Prosper Mérimée et l Académie des Inscriptions et Belles-Lettres - article ; n°4 ; vol.114, pg 626-648
24 pages
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Comptes-rendus des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres - Année 1970 - Volume 114 - Numéro 4 - Pages 626-648
23 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1970
Nombre de lectures 78
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Monsieur André Dupont-
Sommer
Prosper Mérimée et l'Académie des Inscriptions et Belles-
Lettres
In: Comptes-rendus des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, 114e année, N. 4, 1970. pp. 626-
648.
Citer ce document / Cite this document :
Dupont-Sommer André. Prosper Mérimée et l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres. In: Comptes-rendus des séances de
l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, 114e année, N. 4, 1970. pp. 626-648.
doi : 10.3406/crai.1970.12575
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/crai_0065-0536_1970_num_114_4_12575PROSPER MÉRIMÉE
ET L'ACADÉMIE DES INSCRIPTIONS
ET BELLES-LETTRES
PAR
M. ANDRÉ DUPONT-SOMMER
SECRÉTAIRE PERPÉTUEL
Messieurs,
Le 23 septembre 1870, à onze heures du soir, expirait à Cannes,
à l'âge de soixante-sept ans, l'un des personnages les plus étonnants
du dix-neuvième siècle, Prosper Mérimée. Le 10 septembre, après
le désastre de Sedan et la chute de l'Empire, il avait quitté Paris,
menacé par l'invasion allemande, et s'était réfugié auprès de miss
Fanny Lagden, une amie de toujours, qui, avec sa sœur, l'avait
souvent accueilli à Cannes. Elle veilla sur ses derniers instants : « II
a paru s'en aller dans un doux sommeil », a-t-elle rapporté dans
une lettre écrite le lendemain de sa mort. Aujourd'hui, Mérimée
repose dans le cimetière anglais de Cannes, face à l'Esterel ; en 1879,
quand elle mourut, Fanny Lagden se fit enterrer sous la même dalle
que son illustre ami, et leurs deux noms sont associés sur la stèle funér
aire, très simple, qui se dresse sur la tombe.
Prosper Mérimée avait été élu membre de l'Académie des Inscrip
tions et Belles-Lettres le 17 novembre 1843, à l'âge de quarante ans.
Durant vingt-sept ans, il fit donc partie de notre Compagnie. A l'oc
casion du centenaire de sa mort, en ce discours que nos usages
invitent votre Secrétaire perpétuel à faire devant vous, lors de la
séance publique annuelle, et qui doit ou bien retracer la vie et les
travaux d'un confrère disparu ou bien traiter d'un point relatif
à l'histoire ou aux activités de l'Académie, je voudrais évoquer le
souvenir d'un de nos confrères les plus célèbres et dont l'œuvre,
dans l'une des disciplines les plus chères à notre Compagnie, l'étude
des Antiquités de la France, fut et reste hautement estimable. MÉRIMÉE ET L* ACADÉMIE DES INSCRIPTIONS 627 PROSPER
Je ne parlerai point de l'écrivain, de l'auteur de ces nouvelles
universellement connues que sont, par exemple, Colomba et Carmen ;
ses talents proprement littéraires lui ouvrirent, comme chacun sait,
les portes de l'Académie française, et il appartient à d'autres de
célébrer l'homme de lettres et de décrire sa riche et puissante per
sonnalité aux dons si divers. Je parlerai ici seulement de Mérimée
en tant qu'il fut membre de notre Compagnie : je rappellerai les
titres éminents qu'il put produire pour y entrer, je conterai les
circonstances de son élection, je montrerai enfin avec quelle exacti-
tube et quelle conscience il s'acquitta des tâches que l'Académie eut
à lui confier.
Quand, le 27 mai 1834, Prosper Mérimée fut nommé par Adolphe
Thiers, alors ministre de l'Intérieur, au poste d'Inspecteur général
des Monuments historiques, en remplacement de Ludovic Vitet pour
qui ce poste avait été créé en 1830, le nouvel Inspecteur général
avait trente ans. Il n'avait guère jusque-là étudié l'archéologie,
mais, auprès de son père, Léonor Mérimée, qui était peintre, secré
taire de l'École des Beaux- Arts, il avait pris du moins le goût de la
peinture ; en fait, il avait publié plusieurs nouvelles, qui l'avaient
lancé dans le monde des lettres, et aussi des essais comme La
Jaquerie, scènes féodales (1828) et la Chronique du temps de Charles IX
(1829), qui révélaient sa curiosité d'esprit et ses talents en matière
d'histoire. En réalité, un assez maigre bagage pour les responsabilités
qu'il allait assumer ; il ignorait tout notamment des problèmes
techniques de l'architecture, ce qui est une assez grave lacune pour
un inspecteur des monuments historiques. Mais il était doué d'une
intelligence lucide et puissante qui lui permit d'assimiler rapidement
les premiers rudiments d'archéologie qui lui faisaient défaut, riche
aussi d'une vitalité et d'une capacité de travail exceptionnelles.
Tout de suite, il dévore les travaux du comte Arcisse de Caumont,
qui n'est guère plus âgé que lui, mais qui s'est déjà signalé par
diverses publications archéologiques et qui sera l'un des fondateurs
de l'archéologie du Moyen Age en France. Le 2 juillet 1834 — cinq
semaines seulement après sa nomination — , une lettre qu'il lui
adresse nous le montre sur le point de partir pour sa première
tournée d'inspection ; il est en pleine fièvre, tout rempli d'idées et
de projets, désireux aussi de s'entourer des meilleurs conseils1 :
« Au moment de commencer ma tournée d'inspection, lisons-nous,
j'éprouve plus que jamais le besoin de réclamer les conseils des
1. Prosper Mérimée. Correspondance générale établie et annotée par Maurice Par-
turier (1941-1964), I, p. 287 sq. Dans les citations des lettres de Mérimée nous respectons
scrupuleusement l'orthographe et la ponctuation de l'auteur, tout comme l'a fait
Maurice Parturier. 628 COMPTES RENDUS DE L'ACADÉMIE DES INSCRIPTIONS
personnes qui, par de longues et savantes études, ont acquis la
connaissance parfaite des monuments du Moyen-Age. C'est à vous,
Monsieur, que je devais m'adresser d'abord. Vos ouvrages m'ont
donné le goût de l'archéologie, et depuis longtemps je désirais avoir
l'honneur de faire votre connaissance. Mon prédécesseur, M. Vitet,
m'a parlé souvent de votre complaisance. Puis-je espérer, Monsieur,
que vous voudrez bien quelquefois correspondre avec son succes
seur ? » Mérimée lui expose ensuite en détail le programme de son
voyage, judicieusement étudié, mais fort chargé, qui doit durer
cinq mois et le conduire de Vézelay à Lyon, à Brou, puis à Avignon,
Orange, Aiguës-Mortes, Nîmes, Perpignan, Toulouse et Albi. Que
de noms évocateurs ! Du premier coup, il a saisi l'extrême urgence
des mesures à prendre, et il déploie toute son activité et son zèle
en vue d'assurer le mieux et le plus rapidement possible la sauve
garde de nos monuments historiques. « Vous savez mieux que per
sonne, Monsieur, poursuit-il, à combien d'ennemis nos antiquités
sont exposées. Les réparateurs sont peut-être aussi dangereux que
les destructeurs. J'ai bien peu de moyens d'être instruit des projets
de ces Messieurs. Je serais bien reconnaissant si vous vouliez bien
me donner ou me faire donner avis de leurs méfaits lorsqu'ils
viendront à votre connaissance. Je ferai de mon mieux pour plaider
auprès du Ministre la cause de nos vieux monuments. Soutenu
de l'autorité de votre nom, j'aurais plus de chances de succès.
J'ai demandé que toutes les réparations, projetées pour les monu
ments historiques, fussent soumises au conseil des bâtiments civils
avant d'être mises à exécution... »
Quelques jours après, le 6 juillet, c'est au ministre même, Adolphe
Thiers, qu'il écrit, et la déférence du ton s'allie dans cette lettre
à la précision et à la fermeté des mesures qu'il préconise1 : « Le
mauvais goût qui a présidé à la plupart des réparations faites depuis
deux siècles à nos monuments du moyen âge, a laissé des traces
peut-être plus funestes que les dévastations, suites de nos guerres
civiles et de la révolution. Les Protestans et les Terroristes se sont
contentés de mutiler des statues, de détruire quelques ornements
tandis que souvent les réparateurs ont complètement changé l'aspect
des édifices qu'ils ont voulu restaurer. Il suffira de citer comme
exemple de disparates choquans les églises de St Germain-des-Prés
et de St Gervais. Le portail de l'abside de la premi&

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