Université Marc Bloch Strasbourg II UFR Sciences Sociales Pratiques Sociales et Développement Doctorat Sciences sociales Juliette BORTMANN Entre vocation nécessité et contingence Le cas des professionnels du dispositif de la Protection Judiciaire de la Jeunesse Thèse dirigée par Monsieur le Pr Freddy RAPHAËL

Marc Bloch

Description

Niveau: Supérieur, Doctorat, Bac+8

• exposé

Université Marc Bloch, Strasbourg II UFR Sciences Sociales, Pratiques Sociales et Développement Doctorat Sciences sociales Juliette BORTMANN Entre vocation, nécessité et contingence. Le cas des professionnels du dispositif de la Protection Judiciaire de la Jeunesse Thèse dirigée par Monsieur le Pr. Freddy RAPHAËL

• activité professionnelle sur la personne


• professionnels de la pjj


• homme d'affaire en pleine tractation


• sciences sociales


• régime politique totalitaire


• carrière d'homme politique


• question du sens de l'activité professionnelle


• repères historiques sur le terrain d'enquête

Sujets

• Exposé
• Raphaël
• Sciences humaines et sociales

Informations

• Publié par: profil-feym-2012
• Nombre de lectures: 34
• Langue: Français
• Poids de l'ouvrage: 2 Mo

Extrait

Université Marc Bloch, Strasbourg II
UFR Sciences Sociales, Pratiques Sociales et Développement
Doctorat
Sciences sociales

Juliette BORTMANN


Entre vocation, nécessité et contingence.
Le cas des professionnels
du dispositif de la Protection Judiciaire de la Jeunesse



Thèse dirigée par Monsieur le Pr. Freddy RAPHAËL

Sommaire
Prologue ...................................................................................................3
Partie I : Préalables, Théorie et Problématique........6
Chapitre 1 : Position du chercheur et présentation du sujet........7
Chapitre 2 : Référents théoriques .............................................................................20
Chapitre 3 : Problématique et méthode.....77
Partie II : L'Enquête................................................................................94
Introduction : Repères historiques sur le terrain d'enquête .......................................95
Chapitre 1 : Devenir professionnel de la PJJ… Vocation ou hasard ?....................108
Chapitre 2 : Appartenir à un corps de métier ou à une institution ?.........................125
Chapitre 3 : Quel impact du contexte institutionnel sur les professionnels de la PJJ ?
................................................................................................................................180
Chapitre 4 : Comment les professionnels de la PJJ construisent le dogme éducatif226
Chapitre 5 : Comment les professionnels de la PJJ légitiment le caractère intrusif du
travail social ............................................................................................................267
Partie III : Dénouements.......315
Chapitre 1 : Quelle vocation au départ ?.................................................................317
Chapitre 2 : Les facteurs persuasifs........321
Chapitre 3 : Les facteurs dissuasifs ........................................................................333
Chapitre 4 : La socialisation : perspectives.............................350
Chapitre 5 : Retour aux sources..............................................................................359
Epilogue ...............................................................366
Annexes................................372

Entre vocation, nécessité et contingence.
Le cas des professionnels du dispositif de la Protection Judiciaire de la Jeunesse
2 Prologue
"Il se peut que sa profonde méfiance à l'égard des hommes (le
doute quant à leur droit de décider de son sort et de le juger) ait déjà
joué un rôle dans son choix d'un métier qui excluait qu'il fût exposé
aux regards du public. Celui qui choisit, par exemple, une carrière
d'homme politique fait volontairement du public son juge avec la foi
naïve et avouée de gagner sa faveur. L'éventuelle hostilité de la
foule l'incite ensuite à des performances de plus en plus exigeantes,
de la même façon que Tomas était stimulé par la difficulté d'un
diagnostic.
Il le savait : il y avait deux choses en balance : d'un côté, son
honneur (qui exigeait qu'il ne désavoue pas ce qu'il avait écrit) et de
l'autre, ce qu'il avait pris l'habitude de considérer comme le sens de
sa vie (son travail d'homme de science et de médecin).
Il supposait (correctement) qu'une fois qu'il serait
volontairement descendu au degré le plus bas de l'échelle sociale
(où avaient dû descendre alors des milliers d'intellectuels d'autres
disciplines), la police n'aurait plus prise sur lui et cesserait de
s'intéresser à lui.
1Aussi devint-il laveur de vitres."

Tomas est un personnage de roman, mais son histoire n'appartient,
malheureusement, pas qu'à la fiction. Au sein de la Tchécoslovaquie du début des
années 60, c'est le mérite technique – en l'espèce, ses talents de chirurgien – qui
justifie le statut – ici, de médecin reconnu. Après le Printemps de Prague, le mérite
technique est sérieusement éclipsé par le discours politique. Que se passe-t-il alors
pour lui ? Ayant tenu des propos critiques sur le régime, on lui demande de se
rétracter pour le bon déroulement de sa carrière. Après moult hésitations, il estime

1
Kundera (Milan), L'Insoutenable Légèreté de l'Etre, Paris, Gallimard, 1989, coll. Folio, 475p.,
pp. 263, 258, 276.
Entre vocation, nécessité et contingence.
Le cas des professionnels du dispositif de la Protection Judiciaire de la Jeunesse
3 que le sacrifice de son identité politique serait pire que celui de son identité
professionnelle.

Mais que l'on ne s'y méprenne pas : l'objet de cette recherche n'est pas de
faire le procès du communisme ! Si nous avons ouvert cette thèse sur l'histoire de
Tomas, c'est qu'elle nous paraît édifiante en bien des points et qu'elle nous permet
de poser avec force les questions que nous traiterons ici.

Au sein des sociétés modernes, le travail occupe une place centrale, tant dans
le système économique, que dans les représentations. Faire connaissance avec
quelqu'un implique généralement – et assez rapidement – de savoir ce qu'il fait "dans
la vie". L'activité professionnelle est utilisée pour situer l'individu sur l'échelle sociale,
en termes de prestige et de niveau de revenus. Elle est également supposée nous
renseigner sur ses centres d'intérêts, certains aspects de sa personnalité, de son
mode de vie, etc.

Une petite expérience imaginée pour un enseignement que nous assurions
auprès d'élèves infirmiers illustre bien ce phénomène. Une photo était présentée aux
étudiants. Elle mettait en scène un homme, âgé de 50 à 60 ans, portant costume et
cravate. Assis à un bureau design, il était au téléphone, apparemment très absorbé
par sa conversation. Les étudiants y ont immédiatement vu un homme d'affaire en
pleine tractation. Quand nous leur avons demandé ce qu'ils imaginaient de sa vie
privée, de sa voiture, de son logement, de son sport préféré, de sa boisson favorite,
les étudiants ont répondu à peu près en cœur : il est déjà divorcé une ou deux fois,
remarié à une jeune et jolie femme, il a un appartement en ville et une maison de
campagne, une voiture luxueuse, il joue au golf et, surtout (c'est sur ce point que le
consensus était parfait), il raffole du whisky !

Pourtant, l'histoire de Tomas nous interpelle sur un point : est-ce que l'image
spontanément associée à un laveur de vitres pourra s'appliquer dans son cas ?
Tomas EST-il un laveur de vitres ? Evidemment, les choses sont assez claires car
cette activité est bien perçue comme un accident dans son parcours de vie. Elle est à
replacer dans le contexte particulier d'une censure idéologique. En fait, Tomas est un
Entre vocation, nécessité et contingence.
Le cas des professionnels du dispositif de la Protection Judiciaire de la Jeunesse
4 chirurgien contrarié, réduit à tavailler comme laveur de vitres par un régime politique
totalitaire.

Mais est-ce aussi juste que cela ? Le fait que, dans le cas de Tomas, il soit
évident qu'il n'EST pas laveur de vitres soulève une question encore plus
fondamentale : est-ce qu'un laveur de vitres EST un laveur de vitres ? En d'autres
termes, l'identité individuelle peut-elle se réduire à l'identité professionnelle ? Peut-
elle tout du moins s'y apparenter ?

Pour formuler les choses encore autrement, c'est bien la question du sens de
l'activité professionnelle que nous posons. Que nous dit l'activité professionnelle sur
la personne qui l'exerce ?

Il y a encore une autre question qui est posée à travers celle-ci, c'est celle de
la socialisation. Il est convenu, en sociologie, d'appréhender la professionnalisation
comme une socialisation. On considère alors que l'individu intériorise un certain
rapport au monde et aux autres, un certain nombre de représentations et de
pratiques, véhiculés par son environnement professionnel. Mais, est-ce forcément le
cas ? Travailler dans un environnement signifie-t-il en absorber l'esprit ? Ne peut-on
imaginer que le travail se fasse sans remaniement intérieur ? De façon purement
alimentaire et automatique ? Est-ce qu'il y a des choses que l'i