La Hyène
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Description

La Hyène… Sous ce sobriquet mystérieux se cache l’une des créatures les plus diaboliques de notre temps… Comme la bête du même nom, elle semble changer de sexe à volonté, tantôt mâle tantôt femelle, tantôt religieux intransigeant tantôt femme fatale au charme envoûtant…
Mais avant de rejoindre le Maître des Ténèbres, elle devra affronter celle qu’elle hait depuis toujours… Celle qui ose lui disputer les faveurs du Seigneur des vivants et des morts…

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Publié le 11 juin 2018
Nombre de lectures 62
Langue Français

Extrait

1
Linda Moreno La Hyène « Dans le monde réellement renversé, le vrai est un moment du faux. » (GUY DEBORD) MMXVII
2
1 PREMIÈRE MARCHE ( )  Il était quatre heures du matin et Linda était assise seule à la table d’un snack-bar de Sunset, devant un infâme jus de chaussette qui avait l’audace de se faire appeler «café ».  Elle avait des cheveux gris attachés en queue-de-cheval. Des fois qu’on la prenne pas pour une radasse,elle était fringuée d’un corsage de résille noire et d’une juperas du au minou. En dépit de la chaleur moite, elle arborait des bas de nylon noir avec porte-jarretelles et des escarpins aussi noirs que l’encre de ses yeux… Preuve vivante que l’on pouvait être néo-gothique glam et faire pouffe en même temps!  Les lieux étaient déserts, à l’exception du barman qui manipulait sa PlayStation, lorsqu’une jeune femme se présenta. Elle portait un costume de soubrette composé d’une robe noire à col cassé et d’un tablier blanc. Une coiffe blanche posée sur ses cheveux blonds accentuait son air nunuche. Elle s’approcha de la fille aux cheveux gris.─ C’est vous,Linda Moreno ? bégaya-t-elle. ─ Oui, jusqu’à preuve du contraire, répondit Linda. Asseyez-vous, je vous en prie…La jeune femme s’installa en face de Linda et posa son sac à main en toile sur la table. Vous prenez quelque chose ? demanda Linda. ─ Non, rien… bredouilla la fille. Après ce que je viens de voir, j’ai l’estomac à l’envers! Je vous comprends, fit Linda avec un battement de cils. Bien, vous pouvez me décrire l’ambiance de la soirée? C’était une soirée banale, comme les autres… il y avait des femmes habillées comme des putes… Linda esquissa un sourire gêné. 1 ( ) Pensez aux marches d’un podium…3
─ Non, je ne disais pas ça pour vous, Miss… rectifia la jeune femme. J’entends bien, répondit Linda, tout en jaugeant son interlocutrice.  Certains parents devraient bien réfléchir avant de choisir un prénom pour leur progéniture. Ses parents l’avaient prénommée Stella. Elle n’avait pourtant rien d’une étoile, Stella… même pas une étoile de mer… Avec cette frange blonde qui lui barrait le front au-dessus des yeux. Des yeux ternes où ne scintillait aucune lueur particulière. Si les yeux sont le miroir de l’âme, alors celle de Stella ne devait pas être très élevée. Rien que l’âme d’une petite bonne femme au destin tout tracé. Son job, loin des projecteurs : beurrer des toasts et les disposer en quinconce sur un plateau d’argent…Elle œuvrait dans des réceptions mondaines réservées aux happy fews, où des larbins en veste blanche et gants blancs circulaient parmi les invités en portant des plateaux d’argent garnis de coupes de champagne. Mais, voilà qu’en poussant la porte des toilettes réservées au personnel, Stella avait découvert un cadavre. Celui d’un homme revêtu d’un smoking, agenouillé devant la cuvette des W. C. On aurait pu croire qu’il vomissait dans les chiottes, mais il y avait du sang partout. Sur le sol, sur les murs et même au plafond…Alors, Stella s’était précipitée en hurlant à l’extérieur des toilettes. Elle avait déboulée au beau milieu de la réception, les yeux hagards, bousculant les invités et leurs larbins, faisant valdinguer les plateaux garnis de coupes de champagne… Un beau désastre. Non, ce n’était pas une animation destinée à pimenter la soirée età mettre de l’ambiance. Juste un fait divers qui s’invitait au beau milieu d’une cocktail party. Dans une luxueuse résidence de Beverly Hills.
4
Non loin de Sunset Boulevard, l’interminableboulevard du crépusculequi serpente à travers Los Angeles. Vous faites des extras ? demanda subitement Linda. ─ Qu’est-ce que vous voulez dire? s’indigna Stella.─ Des extras pour arrondir vos fins de mois… C’est mal payé, votre job ! Vous côtoyez des gens richissimes et célèbres et ils vous laissent à peine quelques miettes ! Non, répliqua sèchement Stella. Je suis une fille sérieuse…─ Ça vous va bien… observa Linda. La victime était journaliste. Bob Seagal travaillait pour le «Los Angeles Enquirer». Qui pouvait lui en vouloir au point de le tuer?L’autopsie devait révéler quelque chose d’effrayant et de fantastique. La cavité crânienne de Bob Seagal était vide. Plus de cerveau. Apparemment, détail horrible, « on » avait percé un trou à la base du crâne, au niveau de l’occiput, et « on » avait aspiré la masse cérébrale. Comme on gobe un œuf cru en perçant un trou dans la coquille. A ce stade, on ne se demandait plus QUI mais QUOI avait pu commettre ce crime abominable inédit dans les annales de la criminologie. Aspirer le cerveau d’un être humain, journaliste par-dessus le marché… Oui, quelle créature monstrueuse avait pu faire un truc pareil ?!  On connaissait les vampires suceurs de sang, mais pas encore de suceurs de cerveaux… C’est vrai que par les temps qui courent, il faut s’attendre à tout.─ Bien, fit Linda. Je crois que j’en ai fini avec vous…Je peux rentrer chez moi ? demanda Stella.  Linda lui remit sa carte de visite :  Si jamais un détail qui vous a échappé vous revenait brusquement en mémoire, n’hésitez pas à me contacter… Je suis disponible 24 heures sur 24, mais la nuit de préférence…Vous travaillez la nuit? s’étonna Stella.
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─ Oui, et je dors le jour… précisa Linda. Elle suspendit sa phrase et laissa planer un silence inquiétant avant de conclure : Comme les vampires ! ─ Si vous cherchez à me faire peur, c’est raté! Après ce que je viens de voir… Alors, Linda enfonça son regard noir dans les yeux délavés de la poulette. Brusquement, Stella se sentit envahie d’un froid glacial. Linda avait de grands yeux noirs etd’épais sourcils noirs en accent circonflexe. Des lèvres violettes et des dents d’une blancheur étincelante. Son visage hâve aux traits émaciés évoquait celui d’une morte…─ Bon… je vais rentrer chez moi… bredouilla Stella. J’ai besoin de me reposer…Oui, dépêche-toi, ma chérie… ponctua Linda avec un sourire. Le soleil va bientôt se lever ! * * * L’avènement de l’ordinateur portable a grandement simplifié les enquêtes policières. Plus besoin de passer une maison au peigne fin, de vider la corbeille à papier et de racler tous les fonds de tiroir, de secouer tous les bouquins de la bibliothèque à la recherche d’une note glissée entre les pages d’un ouvrage.Désormais, tout est dans l’ordinateur. D’ailleurs, dans les habitations post-modernes, le mobilier lui-même est réduit à sa plus simple expression. C’est le triomphe du minimalisme.L’humanité doit réduire son «empreinte carbone », sous peine de voir le niveau des océans s’élever dangereusement et submerger les mégalopoles du monde civilisé. On parle même de fabriquer des maisons en carton recyclable avec des imprimantes 3-D (on le fait déjà en Chine).
6
 Linda profita du voile ténébreux de la nuit pour s’introduire chez Bob Seagal. Pour se livrer à ce turbin, elle avait revêtu ce qu’elle appelait sa tenue de panthère noire : un collant de danseuse qui moulait son corps gracile comme une seconde peau, une cagoule et des ballerines de feutre, sans oublier des gants de pécari. Le tout, noir grand teint.  Bob Seagal habitait un ravissant pavillon de banlieue laqué de blanc et précédé d’un jardinet dans l’élégant quartier de Westwood, non loin de l’Université de Californie. La police de Los Angeles avait posé des scellés sur les portes et les fenêtres de la demeure. Rendue devant la porte d’entrée, Linda tritura la serrure avec une épingle à cheveux et ladite porte s’ouvrit comme une fleur. Facile et peut-être même trop facile, mais il est plus facile de venir à bout d’une porte que d’une femme… Une épingle à cheveux peut faire des miracles et se révéler un excellent outil pour pénétrer chez les gens par effraction… Linda ouvrit donc la porte, ce qui eut pour effet de faire sauter les scellés posés par ces lourdauds de flics, et elle se dépêcha d’investir la turne sur la pointe de ses ballerines de feutre noir. La maison de Bob Seagal n’offrait aucun agrément particulier. Linda passa néanmoins la cambuse au peigne fin, depuis le garage attenant jusqu’au grenier, allant jusqu’à cogner contre les cloisons, histoire de se rendre compte si elles rendaient un son creux… Mais tout était OK. Les hommes du LAPD (Los Angeles Police Department) avaient évidemment confisqué l’ordinateur de la victime, comme l’indiquait la trace rectangulaire laissée par la machine dans la fine pellicule de poussière qui recouvrait le plan de travail du journaliste.  Un détail qui avait sans doute échappé aux flics, parce que difficilement perceptible dans la lumière diurne.
7
 Par contre, la nuit, sous la lumière polarisée de la Lune, ce détail sautait aux yeux. Du moins aux yeux de Linda, qui percevait les infrarouges. Donc, on ne faisait pas la poussière chez Bob Seagal… ou il était trop radin pour se payer les services d’une femme de ménage… Ou alors, il ne vivait pas vraiment ici et il ne faisait que passer. D’ailleurs le sens olfactif de Linda confirma cette impression. La baraque reniflait une odeur fluette. L’odeur des maisons vides. Ça reniflait l’inhabité. Linda se mit à fouiller les tiroirs, mais la police avait eu la même idée et avait déjà tout ratissé.  Les tiroirs étaient vides et archi-vides.  Soudain, elle tressaillit. Ses doigts gantés de noir venaient d’entrer en contact avec une surface glacée. Elle enleva le tiroir pour en extirper le négatif d’une photo, qui était resté coincé dans le fond.Une maison fouillée par les flics, c’était comme une carcasse abandonnée par les fauves, il y avait toujours quelque chose à gratter…֎Le problème, maintenant, c’était de faire développer ce négatif. De nos jours, les photographes qui travaillent sur argentique ne sont plus légion, à la différence du Diable. L’avènement de la photo numérique et l’invasion des téléphones portables et autres smartphones ont sonné le glas de la pellicule à l’ancienne.Linda finit par dénicher un photographe à l’ancienne à Santa Monica, à l’angle de Main Street et de Rose Avenue, non loin de la «Ballerina Clown», sculpture géante due à Jonathan Borofsky. Cette œuvre, une tête de clown sur un corps de ballerine en tutu, symbolisait l’atmosphère de frivolité de la cité… Linda entra dans la boutique du photographe.
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L’homme de l’art était un grand type blond aux cheveux longs, vêtu d’une liquette à fleurs et d’un jean délavé. Linda lui tendit le négatif retrouvé chez Bob Seagal. Vous pouvez développer ce négatif ? demanda-t-elle. Oui, revenez demain ! répondit la gravure de mode. ─ Non, c’est urgent! insista Linda. J’en ai besoin tout de suite !  Elle fit glisser un joli billet vert sur le comptoir en verre du photographe.  Le pseudo-hippie glissa le billet dans une poche de son jean, prit le morceau de pelloche. Puis il désigna un siège à Linda et disparut dans son arrière-boutique qui faisait office de laboratoire. Linda s’assit et attendit en feuilletant un magazine spécialisé. Il y avait un reportage exclusif sur les surfeurs de Malibu et les photos en couleur sur papier glacé étaient saisissantes. Que des beaux mecs aux cheveux blonds délavés, bronzés comme des pains d’épice, les muscles saillants… Le photographe revint, en tenant une épreuve mouillée dans une pince de métal. Linda saisit délicatement le cliché et l’examina.C’était le portrait d’une belle femme brune, qui posaiten maillot de bain noir, allongée sur un transat.A l’arrière-plan, on apercevait de la verdure…Bizarrement, Linda eut l’impression de connaître cette femme, du moins de l’avoir déjà rencontrée… Mais où et quand, mystère…Linda rangea l’épreuve dans son sac à main en croco, régla le tirage et prit congé du photographe. Une fois dans la rue, elle se dit qu’elle n’était pas plus avancée qu’avant de faire développer ce foutu négatif.C’est alors que son téléphone portable se mit à vibrer dans son sac àmain…
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DEUXIÈME MARCHE Une chambre dans un hôtel de Las Vegas. Un décor clinquantbaigné d’une savante lumière tamisée… La pendule en faux bronze posée sur la fausse cheminée en faux marbre sonna 10 heures du soir. Samedi soir à 10 heures pile… C’était précisément le jour et l’heure choisis par Linda pour son rendez-vous avec un certain Charlie Hoffman. C’est elle qui avait choisi le jour et l’heure, alors que ce client aurait préféré un autre jour. Le vendredi soir. Mais elle avait fait valoir qu’elle déjà prise ce jour-là.  Charlie Hoffman était journaliste. Il travaillait pour le même journal que Bob Seagal, le «Los Angeles Enquirer».  Présentement, il avait ôté la veste de son costume et desserré son nœud de cravate pour se donner de l’air.Puis il se resservit un verre de scotch pour tromper son angoisse. On frappa à la porte. Trois coups. Le signal… Le cœur de Charliefit une embardée dans sa poitrine. C’était elle… Il saisit sur un pupitre leremote controlqui commandait à distance l’ouverture de la porte. Une jeune fille se tenait dans l’embrasure.─ Bonsoir, dit-elle d’une voix douce où traînait un léger accent. Vous m’avez invitée et me voici… Linda ressentit une certaine gêne chez son hôte. ─ Vous aviez peur que je sois en retard? dit-elle. ─ Non, pas dutout… bredouilla Charlie.─ Si, je le sais… Les hommes pensent que les femmes sont toujours en retard… En tout cas, je suis là devant vous, en chair et en os ! Est-ce que vous me trouvez belle ?  Elle était ravissante.
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 De taille moyenne, mince, avec des cheveux gris cendrés attachés en queue de cheval, de grands yeux noirs cernés de violet où luisait un regard vif et audacieux. Son visage était fardé de blanc, ce qui exagérait outrancièrement la pâleur naturelle de son teint.  Elle portait des escarpins noirs à talons hauts, des bas noirs, une robe à manches courtes, noire, coupée dans un tissu qui lui collait au corps comme par magnétisme, pour s’épanouir au niveau de la taille et s’arrêter juste au-dessous du genou. ─ Comme un ange… soupiraCharlie. ─ Oh! Il faut se méfier des apparences… dit-elle en entrant dans la chambre et en refermant la porte derrière elle. Je ne suis peut-être pas celle que vous croyez…─ Impossible, bredouilla-t-il. Je vous trouve exquise. C’est vous Linda Moreno? ─ Oui! répondit-elle d’une voix enjouée. C’est ainsi qu’on m’appelle dans le monde des vivants…Linda Moreno… Avec un nom pareil, elledevait être latina ou peut-être gypsy…Sans savoir pourquoi, il pensait qu’elle devait avoir du sang gitan. Sans doute à cause du soupçon d’insolence quiperçait en elle et qui faisait penser à la Esméralda… Soudain,elle releva sa robe jusqu’au-dessus du sillon de ses bas noirs qui coupait ses cuisses blanches, puis elle se posa délicatement au bord du lit en écartant légèrement les cuisses. Elle n’avait pas de culotte. ─ Alors qu’est? dit-elle en faisant-ce que vous attendez la moue. Je n’aime pas qu’on me fasse perdre mon temps! ─ C’est que… balbutia Charlie. Je voulais vous rencontrer seulement pour parler du meurtre de mon collègue Bob Seagal
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