Le curé de Tours
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Description

La Comédie humaine - Études de moeurs. Deuxième livre, Scènes de la vie de province - Tome II. Sixième volume de l'édition Furne 1842. Extrait : L’abbé Chapeloud, égoïste aimable et indulgent, devina la passion de son ami, ce qui n’était pas difficile, et la lui pardonna, ce qui peut sembler moins facile chez un prêtre. Mais aussi le vicaire, dont l’amitié resta toujours la même, ne cessa-t-il pas de se promener avec son ami tous les jours dans la même allée du mail de Tours, sans lui faire tort un seul moment du temps consacré depuis vingt années à cette promenade. Birotteau, qui, considérait ses vœux involontaires comme des fautes, eût été capable, par contrition, du plus grand dévouement pour l’abbé Chapeloud. Celui-ci paya sa dette envers une fraternité si naïvement sincère en disant, quelques jours avant sa mort au vicaire, qui lui lisait la Quotidienne : ― Pour cette fois, tu auras l’appartement. Je sens que tout est fini pour moi. En effet, par son testament, l’abbé Chapeloud légua sa bibliothèque et son mobilier à Birotteau. La possession de ces choses, si vivement désirées, et la perspective d’être pris en pension par mademoiselle Gamard, adoucirent beaucoup la douleur que causait à Birotteau la perte de son ami le chanoine : il ne l’aurait peut-être pas ressuscité, mais il le pleura. Pendant quelques jours il fut comme Gargantua, dont la femme étant morte en accouchant de Pantagruel, ne savait s’il devait se réjouir de la naissance de son fils, ou se chagriner d’avoir enterré sa bonne Badbec, et qui se trompait en se réjouissant de la mort de sa femme, et déplorant la naissance de Pantagruel.

Informations

Publié par
Nombre de lectures 38
EAN13 9782824710075
Langue Français

Extrait

HONORÉ DE BALZA C
LE CU RÉ DE T OU RS
BI BEBO O KHONORÉ DE BALZA C
LE CU RÉ DE T OU RS
Un te xte du domaine public.
Une é dition libr e .
ISBN—978-2-8247-1007-5
BI BEBO OK
w w w .bib eb o ok.comLicence
Le te xte suivant est une œuv r e du domaine public é dité
sous la licence Cr e ativ es Commons BY -SA
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encourag é à le fair e .
V ous de v ez aribuer l’ o euv r e aux différ ents auteur s, y
compris à Bib eb o ok.LE CU RÉ DE T OU RS
A D A V I D , ST A T U AI RE.
La duré e de l’ œuv r e sur laquelle j’inscris v otr e nom, deux fois
illustr e dans ce siè cle est très-pr oblématique ; tandis que v ous
grav ez le mien sur le br onze qui sur vit aux nations, ne fût-il
frapp é que p ar le v ulg air e marte au du monnay eur . Les
numismates ne ser ont-ils p as embar rassés de tant de têtes
cour onné es dans v otr e atelier , quand ils r etr ouv er ont p ar mi
les cendr es de Paris ces e xistences p ar v ous p er p étué es au
delà de la vie des p euples et dans lesquelles ils v oudr ont v oir
des dy nasties ? A v ous donc ce divin privilég e , à moi la
r e connaissance .
DE BALZA C.
   l’automne de l’anné e 1826, l’abbé Bir
otte au, princip al p er sonnag e de cee histoir e , fut sur pris p ar uneA av er se en r e v enant de la maison où il était allé p asser la soiré e .
Il trav er sait donc aussi pr omptement que son emb onp oint p ouvait le lui
p er mer e , la p etite place déserte nommé e le Cloître , qui se tr ouv e der rièr e
le che v et de Saint-Gatien, à T our s.
L’abbé Bir oe au, p etit homme court, de constitution ap ople ctique ,
1Le curé de T our s Chapitr e
âg é d’ envir on soix ante ans, avait déjà subi plusieur s aaques de g oue .
Or , entr e toutes les p etites misèr es de la vie humaine , celle p our laquelle
le b on prêtr e épr ouvait le plus d’av er sion, était le subit ar r osement de
ses soulier s à lar g es agrafes d’ar g ent et l’immer sion de leur s semelles.
En effet, malgré les chaussons de flanelle dans lesquels il s’ emp
aquetait en tout temps les pie ds av e c le soin que les e cclésiastiques pr ennent
d’ eux-mêmes, il y g agnait toujour s un p eu d’humidité ; puis, le lendemain,
la g oue lui donnait infailliblement quelques pr euv es de sa constance .
Né anmoins, comme le p avé du Cloîtr e est toujour s se c, que l’abbé Bir
otte au avait g agné tr ois liv r es dix sous au wisth chez madame de Listomèr e ,
il endura la pluie av e c résignation depuis le milieu de la place de l’ Ar
chevê ché , où elle avait commencé à tomb er en ab ondance . En ce moment,
il car essait d’ailleur s sa chimèr e , un désir déjà vieux de douze ans, un
désir de prêtr e ! un désir qui, for mé tous les soir s, p araissait alor s près
de s’accomplir ; enfin, il s’ env elopp ait tr op bien dans l’aumusse d’un
canonicat vacant p our sentir les intemp éries de l’air  : p endant la soiré e ,
les p er sonnes habituellement réunies chez madame de Listomèr e avaient
pr esque g aranti sa nomination à la place de chanoine , alor s vacante au
Chapitr e métr op olitain de Saint-Gatien, en lui pr ouvant que p er sonne ne
la méritait mieux que lui, dont les dr oits long-temps mé connus étaient
incontestables. S’il eût p erdu au jeu, s’il eût appris que l’abbé Poir el, son
concur r ent, p assait chanoine , le b onhomme eût alor s tr ouvé la pluie bien
fr oide . Peut-êtr e eût-il mé dit de l’ e xistence . Mais il se tr ouvait dans une de
ces rar es cir constances de la vie où d’heur euses sensations font tout
oublier . En hâtant le p as, il obéissait à un mouv ement machinal, et la vérité ,
si essentielle dans une histoir e des mœur s, oblig e à dir e qu’il ne p ensait
ni à l’av er se , ni à la g oue .
Jadis, il e xistait dans le Cloîtr e , du côté de la Grand’r ue , plusieur s
maisons réunies p ar une clôtur e , app artenant à la Cathé drale et où log e aient
quelques dignitair es du Chapitr e . D epuis l’aliénation des biens du cler g é ,
la ville a fait du p assag e qui sép ar e ces maisons une r ue , nommé e r ue de
la Psalee , et p ar laquelle on va du Cloîtr e à la Grand’r ue . Ce nom indique
suffisamment que là demeurait autr efois le grand Chantr e , ses é coles et
ceux qui vivaient sous sa dép endance . Le côté g auche de cee r ue est
r empli p ar une seule maison dont les mur s sont trav er sés p ar les ar
cs2Le curé de T our s Chapitr e
b outants de Saint-Gatien qui sont implantés dans son p etit jardin étr oit,
de manièr e à laisser en doute si la Cathé drale fut bâtie avant ou après cet
antique logis. Mais en e x aminant les arab esques et la for me des fenêtr es,
le cintr e de la p orte , et l’ e xtérieur de cee maison br unie p ar le temps, un
ar ché ologue v oit qu’ elle a toujour s fait p artie du monument magnifique
av e c le quel elle est marié e . Un antiquair e , s’il y en avait à T our s, une des
villes les moins liérair es de France , p our rait même r e connaîtr e , à l’ entré e
du p assag e dans le Cloîtr e , quelques v estig es de l’ar cade qui for mait jadis
le p ortail de ces habitations e cclésiastiques et qui de vait s’har monier au
caractèr e g énéral de l’é difice . Situé e au nord de Saint-Gatien, cee maison
se tr ouv e continuellement dans les ombr es pr ojeté es p ar cee grande
cathé drale sur laquelle le temps a jeté son mante au noir , imprimé ses rides,
semé son fr oid humide , ses mousses et ses hautes herb es. A ussi cee
habitation est-elle toujour s env elopp é e dans un pr ofond silence inter r ompu
seulement p ar le br uit des clo ches, p ar le chant des offices qui franchit les
mur s de l’église , ou p ar les cris des choucas nichés dans le sommet des
clo cher s. Cet endr oit est un désert de pier r es, une solitude pleine de
physionomie , et qui ne p eut êtr e habité e que p ar des êtr es ar rivés à une nullité
complète ou doués d’une for ce d’âme pr o digieuse . La maison dont il
s’agit avait toujour s été o ccup é e p ar des abbés, et app artenait à une vieille
fille nommé e mademoiselle Gamard. oique ce bien eût été acquis de la
nation, p endant la T er r eur , p ar le pèr e de mademoiselle Gamard ; comme
depuis vingt ans cee vieille fille y log e ait des prêtr es, p er sonne ne
s’avisait de tr ouv er mauvais, sous la Restauration, qu’une dé v ote conser vât un
bien national  : p eut-êtr e les g ens r eligieux lui supp osaient-ils l’intention
de le léguer au Chapitr e , et les g ens du monde n’ en v o yaient-ils p as la
destination chang é e .
L’abbé Bir oe au se dirig e ait donc v er s cee maison, où il demeurait
depuis deux ans. Son app artement avait été , comme l’était alor s le
canonicat, l’ objet de son envie et son hoc erat in votis p endant une douzaine
d’anné es. Êtr e le p ensionnair e de mademoiselle Gamard et de v enir
chanoine , fur ent les deux grandes affair es de sa vie ; et p eut-êtr e
résumentelles e x actement l’ambition d’un prêtr e , qui, se considérant comme en
v o yag e v er s l’éter nité , ne p eut souhaiter en ce monde qu’un b on gîte , une
b onne table , des vêtements pr opr es, des soulier s à agrafes d’ar g ent, choses
3Le curé de T our s Chapitr e
suffisantes p our les b esoins de la bête , et un canonicat p our satisfair e
l’amour-pr opr e , ce sentiment indicible qui nous suiv ra, dit-on,
jusqu’auprès de Dieu, puisqu’il y a des grades p ar mi les saints. Mais la conv oitise
de l’app artement alor s

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