L’Archi-Sot
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Variétés historiques et littéraires, Tome VIIL’Archi-Sot, écho satyrique.16051L’Archi-Sot, echo satyrique .Omne regnum in se divisum desolabitur.Quatrain.Pouvres sots, pourquoy laissez-vousUn prince quy par trop vous aime ?Responce.Ne sçavez-vous pas que les fousNe se cognoissent pas eux-mesmes ?MDCV. In-8.Puisque vous le voulez, nous le saurons, Madame,Quand je devrois chercher les papiers sibilinsQu’un refus de Tarquin feit jeter dans la flamme,2Ou feuilleter dix ans le roolle des villains .Je ne sçaurois trouver ceste charge onereuse :Si c’est vostre plaisir, c’est mon contentement.Aussy je l’entreprends, et la peine est heureuse,Puisqu’elle a pour soutien vostre commandement.Nous savons son pays, ses parens et sa race,Non ce qu’ores ils sont, mais ce qu’ils ont esté,Et si son entretien, ses pompes, son audace,Sympathisent au moins avec sa qualité.Ô Dieu ! quy de là-hault contemplez tant de coursesEt donnez tout à coup arrest aux charlatans,Ou vous, dieux des fripons et des coupeurs de bourses,Donnez-moy promptement le secours que j’attends.Apprenez-moy bientost, non pas vostre pratique,Mais quels sont les parens de vostre favory,Afin que, le chantant d’un esprit prophetique,Je fasse voir à tous que vous l’avez chery.À quy m’adresseray-je, ô dieux ! je vous supplie ?Si je suis obligé, vous sçavez bien pourquoy.Hé ! quy voudra de vous ayder à mon envieEt m’oster maintenant d’un si fascheux esmoy ?Echo. — Moi.Quelle voix favorable ...

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Variétés historiques et littéraires, Tome VII L’Archi-Sot, écho satyrique. 1605
1 L’Archi-Sot, echo satyrique. Omne regnum in se divisum desolabitur.
Quatrain. Pouvres sots, pourquoy laissez-vous Un prince quy par trop vous aime ?
Responce. Ne sçavez-vous pas que les fous Ne se cognoissent pas eux-mesmes ? MDCV. In-8.
Puisque vous le voulez, nous le saurons, Madame, Quand je devrois chercher les papiers sibilins Qu’un refus de Tarquin feit jeter dans la flamme, 2 Ou feuilleter dix ans le roolle des villains .
Je ne sçaurois trouver ceste charge onereuse : Si c’est vostre plaisir, c’est mon contentement. Aussy je l’entreprends, et la peine est heureuse, Puisqu’elle a pour soutien vostre commandement.
Nous savons son pays, ses parens et sa race, Non ce qu’ores ils sont, mais ce qu’ils ont esté, Et si son entretien, ses pompes, son audace, Sympathisent au moins avec sa qualité.
Ô Dieu ! quy de là-hault contemplez tant de courses Et donnez tout à coup arrest aux charlatans, Ou vous, dieux des fripons et des coupeurs de bourses, Donnez-moy promptement le secours que j’attends.
Apprenez-moy bientost, non pas vostre pratique, Mais quels sont les parens de vostre favory, Afin que, le chantant d’un esprit prophetique, Je fasse voir à tous que vous l’avez chery.
À quy m’adresseray-je, ô dieux ! je vous supplie ? Si je suis obligé, vous sçavez bien pourquoy. Hé ! quy voudra de vous ayder à mon envie Et m’oster maintenant d’un si fascheux esmoy ? Echo. — Moi.
Quelle voix favorable offre à m’oster de peine Et me rendre sçavant de cela que je veux ? 3 Les deesses quy sont dedans ceste fontaine , Ou bien les Innocens, favorisent mes vœux. Echo. — Eux.
Peut bien estre vrayment que saint Innocent mesme, Non tant comme patron que comme son voisin, Me desire advertir (sçachant bien que je l’ayme) Que pour estre des siens il est un peu trop fin.
Car la fille de l’air ne seroit pas logée Parmy les Innocens du quartier Saint-Denys. Il est vray que peut-estre elle s’y est rengée Pour voir nostre badin, qu’elle prend pour Narcys.
Je me ry, belle Nymphe, et repare mon crime. J’ay tort, je le sçay bien, j’ay prophané ton nom ; Mais je l’auray vrayment desormais en estime. Regardes si tu veux que je m’en aille ou non. Echo. — Non.
Elegie.
Bien donc, puisque tu veux oublier mon offence, Je te veux contenter par mon obeissance, Demeurant avec toy quelque espace de temps, Car, si je ne te voy, pour le moins je t’entends. Echo, je te promets de chanter ton miracle Et de ne vanter plus du Pelien l’oracle, Si j’ay ceste faveur d’estre rendu certain De ce que je te veux demander ce matin. Je m’y suis obligé, mon devoir m’y convie. Si le devoir me presse, aussi faict mon envie. Ne me refuse point, et je jure les yeux Plus reverez par moy que le Styx par les dieux, De prier que le ciel ta langueur adoucisse Et blasmer avec toy la rigueur de Narcisse. Je veux te figurer ce malotru badaut De qui la voix s’elève et le courage fault, Afin que, te monstrant seulement sa figure, Tu donnes les couleurs propres à sa peinture, Et que par ton moyen je monstre en peu de mots Qu’Angoulevant n’est pas luy seul prince des sots ; Qu’il en est encore un dont la folle sagesse Le doibt mettre en procez pour troubler Son Altesse. Pauvre prince ! faut-il qu’un nombre de menteurs, 4 Pour brouiller ton Estat, soyent tes competiteurs ! 5 Et voicy le grand sot qui s’en vient à ta porte Disputer à bon droit les armes que tu porte ! Je le voy, tout bouffy de colére, emporté, Temeraire, attenter contre ta Majesté ; Je le voy, ce grand sot, je le voy qui s’apreste D’avoir le chaperon que tu porte à la teste ; Et, pour te faire veoir que ce desir le poinct, Il a de tes couleurs enrichy son pourpoinct. Il est de toyle blanche et luy servant de voille Pour cacher son desseing soubs l’ombre de la toile. 6 Il est vray que la soye ou le taffetas vert Quy paroît sur la toile a son desir ouvert, Et monstre clairement qu’il se forme et se mire À ce grand corps des sots que tout le monde admire ; Il en a les couleurs, il en a les façons, Et peut dès à present en faire des leçons. Ce pourpoinct qu’on luy voit à diverses taillades Ne luy sert pas souvent en des jours de parades ; Un de taffetas gris, enrichy de ruban 7 Semblable à celuy-là de deffunt Martin Gan , Luy donne, ce dit-il, la façon courtisanne, Et, bien que sans habit il soit et sot et asne, Son pourpoinct blanc et vert, aux oreilles de foux, Fait voir appertement ce quy est le dessoubs. Il commence dejà de trayner à sa queue Les asnes et les sots qu’il rencontre à sa veue ; Il n’espargne non plus les grands que les petits. 8 Les brides et les trous qu’on voit à ses habits Sont pour les attacher, et je croy qu’il luy semble Qu’il peut joindre les foux et les asnes ensemble Soubs l’ombre que luy seul represente tous deux. Mais, s’il pouvoit encore y assembler les gueux,
Les tirer de Paris, et avec asseurance 9 Les mener bien avant dans la nouvelle France , Rechercher son Pactole, et là, nouveau Midas, Flûter comme un bouvier à ceux du Canadas. Il feroit beaucoup plus de te laisser, grand prince, Paisible gouverneur des foux de ta province, Non point chanter aux sots, afin de les renger, Que ton predecesseur fust fils d’un boulanger, Et, par droict successif, qu’il doibt estre en ta place, Ou pour en estre extraict, ou pour ce qu’il te passe En degrez de folie, et qu’encore il reçoit L’honneur d’estre dict sot, quelle que part qu’il soit. Je m’afflige de voir ta Majesté reduitte Soubs le joug de celuy quy faict ceste poursuitte ; Je m’afflige de voir qu’un sujet de ta loy Ne fasse point estat d’un prince tel que toy, Foule aux pieds ta grandeur, et d’une gloire sotte Te ravisse des mains ton sceptre et ta marotte, Mesprise ton pouvoir et ne cherche jamais Que de te contrefaire en tout ce que tu fais. Je le vy l’autre jour, en la rue de la Harpe, 10 Quy, pour mieux t’imiter, se bravoit d’une escharpe Dont les bouts luy passoient par dessus le manteau, Ainsy que les cordons d’un valet de bourreau Qui, bien ayse d’aller commencer son espreuve, Faict voir en les monstrant qu’il va faire chef-d’œuvre Sur un tel que ce sot qui, prince pretendu, Pourroit bien estre un jour par chef-d’œuvre pendu. Ce n’est en cela seul qu’il ose, temeraire, Offencer ton Altesse et la veut contrefaire ; Il est d’autres forfaicts encore convaincu : Ce que tu porte au ventre, il l’a souvent au cu ; On te foite devant, et luy c’est par derrière ; Le barbier le va voir, tu vas voir la barbière, Et, bien que vous soyez en vos maux approchans, Les remèdes pourtant en sont bien differens. Je les laisse à penser à tous ceux quy m’entendent, Aux oreilles de quy ces miens carmes s’estendent, Car cela sent le feu quy naguère allumé Sembloit avoir desjà tout le mal consumé. Mais passe pour ce coup, j’y reviendray peut-estre ; Laissons là mon envie, elle est encore à naistre. Je m’esloigne un peu trop du desseing que j’ay pris ; Il faut que de respect je borne mes escripts. Prince, regarde à toy : c’est une chose unique De te voir gourmandé d’un courtaut de boutique. Ferme-luy tes palais ; commande à tes archers, À tes gardes du corps, à tes asnes legers, Qu’ils luy courent dessus, et pour telle vergongne 11 Qu’on en fasse une enseigne à l’hostel de Bourgongne. J’apprendray cependant de la fille de l’air Ce que j’en dois savoir avant de m’en aller. Echo, je te reviens figurer la peinture De ce prince asne-sot dont j’ay faict la posture, Œ Te le faire cognoistre, et par enseignemens Le monstrer à sa trongne ou ses habillemens 12 Aussy naïvement que si Zeuze ou Paraze , 13 Appelle ou Protogène, avoit depeint un aze . Il a, premierement, les sourcils retirez, Les yeux plus que les chats et les foux egarez, Le front noirement jaune, où la crasse s’escaille Comme le plastre neuf sur la vieille muraille, Quand le masson n’a pas haché par quelque endroict Ou qu’il n’a pas mouillé son mur comme il falloit ; Le rire aussy plaisant comme est une grimace D’un petit marmiton que son maistre menace, Le nez long et petit, par le bas racourcy Comme celuy d’Aelle et de ses sœurs aussy, Dont le goust en est doux et la senteur friande 14 Comme de ces trois Sœurs qui gastoient la viande Du malheureux Phinée avant que Calaïs
Et son frère germain s’en feussent esbahis. Belle figure à voir, sa gorge est yvoirine Comme un os que les chiens rongent à la cuisine ; Sa lèvre espoisse est jaune et son bec relevé Comme sont les bourletz qu’on met sur le privé. Aussy ne croy-je point qu’un retraict soit si salle, Bien qu’il soit tout remply de matière fecalle, Que peut estre sa bouche, où toujours il reçoit Ce quy de plus vilain se prononce et se voit. La face assez jaunastre, où, s’il a chaud, il colle 15 Une jaune sueur à la farine folle ; Ridé par tous endroicts comme les fruicts de Tours Qu’on faict pour conserver cuire dedans les fours, Farineux et cendreux comme ces vieilles figues Dont tous les Provencaulx se rendent si prodigues Sur le port de Marseille, ou cent fois plus villain, Flestry, crasseux, ridé, que n’est un parchemin Qui depuis trois cents ans rode les auditoires Des sedentaires cours et des ambulatoires ; Le menton comme un os quy sert aux cordonniers Lorsqu’ils veulent polir et lisser les souliers, Et, bref, ce quy le rend admirable au possible Par dessus tous les sots, est sa barbe invisible. Je t’ay dict, chère Echo, quels estoient ses habits : Il porte assez souvent un bas d’estame gris, 16 Un manteau de vinaigre où je pourrois m’estendre, Si le manteau de cour ne me faisoit entendre Et n’avoit clairement exprimé celuy-cy, Quy couvre notre sot et le repare aussy. Lorsqu’il a quelques fois son chapeau sur l’oreille, Il s’escoute marcher et se mire à merveille ; Il retourne la teste, et de trois en trois pas, Pour regarder ses pieds, porte les yeux en bas. Quand il a bien marché d’un costé de la rue, Il se tourne de l’autre afin qu’on le salue, Regarde son chapeau, et de deux en deux tours Le montre à ses amis du costé du velours, Se panade à plaisir, et par ses esquipées Crache à ses ennemys cent mille coups d’espées, Faict tarir en leur source, au bruict de son tousser, Les discours quy se vont en torrens amasser, Fulmine de la langue et met tout en deroute Lorsqu’il voit que personne à son gré ne l’escoute ; Mais il ne pense pas, le courtaut mal apris, Si l’on parle de luy, que c’est avec mespris ; 17 Que les petits enfans quy sont à la Licorne Luy font, pour s’en mocquer, à toute heure les cornes ; Qu’on le chifle partout, et que ses compagnons Luy donnent en passant tous les jours des lardons ; Ou encor qu’il y songe il a si peu de rate, Qu’il veult s’esterniser comme fit Erostrate. Il est si peu rusé qu’au despens du renom Il veut après sa mort faire vivre son nom. Ce renom que je dy ne se prend pas au pire : C’est l’honneur que j’entends, où tout le monde aspire. Pauvre sot, où cours-tu ? que te doivent les cieux, Pour leur faire savoir le desdain de tes yeux ? Ils n’ont pas descouvert par quelle tromperie Tu te faisois mignon dedans l’argenterie : Chacun le sçavoit bien. Estois-tu si peu cault, Toy quy te dis Cardan, de te monstrer lourdault En tes inventions, et, jouant de la grippe, Porter comme un badin des galoches de trippe ? Ne pensois-tu pas bien que tu serois cogneu Et qu’on t’en chiffleroit comme il est advenu ? Qu’il les faudroit quitter à la porte du vice Si tu voulois encor te remettre en service ? Et ne jugeois-tu pas qu’un jour on sauroit bien Comme faict pour braver un homme quy n’a rien, Et qu’on verroit encor sur tes pieds la poussière Du règne de laquais que tu laisses derrière ?
Ah ! que tu fus deceu quand tes inventions Elevèrent ton vol et tes devotions ! Et que tu fus trompé quand tu meis en pratique Tes desseings mal tissus dedans une boutique ! Echo, n’est-il pas vray, je says bien qu’aujourd’huy L’on doibt compter le bien dont il a trop jouy ? Echo. — Ouy. Mauvais signe pourtant, dont on ne doibt attendre Que ce quy le fera soubz son vice respandre. E. — Pendre. Ô grand Dieu ! tu le juge, et d’où provient cecy ? Cela ne se doibt pas executer ainsy. E. — Si. Comment ! cela se doibt ? ô pauvre miserable ! Où t’annoncera t’on ta peine espouvantable ? E. — En table. En table ! qu’est-ce à dire ? Après ses passetemps, On luy donneroit là de beaux allegemens ! E. — Je mens. Tu mens, je le croy bien ; mais dy moy, je te prye, Comment il doibt mourir, pour passer mon envie. E. — En vie. Il doibt mourir en vie ! Ah ! je ne le croy pas, Mais bien mourir vivant le jour de son trepas. E. — Repas. Le jour de son repas ! Quoy ! la mort le doibt suyvre Quand, saoul de tant de vols, il sera las de vivre ! E. — Yvre. Il doibt mourir yvre ; encore est-ce un grand bien De courir à sa mort et de n’en sentir rien. E. — Rien. Le vin luy fera donc ce sinistre message, Et l’aisle de son vol luy fera ce passage. E. — Pas sage. « Ce n’est pas estre sage et vivre comme il faut Que de n’avoir point d’aisle et vouloir voler hault. Il se faut mesurer, et donner à sa voille, Selon les propres vents, ce qu’il y faut de toille, Non point s’elargir trop et recevoir le vent Qui nous est plus nuisible et nous pert plus souvent. » En quoy se reduiront, ce pendant que j’y songe, Ses fausses verités qui couvrent son mensonge ? E. — En songe. Mais, puisqu’il doit mourir, ce courtaut desloyal, Au moins asseure moy quy doibt causer son mal. E. — Son mal. Son mal ! il en a faict, mais il est plus coulpable Pour estre marchant feint que larron veritable. En quel lieu peut bien estre un de qui les discours Plaisoient à ce badin quant il parloit atours ? E. — À Tours. Comment ! nostre courtaut n’a plus icy personne Quy des fleurs de bien dire à toute heure luy donne ! Je m’en estonne bien, et voudrois toutefois Lui pouvoir discourir de ce sot quelques fois, Car j’apprendrois de luy des nouvelles certaines Plus que des Innocens, d’Echo ny des fontaines. Nymphe, je te rends grâce, attendant que le temps Me face revenger de ce que tu m’apprens. Si j’en veux savoir plus, il faudra que j’envoie Mes desirs promptement se pourmener à Bloye. Toute fois, j’en sçay trop, les dieux m’ont revelé Ce quy m’avoit esté jusqu’icy recelé. J’ay tacitement sceu quelle estoit sa patrie Et veu dans un miroir sa genealogie, Que je porte à madame, affin de m’acquitter D’une telle promesse et de la contenter.
Stances.
18 Je reviens donc à vous, garny de pioleries , Vous dire qu’en un coup l’air, la terre et les cieux M’ont conté du badaud toutes les tromperies Quant je les ay priez seulement par vos yeux.
La terre me portoit, l’air prenoit ma parolle, Et les cieux mes desirs, des dieux favorisez ; Au bruict de votre nom les postillons d’Eole Furent (bien que mutins) à l’instant apaisez.
Si bien que j’escoutois d’Echo la resonnance Et recevois des dieux les revelations : Grand pouvoir de vos yeux, dont la seule ordonnance Faict reserrer les vents dedans leurs regions.
Je suis donc faict savant au gré de vostre envie, De mille plaisans traicts qu’a faict nostre courtaut, Et l’Echo m’a conté qu’il y va de sa vie Si, pour s’en exempter, il ne gaigne le haut.
Mais, pour ce que je voy la matière un peu grande Et qu’il y faut donner du temps et du loisir, Je vous veux supplier d’accorder ma demande Et remettre à demain ce discours de plaisir.
Aussy bien je cognois que ce que j’en sçay touche À ce pauvre chastré dont tout le monde rit : C’est pourquoy j’ayme mieux vous le dire de bouche, Pour le favoriser, que non pas par escrit.
Sonnet. Allusion sur le nom du protecteur de l’Archi-Sot.
Hé bien ! te voilà donc plongé dans une fange Dont tu ne peux sortir si tu n’as mon secours ! Dis ce que tu voudras, il faudra que tu manges Le remède appresté contre tes beaux discours.
Au mont où ton esprit peu capable se range, Les ardants ou luisants n’ont quasi plus de cours ; 19 Ou j’estime cela morsure de phalange , Pour laquelle guarir ma voix est mon secours.
Beau fils, dont le visage est pareil au lard jaulne, Ton pouvoir se mesure à la longueur d’une aulne, Dont tu ne peux juger que la fin soit le bout.
Tu sais bien que je puis apaiser ton audace ; Si ma parolle a peu te bannir d’une place, Gardes que mes escrits ne t’exhilent du tout.
1. Cette pièce est dirigée contre quelque farceur qui vouloit faire concurrence auPrince des sotset qui, pour prendre un titre au dessus du sien, s’était adjugé (Angoulevent), celui d’archi-sot. Peut-être est-ce la même querelle sur laquelle le Parlement fut appelé à statuer, et qui s’étoit élevée au sujet de laPrincipauté des Sots, entre Angoulevent, qui la déclaroit sa propriété exclusive, et Valentin le Comte (Valeran), qui, avec Jacques Resneau (Rameau), prétendoit la lui disputer. Angoulevent, défendu par maistre Julien Peleus, obtint gain de cause ; mais le procès fut très long, si l’on en juge par la date des arrêts successivement rendus. Le premier est du 2 mars 1604, le dernier du 19 février 1608. Cette grave affaire étoit donc pendante, en 1605, quand parut cette pièce. On peut consulter, pour les détails, leRecueil des plaidoyersmaître Julien Peleus, les de Récréations historiquesDreux du Radier, t. 1, p. 41–42, et de la Place, de Choix des Mercures, t. 56, p. 158–160, et 5 pour Valeray, Tallem., édit. in-12, t. 10, p. 40 ; l’Estoille, édit. du Panthéon, II, p. 424 ; l’Espadon satyrique, 1680, in-12, p. 25.
2. C’est-à-dire les registres énormes où se trouvoient portés les noms de tous ceux qui payoient l’impôt.
3. Cesdéesses sont les nymphes de Jean Goujon à lafontaine des Innocents, placée alors au coin de la rue aux Fers et de la rue Saint-Denis. L’auteur les invoque ici parceque c’est a leur pied qu’Angoulevent, avec la troupe des farceurs de l’hôtel de Bourgogne, venoit faire samontreparade. Il  ou devoit aller aussi au carrefour de la Pointe-Saint-Eustache, près de cePont-Alais quidonné son nom à un autre avoit farceur. V.Nouvellesde Des Periers, édit. Louis Lacour, p. 133–134, et notre tome 3, p. 142.
4. Ceci donne raison à notre première note.
5. L’entrée par lagrande porteétoit un des points en litige. Angoulevent prétendoit qu’il y avoit seul droit, et l’arrêt du 19 février 1608 lui conserva en effet ce privilége. Il y est dit que Nicolas Joubert (c’étoit le vrai nom d’Angoulevent) sera « maintenu et gardé en sa possession et jouissance de sa Principauté de Sots et des droits appartenant à icelle, même du droit d’entrée par la grande porte dudit hôtel de Bourgogne, etc. »
6. Le vert étoit, comme on sait, la couleur des fous.
7. Je ne sais ce qu’étoient ce Martin Gan et l’espèce de pourpoint dont il semble avoir amené la mode ; mais je suppose que celui-ci auroit pu fort bien s’assortir avec les fameuses chausses à lamartingaleparle Rabelais. Le Duchat pense qu’on les dont appeloit ainsi parceque la forme en étoit empruntée aux mariniers deMartègue en Provence. C’est donc peut-êtreMartéguan, et nonMartin Gan, qu’il faut lire ici. V. Rabelais, l. 1, ch. 20, et l. 2, ch. 7.
8. C’est-à-dire que sonhaut de chaussesétoit attaché aupourpointavec des aiguillettes, et qu’il étoitaiguilleté, comme l’Harpagon de Molière.
9. On faisoit alors rafle de tous les gueux irlandois et autres qui se trouvoient à Paris, et on les embarquoit pour leCanadaouNouvelle-France. Les quartiers qui en fournissoient le plus étoient ceux desFossés-Montmartre(V. Tallemant, édit. in-12, t. 2, p. 23), de la Ville-Neuve-sur-Gravois, où se trouvoit, comme on sait, l’une des plus fameusescours de miracle, etc. C’est sans nul doute à cause des nombreuses bandes de mendiants qui en partoient pour le Canada que cette partie de Paris commença de s’appeler alors la Nouvelle-France, nom qui s’est étendu au faubourg Poissonnière, qui en étoit la continuation. La caserne qui s’y trouve l’a seule gardé.
10. Se parer avec forfanterie. Ce mot est dans Montaigne, liv. 3, ch. 10.
11. C’est-à-dire un tableau bouffon, uneaffiche-caricature, qu’on mettra à la porte du théâtre de l’hôtel de Bourgogne.
12. Les peintres Zeuxis et Parashius.
13. Un âne.
14. Les harpies.
15. On voit que les farceurs se couvroient le visage de farine, comme notre Pierrot, qui a seul gardé la tradition. De là le sobriquet d’enfarinésqu’on leur donne partout. On voit par un passage de Montaigne (liv. 3, ch. 10), que c’étoit déjà l’usage des apprentis badins de son temps. On lit dans lesJeux de l’inconnu(1645, in-8, p. 158), au sujet de Jean Farine, qui, lui non plus, ne doit pas son nom à autre chose : « À le voir si blanchastre, il semble qu’il soit déjà enfariné. »
16. On appeloit habit devinaigre, selon le Dictionnaire de Trévoux, tout habit trop léger porté en hiver, sans doute parcequ’il n’empêchoit pas le froid de vouspiquer.
17. Sans doute le cabaret dela Licorne, qui a donné son nom à l’une des rues de la Cité. En 1816, selon la Tynna, il s’y trouvoit encore, au nº 8, un marchand de vin ayant une licorne pour enseigne. On disoit, pour prédire à quelqu’un quelque bonne raillerie :Les petits enfants en iront au vin et à la moutarde, d’où le nom trivial demoutardà donné ceux-ci. Ce que disent ces deux vers répond évidemment à cette locution, qui se trouve
déjà dans Villon, et que Malherbe, dans ses lettres à Peiresc, employoit encore.
18. C’est-à-dire couvert de bigarrures. On connoît le proverbe : «Piolé riolé comme la chandelle des Rois», qui étoit en effet de deux couleurs. Un fol, comme celui qui parle dans ces stances, pouvoit bien s’exprimer ainsi. Les badins, selon Henri Estienne, dans la préface de sonApologie pour Hérodote, portoient des « robes bigarrées de bandes larges. »
19. Sorte d’insecte. Voy. Ronsard, éd. Jannet, t. 1, p. 395, note 4.
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