L’enfant maudit
101 pages
Français

L’enfant maudit

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Description

La Comédie humaine - Études philosophiques - Tome II. Quinzième volume de l'édition Furne 1842. Extrait : La parole du comte retentit dans le sein de la jeune femme alors enceinte 

Informations

Publié par
Nombre de lectures 25
EAN13 9782824710129
Langue Français

Extrait

HONORÉ DE BALZA C
L’EN F AN T MA U DI T
BI BEBO O KHONORÉ DE BALZA C
L’EN F AN T MA U DI T
Un te xte du domaine public.
Une é dition libr e .
ISBN—978-2-8247-1012-9
BI BEBO OK
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Le te xte suivant est une œuv r e du domaine public é dité
sous la licence Cr e ativ es Commons BY -SA
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V ous de v ez aribuer l’ o euv r e aux différ ents auteur s, y
compris à Bib eb o ok.L’EN F AN T MA U DI T
MAD AME LA BARON N E JAMES RO T HSCH I LD
A
n
1CHAP I T RE I
   d’hiv er et sur les deux heur es du matin, la comtesse
Je anne d’Hér ouville épr ouva de si viv es douleur s que , malgréP son ine xp érience , elle pr essentit un pr o chain accouchement  ;
et l’instinct qui nous fait esp ér er le mieux dans un chang ement de p
osition lui conseilla de se mer e sur son sé ant, soit p our étudier la natur e de
souffrances toutes nouv elles, soit p our réflé chir à sa situation. Elle était
en pr oie à de cr uelles craintes causé es moins p ar les risques d’un pr
emier accouchement dont s’ép ouvantent la plup art des femmes, que p ar
les dang er s qui aendaient l’ enfant. Pour ne p as é v eiller son mari couché
près d’ elle , la p auv r e femme prit des pré cautions qu’une pr ofonde
terr eur r endait aussi minutieuses que p euv ent l’êtr e celles d’un prisonnier
qui s’é vade . oique les douleur s de vinssent de plus en plus intenses,
elle cessa de les sentir , tant elle concentra ses for ces dans la p énible
entr eprise d’appuy er sur l’ or eiller ses deux mains humides, p our fair e
quitter à son cor ps endolori la p ostur e où elle se tr ouvait sans éner gie . A u
2L’ enfant maudit Chapitr e I
moindr e br uissement de l’immense courte-p ointe en moir e v erte sous
laquelle elle avait très-p eu dor mi depuis son mariag e , elle s’ar rêtait comme
si elle eût tinté une clo che . For cé e d’épier le comte , elle p artag e ait son
attention entr e les plis de la criarde étoffe et une lar g e figur e basané e dont
la moustache frôlait son ép aule . Si quelque r espiration p ar tr op br uyante
s’ e xhalait des lè v r es de son mari, elle lui inspirait des p eur s soudaines
qui ravivaient l’é clat du v er millon rép andu sur ses joues p ar sa double
ang oisse . Le criminel p ar v enu nuitamment jusqu’à la p orte de sa prison
et qui tâche de tour ner sans br uit dans une impito yable ser r ur e la clef
qu’il a tr ouvé e , n’ est p as plus timidement audacieux. and la comtesse
se vit sur son sé ant sans av oir ré v eillé son g ardien, elle laissa é chapp er un
g este de joie enfantine où se ré vélait la touchante naïv eté de son
caractèr e  ; mais le sourir e à demi for mé sur ses lè v r es enflammé es fut pr
omptement réprimé  : une p ensé e vint r embr unir son fr ont pur , et ses longs
y eux bleus r eprir ent leur e xpr ession de tristesse . Elle p oussa un soupir et
r eplaça ses mains, non sans de pr udentes pré cautions, sur le fatal or eiller
conjug al. Puis, comme si p our la pr emièr e fois depuis son mariag e elle se
tr ouvait libr e de ses actions et de ses p ensé es, elle r eg arda les choses
autour d’ elle en tendant le cou p ar de lég er s mouv ements semblables à ceux
d’un oise au en cag e . A la v oir ainsi, on eût facilement de viné que
naguèr e elle était tout joie et tout folâtr erie  ; mais que subitement le destin
avait moissonné ses pr emièr es esp érances et chang é son ing énue g aieté
en mélancolie .
La chambr e était une de celles que , de nos jour s encor e , quelques
concier g es o ctog énair es annoncent aux v o yag eur s qui visitent les vieux
châte aux en leur disant  : ―  V oici la chambr e de p arade où Louis X I I I
a couché . D e b elles tapisseries g énéralement br unes de ton étaient
encadré es de grandes b ordur es en b ois de no y er dont les sculptur es
délicates avaient été noir cies p ar le temps. A u plafond, les soliv es for maient
des caissons or nés d’arab esques dans le style du siè cle pré cé dent, et
qui conser vaient les couleur s du châtaignier . Ces dé corations pleines de
teintes sé vèr es réflé chissaient si p eu la lumièr e , qu’il était difficile de v oir
leur s dessins, alor s même que le soleil donnait en plein dans cee chambr e
haute d’étag e , lar g e et longue . A ussi la lamp e d’ar g ent p osé e sur le
mante au d’une vaste cheminé e l’é clairait-elle alor s si faiblement, que sa lueur
3L’ enfant maudit Chapitr e I
tr emblotante p ouvait êtr e comp aré e à ces étoiles nébuleuses qui, p ar
moments, p er cent le v oile grisâtr e d’une nuit d’automne . Les mar mousets
pr essés dans le marbr e de cee cheminé e qui faisait face au lit de la
comtesse , offraient des figur es si gr otesquement hideuses, qu’ elle n’ osait y
ar rêter ses r eg ards, elle craignait de les v oir se r emuer ou d’ entendr e un
rir e é clatant sortir de leur s b ouches bé antes et contour né es. En ce
moment une hor rible tempête gr ondait p ar cee cheminé e qui en r e disait
les moindr es rafales en leur prêtant un sens lugubr e , et la lar g eur de son
tuyau la meait si bien en communication av e c le ciel, que les nombr eux
tisons du fo y er avaient une sorte de r espiration, ils brillaient et
s’éteignaient tour à tour , au gré du v ent. L’é cusson de la famille d’Hér ouville ,
sculpté en marbr e blanc av e c tous ses lambr e quins et les figur es de ses
tenants, prêtait l’app ar ence d’une tomb e à cee espè ce d’é difice qui
faisait le p endant du lit, autr e monument éle vé à la gloir e de l’hy méné e .
Un ar chite cte mo der ne eût été fort embar rassé de dé cider si la chambr e
avait été constr uite p our le lit, ou le lit p our la chambr e . D eux amour s
qui jouaient sur un ciel de no y er or né de guirlandes auraient pu p asser
p our des ang es, et les colonnes de même b ois qui soutenaient ce dôme
présentaient des allég ories mythologiques dont l’ e xplication se tr ouvait
ég alement dans la Bible ou dans les Métamor phoses d’O vide . Otez le lit,
ce ciel aurait ég alement bien cour onné dans une église la chair e ou les
bancs de l’ œuv r e . Les ép oux montaient p ar tr ois mar ches à cee
somptueuse couche entouré e d’une estrade et dé coré e de deux courtines de
moir e v erte à grands dessins brillants, nommés ramages , p eut-êtr e p ar ce
que les oise aux qu’ils r eprésentent sont censés chanter . Les plis de ces
immenses ride aux étaient si r oides, qu’à la nuit on eût pris cee soie p our
un tissu de métal. Sur le v elour s v ert, or né de crépines d’ or , qui for mait
le fond de ce lit seigneurial, la sup er stition des comtes d’Hér ouville avait
aaché un grand cr ucifix où leur chap elain plaçait un nouv e au buis
bénit, en même temps qu’il r enouv elait au jour de Pâques fleuries l’ e au du
bénitier incr usté au bas de la cr oix.
D’un côté de la cheminé e était une ar moir e de b ois pré cieux et
magnifiquement ouv ré , que les jeunes marié es r e ce vaient encor e en pr o vince le
jour de leur s no ces. Ces vieux bahuts si r e cher chés aujourd’hui p ar les
antiquair es étaient l’ar senal où les femmes puisaient les trésor s de leur s
4L’ enfant maudit Chapitr e I
p ar ur es aussi riches qu’élég antes. Ils contenaient les dentelles, les cor ps
de jup e , les hauts cols, les r ob es de prix, les aumônièr es, les masques,
les g ants, les v oiles, toutes les inv entions de la co queerie du seizième

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