AY LA PETILLANTE
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Description

Première année d'enseignement en primaire.
Service militaire.
Maintien sous les drapeaux en Algérie.

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Publié par
Publié le 11 juillet 2020
Nombre de lectures 13
Langue Français
Poids de l'ouvrage 3 Mo

Extrait

PROLOGUEQui ne connaît la trilogie de Marcel Pagnol ? ‘‘La gloire de mon père’’‘‘Le château de ma mère’’‘‘Le temps des secrets’’Cette vie d’instituteur public au siècle der-nier avec ses rentrées scolaires, ses grandes vacan-ces, ses ambitions professionnelles et sa vie fami-liale. Un régal, avec l’accent du midi et le chant des cigales. On connaît moins la vie d’un instituteur de l’autre réseau, le privé confessionnel. C’est le pari qui est fait ici de la dépeindre en suivant Jeannot, l’un des fils du directeur d’école catholique, et croyez-le, les anecdotes sont croustillantes, parfois banales, d’autres peu édifiantes voire scabreuses, le plus souvent ignorées. C’est incarné dans une famille certainement unique en son genre puisque, le temps venu, le pè-re et deux des fils y enseigneront de conserve plu-sieurs années de suite, une entreprise familiale... impossible dans l’enseignement public...Les lieux sont réels. Les faits, comme chacun sait, sortis de l’imagination de l’auteur. Par extraordi-naire, si des personnages ou des institutions venaient à s’y reconnaître ce serait pure coïncidence... Jeannot adulte sera suivi dans cette seconde partie car la marque indélébile de l’enfance forge le devenir...2
Le berceau du champagne  Jean-François ne restera que peu de temps dans ce nouvel environnement, une année scolaire en classe de terminale au lycée public d’Epernay, une demie an-née en poste d’instituteur à l’école Saint-Augustin de la paroisse d’Aÿ. Les deux années suivantes il fera son service militaire à Epinal et sera maintenu sous les drapeaux en Algérie. Pour l’inscription au lycée public, ce n’est pas son père qui s’en chargea, on se doute pourquoi. C’est le frère aîné, toujours lui, qui vint présenter son cadet au principal dont on connaît déjà la rigidité pour avoir interdit le collier de barbe, pourtant taillé avec soin, et en dépit de l’absence de ce point dans le règlement in-térieur  Jean-François découvrira ainsi la vie dans l’autre réseau d’enseignement. Il pourra se faire une idée plus juste des différences et des pertinences de l’un et de l’autre tout en constatant que les mêmes manques, les
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mêmes insuffisances, les travers semblables s’y déve-loppaient allègrement. Il prendra donc, l’année suivant l’obtention de son Bac, sa classe de cours élémentaire, sans plus de préparation. À lui de faire ses préparations, ses correc-tions, sa progression en se servant de ses souvenirs d’é-colier, des manuels et de son intuition pédagogique. Ça lui réussira assez bien tant pour lui c’était sa vocation dans l’attente d’une autre plus élevée, lui semblait-il, mais imprécise encore. Ce qui est certain c’est qu’il fut invité avec son directeur de père dans la famille d’un renommé pro-ducteur de champagne dont il avait le fils en classe, était-ce la famille Gosset, le gérant ? était-ce la famille Roger elle-même, la quelle fournissait la reine d’Angle-terre ? Toujours est-il qu’il fit pour la première fois un repas tout au champagne dans une demeure de rêve et une ambiance amicale voire reconnaissante. Il apprit plus tard que les caves du Champagne Pol Roger, l’au-tre branche de la famille, creusées dans le calcaire du sol d’Epernay, s’étendaient sur plusieurs kilomètres et que les bouteilles se comptaient en millions !  Marité toujours aussi soucieuse de sa ligne choi-sira un poste actif dans les caves Deutz, encore un grand du champagne. Elle y travaillera courageusement jusqu’à ce que le choix du couple l’en délivrera. Dédé entra dans la vie active. Il sera opérateur à la salle de cinéma du lieu. Il faut imaginer les énormes machines qu’étaient les projecteurs pour longtemps en-
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core, jusqu’à l’arrivée du numérique. Il faut imaginer la chaleur provoquée par les charbons incandescents, la surveillance constante de leur consumation, de l’avance alors à régler. Il faut imaginer les kilomètres de films, les nombreuses bobines à changer sur l’un des appa-reils quand l’autre tourne. C’était son travail les soirs de séance, les matinées et les soirées le dimanche. Pendant la semaine il partait ici ou là dans la région proche ou parfois très lointaine pour mettre en place des écrans géants panoramiques, réparer des projecteurs ou enco-re installer des cabines complètes de projections. Son patron pouvait compter sur lui, rapidement il s’aperce-vra de la perle qu’il avait recruté. Après plusieurs années de bons et loyaux servi-ces, il regagnera la Bretagne pour ouvrir son atelier de tournage-fraisage, il emploiera Bernard son cadet. L’a-telier deviendra rapidement une entreprise artisanale prospère.  Pierrot macérait au petit séminaire de Reims, tel un cornichon entre deux petits oignons blancs. Un évè-nement inattendu viendra mettre un peu de change-ment temporaire dans sa vie de reclus. Le feu se déclara dans les greniers du bâtiment. Sûrement spontané-ment… Dans l’attente de la remise en état des dortoirs gorgés de l’eau des pompiers il retrouvera sa famille pour quelques jours, sans trop de regret d’abréger son trimestre.
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Dagobert,l’amiL’aumônerie du lycée d’Epernay organisait, pour les élèves volontaires de terminales, une marche de plus de quarante kilomètres, la nuit, pour se rendre à Notre-Dame de l’Épine. Jean-François dont les questions reli-gieuses ne l’avaient pas quitté s’y inscrivit. C’est ainsi qu’au cours de cette randonnée particulière il ren-contra, même s’il faisait nuit noire, Dagobert le seul étudiant de Côte d’Ivoire de l’établissement. Ce pèleri-nage lui apportera cette amitié qui devait durer. Notre-Dame de l’Épine était aussi réputée depuis des siècles pour faciliter la rencontre amoureuse en vue du maria-ge, il s’en remit au rite : on ne sait jamais, ça peut tou-jours servir !  Dagobert qui logeait à Aÿ sera reçu souvent dans la famille tel un roi mage. Nombreux furent les foyers du quartier qui le choyèrent. Il fut de toutes les sorties, de toutes les fêtes de ses connaissances. En ef-fet à cette date Jean-François et ses amis installèrent le foyer de jeunes de la paroisse, en fait des jeunes gar-6
çons seulement, l’heure n’était pas encore à la mixité généralisée. Activités modestes mais utiles pour faire le lien entre les uns et les autres.  Baby-foot, ping-pong, jeux de société et de car-tes, écoute de musiques choisies, préparation de séan-ces de théâtre d’ombres, courtes randonnées, réveillons de fin d’années, préparation de chars pour le défilé ré-mois du rassemblement des jeunesses agricoles et, pour les aînés, animations des offices dominicaux et prépara-tion du séjour sous tentes à Trèves en Allemagne.  Après le service militaire Jean-François retrouve-ra son ami Dagobert et gardera des liens très forts avec lui bien que ce dernier se trouvât à suivre ses études dans la région parisienne. Des années plus tard, le temps que Dagobert se marie avec une belle ivoirienne -elle avait concouru pour l’attribution du titre de miss Côte d’Ivoire-qu’ils engendre un beau garçon et Jean-François sera appelé à Paris pour transporter la famille dans sa Dauphine, la fameuse Léa, jusqu’à Caen. La marraine invitait pour célébrer le baptême de Didier, l’enfant dont il était lui, le parrain. Plus tard encore il se rendra à Sarcelles pour ré-ceptionner la Mercédès neuve et enfourner famille et bagages direction Valence, nouvelle étape de l’étudiant dans ses études à la faculté libre de droit. Quelle fierté, conduire un tel carrosse quand il était habitué à des vé-hicules d’occasion de beaucoup moins de prestige et quel contentement d’avoir réussi à sortir sans trop de difficultés de la circulation intense de la capitale, même
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s’il s’y était perdu un temps, confondant direction et porte et qu’il dût s’arrêter pour demander son chemin !Installé à Valence Dagobert aura l’occasion de rencontrer plus souvent son ami. Un jour ils se ren-dront en promenade sur les bords de l’Ardèche suivant l’équipe habituelle des collègues et amis baroudeurs. Le hasard, mais en était-ce un, voulut qu’une jeune institutrice trouvât sa place dans la Mercédès du convoi près de Jean-François. Sur place les baroudeurs sacs au dos s’enfoncèrent dans les gorges de l’Ardèche pour la journée. La couple Dagobert et leur petit Di-dier profitèrent de tout ce temps, un peu long à leur gré, sur les plages de galets. Au retour chacun s’installa comme il était venu dans les véhicules. L’institutrice de nouveau à l’arrière près de Jean-François. Là, grâce à l’ami Dagobert qui n’y était pour rien mais qui fut le maillon évident, les deux passagers de l’arrière pendant les deux heures du trajet trouvèrent le temps de se tou-cher la main et l’on sait à quoi cela peut mener surtout quand on se souvient du rite prémonitoire du pèlerina-ge à Notre-Dame de l’Épine. Quelques mois plus tard, la famille Dagobert en tenue traditionnelle africaine déboulait dans les HLM de Tournon pour fêter les fiançailles du futur couple. Pour marquer la journée on ira passer la fin d’après-midi dans le Vercors tout proche. Ce sera l’occasion de faire des photos inoubliables des trois familles, deux blanches, la troisième noire sur fond de neige immacu-lée.
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Jo, le bienheureux La famille, depuis le départ d’Yvon à l’armée, manquait-elle d’une présence ? C’est probable puisquel’instituteur fit venir de Bretagne son neveu Jo pour re-trouver le nombre sept, le nombre parfait, disait-on. Marguerite sa mère l’envoyait comme si elle le plaçait en maison de correction ! Fantasme de maman qui veut à tout prix la réussite de sa progéniture. son installation s’y trouva bien, très bien,Jo, dès vraiment mieux que chez lui. Il n’avait plus à subir les vociférations de son père de retour de sa tournée de facteur lequel s’accommodait trop facilement d’autres tournées de cidre quand ce n’était pas de gnole. Il n’a-vait plus non plus à supporter son destin de fils destiné à la prêtrise dans un petit séminaire qui le contraignait à réussir. Avec son oncle directeur, Augustine, sa ma-ternelle tante, son cousin Jean-François instituteur, sa cousine Marité, ses cousins Bernard et Marc et, pen-dant les congés, Pierrot, l’autre promis à la chasteté, il vivait heureux au delà de ses espérances. C’est ce qu’il ne cesse de rappeler aux uns et aux autres quand adulte 9
il les rencontrera. Il a fait découvrir à Jean-François que de fait la vie familialesi elle n’était pas parfaite, elle était assez épanouissante : ça discutait beaucoup, ça riait, ça se déguisait, ça ne ratait pas une occasion de fêter anni-versaires avec invités ou copains de passage et rare-ment ça se mangeait la laine sur le dos.  Marité y mettra un bémol. Elle aimait réellement Bernard Thibault le fils d’une collègue institutrice. Un beau gars, sans doute brave aussi comme ses sœurs l’é-taient. Il passait à la maison, venant de Reims. L’ amou-reux adopté par la famille ne l’était pas par un seul, l’autre Bernard. Celui-ci manifestait sa jalousie sournoi-sement d’abord, de plus en plus ouvertement ensuite. Marité c’était sa sœur, sa grande sœur, il n’était pas question de la laisser toucher par quiconque et encore moins par un Bernard, lui était déjà là ! L’amoureux partit servir en Algérie et s’établit alors une correspondance fréquente avec sa chérie. Le jaloux comprit ce qu’il pouvait tirer de cette situation. Il surveilla l’arrivée du facteur et préleva systématique-ment le courrier destiné à sa sœur qui ne revenait de son travail qu’après la distribution. Avait-il conscience de la gravité de son geste ? Pourquoi continuait-t-il obstinément la collecte de ces lettres d’amour ? Ne se sentait-il pas coupable d’une telle bassesse ? À sa défense on pourra dire qu’il n’était pas le seul jaloux dans la famille, sa grand-mère mater-nelle, disparue tragiquement probablement en raison 10
de ce terrible travers, sa maman, Jean-François lui-même aussi face à son aîné mais on en parlera plus tard. De plus il avait de qui tenir, c’était un Moisan, comme sa grand-mère paternelle autoritaire et comme l’oncle du bout de la longère de la Croix Landry qui terrorisait toute la fratrie. On l’appelait le Dindon puis-que sa femme c’était la Dinde ! Et quand il glougloutait au passage devant sa demeure c’était le sauve qui peut !L’extrême portée de son geste répété aboutit à la fin des relations entre les quasi-fiancés. Marité dépitée tournera son regard vers d’autres partenaires.
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