Séance inaugurale

Laisney

Description

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1 COURS MAGISTRAL (LEA). FRANÇAIS. LAISNEY. VLLEXF09. LUNDI 9-10 H. Séance introductive (1). Qu'est-ce qu'un « génie littéraire » ? I MODALITES 1. Thème Ce CM est un cours de culture générale, centré sur la littérature européenne, plus particulièrement, sur dix de ses plus grands représentants, tous siècles et pays confondus. On abordera ainsi, à raison d'un auteur par séance, dix figures qui ont marqué l'histoire littéraire occidentale.

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Sujets

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Extrait

C OURS MAGISTRAL (LEA).F RANÇAIS .L AISNEY .VLLEXF09.L UNDI 9-10 H . Séance introductive (1). Qu’est-ce qu’un« génie littéraire » ? I MODALITES 1. Thème Ce CM est un cours de culture générale, centré sur la littérature européenne, plus particulièrement, sur dix de ses plus grands représentants, tous siècleset pays confondus. On abordera ainsi, à raison d’un auteur par séance, dix figures qui ont marqué l’histoire littéraireoccidentale. ECRIVAIN DATEPAYSŒUVRE(S) e H OMÈRE  9Grèceav J.C.L’IliadeetL’Odyssée D ANTE  1265-1321ItalieLa divine Comédie C ERVANTÈS Espagne 1557-1615Don Quichotte S HAKESPEARE Angleterre 1564-1615Roméo et Juliette Le Marchand de Venise Hamlet S ADE  1740-1814FranceLes Cent Vingt Journée de Sodome La Philosophie dans le Boudoir G OETHE  1749-1832AllemagneLes Souffrances du jeune Werther Faust H UGO  1802-1885FranceLes Contemplations Les Misérables T OLSTOÏ  1828-1910RussieGuerre et Paix K AFKA Tchécoslovaquie 1883-1924Le Procès Le Château J OYCE  1882-1941IrlandeUlysse 2. Objectif: Ce CM n’est pasun cours de littératurestricto sensu(étude technique des textes), ni un cours de langue (traduction de littératures étrangères), ni un cours visant à approfondir un aspectméconnu de l’œuvre ou de la vie d’un écrivain. Ce cours se donne pour seule ambition de fournir des connaissances de base (biographiques et textuelles) sur des personnalités et desœuvres relevant de la «culture générale»… En d’autres termes, l’objectifvisé est de délivrer uncompendium–éléments essentiels–de tout ce qu’onestcensé savoir

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sur Shakespeare, Tolstoï, Joyce, etc. Dans l’idéal, à l’issue des onze séances, l’étudiant devrait être capablede répondre spontanémentà des questions telles que: «Quand a été écritl’Odyssée? »,« QueraconteDon Quichotte? », «Que signifie l’expressionkafkaïen? ». On peut s’interroger sur «l’utilité»d’un tel cours dansle cadre du L.E.A., formation qui vise, en principe, à un usage utilitaire (et non littéraire) des langues. «Qu’est-ce quecela va m’apporterprofessionnellementde savoir ce que Goethe a écrit? »On pourrait répondre (sur le mode défensif) que ce cours est fondé en légtimité dans la mesure où il aborde les langues étrangères par le biaisd’auteurs écrivant, qui en langue allemande (Goethe et Kafka), qui en langue anglaise (Shakespeare, Joyce), qui en italien (Dante), qui en espagnol (Cervantès), qui en russe (Tolstoï), etc. Maiscette réponse n’est ni suffisante, ni satisfaisante.La vérité est que l’hommecontemporain, aspiré d’un côté par la vie professionnelle, absorbéde l’autrela spirale médiatique, parmanque de culture. Or cette culturen’est pas seulementvitale pourl’individuprivé, elle est également crucialepour l’acteur social, en ce sens que la société–on l’oublie trop souvent–est construite sur un socle devaleurs collectivesque les écrivains dont nous allons parler ont largement contribué à installer. Nous aurons l’occasion d’y revenir…Gardons à l’esprit, pour le moment,que l’on ne saurait être un «homme complet» sans posséder cette culture fondamentale, que véhiculent depuis des siècles, les chefs-d’œuvre littéraires du monde occidental. 3. Modalités: Les séances sont au nombre de dix. Il est vivement recommandé d’y assister régulièrement pour réussir l’évaluation. Celle-cis’effectuera sous la forme d’un QCM complexe.Vingt questions très précises seront posées, à laquelleil sera demandé à l’étudiant de répondreen choisissant UNE possibilité parmi les quatre proposées. Exemple : 1.A QUEL GENRE APPARTIENT LA PIÈCE H AMLET ? □.Hamletest une tragédie en vers. □.Hamletest une tragi-comédie en prose. □.Hamletest un drame lyrique en prose. □.Hamletest une tragédie en vers mêlée de prose. e L’évaluation aura lieu lors de la 12pour les étudiants en présentiel. séance (Pour les étudiants en dérogatoire et COMETE, elle aura lieu durant la période des examens) ***

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II. INTRODUCTION 1.Qu’est-ce qu’un «génie littéraire » ? Interrogeons-nous, pour commencer, sur les notions de «littérature universelle », de « chef-d’œuvre mondial», de « génie transéculaire». Qu’est-ce qu’un écrivaingénial? Qu’est-ce qu’un chef-d’œuvre qui traverse les âges? A quoi reconnaît-on un géant littéraire d’un écrivain talentueux? Ces questions recouvrent celle du bien-fondé de notre sélection: comment légitimer cette pléiade de dix écrivains ? Pourquoi ces auteurs figurent-ils au «top ten», et pas d’autres? Pourquoi Cervantès et pas? Pourquoi Goethe et pas Marc Lévy Guillaume Musso? Pourquoi Homère et pas Nathalie Nothomb? Pourquoi Tolstoï et pas Stephen King ? Et même : Pourquoi Hugo et pas Maupassant ? Pourquoi Sade et pas Rousseau ? Il y a une part d’arbitraire dansnotrechoix qu’il serait malhonnête de dissimuler… D’autres noms: en auraientpu aussi bien être joints à la liste premier lieu, en France: Rabelais, Molière, Balzac, Baudelaire, Flaubert, Mallarmé, Proust, Céline. Et à l’étranger: Hemingway (Etats-Unis), Faulkner (Etats-Unis), Tagore (Inde), Cao Xueqin–l’auteur duRêve dans le Pavillon rouge –Borges (Argentine), Mahfûz (Egypte), Gibran Khalil Gibran (Chine), (Liban), Léopold Sédar Senghor (Sénégal), Mishima (Japon), Ibsen (Norvège), Strindberg (Suède), Conrad (Angleterre), etc. Certaines femmes de lettres auraient également mérité leur place dans ce corpus : Virginia Woolf, George Sand, Jane Austen, Mme de Sévigné, Marguerite Duras… Au-delà de l’arbitraire,il existe des raisonsobjectivesde considérer que les écrivains retenus appartiennent à la « caste supérieure » des génies littéraires, à cette catégorieà partdes créateurs hors pair. Pourquoi ? Cela tient à plusieurs raisonsque l’on peut ramener àconcepts :monumentalité, cinqradicalité, originalité,universalité,séminalité (ou fécondité). Avant de définir ces cinq critères, faisons un détour par Hugo.L’auteur desMisérables, dans un ouvrage consacré à Shakespeare, a écrit un chapitre intitulé «les Génies», dans lequel il fait une listed’écrivains, différentede la nôtre, il va sans dire– etpour cause, il la réalise en 1864... Or voici la définition qu’il propose du génie: «Comme l’eau qui, chauffée à cent degrés, n’est plus capable d’augmentation calorique et ne peut s’élever plus haut, la pensée humaine atteint dans certains hommes sa complète intensité. [Suit une liste de 13 noms où l’on retrouve: Dante, Cervantès et Shakespeare, à côté de Beethoven et Michel-Ange] Tous ces hommes, poursuit-il, marquent les cents degrés du génie.[…]Les génies sont une dynastie[…].Chacun d’eux représente toute la somme d’absolu réalisable à l’Homme. ».

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2. Les cinq critères du génie a. Monumentalité. Un point commun à tous ces écrivainsréside d’aborddans le caractère monumental de l’œuvre. Monumental, ici, n’est pas synonyme de gros (la grosseur d’une œuvre n’est pas un critèresuffisant–à ce titre-là, Dumas, avec ces cents volumes, figurerait en tête des génies). Monumental renvoie plutôt à l’idée de« grandiose ».L’Iliade et l’Odyssée, Don Quichotte, La Divine Comédie, Guerre et Paix, les pièces de Shakespeare,Ulysse, l’œuvre poétique de Hugo, impressionnent par la matière que ces livres brassent et embrassent. Le lecteur est, face à eux, comme le croyant devant les livres saints (Bible, Coran, Talmud), tétanisé, paralysé, en un mot :écrasé. b. Originalité. La seconde particularitédes œuvres génialesse rapporte à leur absolue nouveauté. Homère ouvre une nouvelle ère pour la littérature. Dante invente l’enfer et le paradis, jusqu’alors privésd’images (un nouvelimaginaire s’origine là). Cervantès révolutionne notre manière de raconter une histoire (on peut dire qu’ilinventeroman). Shakespeare fait exploser les cadres étroits du le théâtre. Sade nous révèle l’univers du mal.est le premier à concilier Goethe raison et passion, à conjuguer classicisme et romantisme. Hugo, poète visionnaire, devient un phare pour toute sa génération. Tolstoï pousse la maîtrise du roman jusqu’àla perfection. Kafka nous fait pénétrer, par la fiction, dans le labyrinthe du monde moderne. Joyce enfin se livre à des expériences uniques et totalement déroutantes sur la langue. Bref, avec ces écrivains d’exception, l’histoire dela littérature et de la pensée fait un pas de géant. Ceux qui les entourent (disciples, épigones, admirateurs, etc.) se nourrissent de leur œuvre,sans pouvoir les égaler. c. Radicalité. Le propre du génie, c’est qu’il va« plus; qque les autresloin »u’il s’aventurelà où on ne pensait pasqu’ilfûtpossible d’aller. Le génie ne connaît pas de limites. C’est l’homme de ladémesure. Raison pour laquelle les œuvres de nos génies ont ému, voire choqué, leurs contemporains. Tous ont publié au péril de leur vie, à tout le moins, en ont sacrifié le confort. Dante, Joyce et Hugo, pour avoir franchi les bornes de la décence, ont connul’exil. Sade a été embastillé. Kafkaa souffert l’ostracisme familial et social. Dans leur vie comme dans leurs livres, ces «hommes-océan »(Hugo) ont coupé les ponts avec la normalité, pour mieux explorer les confins de l’impossible… d. Universalité.

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La radicalité ne suffit pas àlaisser une trace dans l’histoire de l’Humanité. Il faut encore avoir le don de créer des «figures de pensée » dans lesquelles chacun puissese reconnaître, s’identifier. Nos géniesont inventé des types et des mythesuniversels. Avec le personnage d’Ulysse, Homère peintl’homme épris d’aventures, qui sommeille en chacun de nous. Tolstoï crée une triade inoubliable avec le Prince André Bolkonsky, Natacha Rostov et Pierre Bézoukhov. Avec Werther, Goethe invente le type del’amant suicidaire.Shakespeare accouche d’une dizaine d’être légendaires: Hamlet, Roméo, Juliette, Othello, Falstaff, Shylock, etc. Signe évident du sceau que nos auteurs ont imprimé à la pensée universelle, plusieurs adjectifs, dérivés de leur nom, passent dans le langage courant: homérique, dantesque, shakespearien, sadique, kafkaïen, etc. e. Séminalité Ces œuvresont aussi un pouvoir fécondantque n’ont pas d’autres œuvres plus ternes… Lapreuve de cettefécondité, c’est que nos génies s’inspirent les uns des autres, dialoguent les uns avec les autres: Hugo rend hommage à Shakespeare en lui consacrant un essai. Joyce réécritl’Odysséedans son romanUlysse. Le comique de Cervantès refait surface dans les romans de Kafka. Les œuvres de Sade font revivre, en régime athée, l’Enferde Dante. Dans la peinture des épisodes guerriers et amoureux,Guerre et Paixest animé d’un souffle shakespearien. Cette séminalité est telle qu’elle touche les autres arts :on ne compte plus les opéras, les pièces musicales, les tableaux, les sculptures, les films, inspirés des oeuvres de Homère, Shakespeare, Dante, etc. C ONCLUSION . Pour prendre conscience de l’apport de ces génies, il faut imaginer ce que serait le mondesans eux. Hugo, Goethe, Tolstoï, Joyce, Kafka–pour nous en tenir aux écrivains «modernes »–n’ont pas seulement révolutionné l’histoire de la littérature,ils ont aussi, plus profondément, bouleversé nos catégories de pensée, nous permettant ainsi de voir le monde autrement, de mieuxl’appréhender, de mieux le domestiquer. Tous ces hommes sont, pour reprendre une formule de Camille Mauclair, des «condensateurs de vérités futurs ». _________

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