Pratiques de prévention des risques professionnels
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Le rapport présente un état des lieux des pratiques des entreprises en matière de prévention des risques professionnels et notamment dans les industries de transformation de viandes de volaille.

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Publié le 01 janvier 2011
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Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

61 Janvier 2011
Pratiques de prvention des risques professionnels Thomas Amoss, Sylvie Clrier, Anne Fretel
Rapport de recherche
 
RAPPORT DE RECHERCHE
Pratiques de prévention des risques professionnels
TH O M A SAM O S S E Centre d’études de l’emploi- MSH Ange-Guépin
SY L V I ECE L E R I E R Centre d’études de l’emploi-Tepp (FR 3126, CNRS)-CPN-EVE
AN N EFR E T E L Centre d’études de l’emploi
              
j a n v i e r 2 0 1 1N° 6 1 
ISSN 1629-5684 ISBN 978-2-11-098604-7
Pratiques de prévention des risques professionnels
PRÉAMBULE
Ce rapport présente les résultats d’une recherche menée sur un double front : un front statistique avec les données d’une enquête nationale et un front qualitatif par une enquête détaillée auprès d’entreprises et établissements de transformation de la volaille. Des entretiens, parfois réitérés, ont également été réalisés auprès des contrôleurs de sécurité en région et de quelques médecins du tra-vail. Nous tenons à remercier toutes les personnes qui nous ont reçus et ont su se rendre disponibles malgré la lourdeur de leur emploi du temps. Sans elles, nous n’aurions pu démêler, ou du moins commencer à démêler, la place du risque professionnel et de sa gestion dans des univers productifs toujours complexes même dans les plus petites unités. Leurs noms ainsi que celui de leur entreprise ou établissement ont été modifiés conformément à nos engagements. La double nature des matériaux mobilisés appelant des traitements également spécifiques, nous pré-sentons les résultats de la recherche en deux temps précédés d’une introduction générale dans la-quelle sont exposées les grandes options de la recherche. Le premier temps (partie I) présente et rend compte de l’exploitation statistique des données relatives à la gestion des risques profession-nels dans l’enquêteREPONSEpartie II du rapport présente les2004-2005. De façon symétrique, la données de l’enquête de terrain. Les échanges entre les deux approches ont cependant été bien plus constants que ne le laisse penser ce découpage. Ces échanges ont porté tant sur l’élaboration des hypothèses que sur les perspectives d’exploitation des divers matériaux de la recherche. Une troisième et dernière partie (Synthèse gé-nérale), qui relie les principaux résultats de la recherche aux hypothèses initiales et formalise l’option méthodologique adoptée, tente d’en rendre compte. Les moments et les formes de la colla-boration entre démarches quantitative et qualitative sont précisés comme les apports de cette colla-boration et, parfois, ses impossibilités.
 
       
 
Convention de recherche CEE-Dares n° 4259 (achevée en novembre 2010) en réponse à l’appel à projets :Analyse économique de la prévention des risques professionnels(émis en 2007 par la Dares).
Sommaire
Introduction ................................................................................................................. 7
1. Le schéma théorique ...................................................................................................................... 7 1.1. L’analyse des risques professionnels au cœur d’un « jeu » d’acteurs : coordination et efficacité des modes de régulation ........................................................................................................................... 9 1.2. Les risques professionnels comme résultats d’arbitrages complexes : une économie des risques professionnels. ......................................................................................................................................... 10 1.3. Le risque professionnel comme construction collective : construire les risques professionnels comme « problème » ............................................................................................................................... 11 2. La méthodologie de l’approche empirique ................................................................................ 12 2.1. Sélection des matériaux d’enquête : données sur grand échantillon et observation d’une branche professionnelle ......................................................................................................................................... 12 2.2. Exploitation statistique de l’enquêteREPONSE2004-2005 ............................................................14 2.3. L’enquête de terrain auprès des industries de transformation de la volaille ....................................16
3. Structuration du rapport : deux types de matériau, une même approche ............................. 17
Partie 1 - Pratiques de prévention : une analyse statistique à partir d’une enquête nationale (REPONSE..............................) ................................ 12..... .......... 2004-2005
1. Le repérage des pratiques d’entreprise concernant la prévention des risques professionnels 23
1.1. Les dispositifs de prévention des risques professionnels déclarés dansREPONSE: la construction de catégories de dispositifs ....................................................................................................................23 1.2. Les pratiques d’entreprise en matière de prévention des risques professionnels, de sécurité et de conditions de travail : indices d’intensité et classes d’établissement ......................................................29 2. Les facteurs associés aux pratiques et politiques d’entreprise en matière de prévention des risques professionnels ...................................................................................................................... 37 2.1. Des profils socio économiques différenciés ? ..................................................................................38 -2.2. Le lien avec la dangerosité, perçue ou mesurée, du travail .............................................................42 2.3. Le lien avec les relations sociales, du côté des salariés comme des dirigeants .............................48 2.4. Le lien avec la stratégie et la situation économique.........................................................................54 2.5. Le lien avec l’organisation du travail et la gestion des ressources humaines..................................58 3. Trois questions que pose la prévention… .................................................................................. 6 3 3.1. Les bons et mauvais élèves de la prévention des risques professionnels.......................................64 3.2. Quelles marges de manœuvres économiques ?..............................................................................65 3.3. Quelle efficacité de la politique de tarification ? ...............................................................................67 Quelques lignes de conclusion......................................................................................................... 68
Partie 2 - Risques et gestion des risques dans des entreprises de transformation de la viande de volaille .............................................................................................. 71
1. Les riques du métier : pénibilité, risques et responsabilité ...................................................... 78 1.1. Les experts de la santé au travail.....................................................................................................79 1.2. Des salariés et leurs représentants ..................................................................................................86 1.3. Les employeurs et les fédérations patronales ..................................................................................87 1.4. Des risques ambigus pour les entreprises .......................................................................................90 1.5. Une notion de risque professionnel diversement construite mais ouverte à d’autres dimensions...93 2. Les dispositifs mis en œuvre ........................................................................................................ 95 2.1. Quels dispositifs pour quelles entreprises .......................................................................................95 2.2. Des natures différentes de dispositifs ............................................................................................109 2.3. Les jeux de la tarification ................................................................................................................116 2.4. Les (gros) défauts du meilleur élève ..............................................................................................123
 
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Conclusion ...................................................................................................................................... 127
Synthèse générale .................................................................................................... 133 
1. Plusieurs voies de prévention pour une diversité de modes de gestion des risques professionnels ................................................................................................................................. 133 
1.1. Un ordonnancement des dispositifs de prévention, une typologie des comportements ................133 1.2. Les facteurs associés aux pratiques de prévention .......................................................................134 1.3. Au-delà de la seule politique de tarification, une pluralité de leviers pour l’action publique ..........135
2. Retour sur l’apport croisé des données statistiques et des observations de terrain ............ 137
2.1. L’observation au soutien des statistiques : comment classer et compter les dispositifs de préven-tion ? ...................................................................................................................................................... 137 2.2. Facteurs associés aux pratiques de prévention : points d’accord et de désaccord des observations de terrain et des données statistiques ................................................................................................... 139 2.3. Mise en évidence des apports et limites propres des matériaux statistiques et ethnographiques 140
Conclusion ...................................................................................................................................... 142
Annexe ...................................................................................................................... 143  
 
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INTRODUCTION
 
Ce rapport vise un état des lieux des pratiques concrètes des entreprises en matière de prévention des risques professionnels. Nous cherchons à identifier les déterminants et les enjeux, notamment économiques, pour les acteurs engagés afin de comprendre dans quelle mesure le risque profession-nel se constitue en problème pour les entreprises et de quels arbitrages les dispositifs de prévention résultent.  L’analyse empirique de la situation des établissements en matière de prévention des risques repose sur une exploitation de données statistiques et sur une enquête de terrain approfondie. Le travail statistique exploite l’enquêteREPONSE qui interroge à la fois des représentants de la 2004-2005 direction, des représentants du personnel et des salariés dans près de 3 000 établissements. Elle comporte des questions qui relèvent spécifiquement de la prévention des risquesdocuments éla-borés, dispositifs mis en place, objectifs suivis et négociations tenues en matière de prévention des risques, de sécurité et de conditions de travailont toutes été mobilisées dans l’analyse.qui L’enquête de terrain s’est portée sur les industries de transformation de viandes de volaille, qui pré-sentent un nombre élevé de troubles musculo-squelettiques (TMS) ; nombre qui ne cesse d’augmenter depuis dix ans. Ces industries ont signé un accord santé-travail en 2007 qui reconnaît en préambule l’importance de l’enjeu sanitaire. Nous avions, avec cette industrie, l’occasion d’examiner la façon dont elle fait face (ou non) aux risques professionnels dans un contexte de risque élargi, puisqu’elle doit également répondre à de fortes contraintes sanitaires qui remodèlent constamment ses normes de production. La menace de grippe aviaire en a été le dernier épisode aigu, qui a accentué les contrôles sanitaires de la viande tout au long de la filière de production. Cette industrie connaît par ailleurs des transformations continues, qu’elles découlent des modifica-tions des habitudes alimentaires, des mouvements internes de cession-concentration, de la montée de la concurrence internationale, de l’émergence des questions d’environnement ou encore de la réduction régulière du nombre d’éleveurs de volailles à l’occasion du renouvellement des généra-tions. Bref, le secteur s’adapte parfaitement à notre souhait de saisir la prévention des risques pro-fessionnels au cœur d’une dynamique productive habitée de conflits, tensions et arbitrages entre objectifs divers et parfois contradictoires.
1. LE SCHÉMA THÉORIQUE
Tel qu’il est conçu en France, le risque professionnel est un risquedel’entreprise, qui est orienté – ou que l’on souhaiterait orienter – vers la prévention par des incitations financières et réglemen-taires. C’est la résultante des spécificités du régime des risques professionnels français fondé sur la responsabilité sans faute de l’employeur, un financement à la charge des entreprises à hauteur du coût des sinistres qu’elles génèrent et qui se veut incitatif à la prévention (Del Sol, Turquet, 2007). La branche « risques professionnels » se particularise donc par la présence de trois types d’acteurs : les entreprises, les salariés et le système assurantiel, ici public, ainsi que par une scission entre le payeur (l’entreprise) et le bénéficiaire (le salarié), situation originale dans le champ de l’assurance. En partant du postulat de l’aversion au risque des agents, l’approche économique cherche à préciser les conditions dans lesquelles les responsables d’entreprise s’engagentex antedans des actions de prévention coûteuses pour réduire la survenue de dommages relatifs à la santé des salariésex post. Ces analyses sont menées en supposant les comportements rationnels et sur la base d’un calcul coût-bénéfice ou, plus explicitement encore, dans une logique de maximisation des profits. Dans ce cadre commun, deux programmes économiques distincts sont proposés : d’une part, l’efficience des efforts de prévention peut être appréciée en fonction de la diminution des coûts globaux qu’ils per-mettent d’obtenir [Geoffard, 2005] ; d’autre part, la décision de mettre en œuvre une politique de
 
Pratiques de prévention des risques professionnels
prévention peut aussi être modélisée en fonction du rapport entre coûts de la prévention et coûts de la non-prévention [Askenazy, 2004b]. Cette seconde formulation ouvre la possibilité d’une prise en compte d’éléments non financiers tels que la dégradation de l’image de l’entreprise, l’aversion des salariés pour des emplois dégradés, des défauts de mobilisation de leur part, etc. Quoi qu’il en soit, la dégradation des indicateurs de santé et de sécurité au travail (Gollac, Volkoff, 1996 et 2000 ; Askenazy, 2004a), le solde négatif de la branche « accidents du travail-maladies pro-fessionnelles » (AT-MP) entre 2002 et 20061des coûts de non-déclaration ou sous-et la progression déclaration supportés par la branche « maladie » (c’est-à-dire la collectivité [Cour des comptes, 2002]) témoignent des limites du système d’incitation à la prévention et réinterroge les leviers du comportement de l’acteur principal « entreprise ». En économie, ces interrogations se convertissent principalement en trois problématiques non exclusives les unes des autres. En premier lieu, on cherche à raffiner le calcul coût-bénéfice par la prise en compte des coûts indirects (éventuellement non financiers), masqués ou cachés des AT-MP, coûts qui sont, volontairement ou non, insuffi-samment considérés par les entreprises : l’absentéisme associé aux conditions de travail dégradées, une régulation rendue complexe de l’organisation, les effets de saturation des marges de manœuvre des salariés, etc. (Pépin, Fauconnier, 2005). En second lieu, on s’interroge sur l’équilibre entre mu-tualisation2 et internalisation des coûts sociaux (envisagée pour les entreprises les plus dange-reuses). Ce type de travaux s’intéresse aux effets pervers des différentes solutions mises en œuvre (transfert possible des risques vers des entreprises plus petites, dont la tarification est fondée sur la mutualisationviala sous-traitance (Askenazy, 20063) et à leurs avantages (réduction de l’aléa mo-ral4 en cas de limitation de la mutualisation). Enfin, l’analyse économique s’est intéressée à l’accentuation des contraintes incitant les entreprises à une meilleure prise en compte des risques professionnels. Souvent conduites à partir de comparaisons internationales avec les pays anglo-saxons (Askenazy, 2006 ; Gallandet aliiles recherches ont notamment examiné l’obligation, 2007), de publicité concernant les résultats en matière de santé et l’amélioration des moyens de police de la sécurité et de la santé au travail. Quelles que soient les différences, parfois substantielles, entre les auteurs, voire leurs divergences, l’approche économique repose sur un ensemble de conventions et de notions sur lesquelles il nous semble intéressant de revenir pour éclairer le comportement des entreprises en matière de préven-tion des risques professionnels. Trois conventions liées ont plus précisément retenu notre attention.
1. L’entreprise est l’acteur principal de la décision (ou non) de préventionselon les coûts et bénéfices attendus. Mais le processus de décision ne tient pas compte du système d’interactions au sein de l’entreprise entre les responsables et les représentants du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT), les syndicats ou les médecins du travail. Il ne considère pas da-vantage les interactions avec des acteurs extérieurs à l’entreprise comme les préventeurs des caisses régionales d’assurance-maladie (Cram), les experts, les réseaux patronaux, les syndicats, etc.
2. L’évaluation des risques professionnels et la décision de mise en place d’actions de préven-tion sont analysées indépendammentdes autres évaluations et décisions que les trois acteurs doi-                                                 1des comptes de la Sécurité sociale (Del Sol, Turquet, 2007).Le retour à l’équilibre est prévu en 2007 par la Cour 2aujourd’hui modulée selon la taille des entreprises. À partir de tarification, c’est-à-dire le degré de mutualisation, est  La 200 salariés (bientôt 150), la tarification est censée s’appliquer à taux réel (ce qui n’est pas réellement le cas, cf.infra). Pour les entreprises de moins de 10 salariés, la mutualisation est complète pour éviter de compromettre la santé économique de ces unités qui ne pourraient supporter les coûts complets d’un accident du travail, surtout en cas de décès. Entre ces deux seuils de taille, la tarification est dite mixte. Au total, les 10 milliards versés par les entreprises ne représenteraient que 50 % du coût réel (Cour des comptes, 2002) et la part de la mutualisation croît constamment depuis 1995, passant de 56 % à cette date à 60 % en 2004 (Del Sol, Turquet, 2007). 3Béatrice Appay et Annie Thébaud-Mony dans les années 1990 pointaient déjà ce risque (Appay, Thébaud-Les travaux réalisés par Mony, 1997). 4Pour l’application de la notion à l’espace de la santé, cf. par exemple Rochaix (1997) et Trontin et Béjean (2001).
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Rapport de recherche du Centre d’études de l’emploi
vent parallèlement assurer. Cela procède d’une large simplification des arbitrages opérés par les acteurs. Un positionnement économique sur le marché ou des décisions sur les prix peuvent pour-tant être perçus comme concurrents d’efforts de prévention. Des politiques publiques, notamment celles concernant l’emploi, peuvent offrir des opportunités (allègement de cotisations sociales) qui brouillent la perception des coûts des dommages de santé. Des actions de prévention peuvent être mises en place pour apaiser un climat social tendu.
3. Une conception du risque que l’on peut définir comme substantialiste: ce risque est supposé exister en soi et n’échapper aux politiques d’entreprise que parce que la mise en œuvre de disposi-tifs de prévention n’est pas rationnelle économiquement, éventuellement dans le cadre d’un modèle à information imparfaite (les décideurs économiques n’étant alors pas à même de se faire une idée juste du coût qu’il représente pour eux). Les constructions collectives dont il fait l’objet d’un point de vue économique et social (procédures d’évaluation mises en œuvre par les entreprises, élabora-tion de dossiers avec avis médicaux par les salariés ou leurs représentants) sont ainsi occultées. Voulant construire une approche plus réaliste des conditions dans lesquelles les entreprises s’engagent (ou non) dans la prévention des risques professionnels, nous avons proposé un triple déplacement par rapport aux analyses économiques existantes que nous venons de restituer briève-ment. Déplacements qui nous situent dans une analyse sociologique de l’économie de la prévention des risques professionnels. Nous analysons ainsi la décision (ou non) de prévention comme inscrite dans un processus dynamique qui fait interagir de nombreux acteurs (1) ; nous cherchons à éclairer les comportements des entreprises en la matière en les articulant à plusieurs dimensions de leur ac-tivité (les dimensions économiques et financières évidemment, mais aussi celles relevant de leur gestion sociale, environnementale et du mode de relation entre partenaires sociaux) (2) ; et nous considérons enfin le risque professionnel comme le résultat de constructions collectives qui ne sont ni toujours achevées, ni toujours cohérentes pour l’ensemble des acteurs engagés (3).
’ ’ ’ 1.1. L analyse des risques professionnels au cœur d un « jeu » d acteurs : coordina-tion et efficacité des modes de régulation
Comme le montre une recherche récente dirigée par Catherine Omnès dans le cadre du programme santé-travail de la MiRe et intituléeLes gens du risque au travail en France auXXe siècle (Join-Lambert, 2005), la prévention des risques mobilise une grande variété d’acteurs. Plus encore qu’aux États-Unis ou en Grande-Bretagne, il semble qu’en France, pays où le cadre légal et les régulations conventionnelles jouent un rôle de premier plan (Coutrot, 1998), on ne puisse faire l’économie d’une prise en compte de l’ensemble des acteurs et des rapports qu’ils entretiennent. Cette ap-proche, qui impose de complexifier le modèle économique standard, nous semble pouvoir être con-duite sans perdre le contact avec l’économie. En effet, les développements récents de la théorie de l’agence, dont Olivier Favereau et Pierre Picard avaient présenté les fondements en 1996, ont déjà bien avancé dans cette voie pour l’analyse du travail, des politiques publiques et de l’assurance. Christian Trontin et Sophie Béjean ont, par exemple, proposé en 2001 une application de cette théo-rie économique à la prévention des accidents du travail, qui semble tout à fait cohérente avec l’approche que nous entendons suivre. Au-delà des acteurs classiquement identifiés dans l’analyse (entreprises, salariés et tiers assureur), nous considérons plusieurs acteurs qui nous semblent souvent occultés et pourtant décisifs : les mé-decins du travail, qui conseillent les chefs d’entreprise, les salariés ou leurs représentants ; les ex-perts préventeurs de la tutelle (par exemple de l’Institut national de recherche et de sécurité-INRS) que les salariés ou les entreprises peuvent solliciter ; les comités d’hygiène, de sécurité et des condi-tions de travail (CHSCT) lorsqu’ils existent5et autres institutions représentatives du personnel. Plus                                                  5 Ils font l’objet d’une obligation légale dans les établissements de plus de 50 salariés. De fait, ils sont présents dans près de trois quarts d’entre eux, une proportion stable entre 1998 et 2004 (Coutrot, 2001 et 2007).
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