Les Constructions de Justinien de Procope de Césarée : document ou monument? - article ; n°4 ; vol.142, pg 989-1001
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Description

Comptes-rendus des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres - Année 1998 - Volume 142 - Numéro 4 - Pages 989-1001
13 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1998
Nombre de lectures 82
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Monsieur Denis Roques
Les Constructions de Justinien de Procope de Césarée :
document ou monument?
In: Comptes-rendus des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, 142e année, N. 4, 1998. pp. 989-
1001.
Citer ce document / Cite this document :
Roques Denis. Les Constructions de Justinien de Procope de Césarée : document ou monument?. In: Comptes-rendus des
séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, 142e année, N. 4, 1998. pp. 989-1001.
doi : 10.3406/crai.1998.15927
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/crai_0065-0536_1998_num_142_4_15927COMMUNICATION
LES CONSTRUCTIONS DE JUSTINIEN T>E PROCOPE DE CÉSARÉE:
DOCUMENT OU MONUMENT?, PAR M. DENIS ROQUES1
Les Constructions de Procope de Césarée n'ont pas trouvé de
traducteur français depuis 167 12, et cependant il s'agit d'une
œuvre originale à plusieurs titres. D'abord parce que, dans la li
ttérature antique comme dans l'ensemble de la littérature euro
péenne, elles n'ont pas d'équivalent malgré la multiplicité des
souverains qui, dans l'Antiquité autant qu'à des époques plus
récentes, se sont efforcés de marquer l'histoire de leur empreinte.
Ensuite parce qu'aucun de ces souverains n'a pu, si grand que fût
son Empire, si long que fût son règne, construire avec autant
d'énergie et d'ubiquité que Justinien, ce qui rend plus méritoire
la tâche de son historiographe. Enfin parce qu'à prendre les
Constructions dans leur ensemble, il est, dans l'Antiquité, peu
d'œuvres qui requièrent, de la part de leur auteur comme de celle
de leurs auditeurs/lecteurs, des connaissances aussi diverses
tout en demeurant elles-mêmes d'authentiques œuvres litté
raires, soucieuses, à ce titre, de culture et de beau langage. Telles
sont quelques-unes des raisons majeures qui font des Construct
ions de Justinien un ouvrage profondément original et invitent par
conséquent les commentateurs modernes à tenter d'en définir la
nature et la portée.
Sans insister ici sur les aspects proprement littéraires de l'ou
vrage, qui mériteraient eux aussi d'être pris en compte, on notera
d'emblée, en guise d'impression d'ensemble, la clarté de sa
1. Une version plus circonstanciée de cette communication paraîtra dans les Actes du
colloque international de Londres (25-26 octobre 1998) sur les Constructions de Justinien
(Ilepl XTiofidruv), qui seront publiés prochainement dans la revue Antiquité tardive, 2000.
2. Selon O. Weh, Prokop, Bauten, Munich, 1977, p. 514, les auraient été tra
duites en français par Martin Fumée, sieur de Genillé, « avec » les Guerres. Mais dans YHis-
toire des guerres faictes par l'Empereur Justinien contre les Vandales et les Goths, escrite en grec
par Procope etAgathias et mise en français, Paris, 1587, les Constructions sont absentes. La pre
mière — et la seule — traduction française parue à ce jour est celle de Louis Cousin, pré
sident en la Cour des Monnoyes, Histoire de Constantinople depuis le règne de l'Ancien Justin
jusqu 'à la fin de l'Empire, t. 2, Paris, 1671, p. 307-473. J'ai moi-même achevé en 1990 une tr
aduction annotée des Constructions, qui n'est cependant pas publiée. 990 COMPTES RENDUS DE L'ACADÉMIE DES INSCRIPTIONS
composition3. Partant de la capitale de l'Empire romain d'Orient,
à qui est consacré le livre I et dont sont surtout présentées les
constructions religieuses4, Procope évoque ensuite celles — sur
tout militaires — de Mésopotamie du Nord (livre II)5 et des Armé-
nies (livre III)6, puis celles — presque totalement militaires — de la
péninsule Balkanique (livre IV)' avant d'en venir, au livre V, aux
reconstructions architecturales et aux travaux publics menés par
l'Empereur en Asie Mineure et en Palestine8 et, au livre VI, aux
interventions de Justinien en Egypte, Pentapole de Libye, Tripoli-
taine et Afrique mineure (Byzacène, Afrique proconsulaire et
Numidie byzantine)9. Menée conformément au schéma géogra
phique traditionnel — celui d'Hécatée, Éphore, Pseudo-Skylax,
Pseudo-Skymnos, Strabon —, qui exige une présentation d'ouest
en est et du nord au sud10, l'analyse envisage successivement les
trois continents antiques en s'organisant autour de pôles régio
naux significatifs (Byzance : I ; Dara : II ; Martyropolis et Théodo-
sioupolis : III ; Justiniana Prima : IV ; Jérusalem : V ; Leptis
Magna : VI) et en fonction de deux thèmes majeurs : les construc
tions religieuses et les constructions militaires de Justinien.
Cette simplicité de composition va de pair avec une richesse
exceptionnelle. En premier lieu Procope ne se contente pas d'évo
quer à grands traits fortifications et églises : il précise à l'intérieur
de chaque groupe la variété des constructions mentionnées : for
tins, forts, casernes, forteresses, murs de défense, remparts, pour
les constructions militaires ; « maisons » de saints, martyria, monast
ères, églises, cathédrales, pour les constructions religieuses. En
second lieu il ne manque pas de signaler avec un identique souci
de la diversité les ouvrages hydrauliques : puits, réservoirs,
citernes, aqueducs, digues, barrages. Enfin il n'oublie pas de
3. L'accord n'est pas encore fait sur la date des Constructions : 559-560 avant Stein ;
Stein : « printemps 553/été 555 » ; Av. Cameron : « 554 or thereabouts » ; M. Whitby : 560-
561.
4. En particulier la Grande église alias Sainte-Sophie (I, 1, 20-78), l'église des Apôtres
(I, 4, 1-24), l'église d'Anaplous (I, 8, 2-20), à quoi il faut ajouter, dans le domaine profane,
la Chalkè du palais impérial (I, 10, 10-20).
5. En particulier à Dara (II, 1, 4-3, 26), Constantina (II, 5, 2-11), Kirkèsion (II, 6, 2-11),
Édesse (II, 6, 1-16), Zènobia(II, 8, 8-25), Antioche (II, 10, 2-25).
6. En à Martyropolis (III, 2, 1-14), Théodosioupolis (III, 5, 1-12) et en Tza-
nique (III, 6, 1-26).
7. En particulier aux Thermopyles (IV, 2, 1-15), en Thessalie (IV, 3, 1-15), sur le limes
danubien (IV, 6, 1-7, 21), en Propontide, sur PHellespont et en Chersonèse de Thrace (IV,
9, 14-10, 28).
8. Particulièrement à Éphèse (V, 1, 4-16), en Bithynie (V, 2, 1-3, 17), en Cilicie (V, 5, 1-6,
20) et dans les provinces de Palestine (V, 6, 1-8, 9).
9. Essentiellement à Alexandrie, Ptolémaïs de Libye Pentapole, Leptis Magna et Car-
thage.
10. Cf. P. Pédech, La géographie des Grecs, Paris, 1976, p. 42. LES CONSTRUCTIONS DE JUSTINIEN 991
mentionner les bains publics construits par Justinien ainsi que, en
plus d'une circonstance, l'entretien et la création de voies de comm
unication11, dont apparaît bien le double rôle, à la fois stratégique
et civilisateur.
Cependant la diversité du récit n'exprime pas uniquement l'ac
tion de Justinien dans les campagnes (xûpai) de l'oikoumène : elle
traduit aussi la multiplicité des interventions impériales dans ce
qui reste la clef de voûte de la civilisation antique : la cité. Procope
n'omet pas de rapporter l'édification de ponts (pour remédier aux
inondations provoquées par les fleuves d'Asie Mineure : livre V12),
les aménagements de ports (I)13, la construction de greniers à blé et
de celliers pour nourrir la population de Constantinople (V)14.
Outre ces infrastructures de communication et d'approvisionne
ment, il mentionne, dans le cadre urbain, les hospices et les infi
rmeries, qui reçoivent voyageurs et malades15, les structures pure
ment utilitaires (rues, magasins, résidences)16, les structures
simultanément utilitaires et décoratives (places, portiques, fon
taines)17 et celles — rares — qui sont uniquement décoratives (telle
à Constantinople la statue équestre de Justinien sur l'Augus-
teum)18, constructions auxquelles s'ajoutent enfin les édifices offi
ciels (résidences de magistrats19, palais réhabilités ou construct
ions ex nihilo)20, toutes évocations qui, par leur accumulation et leur
variété, confèrent un vif intérêt à l'ouvrage.
Toutefois l'intérêt et l'attrait des Constructions ne se limitent pas
à cette diversité objective, effet des interventions impériales. Il est
une autre diversité, subjective celle-là, qui tient à la personnalité
intellectuelle de Procope et traduit sa curiosité permanente. Fidèle à
une tradition hellénique multiséculaire qui

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