invite à nous
engager d'abord dans la présentation d'une communauté scientifique
pan-européenne, alors particulièrement active. A côté de fortes amit
iés et de relations personnelles intenses, nous devrons évidemment
enregistrer parfois des discussions vives, même des points de fric
tions. Mais, alors que le xixe siècle et les premières décennies du
xxe siècle ont connu une exaltation nationaliste qui, trop souvent,
s'est étendue malheureusement jusqu'au domaine de la science et
de la culture, il faut reconnaître que l'ère des Lumières avait pu
profiter d'une atmosphère agréable et féconde de cosmopolitisme ;
l'usage général de la langue française n'était-il pas d'ailleurs une
composante favorable à un tel climat de coopération scientifique ;
lors même que des conflits pouvaient surgir entre des savants d'ori
gines différentes, c'est seulement de façon secondaire que se dessi
naient des ombres que nous qualifierons de nationalistes. AUX SOURCES DE L'ÉGYPTOLOGIE EUROPÉENNE 745
Rappelons la découverte effectuée en juillet 1799, non loin de la
bourgade de Rashid que nous francisons en Rosette, sur le rivage
du Delta égyptien, lors de travaux de terrassement menés par l'armée
française — celle de la fameuse Expédition d'Egypte —, d'une « pierre »
gravée de trois écritures : hiéroglyphique, démotique (on disait alors
plutôt « enchoriale ») et grecque. Des érudits se penchèrent aussitôt
sur elle pour y trouver une voie d'accès vers les messages des Pha
raons, demeurés muets depuis quinze siècles. La traduction du texte
grec ne faisait pas de difficulté et, rapidement, l'académicien Ameilhon
en publia une belle étude. Dès 1802 parurent plusieurs brochures.
L'une était due à l'illustre spécialiste des langues sémitiques (arabe,
hébreu et syriaque) Silvestre de Sacy, alors professeur à l'École spéciale
des Langues orientales vivantes et membre de l'Institut : Lettre au
citoyen Chaptal, Ministre de l'Intérieur, au sujet de l'inscription égyp
tienne du monument trouvé à Rosette ; dans la version démotique, il
avait réussi à reconnaître trois noms dont celui de Ptolémée ; mais,
cherchant dans les signes des valeurs uniquement alphabétiques, il
ne pouvait aller plus loin. L'autre publication était d'un diplomate
suédois Johan David Àkerblad : Lettre sur l'inscription égyptienne de
Rosette, adressée au citoyen Silvestre de Sacy, Paris et Strasbourg, an X ;
par comparaison avec le grec, il avait identifié les noms propres de
la version démotique, restitué les mots pour « temples » et « grecs »
dans leurs formes coptes correctes et repéré le suffixe pronominal
de la troisième personne ; dans la version en hiéroglyphes, il avait
même réussi à isoler les nombres cardinaux. On ne citera que pour
mémoire les divers essais d'un autre diplomate suédois, le comte Nils
Gustav Palin qui, s'en tenant aux méthodes anciennes, à l'instar d'Atha-
nase Kircher, considérait dans les hiéroglyphes des symboles.
Incapables d'aller plus avant, Àkerblad et Silvestre de Sacy ne consa
crèrent plus leurs activités majeures à la Pierre de Rosette. Cependant
en 1812 Àkerblad adressera à Champollion une lettre cordiale pour
le remercier de lui avoir envoyé son Introduction à l'Egypte sous les
Pharaons et, en 1815, il écrira à Thomas Young.
En effet un nouveau venu s'était présenté dans l'arène du déchiffre
ment : un médecin anglais né en juin 1773 à Milverton, dans le canton
de Somerset. Thomas Young était le fils d'un commerçant quaker ;
t

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