Le " Dr Strangelove " de la psychanalyse
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"Why does the Dr. Strangelove of psychoanalysis, remain the darling of the media and publishers of France.?

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Langue Français

Extrait

Patrick Valas - Le Kâbhydont
Il a la trentaine, il est détendu,voire jovial. Je lui trouve une gueule plutôt sympathique, mais un peu insolente. Avec un large sourire, sans doute pour appâter « le pigeon » qu’il verrait en moi (c’est mon sentiment) il annonce la couleur dès le premier instant, au premier rendez-vous.
« Je vous préviens tout de suite je suis un pervers polymorphe »
Cette façon de se présenter, comme l’expérience le prouve, est presque le stigmate même de la perversion, un névrosé peut se faire peur en faisant semblant de se croire vraiment fou mais il n’avoue un trait de perversion qu’exceptionnellement et en général beaucoup plus tardivement.
je lui demande s’il pense ne pas avoir dépassé l’âge d’un enfant de 5 ans ou bien s’il a retrouvé cet âge d’or après une longue ascèse.
Le sourire se îge, il garde un long silence.
. Il me répond que dès l’enfance il s’est découvert un certain goût pour les choses sexuelles et que depuis il aurait « tout » essayé :
« Le sado, le maso, le trio, le pédalo et le travelo » ce sont ses propres termes qu’il avance non sans une certaine satisfaction. Les yeux sont égrillards, humides de jubilation, guettant un signe complice de mon regard. Un sourire entendu plisse à nouveau ses lèvres. « En somme » lui dis-je « vous êtes une sorte d’explorateur de la Chose, et d’après ce que vous me dïtes vous faïtes cela très sérieusement, la preuve vous venezregarderun psychanalyste à sonoice»
Il le conîrme, mais apparemment il ne semble pas avoir saisi la nuance de mon propos.
Porte Dauphine, il a mâté derrière les buissons.
Dans les couloirs du métro, il a fait coucou à des lycéennes eFarouchées en leur montrant « l’oiseau »
Il a même donné dans le ciné porno en participant comme îgurant actif au tournage d’un îlm classé X, l’un des premiers du genre en rance, qui a connu son heure de gloire et dont le titre est à lui seul tout un programme,Le sexe quI parle.
« Vous êtes un type épatant et vraiment dans le coup » lui dis-je pour le relancer. Il est vrai que Mai 68 est déjà oublié, nous sommes en rance dans les années 1975-1978 dites « Giscard » qui lui-même se présentait alors comme l’homme le plus intelligent du moment ayant libéré le pays de ses mœurs étriquées.
Mon visiteur dans le désespérant conformisme ambiant pense quand même avoir fait un parcours accidenté, et maintenant son attention est portée sur toutes les femmes qui sont des êtres « vraiment formidables et qui méritent le détour »
Cependant à la sobriété du tête-à-tête il avoue préférer d’autres « cabrioles » cela étant dit avec beaucoup de modestie.
« Vous semblez vraiment heureux, et votre vie est plutôt bien orientée, pourquoi viendriez-vousparlerà un psychanalyste ? » lui dis-je en appuyant sur la pédale.
« Il y a quelque chose qui ne va pas, faire l’amour m’épuise, et je préfère le spectacle des couples complaisants qui s’oFrent au regard, vous n’allez pas me faire croire que vous-même n’êtes jamais allé voir ça Porte Maillot, tout le monde y va, ça commence vers 23h, Allée du Bois de Boulogne »
Autrefois il aimait bien se regarder baisant dans les miroirs, puis se îlmer avec une caméra vidéo, enîn il a estimé plus jouissif et moins fatiguant de regarder les autres.
Ce qui le fait vraiment jouir, lui inspire sa vocation :
Mettre en présence, en des mises en scène scabreuses qu’il agence, des gens complaisants qui se surprennent d’êtres découverts par d’autres là où ils ne s’y attendent pas.
A la force du poignet, c’est le cas de le dire, il s’est taillé sur le tas une réputation très enviée, selon lui, de maïtre en libertinage.
Il peut lui arriver d’organiser des cérémonies d’initiation où participeraient plus de 300 impétrants, réglant leurs ballets tournants en des mises en scène de plus en plus sophistiquées (Rappelons que le récent livre de Catherine Millet y fait allusion.) « Vous verriez ça » dit-il en jubilant, il est au bord de m’inviter. J’interromps ce premier entretien sur ce point, il est ravi et accepte avec plaisir un nouveau rendez-vous.
Quelques remarques préliminaires :
Ces récits détaillés montrent bien qu’il vise moins la jouissance sexuelle dans sa réalisation que la jouissance de l’Autre présentiîée par des femmes qu’il aime en les livrant à des inconnus. Il cherche à provoquer l’angoisse, la honte, le dégoût chez ses victimes plus ou moins consentantes. Mais cela reste dans les limites du jeu.
Il apparaït bien ici que dans la mise en exercice de son fantasme il se place en position d’objet (regard et voix) visant la J.A. dans la division subjective qu’il fait supporter à la multitude des autres qu’il entraïne dans son jeu. On peut le qualiîer de sujet pervers. C’est un diagnostic posé en référence à la structure et non pas du point de vue seulement de la phénoménologie. Les névrosés peuvent agir leurs traits de perversions de la même façon à ceci près que dans leurs fantasme ils restent toujours en position de sujet interdit, simulant seulement avec beaucoup d’inhibition l’objet. D’où la nécessité pour eux d’être
accompagnés par cet initiateur averti que peut être un vrai pervers qu’ils admirent. Ce dernier jouissant sans réserve du prestige qu’il reçoit des autres. Un couplage se forme entre le pervers et son partenaire dont la qualité essentielle, aux yeux du pervers, c’est qu’il ne soit pas consentant. Ce qui lui donne toute sa valeur c’est d’être forcé. Les « Professionnelles prostituées recrutent leurs clients chez les névrosés ou les psychotiques qui eux demandent à subir des mutilations réelles. Le vrai pervers lui reste dans la dimension du comique, il fait semblant.
Une première question se pose ici : à quoi peut lui servir le psychanalyste ? D’autant plus qu’ un tel sujet ne semble pas se plaindre d’un symptôme. Reste que l’essentiel n’est pas non plus de poser un diagnostique de structure mais de faire apparaïtre quel désir l’anime ? C’est la question préalable pour tout sujet avant l’entreprise d’une cure. A cet égard il n’y a pas lieu de refuser une psychanalyse à un sujet pervers car contrairement à une idée reçue un tel sujet n’est pas nécessairement un cynique ou une canaille, aussi obscène puisse t-il se montrer parfois.
Deuxième séance.
En fait un grain de sable est venu enrayer la machinerie si ecace qu’il avait mise en place :
Toutes les femmes l’adorent, sauf une, il l’a rencontré, elle l’a torpillé.
Elle se prénomme Mitan, il est fou amoureux d’elle. Il laisse tomber ses activités festives. Elle fait mi-temps pour lui. Aveuglé, emporté par son élan, il commet l’impair de l’inviter à l’une de ses partouzes, espérant en faire « La Grande Prêtresse du Tout-Paris »
Elle refuse net et le laisse tomber illico sur cette sentence « Tu es un mec bidon »
Sa duplicité démasquée le fait ricaner. Pour un temps seulement, car la perte de l’objet vraiment aimé le plonge dans un malaise et une angoisse insupportables.
« Menteur, oui à la rigueur, sale mateur aussi, mais surtout pas amateur »
Il se considère comme un professionnel tout-terrain de la conduite sexuelle. Son être de semblant s’eFondre et son monde avec. A cause d’une femme qu’il aime, délogé de sa position d’objet agalmatique, il est renvoyé à sa division subjective insupportable d’être sous la prise de signiîants infâmants, « amateur, bidon » qui le représentent pour un autre signiîant dont Mitan aurait le secret. Un secret désormais perdu car elle est partie sans laisser d’adresse.
Au fond, cet amour insensé pour La emme perdue, a fait émerger le signiîant du transfert, préparant la place où l’analyste pourrait venir se loger.
Troisième séance.
Il va pouvoir alors émettre une plainte au nom de la vérité d’une angoisse qui n’est pas sans son envers de culpabilité.
Un symptôme commence à se cristalliser. Jusqu’à présent il s’accommodait assez bien de ses aFaires. Pour ses partouzes, le sérieux l’animait. Il les voulaient parfaites et satisfaisantes pour tous ses adés. Sublimation en quelque sorte. Mais là rien ne va plus. L’organisation de ses soirées lui était facile. Elle lui devient impossible, car il n’arrive plus à constituer les couples. Cela l’oblige à refaire sans cesse ses listes, dont les combinaisons ne tiennent plus. Cela tourne à l’obsession et à l’insomnie : il fait et défait et refait ses listes jour et nuit.
Ce symptôme est si nouveau qu’il se demande s’il n’est pas le signe de ce qu’il s’est trompé sur sa vraie nature. L’analyse lui semble maintenant la seule voie pour le savoir.
« Je suis suspendu à votre décision » dis t-il en sanglotant.
Je lui dis qu’il pourra s’allonger à la prochaine séance.
Contrôle avec Lacan à qui je présente les choses comme je viens de le faire.
Lacan : « Pas question encore qu’il s’allonge »
Valas : « Mais Monsieur je lui ai déjà dis qu’il pourrait aller sur le divan, de quoi vais-je avoir l’air ? »
Lacan : « Prenez l’air que vous pouvez mais pour lui pas question »
Au rendez-vous suivant, il arrive hilare et se prépare à y aller.
Valas : « Ecoutez, avant il faudrait quand même que vous m’en disiez un peu plus »
Lui sans se démonter :
« ça tombe bien parce que je trouve que vous allez un peu vite, alors que j’avais encore des choses à vous dire »
le voilà qui se met à me raconter sur le ton d’un premier communiant repenti le tableau édiîant d’un roman familial à l’usage de la psychanalyse illustrée,
pouvant faire le texte d’un ouvrage destiné à des enfants du niveau de la maternelle.
Enfant sage il n’aurait pas cassé 3 pattes à un lapin. Tout au plus il avait arraché une fois les ailes d’une mouche.
Soulevé parfois les jupes de ses copines de classe.
Surtout, insiste t-il sur le ton de la connivence, il n’a pas le souvenir d’avoir voulu observé en cachette les ébats de ses parents.
Mai 1968 lui a fait découvrir une volonté de jouissance sans entrave. Parti de l’extrême gauche tendance situationniste, sa dérive l’a mené à l’extrême nord, en Suède, seul pays où l’on pratiquait en Europe le hard corps (sic)
Depuis toujours il pratique l’onanisme, sans peur, sans reproche sans pitié et surtout sans intention d’y renoncer.
Il adore sa Mère, sa meilleure complice, à qui il raconte tout.
Son Père,voyageur de commerce est absent la plupart du temps. C’est le père fouettard du week-end. On lui « dore la pilule » moyennant quoi il peut en recevoir une double ration de raclée. Pour son bonheur.
Bref, il se fout de ma gueule. Il connaït la musique, parce qu’il suit les cours du département de psychanalyse encore logé à Vincennes. On lui a enseigné qu’un pervers est inanalysable.
Valas : « tout cela est presque vrai, mais Mitan dans tout ça ?
Il fond en larmes.
Le persiage cesse un instant pour reprendre aussitôt. Pour lui je dois être un în connaisseur en matière de perversion comme en témoignerait les « chinoiseries » qui sont dans mes vitrines. Il me supplie de le prendre en analyse, il sera d’une docilité quasi-canine aux contraintes de la cure.
Contrôle avec Lacan.
Lacan : « Non là il ne se moque plus de vous, ce sont des manifestations transférentielles, donner lui sa chance, il vous apprendra beaucoup »
La cure peut commencer.
Lui : « Il me faudrait rencontrer une femme compréhensive à aimer. Pourquoi ne la trouverais-je pas parmi l’une de vos analysantes ? »
J’apprendrai plus tard qu’il ne s’est pas fait faute d’essayer.
Il se vautre. D’abord divisé par le signiîantbIdonil va rejoindre une position d’objet de rien du tout. « C’est vraiment chic de vous dépenser pour une roulure comme moi »
Si mes interventions sont « tout à fait justes elles pourraient être aussi bien tout à fait à côté de la plaque » il les ponctue parfois par « touché, coulé » comme à la bataille navale. Au fond il cherche à mettre l’analyste hors de lui, de sorte que me jugeant indigne d’en occuper la place il pourrait me plaquer sans plus de cérémonie.
Il ne parle que de l’actuel, et dans mes contrôles successifs Lacan me pousse à ne pas le lâcher.
Lacan :
« Cela ne durera pas mais laissez lui l’initiative de rompre, le plus tard possible ce sera déjà pas si mal »
En eFet son ironie et ses pointes ont pour visée de projeter sa propre division subjective sur l’analyste, jusqu’à înir par m’angoisser par une manœuvre calculée à laquelle je ne m’attendais pas.
En eFet une analysante que je reçois après lui, est muette depuis quelque temps, ce n’est pas son style. Interrogée, elle înit par me dire qu’après ses séances il y a un quelqu’un qui l’attend dans la rue. Je lui demande plus de précision. Elle a pris l’habitude d’aller boire un verre régulièrement avec lui. Je lui demande son nom, elle sait qu’il fait une analyse avec moi. Je suis à peine surpris d’apprendre que c’est lui. Ils parlent de leur cure. Un jour il lui a proposé de l’emmener dans une partouze. Elle a refusé, mais elle était terriîée à l’idée de m’en parler.
Lorsqu’il vient à sa séance suivante, je lui demande d’aller s’asseoir et lui dit que sans doute j’avais oublié de lui préciser que nous n’étions pas là pour nous bidonner et qu’il ne saurait être question de faire des galipettes ni ici et encore moins dans la salle d’attente. « J’ai compris » me répond t-il.
Après quelques nouveaux dérapages contrôlés la cure va connaïtre un moment crucial et même terminal parce que mon analysant va faire la rencontre d’une très jeune îlle.
Il commence à l’idéaliser, elle parvient à lui faire oublier ses tourments, il veut l’épouser.
« Dans un dernier sursaut de lucidité avant le grand renoncement » selon ses termes, il est pris par la pensée que si elle consentait à ocier dans ses nouvelles agapes ce serait vraiment le « paradis »
Je lui fais remarquer que ce serait plutôt un retour à l’ornière. Il n’a pas de chance, la belle innocente accepte son oFre.
Il ne reviendra pas à son prochain rendez-vous.
Quelques mois plus tard, je lui envoie une lettre lui disant que je maintenais qu’il me devait le montant de la dernière séance où il n’était pas venu en le priant de m’envoyer cette somme par chèque barré à mon nom.
Il me l’a adressé.
Après ce bout de chemin, je ne dirais pas qu’il est arrivé au terme de sa cure et si même il l’avait vraiment commencée. Mais après tout si elle a pu lui rendre l’existence un peu plus légère, je lui aurai au moins servi à ça.
Trois ans plus tard je tombe sur un long interview de lui dans la revue Actuel. Il y raconte avec beaucoup de détails les « soirées » qu’il organise avec sa femme et où se pressent les gens branchés. Il y a même des psychanalystes. Au détour d’une phrase il mentionne qu’il avait commencé une analyse, mais qu’il n’avait pas eu le courage de la mener à son terme. Mais enîn c’était grâce à ce bout de travail qu’il avait réussi dans son « entreprise »
Patrick Valas. 1981
notes:
lien url sous le titre:EFets des identiîcations de groupe, P. Valas
SOURCE
Buvard & Désencré
éditent et présentent sous toutes formes utiles les textes, documents, essais, Ictions et témoignages qui leur sont conIés, en rapport (...) avec la psychanalyse freudienne et lacanienne. ïl n'y a pas à dire, et donc qu'on se le dise, Buvard & Désencré, éditeurs, ont vraiment la psychanalyse à la bonne.
Eva Talineau
Pour Patrick Valas - dans le courant d'une discussion qui a déjà 576 items, vous dites à un moment que Lacan a introduit en 1975 la notion d'"Inconscient réel" (non langagier), auquel l'Inconscient langagier fait bouchon dans la cure. Cela m'intéresse beaucoup. C'est à cela qu'on a aFaire dès qu'il y a de la psychose dans l'air - c'est l'aire du deux, tel que quelqu'un comme Gaetano Benedetti essaye de le mettre au travail - et y réussit parfois - entre lui et ses patients. C'est ce dont la psychanalyse instituée à une peur bleue, à tel point que des questions essentielles, comme celle des rêves télépathiques dans la cure analytique, qui sont des faits avérés, pour laquelle il y a une littérature importante depuis les premiers analystes (Hélène Deutsch, Istvàn Hollos, et les autres analystes Hongrois - numéro spécial du Coq Héron déjà ancien, et de nombreux témoignages dans tous les courants et tendances analytiques depuis) ne peuvent même pas être discutées, ce qui exclut, évidemment d'en tirer quelqu'enseignement. On a ces phénomènes de "communication" directe, dont les soignants en psychiatrie font l'expérience répétée (les schizophrènes sont poreux, ce sont des baromètres vivants du réel en circulation autour d'eux, une partie non négligeable de leurs productions délirantes sont une manière de nous dire ce que nous préférerions ne pas savoir ) d'un côté - et un véritable interdit de les prendre en compte dans la pensée que nous avons du psychisme, sauf à titre d'aberrations de l'autre. Lorsqu'on mentionne la chose dans le décours d'une réunion entre analystes, sur un groupe de vingt, il y a régulièrement un ou deux confrères qui ont déjà rencontré cela dans leur clinique - le patient qui vient à sa séance avec des rêves qui montrent qu'ils sont"branchés", sans le savoir, sur le préconscient de l'analyste, qu'ils voyagent dans la psychê de celui-ci sans que la séparation des corps fasse obstacle. Mais si on propose un séminaire de recherche pour prendre au sérieux cela, voir ce que cela implique théoriquement, on se heurte à un mur. reud a écrit sur le sujet, les textes sont accessibles, magniîquement traduits par Rey et GranoF, tout le monde peut les lire - mais ils ne sont pas lus, ou pire, en contre-sens. Lacan, dans sa période structuraliste, parlait de "réseaux de communications dans l'Autre" - Ecrits, "champs et fonction etc..", puis dans les derniers textes, liait la chose à des techniques du corps, à l'"initiation", dont, disait-il "il n'y aurait plus trace de nos jours" - il est embarrassé, il y a à ce moment là quelquechose qui le chiFonne dans ce sujet, cela ne "cadre" plus trop avec ce qu'il est en train de dire d'autre. Mais au lieu de chercher à avancer à partir de cet embarras, ce qui serait la démarche rigoureuse - la Science avance non pas en balayant sous le tapis ce qui ne cadre pas avec les théories en vigueur mais en créant un nouveau cadre conceptuel qui rend compte aussi des aberrations et exceptions - on fait comme si cela n'existait pas. Je crois que si cela continue comme cela, la psychanalyse sera, dans quelques décennies, un système philosophique sclérosé, tombé en désuétude,
qui fonctionnera de manière religieuse pour quelques adeptes. L'Inconscient est dans son fond, réel. Il nait de notre rencontre corps/âme avec les autres réels à travers qui nous recevons notre "être au monde", il est trace de cette rencontre, et trace des réponses que nous avons produites, très précocement, à ce qui a été rencontré. La psychanalyse qui travaille à partir des traces permet de ressaisir ce par quoi on a été saisis - cela, c'est son niveau langagier - c'est utile, cela ne va pas bien loin. Un gadget pour nantis de la psychê, ceux qui ont reçu, en leur temps, tout l'attirail Oedipien qui permet de voyager dans la vie lesté d'un capital de manque à faire fructiîer tout en s'en plaignant (je fais de la provoc, c'est exprès), un plus pour ceux qui de toutes façons pourraient s'en passer.
L'autre psychanalyse, celle qui a aFaire à l'Inconscient réel, aux aires de la psychê où la métaphore n'est pas active, où tout se passe, à certains moments , comme si patient et analyste étaient enveloppés ensemble d'une même matrice psychique à l'intérieur de laquelle des éléments circulent de l'un à l'autre, où le patient "explore" l'autre pour y puiser des éléments pour son propre devenir, s'approprier des nouvelles potentialités, existe aussi. Mais elle n'est pratiquement pas conceptualisée. De temps en temps, quelqu'un amène un concept qui peut faire sens là-dedans. Je pense au "corps-mémoire" de Daniel Sibony. Il y en a sûrement d'autres. Mais jamais cela n'est dit clairement "voilà, nous sommes là ailleurs que dans ce que reud a découvert, dans ce que Lacan a après lui formalisé, voyons comment, aujourd'hui, on pourrait avancer". Bon, on est un peu loin de l'autisme (quoique..). Il est peut-être temps de sortir de la vulgate lacanienne où le "mot" est le meurtre de la chose - à ce propos, je viens de faire tout un travail sur Heidegger, c'est édiîant à quel point le concept d'ek-sistence chez Lacan et toute sa théorie du langage a d'anités avec les développements de celui-ci sur l'"être pour la mort", et son opposition entre la recherche "authentique" du Dasein comme rapport à l'Etre et la vie dans le "on" de la "mondanité", pour l'un et l'autre, on ek-siste d'être "hors" quelque chose - pour envisager que les premières inscriptions signiîantes pourraient (je mets un conditionnel), être la trace d'un "oui" premier à la Chose, et que pour un grand nombre de nos patients, pas forcément psychotiques, c'est au niveau de ce "oui" premier que se joue la rencontre analytique. Ils viennent nous apporter leur "corps-mémoire" - et non, seulement, leur mémoire, consciente et inconsciente (langagier) - qui entre en résonnance avec ce qui en nous, fait "corps-mémoire".Pour Patrick Valas - dans le courant d'une discussion qui a déjà 576 items, vous dites à un moment que Lacan a introduit en 1975 la notion d'"Inconscient réel" (non langagier), auquel l'Inconscient langagier fait bouchon dans la cure. Cela m'intéresse beaucoup. C'est à cela qu'on a aFaire dès qu'il y a de la psychose dans l'air - c'est l'aire du deux, tel que quelqu'un comme Gaetano Benedetti essaye de le mettre au travail - et y réussit parfois - entre lui et ses patients. C'est ce dont la psychanalyse instituée à une peur bleue, à tel point que des questions essentielles, comme celle des rêves télépathiques dans la cure analytique, qui sont des faits avérés, pour laquelle il y a une littérature importante depuis les premiers analystes (Hélène Deutsch, Istvàn Hollos, et les autres analystes Hongrois - numéro spécial du Coq Héron déjà ancien, et de nombreux témoignages dans tous les courants et tendances analytiques depuis) ne peuvent même pas être discutées, ce qui exclut, évidemment d'en tirer
quelqu'enseignement. On a ces phénomènes de "communication" directe, dont les soignants en psychiatrie font l'expérience répétée (les schizophrènes sont poreux, ce sont des baromètres vivants du réel en circulation autour d'eux, une partie non négligeable de leurs productions délirantes sont une manière de nous dire ce que nous préférerions ne pas savoir ) d'un côté - et un véritable interdit de les prendre en compte dans la pensée que nous avons du psychisme, sauf à titre d'aberrations de l'autre. Lorsqu'on mentionne la chose dans le décours d'une réunion entre analystes, sur un groupe de vingt, il y a régulièrement un ou deux confrères qui ont déjà rencontré cela dans leur clinique - le patient qui vient à sa séance avec des rêves qui montrent qu'ils sont"branchés", sans le savoir, sur le préconscient de l'analyste, qu'ils voyagent dans la psychê de celui-ci sans que la séparation des corps fasse obstacle. Mais si on propose un séminaire de recherche pour prendre au sérieux cela, voir ce que cela implique théoriquement, on se heurte à un mur.
reud a écrit sur le sujet, les textes sont accessibles, magniîquement traduits par Rey et GranoF, tout le monde peut les lire - mais ils ne sont pas lus, ou pire, en contre-sens. Lacan, dans sa période structuraliste, parlait de "réseaux de communications dans l'Autre" - Ecrits, "champs et fonction etc..", puis dans les derniers textes, liait la chose à des techniques du corps, à l'"initiation", dont, disait-il "il n'y aurait plus trace de nos jours" - il est embarassé, il y a à ce moment là quelquechose qui le chiFonne dans ce sujet, cela ne "cadre" plus trop avec ce qu'il est en train de dire d'autre. Mais au lieu de chercher à avancer à partir de cet embarras, ce qui serait la démarche rigoureuse - la Science avance non pas en balayant sous le tapis ce qui ne cadre pas avec les théories en vigueur mais en créant un nouveau cadre conceptuel qui rend compte aussi des aberrations et exceptions - on fait comme si cela n'existait pas. Je crois que si cela continue comme cela, la psychanalyse sera, dans quelques décennies, un système philosophique sclérosé, tombé en désuétude, qui fonctionnera de manière religieuse pour quelques adeptes. L'Inconscient est dans son fond, réel. Il nait de notre rencontre corps/âme avec les autres réels à travers qui nous recevons notre "être au monde", il est trace de cette rencontre, et trace des réponses que nous avons produites, très précocement, à ce qui a été rencontré. La psychanalyse qui travaille à partir des traces permet de ressaisir ce par quoi on a été saisis - cela, c'est son niveau langagier - c'est utile, cela ne va pas bien loin. Un gadget pour nantis de la psychê, ceux qui ont reçu, en leur temps, tout l'attirail Oedipien qui permet de voyager dans la vie lesté d'un capital de manque à faire fructiîer tout en s'en plaignant (je fais de la provoc, c'est exprès), un plus pour ceux qui de toutes façons pourraient s'en passer. L'autre psychanalyse, celle qui a aFaire à l'Inconscient réel, aux aires de la psychê où la métaphore n'est pas active, où tout se passe, à certains moments , comme si patient et analyste étaient enveloppés ensemble d'une même matrice psychique à l'intérieur de laquelle des éléments circulent de l'un à l'autre, où le patient "explore" l'autre pour y puiser des éléments pour son propre devenir, s'approprier des nouvelles
potentialités, existe aussi. Mais elle n'est pratiquement pas conceptualisée. De temps en temps, quelqu'un amène un concept qui peut faire sens là-dedans. Je pense au "corps-mémoire" de Daniel Sibony. Il y en a sûrement d'autres. Mais jamais cela n'est dit clairement "voilà, nous sommes là ailleurs que dans ce que reud a découvert, dans ce que Lacan a après lui formalisé, voyons comment, aujourd'hui, on pourrait avancer". Bon, on est un peu loin de l'autisme (quoique..). Il est peut-être temps de sortir de la vulgate lacanienne où le "mot" est le meurtre de la chose - à ce propos, je viens de faire tout un travail sur Heidegger, c'est édiîant à quel point le concept d'ek-sistence chez Lacan et toute sa théorie du langage a d'anités avec les développements de celui-ci sur l'"être pour la mort", et son opposition entre la recherche "authentique" du Dasein comme rapport à l'Etre et la vie dans le "on" de la "mondanité", pour l'un et l'autre, on ek-siste d'être "hors" quelquechose - pour envisager que les premières inscriptions signiîantes pourraient (je mets un conditionnel), être la trace d'un "oui" premier à la Chose, et que pour un grand nombre de nos patients, pas forcément psychotiques, c'est au niveau de ce "oui" premier que se joue la rencontre analytique. Ils viennent nous apporter leur "corps-mémoire" - et non, seulement, leur mémoire, consciente et inconsciente (langagier) - qui entre en résonnance avec ce qui en nous, fait "corps-mémoire".
Pour Patrick Valas - dans le courant d'une discussion qui a déjà 576 items, vous dites à un moment que Lacan a introduit en 1975 la notion d'"Inconscient réel" (non langagier), auquel l'Inconscient langagier fait bouchon dans la cure. Cela m'intéresse beaucoup. C'est à cela qu'on a aFaire dès qu'il y a de la psychose dans l'air - c'est l'aire du deux, tel que quelqu'un comme Gaetano Benedetti essaye de le mettre au travail - et y réussit parfois - entre lui et ses patients. C'est ce dont la psychanalyse instituée à une peur bleue, à tel point que des questions essentielles, comme celle des rêves télépathiques dans la cure analytique, qui sont des faits avérés, pour laquelle il y a une littérature importante depuis les premiers analystes (Hélène Deutsch, Istvàn Hollos, et les autres analystes Hongrois - numéro spécial du Coq Héron déjà ancien, et de nombreux témoignages dans tous les courants et tendances analytiques depuis) ne peuvent même pas être discutées, ce qui exclut, évidemment d'en tirer quelqu'enseignement. On a ces phénomènes de "communication" directe, dont les soignants en psychiatrie font l'expérience répétée (les schizophrènes sont poreux, ce sont des baromètres vivants du réel en circulation autour d'eux, une partie non négligeable de leurs productions délirantes sont une manière de nous dire ce que nous préférerions ne pas savoir ) d'un côté - et un véritable interdit de les prendre en compte dans la pensée que nous avons du psychisme, sauf à titre d'aberrations de l'autre. Lorsqu'on mentionne la chose dans le décours d'une réunion entre analystes, sur un groupe de vingt, il y a régulièrement un ou deux confrères qui ont déjà rencontré cela dans leur clinique - le patient qui vient à sa séance avec des rêves qui montrent qu'ils sont"branchés", sans le savoir, sur le
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