Chaire Interbrew-Baillet Latour Union européenne - Russie UCL - KUL
IEE - Document n° 36 Novembre 2004
Par-delà la défense collective. Lévolution des fonctions de lOTAN depuis la fin de la guerre froide
Institut détudes européennes Pôle européen Jean Monnet Université catholique de Louvain Place des Doyens, 1 1348 Louvain-la-Neuve Tel : +32 10 47 84 16 Fax : +32 10 47 85 49 http://www.euro.ucl.ac.be
Par GALIAGLUME
Avant-propos
Depuis leffondrement de lURSS, lOTAN représente une instance tierce déterminant une part de la relation nouée entre lUnion européenne et la Russie. Ces deux dernières entretiennent des rapports tourmentés avec lorganisation transatlantique. Moscou naurait pas vu dun mauvais il la disparition dune structure militaire léguée par la guerre froide. Et le Kremlin de sinquiéter dès lors face aux transformations des missions de lOTAN et laccroissement de ses membres. Encore que confrontée à linéluctabilité de ces processus, la Russie délaisse lopposition stérile et semploie davantage à occuper une place privilégiée dans les partenariats otaniens. De même espère-t-elle une évolution substantielle de la Politique européenne de sécurité et de défense (PESD) de lUnion européenne, gage, sinon déquilibre, au moins de pluralisme sécuritaire en Europe. La relation problématique de lUE avec lOTAN tient du même ordre de tension : le lien entre les deux organisations, le sens de la PESD et le concept de puissance demeurent à élucider. Dans quelle mesure les deux institutions sont-elles complémentaires, subsidiaires ou exclusives lune de lautre ? La question est posée mais une réponse tranchée risquerait dobérer la poursuite dun processus de défense européen frappé dambiguïté constructive. Il ny a en effet guère daccord au sein des États membres de lUE sur le principe et les moyens de la puissance. Quand Michel Barnier, ministre français des Affaires étrangères, affirme en marge des commémorations du débarquement de Normandie que « nos amis américains devront comprendre que nous allons construire lEurope, non seulement comme marché mais comme puissance »1, que signifie-t-il précisément ? Pour la France, il sagit assurément dune puissance globale, et donc militaire, dotée dune autonomie large. Mais pour dautres, lUnion développe une simple puissance « normative », propageantad extra des valeurs par un phénomène dialectique de coercition, dincitation et dattraction économique, unsoft power. Dans cette optique, qui est largement celle de la Belgique à lheure actuelle, la « puissance » des forces armées se dilue dans des missions dacheminement daide humanitaire et ne sexprime finalement que dans la sécurisation de voies de communications ou des opérations de maintien de la paix aux risques réduits2. Pour dautres encore, lUE ne saurait être une puissance indépendante des Etats-Unis. Les membres qui ont adhéré à lUnion en 2004 persistent largement à voir en Washington le pourvoyeur fiable de leur sécurité. Aleksander Smolar, professeur de sciences politiques et conseiller des Princes polonais post-communistes, rappelle à ce propos : « les nations malheureuses ont la mémoire longue et les Etats-Unis sont perçus comme lunique garant de la sécurité en Pologne »3Hubert Védrine quand il indique que lEurope puissance, «. On ne peut dès lors donner tort à si nécessaire au monde », mais inégalement désirée des Européens, devrait au préalable lever les réticences nourries envers toute idée de puissance, que ce soit « par pacifisme, angélisme, atlantisme ou hédonisme »4. Dans lintervalle, il demeure indispensable de prendre conscience des évolutions des fonctions de lOTAN depuis la fin de la guerre froide. Celles-ci dépassent largement lobjectif fondateur de défense collective pour sétendre à des tâches de sécurité collective ou coopérative. Cette évolution est ici magistralement retracée par Mademoiselle Galia Glume dans le cadre dune recherche menée auprès de la Chaire Interbrew-Baillet Latour sur larchitecture de sécurité dans lEurope post-guerre froide. Professeur Tanguy de Wilde Coordonnateur de la Chaire Interbrew Baillet-Latour
1 par CitéLe Monde, 6-7 juin 2004. 2 suffit à cet égard de lire lidée que le ministre belge de la Défense se fait de limpuissance pour être édifié sur ce quil considère Il comme la puissance sur la scène internationale. Le Bimensuel militaireDirectdu 6 septembre 2004 note ainsi que « la situation au Soudan a profondément marqué le ministre Flahaut » et de citer ce dernier : « Lorsque je vois que des personnes souffrent, cela me donne un sentiment dimpuissance. Maintenant, nous avons loccasion dy remédier ». La Belgique y a effectivement remédié par le transport de vivres vers les zones défavorisées. 3 Cité parLe Monde, 6-7 juin 2004 4Le Monde 2004., 9 septembre
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Table des matières
Section I. LOTAN : une décennie de mutations 1.1. La fin de la guerre froide et le grand retour de la sécurité collective 1.1.1. Maintien de lAlliance victorieuse à Londres 1.1.2. Le nouveau Concept Stratégique ou la « sécurité élargie » 1.1.3. Le Concept Stratégique de 1999 : un rôle global pour lOTAN 1.2. Exporter la sécurité et la stabilité « hors zone » 1.2.1. Du Conseil de coopération Nord-Atlantique au Partenariat pour la Paix : le triomphe de la sécurité coopérative 1.2.2. Lélargissement ou la projection de la sécurité démocratique 1.2.3. LOTAN et la Russie entre coopération et confrontation : une illustration de linteraction des fonctions de lAlliance 1.3. LOTAN et la gestion des crises et des conflits 1.3.1. Premières opérations de paix en Bosnie 1.3.2. La guerre du Kosovo ou la prééminence de lAlliance dans larchitecture de sécurité européenne 1.3.3. Le cas macédonien : lOTAN au service de la diplomatiecroisée euro-américaine
Section II. Laprès-11 septembre : à quoi sert lOTAN ? 2.1. LOTAN est-elle adaptée à la « guerre contre le terrorisme » ? 2.1.1. Les aspects militaires de la lutte contre les menaces asymétriques 2.1.2. Poursuite de la transformation de lOTAN à Prague 2.2. La logique de la sécurité collective à la lumière du 11/9 2.2.1. Le Conseil permanent OTAN-Russie : une conséquence de la lutte anti-terroriste 2.2.2. Lélargissement : vers une dilution de lAlliance ? 2.2.3. Gestion de crises et consécration du hors zone 2.3. LOTAN à lépreuve de la stratégie de sécurité américaine 2.3.1. LOTAN et la crise irakienne : la solidarité transatlantique en question ? 2.3.2. Istanbul ou les limites de linstrumentalisation