Mery pour toujours de Risi Marco

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• Langue: Français

Extrait

Mery pour toujours
Mery per sempreF de Marco Risi
FICHE FILM
fiche technique
1989 Italie 1h40
Réalisateur :
Marco Risi
Scénario :
Sandro Petraglia
d'après le roman
d'Aurelio Grimaldi
Mery pour toujours
Musique :
té. Un nouvel élève arrive en classeRésumé
en même temps que la lettre deGiancarlo Bigazzi
transfert de Marco. Il la jette auMarco Terzi, traumatisé par un mariage
panier.raté, choisit un poste d’enseignant-édu-
cateur dans une prison pour mineurs. IlInterprètes :
La Saison Cinématographique 1990se heurte à la dure réalité du monde
Michele Placido carcéral et sa classe est composée de
délinquants représentant les pires casClaudio Amendalo
sociaux : Pietro est cambrioleur,
Alessandro di Sanzo Natale a déjà tué, Mery, un jeune tra-
vesti arrêté pour racolage, est persé-
cuté par ses condisciples. Marco
sera vite pris entre deux feux : d’un
côté les adolescents qui ne voient en
lui qu’un auxiliaire de la justice, de
l’autre le directeur de la prison et les
surveillants partisans d’une répres-
sion renforcée. Il commence cepen-
dant à "gagner du terrain". Mais
lorsque l’évasion du jeune Pietro se
termine par la mort de ce dernier au
cours d’un hold-up raté, le groupe se
referme à nouveau dans son hostili-
L E F R A N C E
1D O C U M E N T S
ger, il n’est pas poussé par le désirCritique Entretiens avec Marco Risi
de sacrifice, il n’est pas non plus le
poète fantaisiste qui, tel RobinLes films de prison, comme les Avez-vous tourné avec de vrais
Williams dans "Le cercle desfilms de guerre ou les westerns, délinquants ?
poètes disparus", insuffle à sesobéissent à des constantes, pour-
disciples le souffle épique d’untant "Mery pour toujours" ne res- Il n’y a que deux anciens prison-
idéal. Au jour le jour, patiemment,semble à aucun autre. Bien sûr, les niers de la Malaspina dans le film,
Marco "se plante", se met à dos pri-barreaux sont là, les gardiens Francesco Benigno qui joue Natale,
sonniers et autorités, enfreint lesobtus et souvent brutaux aussi, la le caïd de la classe, et Roberto
règles, balaie ses idées reçues, etpromiscuité, les brimades entre Mariano, Antonio le jeune père de
affronte la réalité. Les drames, lescodétenus, mais cette prison est famille. Les autres ont eu parfois
violences, les aventures person-peuplée d’adolescents dont les maille à partir avec la loi, mais
nelles de chacun de ses élèvessentiments et les comportements c’est tout. Je voulais tourner à la
récalcitrants sont minutieusementne peuvent qu’osciller sans cesse Malaspina, mais malgré l’accord
suivis par le réalisateur quientre l’état d’enfance et la maturi- du directeur et celui du maire, fina-construit son film comme un puzzleté. lement c’est de Rome qu' est
dont les morceaux s’emboîtentA ce point de vue, ils sont mal- venue la décision, pour ne pasdouloureusement, avec des déra-léables, bien que déjà corrompus déranger l’institution. Je me suispages émotionnels et des crisse-ou apparemment très atteints par
rabattu sur Ostia, dans une ancien-ments d’humour noir.un passé de mauvais aloi.
ne colonie de vacances, avec desTous les personnages sont amenésQuel que soit le fardeau dont leur
longs couloirs, auxquels nousavec un soin et une précisionenfance a été accablée, ils doivent
avons rajouté barreaux et grilles,dignes d’un romancier naturaliste,le porter pour toujours, mais
fermé des fenêtres, pour y tournerune qualité qu’on n’avait plusMarco Risi, humaniste animé d’un
le dortoir et les couloirs avoisi-revue depuis la grande époque duoptimisme désespéré, veut voir en
nants, la salle de bains, les sallesnéoréalisme italien avec lequelchacun d’eux la possibilité d’une
d’isolement C’était un établisse-"Mery pour toujours" renoue avecrédemption. A travers le personna-
ment sinistre, pour une colonie dele plus grand bonheur.ge de Mery, né Mario, mais dont la
vacances Pour la classe, les cou-féminité ne fait aucun doute au
loirs et la cour, nous sommes allés"Mery pour toujours", rappellemilieu de tous ces jeunes mâles, il
à Rome dans une école.avant tout que l’esprit humainaffirme que même si l’être humain
demeure libre de toute influence,évolue, pour toujours, il doit "faire
L‘ambiance et les règles de lapeut combattre la violence par laavec" son conditionnement pre-
réflexion, I’obscurantisme par la Rosaspina sont-elles conformes àmier, ce que la nature lui a donné,
lucidité, le désespoir par la volonté celles de la Malaspina ?ce que les parents et l’environne-
d’exister. "Mery pour toujours",ment ont d’abord établi. En aucun
faut-il le préciser, est interprêté par La tension entre les gardiens et lescas, il ne reconnaît au système
des jeunes acteurs pleins de fougue détenus, la violence et le désespoirpénal, à la vie carcérale, la capaci-
et par un Michele Placido éblouis- sont les mêmes, même si le dortoirté de survie ou de rachat. C’est en
sant au jeu tout en nuances et en a été progressivement remplacél’homme qu’il place son espoir, en
énergie, mis en scène avec la force par des chambres de quatre-cinqchoisissant la personnalité éclairée
que confère la violence des calmes. garçons, même s’il y a un centre d'de Marco Terzi, tel un esprit lucide
accueil plus agréable, même si auau milieu des barbares, pour deve-
La Revue du Cinéma n°457
lieu de cent adolescents, il n y en anir leur guide.
Hélène Merrick
Ce professeur-là n’est pas leur ber- plus que trente-cinq environ. Dans
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leurs yeux, c’est la même tristesse. Alessandro n’est pas un travesti, Soldati
Ils ont dix-sept ans ou moins, mais I’an dernier pendant le tournage, il (1987)
le regard d'hommes de trente-cinq voulait qu’on lui confirme qu’il
était bien un garçon, qu’il n’avaitans. Le pire, c’est la drogue, dont Mery per sempre
pas l’air d’une jeune fille. Après leje n’ai pas voulu parler dans "Mery (Mery pour toujours, 1989)
succès du film et de son beau per-pour toujours", pour ne pas accapa-
sonnage, il est devenu plus femmerer toute l’attention sur ce sujet à Ragazzi fuori
il fait des mimes. La scène danspart entière. "Mery pour toujours" (Les garçons de la rue, 1991)
laquelle il déclare à Micheleest avant tout une histoire d’amour
Placido que dans son enfance il seentre le professeur et ses élèves. Fils de Dino Risi, il renoue grâce à
déguisait avec les vêtements de saLa production pensait aussi qu’il "Mery per sempre" avec la tradition
mère, il est facile de déceler dansfallait montrer Placido dans son néoréaliste.
ses yeux que c’est sa propre véritéappartement, avec une femme Jean Tulard
qu’il raconte, il a eu du mal àpeut-être, parce que Placido est Dictionnaire des réalisateurs
accepter de jouer ce moment.un sex symbol en Italie ! Mais,
malgré son passé qu’on devine,
Les autres acteurs l’ont-ils acceptéses déboires sentimentaux,
tel(le) quel(le) ?I’important c’était sa vie dans la
classe et la prison.
Complètement, il n’y a jamais eu
d’équivoque, ils étaient tous amis,
Quels ont été les rapports entre les
ils ne sont pas bêtes, ils ont com-
acteurs professionnels et les débu-
pris que c’était un fiIm ; lorsque j‘ai
tants ?
demandé à Alfredo di Bassi qui
joue Carmelo, de tenter de séduire
Nous avons beaucoup répété avec
un de ses compagnons, je me sen-
Tony Sperandeo qui joue le
tais dans mes petits souliers, c’est
gardien-chef, c’est un acteur de
un garçon-boucher plutôt viril, il a
théâtre de Palerme qui a beaucoup
compris, ce n’était que de la fic-
fait pour que les textes soient dits
tion.
avec spontanéité. Avec Claudio
Amendola, qui est très profession-
La Revue du Cinéma n°457
nel, je souhaitais même parfois
Propos recueillis par Hélène Merrick
qu’il fasse des erreurs pour s’ali-
gner sur les autres, qu’il ne soit
pas parfait ! Certains des jeunes Filmographie
garçons ont trouvé leur voie, ou du
moins ils le croient, par exemple
Vado a vivere da soloBenigno (Natale) qui veut absolu-
(1982)ment devenir acteur, qui possède la
rage pour ça et dont le physique