Conseiller en économie sociale et familiale 2006 Inst. Régional du Travail Social - Basse-Normandie
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Examen du Supérieur Inst. Régional du Travail Social - Basse-Normandie. Sujet de Conseiller en économie sociale et familiale 2006. Retrouvez le corrigé Conseiller en économie sociale et familiale 2006 sur Bankexam.fr.

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Publié le 18 juillet 2008
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Langue Français

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er Institut Régional du Travail Social1 SUJET Service Sélections 11 rue Guyon de Guercheville 14200 HÉROUVILLE SAINT CLAIR Sélection des Conseillers(ères) en Économie Sociale et Familiale ÉPREUVE ÉCRITE du 3 au 6 avril 2006 Nombre total de pages du sujet : 5 DURÉE DE L’ÉPREUVE : 2 heures TEXTE N° 1 : « Les analphabètes du Quart-Monde » d’Ali Hamadache  Courrier de l’Unesco(février 1984) TEXTE N° 2 : «L’illettrisme, une polémique pour lettres » de Luc Cédelle  Le Monde de l’Education (2002) 1 – Analyse (8 points sur 20) Après avoir lu les deux documents, vous dégagerez la thèse respective de l’un et l’autre texte, de manière concise et claire. 2 – Développement (8 points sur 20) Depuis 2002, le « plan d’action contre l’illettrisme » de Luc Ferry met en œuvre des directives, des mesures nouvelles afin de lutter contre un niveau qui ne cesse de se dégrader. Parallèlement, les nouveaux media, dont le but est de permettre aux groupes et aux individus de coopérer et de créer une intelligence collective et sociale, se diffusent de manière croissante. Selon vous, l’expansion des technologies modernes de communication aggravent-elles, ou non, la discrimination envers les analphabètes ? Présentation, orthographe, syntaxe (4 points sur 20) AUCUNE FEUILLE DE BROUILLON NE SERA ACCEPTÉE  1
TEXTE N° 1
« Les analphabètes du Quart-Monde »
On aurait tort de croire que l’analphabétisme s’arrête aux frontières du tiers-monde. Nombreux sont en effet les pays qui, ayant depuis des générations réalisé la scolarisation universelle, découvrent avec étonnement qu’ils doivent faire face à un fléau qu’ils pensaient avoir éliminé et qui se développe de façon alarmante, n’épargnant pas même ceux qui, depuis des décennies, jouissent d’un haut niveau de prospérité matérielle. La situation des analphabètes des sociétés industrialisées est sans doute plus difficile et, parfois même, revêt un caractère dramatique ; un adulte nord-américain ou scandinave qui n’a pas une maîtrise suffisante de l’écrit vivra avec plus d’intensité l’exclusion dont il est la victime que le même adulte d’un pays où le taux d’analphabétisme est élevé. A la limite, dans certains pays du tiers-monde, une riche vie communautaire et une civilisation orale développent, à travers un système de symboles différent, d’autres moyens pour exercer la mémoire et organiser la pensée et sont à même de prendre en charge l’analphabète. Dans une société économiquement et technologiquement avancée, où la communication écrite occupe une place prépondérante et où l’imprimé, en particulier, est omniprésent, celui qui n’a pas accès aux techniques instrumentales de base (savoir livre, écrire et calculer) est automatiquement infériorisé dans un certain nombre de situations quotidiennes : au marché, dans les transports, à la banque, à la poste, dans l’exercice de ses droits et devoirs civiques, voire pour l’accès à l’emploi. Un chômeur analphabète évitera même de solliciter l’Agence pour l’Emploi, car il éprouvera de la honte à ne pouvoir remplir les formulaires requis. Un ouvrier analphabète aura du mal à participer efficacement à l’activité syndicale. Les illettrés sont tout aussi handicapés dans la vie quotidienne, particulièrement complexe, d’un pays développé. Faute de pouvoir lire les noms des rues ou des stations de métro, de tram, d’autobus, ils ne pourront pas s’orienter et circuler aisément dans une ville. Dans un grand magasin, ils ne pourront pas comparer les étiquettes ; chez l’épicier ou le boucher, ils ne sauront pas calculer le prix des aliments. Faire admettre un enfant à l’hôpital, remplir une demande d’allocation et autres formalités administratives –tous les démêlés avec l’administration, l’école, la justice- constitueront pour les analphabètes autant d’épreuves insurmontables. L’illettré n’obtient ni le respect de son environnement social, ni même celui de sa famille. Les enfants, qu’il ne peut aider dans leurs devoirs scolaires, finiront par le mépriser, voire par lui désobéir. La plupart des illettrés éprouvent une honte qui les incite souvent à vouloir cacher aux autres le fait qu’ils ne savent pas lire et écrire, et qui les paralyse lorsque l’occasion leur est offerte de suivre des cours d’alphabétisation. Parfois, les facultés d’intelligence dont les illettrés ne manquent pas au départ ne sont plus gardées en éveil, exploi-
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tées, développées. Par ailleurs, la diffusion croissante des technologies modernes introduit une nouvelle discrimination envers les analphabètes. Pour les pays riches comme pour les moins nantis, analphabétisme et pauvreté sont liés, chacun de ces éléments étant tantôt cause, tantôt conséquence. L’analphabétisme est en étroite relation avec un certain nombre de facteurs qui s’influencent mutuellement : faiblesse ou absence de revenus, insuffisance quantitative et qualitative de la scolarisation antérieure, pauvreté de l’environnement culturel, santé précaire, habitat insalubre, etc. Il touche plus particulièrement ceux que l’on appelle maintenant le « Quart-Monde », c’est-à-dire les catégories sociales les plus défavorisées, notamment les économiquement faibles, les habitants des zones marginales des villes ainsi que ceux des régions périphériques ou en déclin, les travailleurs migrants et leurs familles, certaines minorités ou groupes défavorisés. Cette population est en majorité constituée par les sans-emploi, les travailleurs occasionnels ou confinés dans des emplois peu ou non qualifiés, les assistés sociaux, certaines populations rurales dont le niveau de vie est particulièrement bas et où la contribution de l’enfant aux ressources familiales est parfois plus importante que sa scolarité régulière –enfin tous ceux qui sont situés au bas de l’échelle économique et sociale. Ils sont particulièrement nombreux parmi les chômeurs car, si un niveau d’instruction élevé ne peut garantir un emploi dans la conjoncture économique actuelle, c’est cependant une condition indispensable pour accéder à une profession stable et bien rémunérée. Ils sont également nombreux parmi les détenus, dont l’analphabétisme est d’autant plus ressenti que l’écrit constitue souvent, dans ce cas, un moyen privilégié de communication avec l’extérieur. La plupart des Etats des pays industrialisés admettent plus ou moins explicitement l’existence de l’analphabétisme d’une partie de la population adulte de leur pays. Même quand l’existence du problème est reconnue, à quelques rares exceptions près, très peu d’études ont été entreprises, avec les moyens appropriés, pour en chiffrer l’ampleur, encore moins en analyser les causes. Ali Hamadache /Courrier de l’Unesco– février 1984
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TEXTE N° 2 « L’illettrisme, une polémique pour lettres » « L’illettrisme en tant que problème social reconnu en France est en effet une notion très contemporaine, dont, dans un livre ardu, le sociologue Bernard Lahire a entrepris la «déconstruction» méthodique, au risque de s’attirer des inimitiés et d’avoir l’air, ce qu’il récuse, de nier la gravité des inégalités devant l’écrit. Ce néologisme, intégré en 1985 dans lePetit Robert, a été mis en avant pour la première fois dans un rapport du mouvement ATD-Quart Monde en 1978. Auparavant, on parlait certes des « illettrés » mais surtout de l’ « analphabétisme », et pour désigner une réalité différente : celle des pays dépourvus de système scolaire ou celle des personnes n’ayant jamais « appris à lire ». Depuis, le terme a connu une véritable fortune médiatique et politique, marquée notamment par la création en 1984 par le gouvernement Mauroy du Groupe permanent de lutte contre l’illettrisme, dissous en 2000 et remplacé depuis par l’Agence nationale de lutte contre l’illettrisme. Bernard Lahire reconstitue minutieusement le processus ayant conduit à faire de l’illettrisme un concept à succès et traque les ambiguïtés, voire les dérives liées à son utilisation publique. Travail salutaire, puisque l’absence de distance critique mène aujourd’hui, avec les meilleures intentions du monde, à placer sous la bannière de la « lutte contre l’illettrisme » des mesures concernant essentiellement… des enfants de six ans qui débutent à peine leur apprentissage. Un autre glissement conceptuel a fait les frais de la démystification entreprise par Bernard Lahire : l’habitude consistant, pour mettre l’accent sur la gravité du problème, à désigner ceux qui ne maîtrisent pas l’écrit comme des personnes au mieux incapables de «formuler leur pensée» et, au pis, ne disposant plus que de la violence pour s’exprimer. A ce sujet, le sociologue s’est heurté (entre autres) au linguiste Alain Bentolila. Professeur à la Sorbonne expert « incontournable » depuis 1990, auteur de nombreux ouvrages, Alain Bentolila est aussi un habitué des colloques et émissions où il fait un tabac par son talent d’expression et son positionnement dans le registre du « langage de vérité ». Bernard Lahire estime notamment qu’il «joue avec les connotations pathologisantes» en considérant l’illettrisme comme un «autisme social» et ne lui pardonne pas d’avoir écrit un jour (dérapage ?) que les enfants en grande difficulté avec la langue «seront moins humains que les autres». Ces reproches sont à la fois intéressants et déconcertants dans la mesure où pratiquement aucun discours public, quel que soit son thème, ne sortirait indemne d’un tel passage au crible.
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Alain Bentolila admet des «provocations» mais ne retire rien à «l’idée d’enfermement linguistique». «Ceux qui, estime-t-il,entretiennent avec la langue orale et écrite des malentendus vivent plus difficilement que les autres, ont moins de chances de décider de leur destin social et sont plus vulnérables devant des textes sectaires ou intégristes». La «seule question» consiste selon lui à «distribuer de façon plus équitable le pouvoir linguistique». Sur ce point-là, il sera difficilement contredit. Luc Cédelle-Le Monde de l’Education– 2002
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ème Institut Régional du Travail Social2 SUJET Service Sélections 11 rue Guyon de Guercheville 14200 HÉROUVILLE SAINT CLAIRSélection des Conseillers(ères) en Économie Sociale et Familiale ÉPREUVE ÉCRITE du 3 au 6 avril 2006 Nombre total de pages du sujet : 5 pages DURÉE DE L’ÉPREUVE : 2 heures TEXTE N° 1 : « Un nouvel outil de communication»  Katia Vilarasow – Valeurs mutualistes n° 222 – janvier 2003 TEXTE N° 2 : Extrait du roman «Les Chases»  Georges Pérec - 1965 1 – Analyse (8 points sur 20) Après avoir lu les deux documents, vous dégagerez la thèse respective de l’un et l’autre texte, de manière concise et claire. 2 – Développement (8 points sur 20) Ethique des affaires, éthique individuelle, il en est actuellement beaucoup question. L’éthique fait même parfois partie du programme de certaines écoles. Beaucoup n’y voient qu’une mode ou un moyen de faire de meilleures affaires ou d’améliorer la productivité ; d’autres pensent qu’on peut voir un progrès dans cette moralisation du monde des affaires. Mais, pensez-vous que l’on puisse sérieusement espérer une moralisation des marchés ou le renoncement aux extraordinaires profits purement spéculatifs en faveur d’investissement productifs, plus utiles à la collectivité ? Présentation, orthographe, syntaxe (4 points sur 20) AUCUNE FEUILLE DE BROUILLON NE SERA ACCEPTÉE
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TEXTE N° 1
« Un nouvel outil de communication »
Si aujourd’hui toutes les entreprises entonnent l’air du développement durable, il reste parfois du chemin à faire entre les paroles et les actes. Certaines firmes anglo-saxonnes peuvent être considérées à juste titre comme des pionnières dans ce domaine. Dès les années 1980, The Body Shop, Ben & Jerry’s ou Patagonia ont intégré dans leur rapport annuel un volet social et environnemental. Avec l’idée que, si l’entreprise n’a pas pour vocation de régler tous les problèmes de la société, «il lui appartient malgré tout de contribuer à résoudre ceux dont elle est coresponsable, c’est-à-dire auxquels elle contribue du fait même de ses activités». A l’opposé d’une croissance désordonnée qui dégrade l’environnement et accroît les inégalités, ces entreprises prônent un développement vertueux, où la société, la planète et les profits ne peuvent être envisagés séparément. En France, des firmes ont entrepris d’adopter une démarche éthique en s’assurant que leur propre production ou celle de leurs sous-traitants n’a pas d’impact négatif sur les personnes ou l’environnement. Ainsi, Carrefour a signé un partenariat avec la Fédération internationale des droits de l’homme pour lutter contre l’exploitation des enfants et le travail forcé chez ses fournisseurs. De son côté, l’enseigne Monoprix, qui a publié en 2000 une charte de développement durable, a été la première à distribuer dans ses rayons les produits alimentaires « Max Havelaar » issus du commerce équitable. Par rapport au circuit traditionnel, ce réseau de distribution alternatif permet d’assurer des revenus décents aux producteurs grâce à la limitation des intermédiaires. Parallèlement, des codes de conduite volontaires se multiplient, fruits de réflexions menées par des regroupements d’entreprises, des ONG ou des institutions internationales. La Chambre de commerce internationale a ainsi publié en 1991 une « Charte des entreprises pour le développement durable ». La Commission européenne a édité en 2001 un Livre vert sur la responsabilité sociale des entreprises. En 1997, la norme sociale SA 8000 a été créée avec pour ambition d’imposer un référentiel commun concernant les conditions de travail. Elle concerne aujourd’hui 150 entreprises dans le monde. Dans notre pays, l’Afnor (Agence française de normalisation) étudie la mise en place de nouvelles normes. Mais bien souvent, ces conduites vertueuses sont dictées par le souci de ne pas se mettre les consommateurs à dos. En effet, selon une étude Sofrès réalisée en 2000, la première menace perçue par les dirigeants de sociétés européennes est, pour 54 % d’entre eux, les mouvements d’opinion ! Les consommateurs ont découvert leur pouvoir d’influence. En France, le collectif « De l’éthique sur l’étiquette » a poussé plusieurs entreprises à adopter un code de conduite et à accepter un contrôle indépendant. Il diffuse chaque
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année un « carnet de notes » permettant de comparer les avancées des différentes enseignes en matière de responsabilité sociale. Dans un contexte où les entreprises sont soucieuses de leur image, il est parfois difficile de dissocier les réels engagements des opérations publicitaires. Ainsi TotalFinaElf, secouée par la catastrophe écologique provoquée par le naufrage du pétrolierErika, se lance désormais dans de grands chantiers de production d’énergie éolienne. EDF communique auprès de ses clients certaines mesures de l’impact de son activité sur l’environnement. Mais ont-elles pour autant vraiment changé leurs pratiques ? Pour d’autres, adopter une démarche de développement durable relève d’un réel enjeu de management. «Par exemple, Carrefour a mis en place une filière sans OGM lorsque est apparue la crainte du public face aux organismes génétiquement modifiés, anticipant ainsi une tendance de marché, explique Carole Troschelj, consultante chez Utopies, agence de conseils spécialisée en développement durable.Cette démarche permet aussi de prendre de l’avance sur les évolutions réglementaires. Dans l’industrie du ciment, particulièrement émettrice de dioxyde de carbone, Lafarge s’est fixé des objectifs pour contribuer à la lutte contre l’effet de serre». A partir de 2003, le développement durable devient un passage obligé pour les grands groupes cotés en Bourse, sommés par la loi sur Les Nouvelles Régulations Economiques (NRE) de fournir tous les ans des données sur leur responsabilité sociale et environnementale. Le Danemark, la Norvège, la Suède et les Pays-Bas ont pris des dispositions similaires. «Mais ces législations nationales sont difficiles à harmoniser sur le plan international, note Carole Troschelj.? »De plus, comment juger de la pertinence des critères retenus L’investissement socialement responsable (ISR) est confronté au même problème : ces produits financiers doivent être investis dans des entreprises reconnues comme éthiquement responsables. Pourtant, dans leurs portefeuilles de produits d’épargne éthiques, certaines banques françaises incluent des entreprises pétrolières ou d’armement… La transparence viendra-t-elle du marché ? Oui, répondent les experts, pensant qu’en dernier ressort ce sera aux consommateurs de trancher.
Katia Vilarasow Valeurs mutualistes n° 222– janvier 2003
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TEXTE N° 2
« Les chases »
Comment faire fortune ? C’était un problème insoluble. Et pourtant, chaque jour, semblait-il, des individus isolés parvenaient, pour leur propre compte, à parfaitement le résoudre. Et ces exemples à suivre, éternels garants de la vigueur intellectuelle et morale, de la France, aux visages souriants et avisés, malins, volontairement, pleins de santé, de décision, de modestie, étaient autant d’images pieuses pour la patience et la gouverne des autres, ceux qui stagnent, piétinent, rongent leur frein, mordent la poussière. Ils savaient tout de l’ascension de ces chéris de la Fortune, chevaliers d’industrie, polytechniciens intègres, requins de la finance, littérateurs sans ratures, globe-trotters pionniers, marchands de soupe en sachets, prospecteurs de banlieue, crooners, play-boys, chercheurs d’or, brasseurs de millions. Leur histoire était simple. Ils étaient encore jeunes et étaient restés beaux, avec la petit lueur de l’expérience au fond de l’œil, les tempes grises des années noires, le sourire ouvert et chaleureux qui cachait les dents longues, les pouces opposables, la voix charmeuse. Ils se voyaient bien dans ces rôles. Ils auraient trois actes au fond d’un tiroir. Leur jardin contiendrait du pétrole, de l’uranium. Ils vivraient longtemps dans la misère, dans la gêne, dans l’incertitude. Ils rêveraient de prendre, ne serait-ce qu’une seule fois, le métro en première. Et puis, soudain brutale, échevelée, inattendue, éclatant comme un tonnerre : la fortune ! Leur pièce serait acceptée, leur gisement découvert, leur génie confirmé. Les contrats tomberaient à la pelle et ils allumeraient leurs havanes avec des billets de mille. Ce serait une matinée comme les autres. Sous la porte d’entrée on aurait glissé trois enveloppes, longues et étroites, aux en-têtes imposants, gravés, en relief, aux suscriptions précises et régulières, frappées sur une IBM direction. Leurs mains trembleraient un peu en les ouvrant : ce serait trois chèques, avec des ribambelles de chiffres. Ou bien, une lettre : « Monsieur, « M. Podevin, votre oncle, étant mortab intestatet ils se passeraient la… » main sur le visage, doutant de leurs yeux, croyant rêver encore ; ils ouvriraient la fenêtre toute grande. Ainsi rêvaient-ils, les imbéciles heureux : d’héritages, de gros lot, de tiercé. La banque de Monte-Carlo sautait ; dans un wagon désert, une sacoche oubliée dans un filet : des liasses de gros billets ; dans un douzaine d’huîtres, un collier de perles. Ou bien, une paire de fauteuils Boulle chez un paysan illettré du Poitou.
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De grands élans les emportaient. Parfois, pendant des heures entières, pendant des journées, une envie frénétique d’être riches, tout de suite, immensément, à jamais, s’emparait d’eux, ne les lâchait plus. C’était un désir fou, maladif, oppressant, qui semblait gouverner le moindre de leurs gestes. La fortune devenait leur opium. Ils s’en grisaient. Ils se grisaient sans retenue aux délires de l’imaginaire. Partout où ils allaient, ils n’étaient plus attentifs qu’à l’argent. Ils avaient des cauchemars de millions de joyaux. Georges Pérec Les Chases - 1965
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