La Corse - article ; n°40 ; vol.8, pg 304-329
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Description

Annales de Géographie - Année 1899 - Volume 8 - Numéro 40 - Pages 304-329
26 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1899
Nombre de lectures 97
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Friedrich Ratzel
La Corse
In: Annales de Géographie. 1899, t. 8, n°40. pp. 304-329.
Citer ce document / Cite this document :
Ratzel Friedrich. La Corse. In: Annales de Géographie. 1899, t. 8, n°40. pp. 304-329.
doi : 10.3406/geo.1899.6121
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/geo_0003-4010_1899_num_8_40_6121304
II. — GÉOGRAPHIE RÉGIONALE
LA CORSE
ÉTUDE ANTHROPOGÉOGRAPHIQUE
Aux abords de 1880, à l'époque où je portais en tête l'idée de mon
Anihropogéographie, je me rencontrais souvent, dans la maison de
Moritz Wagner, avec Gregorovius, dont la « Corsica » m'avait fourni
plusieurs exemples intéressants sur l'importance historique des îles.
L'esprit synthétique de tel que le montrent toutes ses
études de voyage, excellait aux considérations anthropogéographiques
conçues dans le sens de l'ancienne « philosophie de l'histoire ». Il
estimait à cette époque que ce serait un beau sujet d'étude que de faire
un jour la monographie de la Corse au point de vue du rôle qu'a joué
dans son histoire sa nature insulaire; c'était en quelque sorte un
exemple type de ce qu'une île peutêtre et de l'action qu'elle peut avoir
en histoire.
Deux séjours assez prolongés en Corse, en 1898 et en 1899, me four
nirent l'occasion de tenter la réalisation de cette idée. Au moment où
je présente au public géographique quelques faits et quelques aperçus
sur la géographie de l'île de Corse, je regarde comme un devoir d'adres
ser à Gregorovius un souvenir reconnaissant : je lui ai dû, au temps de
nos entretiens, plus d'une idée suggestive, et son nom, aujourd'hui
encore, est une recommandation pour les Allemands auprès de tout
Corse cultivé; d'autre part je dois rendre hommage aux Corses et aux
Français du continent, pour l'accueil cordial qu'ils m'ont toujours fait.
I. — SITUATION ET ÉTENDUE
La Corse, située entre 41° 22' et 43° ť lat. N., est la plus septen
trionale des grandes îles de la Méditerranée; elle forme, par rapport
à l'alignement de la Sicile, de la Sardaigne et des Baléares, comme un
ouvrage avancé tournant sa pointe vers le N. Elle se relie d'ailleurs à
cet alignement par une élévation sous-marine, qui ne comporte pas,
entre la Sardaigne et la Corse, de profondeurs supérieures à 100 m.,
ainsi que par un groupe de petites îles (Cavallo, Lavezzi) jetées dans
le détroit de Bonifacio. Au Nord et à l'Ouest de l'île font face de
grandes profondeurs (jusqu'à 3 000 m. environ). A ГЕ., au contraire,
entre la Corse et Livourne, on ne trouve pas de fonds supérieurs à CORSE. ÉTUDE AN THROPO GÉOGRAPHIQUE. 305 LA
200 m. ; ils s'abaissent d'ailleurs rapidement vers le S., jusqu'à 1 000 m.
dans le détroit de Cervione. Mais ici encore les îles de l'archipel tos
can révèlent d'étroits rapports, tant par leur proximité que par la
structure de leur sol. La Sardaigne n'est séparée de la Corse que par
un détroit de 12 km. On voit, de la citadelle de Bonifacio, les maisons
de la côte sarde. De plus, la Sardaigne, par sa composition géologique
et par les lignes de son relief, est un pendant de la Corse. Entre la
Corse et la Toscane, il n'y a guère, d'autre part, que 80 kilomètres de
mer. Ainsi la Corse offre de la proximité et de la parenté avec deux
portions du sol italien. A ces faits s'ajoutent d'autres concordances.
La Corse et la Sardaigne témoignent leur parenté par l'identité
parfaite de direction de leurs axes longitudinaux; toutes deux forment
avec l'axe de la presqu'île apennine un angle de o5°. Ainsi figurent-
elles en avant de l'Italie une sorte de muraille insulaire, qui sépare la
mer Tyrrhénienne de la moitié espagnole de la Méditerranée occi
dentale. De plus, les petites îles contribuent à unir l'Italie et la Sar
daigne à la Corse. 11 résulte de là que la mer Tyrrhénienne, fermée
aussi au S. par la Sicile, représente une « mer intérieure », dont l'i
mportance au regard de ces îles fat de tout temps beaucoup plus grande
que la moitié de la Méditerranée tournée du côté de l'Espagne : celle-
ci est par comparaison vis-à-vis d'elle une « mer extérieure ». Ce
n'est pas seulement à cause de son orientation vers l'Italie, mais à
cause de son orientation vers la mer Tyrrhénienne que, de très bonne
heure, la côte orientale de la Corse a été la côte historique, et que
l'opposition entre les deux côtes reste un des faits essentiels de l'his
toire de la Corse. Les désignations de Banda di Dentro et Banda di
Fuori, « En deçà » et « Au delà des monts » ont été inventées pour
marquer ce caractère intérieur de la côte Est.
Cette muraille insulaire s'appuie au N. à l'Italie ; au S., elle s'éloigne
de l'Italie, mais elle s'avance d'autant plus vers le môle que projette
l'extrême Nord de l'Afrique. La Corse se trouve ainsi plus proche de
l'Italie que la Sardaigne. Aujourd'hui encore les vapeurs italiens met
tent six heures de Livourne à Bastia; il leur en faut dix de Civita
Vecchia au Golfe des Aranci.
Les destinées de la Corse et delà Sardaigne ont pris de bonne heure
un cours différent. L'étude de la langue laisse reconnaître que déjà
aux époques qu'on doit qualifier de préhistoriques, la Sardaigne a subi
plus que la Corse, les influences ibères. D'autre part, les antiquités et
l'histoire indiquent une intensité des influences puniques qui ne s'est
jamais manifestée en Corse. On pout appeler la Sardaigne la plus afr
icaine des deux îles : il suffit en ellet de se rappeler sa position. La
■distance de la côte Sud de la Sardaigne à l'égard du point le plus rap
proché du littoral Nord-Africain ne dépasse que d'une quantité insi
gnifiante la distance de Calvi à Nice. De môme, à l'époque romaine,
ANN. DE GÉOG. — VIIIe ANNÉE. 20 306 GÉOGRAPHIE RÉGIONALE.
la Sardaigne primait de beaucoup la Corse; elle est aussi riche en
vestiges de routes et en inscriptions que la Corse en est pauvre.
La première avance de la Sardaigne sur la Corse doit être attribuée
à sa situation, par laquelle elle se trouve faire face à la région où se
déroula l'histoire pré-romaine. Plus tard elle fut également favorisée
par sa proximité plus grande de la Sicile et de la Basse-Italie. Enfin
de tout temps elle attira l'attention de tous les peuples à un plus haut
degré que la Corse. Plus grande, plus riche, plus facile d'accès, elle
attira les conquérants, les marchands, les colons, qui se trouvèrent
du même coup détournés de la Corse. C'est une circonstance digne de
remarque, et qu'on a souvent l'occasion d'observer : tel ou tel pays,
dans une certaine mesure, relègue dans l'ombre un autre pays. Ce fait
ne s'explique pas seulement par des raisons géographiques; il tire
son origine de la tendance que manifestent les peuples à se concent
rer sur un domaine déterminé, auquel ils appliquent ensuite toute
leur activité, au préjudice des régions voisines. Les cas de ce genre se
répètent dans la colonisation de n'importe quelle portion du globe, en
petit comme en grand. Nous voyons pendant des milliers d'années
l'Inde visitée par les arrivants de l'Ouest, tandis que l'Indo-Chine reste
comme dans l'ombre. L'histoire des Antilles montre la concentration
de quelques peuples Européens sur des terres de faible étendue, tandis
que l'Amérique centrale, si importante à tant d'égards, reste négligée.
La riche Alsace sert pour ainsi dire d'abri à la Suisse, en détournant
d'elle les regards de la France. De même la Sardaigne et la Corse :
bien qu'elles semblent aller de pair dans l'histoire ancienne de la Médi
terranée occidentale, la Corse n'apparaît souvent que comme un simple
accessoire de l'autre île, plus grande et plus riche. Leurs destinées se
sont séparées : la Sardaigne a passé au pouvoir de Г Aragon et de
l'Espagne, et plus tard du Piémont ; tandis que la Corse appartint à
Pise et à Gênes. Aujourd'hui encore, les relations de commerce et de
voisinage entre elles sont peu fréquentes. Cependant la Sa

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