Jean-Baptiste Rousseau — C a n t a t e sAdonisLe dieu Mars et Vénus, blessés des mêmes traits, Goûtaient les biens les plus parfaits,Qu’aux cœurs bien enflammés le tendre Amour apprête ; Mais ce dieu superbe et jaloux,D’un œil de ...
Le dieu Mars et Vénus, blessés des mêmes traits, Goûtaientles biens les plus parfaits, Qu’aux cœurs bien enflammés le tendre Amour apprête ; Maisce dieu superbe et jaloux, D’un œil de conquérant regardant sa conquête, Fit bientôt aux plaisirs succéder les dégoûts.
Uncœur jaloux ne fait paraître Quedes feux qui le font haïr ; Et,pour être toujours le maître, L’amantdoit toujours obéir.
L’Amourne vа point sans les Grâces ; Onn’arrache point ses faveurs ; L’emportementni les menaces Nefont point le lien des cœurs.
Uncœur jaloux ne fait paraître Quedes feux qui le font haïr ; Et,pour être toujours le maître, L’amantdoit toujours obéir.
La déesse déjà ne craint plus son absence ; Et, cessant de l’aimer sans s’en apercevoir, Fait atteler son char, pleine d’impatience, Et vole vers les bords soumis à son pouvoir. Làses jours coulaient sans alarmes, Lorsqu’un jeune chasseur se présente à ses yeux : Elle croit voir son fils : il en a tous les charmes ; Jamais rien de plus beau ne parut sous les cieux ; Et le vainqueur de l’Inde était moins gracieux, Le jour que d’Ariane il vint sécher les larmes.
Faune,d’un sourire, Approuveleur choix : Lejaloux Satyre Fuitau fond des bois ; EtPan, qui soupire, Briseson hautbois.
Il aborde en tremblant la charmante déesse : Latimide pudeur relève ses appas : LesGrâces, les Ris, la Jeunesse, Marchentau devant de ses pas ; Et du plus haut des airs, l’Amour avec adresse, Fait partir, à l’instant, le trait dont il les blesse. Quedésormais Mars en fureur Gronde,menace, tonne, éclate ; Amants, profitez tous de sa jalouse erreur. Des feux trop violents font souvent une ingrate : On oublie aisément un amour qui fait peur, Enfaveur d’un amour qui flatte.
Quele soin de charmer Soitvotre unique affaire ; Songezque l’art d’aimer, N’estque celui de plaire.