Cauchemar en URSS - Alors qu il est minuit dans le siècle
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Cauchemar en URSS - Alors qu'il est minuit dans le siècle

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nrecon  urvilus el rssruront!»disdou saneuqletq obnneu ssme âesne ues L-er s
«E gretteront que lon en parle encore, comme si tout avaitétéet, surtout, compris sur ce qui fut qua-dit lifié de«plus grandévénement politique et social duesiècle»par Ante Ciliga. Certaines tenteront xx de sauver quelque chose du naufrage dans un bilan du«socialisme réel»quils jugeaient hier encore «globalement positif». Les autres comptabili-seront,«en regard des victimes de Hitler et de Franco, celles de Lénine, Staline, Mao et autres Pol Pot pour célébrer lhumanisme dufmiet du capitalisme bureaucratique financier, lesquels nont pas besoin de camps de concentration pour condamner des sociétés entièresà la misère età l autodestruction1». Toutes communieront dans la même affirmation péremptoire et sans appel : la chute du mur de Berlin et limplosion de lurss signifient«la fin du communisme». À qui demandent, comme l ceuxAlice de Lewis Caroll, si un même mot peut exprimer des choses dif-férentes, nos modernes Humpty Dumpty ne répon-dent pas :«La question estQui est le maître ?, un point c est tout !»Ils nont même plus le mérite de la franchise brutale, nous sachant habitués depuis des décenniesàla novlangue de Big Brother. Il va de soi quun mot signifie seulement son contraire : la liberté cest lesclavage, la guerre cest la paix comme lursscétait le communisme. Cela va de soi et ne mérite pas même l’ébauche dune discussion.
Alors qudial ness tl e msiinèculiet
Avant-propos –5
Ceux qui, hier, portaient aux nues Staline ou Mao et insultaient leurs critiques et les témoins directs de ce drame se font aujourdhui, au nom de leurs erreurs passées, les chantres inspirés de la démocratie de marché, sinon les hagiographes des grands patrons du capitalisme. Nous sommes donc bien passés dun mensonge déconcertantà un autre : sous le socialisme proclamé dhier ne se trouvait quune forme totalitaire de capitalisme bureaucratique d’État quil est encore impossible de qualifier comme tel2. Il importe donc de remettreàet le point de vue de ceuxjour les textes qui,à de l contre-courantenthousiasme pour la construction du socialisme sur un sixième du globe, surent raison garder et préserver les chances de renaissance dun mouvement d’émancipation sociale libéré de lhypothèque léniniste et stali-nienne. Cette renaissance passait par une analyse sans concession de la nature de classe du régime soviétique du point de vue de ceux den bas, tant au niveau de la situation réelle des classes laborieuses que de la répression exercée contre lensemble des courants révolutionnaires. Au premier rang de ceux qui dénoncèrent limposture stalinienne figure Boris Souvarine, dont les trois textes que nous republions ici furentécrits juste après la parution de sonStaline. Aperçu historique du bolchevismeen 3; ouvrage qui marque une date essentielle dans la compréhension du régime instaurédans lancien empire des tsars ; analyse désormais considérée comme un classique de lhistoire duxxesiècle. Le premier de ces trois textes s interroge longue-ment sur la logique des procès de Moscou et sur lampleur de la répression de masse dont elle nest que la partieémergée au sommet de l’État-parti. Les suivants insistent plus particulièrement sur la situation des classes laborieuses des villes et des
campagnes dans la seconde moitiédes années. Ils permettent de faire le point sur les analyses de Souvarine au plus fort de la terreur stalinienne. Il sagira ici de rappeler leur genèse et leur spécificité, les actions de solidaritéauxquelles leur auteur parti-cipa, avant d’évoquer brièvement sonévolution poli-tique durant cette période.
Dès-, Boris Souvarine entame un dia-logue avec Lénine. Devenu secrétaire du Comitéde la IIIeInternationale, il est donc un des principaux artisans de ladhésion du mouvement ouvrier et socialiste francaisà nouvelle organisation au cette congrès de Tours en décembre4. Lannée sui-vante, il est le premier représentant du parti francais auprès de lexécutif de lInternationaleà Moscou comme membre du Secrétariat et du Presidium. Après son exclusion de lInternationale communiste en juillet, Souvarine analyse, dès son retour en France en janvier, les conséquences de la pré-tendue«bolchevisation»au sein du parti russe et de lInternationale. Ilécrit alors dans la nouvelle revue «ysdncilamunisteiste-com»de Pierre Monatte5(La Révolution prolétarienne) puis dans leBulletin com- muniste, quil fait paraître comme organe critique tout en essayant de regrouper les communistes dopposition dans un Cercle communiste Marx et Lénine fondé f enévrier deviendra le qui Cercle communiste démocratique en. Au-delà des conflits dappareil et des rivalités de personnes dans la lutte pour le contrôle du pouvoir, Souvarine discerne rapidement quil est indispensable d’éta-blir une analyse de classe de la sociétésoviétique6. Il constate que le mode de production nest en rien socialiste et que la plus-value est accaparée par une bureaucratie parasitaire. Dans le domaine des
Avant-propos 7
institutions politiques, les soviets sont réduits aux prérogatives dun conseil municipal, moins le droit d les assembl ;opinion politiqueées ne sont que des chambres d les syndicats des ins-enregistrement ; truments de la politique du parti cantonnésà un rôle de répression ou dassistanat dans les entre-prises. La tendance générale de la décennieécoulée enurssaboutitàune«restauration des classes»et nonàleur suppression, au développement de lex-ploitation de lhomme par lhomme et au renforce-ment de la dictature du parti dont la nature a radi-calement changépour devenir«une nouvelle classe privilégiée».«Le Parti,écrit-il, nest plus une frac-tion du prolétariat : il se trouve au-dessus. Ses inté-rêts ne sidentifient plusà ceux de la classe.» L appartenance au parti nentraîne plus le fait d’être communiste. Il est au contraire préférable de ne plus l’être car, alors que la répression des idées révolutionnaires bat son plein, les communistes authentiques nont le choix qu entre«le silence et la prison ou la Sibérie». En, les   membres du parti au pouvoir ne sont que des «rouages de la machine gouvernementale sovié-tique»et«la principale catégorie privilégiée du régime»qui dispose davantageséconomiques en termes de sécurité de lemploi, de logement et de rémunération. Le«mécanisme du régime»place le secrétariat au sommet de la pyramide de la bureau-cratie du parti, dédoublée par celle des«soviets». Cetédifice est complété l parappareil des syndi-cats, celui des administrationséconomiques, indus-trielles, commerciales, ceux des forces de répres-sion, etc. :«Tous ces appareils additionnés, entre-lacés, interpénétrés, constituent la plus formidable trame dautorité ait jamais enserr quié, ligoté, bâillonné, paralyséun peuple, un individu, et dont on ne connaît pas d’équivalent ni dans le passéni
dans le présent.»Le principal mérite de lopposi-tion emmenée par Trotski aétéde«descendre dans larène enpour la démocratisation du Parti, étape nécessaire vers la démocratie soviétique». Mais elle a aussi«donné limpression de vouloir seulement supplanter les maîtres du pouvoir et de navoir songé àla démocratie que pour y parvenir». Elltout pas pris la mesure exacte du chan-e n a sur gement considérable dans la nature du parti, vic-time dun fétichisme qui lempêche de«différencier la réalitédu Parti de sa définition théorique». En, Souvarine participeà trilogie sign laée par l’écrivain roumain Panaït Istrati,Vers lautre flamme. Il y rédige le troisième volume,La Russie nue7, consacré à situation tragique des classes la laborieuses,àpartir dinformations glanées unique-ment dans la presse du régime. Il yévoque les fins et les moyens de la prétendue«dictature du prolé-tariat» – fait la pyramide bureaucratique des en «appareils»de l’État-partiavant de conclure que, «classes laborieuses, on ne peut accom-contre les plir quune révolution bourgeoise».À la même époque, il sinterrogeégalement sur la signification des plans quinquennaux dont le coût est supporté par les travailleurs russes :«La question est donc de savoir si ces usines-là, ces tracteurs-làméritent d’être payés un tel prix, si une génération de prolétaires doitêtre sacrifiée pour un résultat accessible autre-ment, et si le chemin du socialisme passe nécessaire-ment par la misère et lesclavage du prolétariat.» La mise enœuvre de cette politiqueéconomique entraîne un asservissementépouvantable des popu-lations laborieuses, mais aussi la répression des dif-fé mouvementrents courants du révolutionnaire susceptibles de sopposeràce nouveau despotisme oriental. La dénonciation des conditions de vie misérables des travailleurs doit saccompagner,
Avant-propos 9
pour Souvarine, de campagnes de solidaritéavec les révolutionnaires persécutés par le régime, qui deviennent le symbole de loppression dune classe dans son ensemble. Ainsi pour Nicolas Lazarévitch, arrêtéleoctobrepour avoir tentéde créer un groupeàlusine Dynamo oùil travaille, en vue de la constitution de syndicats de classe indépendants qui défendront les intérêts des ouvriers contre la direction des usinesétatisées ou le patronat privé issu de la nouvelle politiqueéconomique (nep). Le décembre, Lazarévitch est condamné àtrois ans de camp. Détenu au secretà prison de la la Loubianka, puisàBoutyrki, il est déportéau camp de Souzdal.Àson retouràBoutyrki, il est violem-ment passé à tabac. Souvarine participeà cam- la pagne en sa faveur, qui aboutitàlappel dun e qua-rantaine dintellectuels Georges notamment Duhamel, Romain Rolland, Séverine et Léon Werth lancé à lambassade russe de Paris. Il dénonceégalement, dans leBulletin communiste, le traitement dont sont victimes les communistes dopposition dans le parti russe. Ainsi, lejanvier , un tract du Cercle communiste Marx et Lénine annonce la déportation et lexil des leaders de la Révolution russe. Lannée suivante, c est lou-vrier anarchiste italien Francesco Ghezzi qui est arrêtéet condamné8. Souvarineécrit alors :«Il y a maintenant tant de révolutionnaires emprisonnés ou déportés dans la République des Soviets quun cas de plus risque de passer inaperçu. Cela ne doit pasêtre. Cela ne sera pas. Certaines circonstances permettent d’éveiller bien des consciences et, préci-sément, ce nouveau défi insolent au mouvement prolétarien non asservi doit forcer lattention de lopinion révolutionnaire.9» Deux ans plus tard,La Critique sociale10, revue de Souvarine, annonce larrestation de D. B.
Riazanov un militant socialiste russe mais aussi un historien de premier plan du mouvement ouvrier européen et un des grands connaisseurs des œuvres de Marx et dEngels. En rappelant son œuvre de marxologue et son action de militant, Souvarine souligne le caractère contre-révolution-naire du stalinisme. De même que Ghezzi est un ouvrier anarchiste dévoué à la cause du prolétariat, quelquun comme Riazanov est inattaquable dun point de vue révolutionnaire :«Par cet exploit bar-bare, la dictature du secrétariat a peut-être portéun coup mortelà un grand serviteur désintéressé du prolétariat et du communisme. [] Mais du moins aura-t-elle en même temps dissipéla dernière appa-rence susceptible de faire illusionà lextérieur et avoué, révélant sa vraie nature, lincompatibilité absolue entre le bolchevisme post-léninien et le marxisme.11» Contrairementà lattente de Souvarine, le cas de Riazanov ne soulève guère de protestations importantes. Il faudra attendre laf-faire Victor Serge pour que naisse une prise de conscience de la répression stalinienne de la part de lextrême gauche, mais aussi dune partie du mou-vement socialiste et de certains intellectuels. Comme pour Francesco Ghezzi, Souvarine est lun des premiersà être informé de larrestation de l’écrivain, qui est annoncée dansLe Travailleurdu marsun hebdomadaire communiste dop-position de lest de la France auquel il collabore et où anime une chronique des ilévénements sovié-tiques. Leavril, un rédacteur précise que les amis françde Victor Serge sont, depuis le mois prais écé-dent, sans aucune nouvelle. La semaine suivante, lappel du Cercle communiste en faveur de Victor Serge est publié en première page duTravailleur. (Ce texte figure aussi au sommaire deLa Critique
Avant-propos 11
socialedavril, accompagné dun appel signé par Georges Bataille, Lucien Laurat, Jacques Mesnil, Pierre Pascal et Boris Souvarine.) Il rap-pelle notamment larrestation de Victor Serge en et sa libération suiteà lintervention de per-sonnalités politiques ou littéraires de la bourgeoisie de gaucheémues par lemprisonnement dun des hommes qui avait, tant par ses propres livres que par ses traductions, fait le mieux connaître le point de vue bolchevik sur la Révolution russe. Enfin, lappel insiste sur le caractère arbitraire et inique de cette arrestation12. Lejuin, Souvarine annonce dansLe Travailleurla condamnation officielle de l’écrivain : protester avec la plus grande détermination pour Victor Serge,écrit-il en substance, ce nest pas seu-lement prendre la défense dun innocent persécuté mais aussi permettre dalerter lopinion sur le sort misérable des travailleurs russes. Cest la même pro-blématique que Souvarine invoquait au moment de larrestation de Francesco Ghezzi :àtravers lexem-ple dun révolutionnaire persécuté, cest tous les tra-vailleurs quil faut défendre contre larbitraire et la répression dune bureaucratie tyrannique qui fait ainsi une nouvelle fois la preuve de son caractère anti-ouvrier et anti-socialiste. Il faut se saisir de ces cas pouréclairer lopinion publique européenne abusée par le prestige de la révolution deet une propagande aux moyensénormes. Au début de cette campagne en faveur de Victor Serge, Souvarine rencontre d’énormes difficultés pouréveiller lintérêt des personnalités de gauche dont le poids aurait pourtant pu, dès le printemps , peser lourd. Une lettreàPierre Kaan dumai est particulièrement révélatrice de ces pro-blèmes :«Larrestation de Victor Serge date dumars. Deux mois déjà. Personne na rien fait sur le
plan de la protestation publique. Jai rédigé un papier et commencé de recueillir des signatures. Bernier sest misàergoter,àproposer des amende-ments et a voulu me faire entrer en rapport avec Mme Paz sous prétexte quil la fréquenteà Monde, subordonner notre action aux considérations louches de Bergery, etc. Jai refusénet dentrer dans cette voie, sachant pertinemment ce quil y a au bout. Dautre part, [Pierre] Pascal hésitaitàsigner, de crainte dattirer des représailles sur sa famille. Jai changé de tactique, soumis mon papier au Cercle et lancéce premier appel, avec la signature collective, sans illusion, car je sais par expérience que la presse en général ninsère pas dans ces condi-tions. [] Là-dessus, expulsion de la famille Roussakov de Leningrad, arrestation dAnita. Pascal se sent libéréde tout scrupule et se montre disposé àsigner ce quon voudra. Je ne fais ni une ni deux, je rédige un second papier, le soumetsàla signature de ceux sur qui j’étaisà pr peuès sûr de pouvoir compter et le fais envoyer comme le précé-dentà adresses. [] Je nai pas cherché àcollec-ter le plus possible de signatures, maisà au sortir plus tôt un appel.»Dans la suite de cette lettre, Souvarine insiste particulièrement sur le rôle néfas-te des personnalités influencées par le stalinisme : «Nous devons nous exprimer comme nous lenten-dons et, en communistes, compter sur la contagion de lexemple. Si nous naboutissons pas, nous aurons tout de même fait notre devoir. Cela nem-pêche pas dagir au mieux dans la coulisse pour arriveràune solution favorable, mais aucune action en coulisse naura deffet sans lappui dune cam-pagne publique. Le scandale, cest que les soi-disant amis de V. S.naient rien fait depuis deux mois, alors quils ont des moyens, des relations, de lin-fluence. [] Son quils renoncentà quoi faire gez
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