Plongeons-nous un instant dans un monde hypothétique. Imaginons que le peloton, dans son intégralité, utilise le même matériel. Quelles pourraient être les incidences sur les performances ? Bradley Wiggins, Joaquin Rodriguez, Vincenzo Nibali, occuperaient-ils tout autant les premiers strapontins de la hiérarchie mondiale actuelle ? Les forces et les faiblesses de chacun seraient-elles gommées d'un coup de baguette magique, et ce de par l'utilisation d'un matériel uniforme utilisé par tous les belligérants du monde de la petite reine ? "Je ne pense pas que la différence se fasse au niveau du matériel, avance avec assurance le très expérimenté Sébastien Hinault. On dispose tous de matériel de pointe. Il est vrai que certains constructeurs sont un peu meilleurs que d'autres. Cela peut avoir une incidence à la limite dans les chronos, mais ce n'est pas aussi important que dans le monde de la F1, c'est évident. Les grandes différences se font avant toute chose sur les qualités physiques de chacun. D'autres paramètres rentrent aussi en ligne de compte comme l'alimentation, la préparation par exemple.
Dans une équipe comme Sky, il y a certes un budget différent avec une possibilité de tests en soufflerie plus accrue. Mais en termes de matériel pur, il n'y a pas spécialement d'écart qui permettrait de combler une différence de talent. Dans le cyclisme, on est moins dépendant de la technologie qu'en F1, encore une fois. Chez les professionnels, on ne voit pas spécialement de nouveaux vélos". Dans un marché ultra-concurrentiel, où il n'est guère simple de faire face à la puissance économique, même si tous les coureurs disposaient du fameux plateau Osymétric, pour Jean-Louis Talo, le résultat serait le même au final : "Si tout le monde avait le même vélo, avec un plateau Osymétric ce serait le meilleur qui l'emporterait, confirme le concepteur du pédalier de Bradley Wiggins. Je suis tranquille de ce côté-là si tout le monde l'utilisait. Les Français, ce n'est pas demain la veille qu'ils vont le mettre d'autant qu'ils vivent tous au crochet des sponsors. J'ai tablé avec des gens ouverts d'esprit. Les Britanniques n'ont pas d'histoire avec le vélo, mais eux font de la science". Pour le président du MPCC, envisager une telle uniformité du matériel est à la fois inconcevable et ne nivellerait pas les valeurs : "Aujourd'hui, tout le monde a le même vélo, ajoute Roger Legeay.
Une dépendance technologique dans le cyclisme qui prête moins à conséquence qu'en Formule 1
Mais en termes de position et d'égalité des chances, elle est pleinement respectée depuis la position extrême dans le contre-la-montre. Après, avoir tous le même vélo reviendrait à dire avoir tous la même marque, c'est totalement exclu. De nos jours il y a beaucoup de marques qui distribuent des vélos et souhaitent être les partenaires des équipes. Il y a une concurrence saine en amélioration de matériel, en poids, en rigidité, en sécurité. Je pense aussi que l'UCI dans le cadre de l'égalité des chances respecte bien les choses. Il y a toujours des innovations, mais cela fait partie des règles. Cela étant, le plateau ovale existe depuis bien longtemps. Le pédalier utilisé par Bradley Wiggins a été employé il y a longtemps.
Ce n'est pas une découverte. On nous l'avait proposé il y a environ vingt ans ou vingt-cinq ans. Est-ce que cela génère un moins, certainement pas. Un plus ? Cela reste à démontrer. Cela ne serait pas juste de dire que Wiggins a remporté le Tour avec un plateau différent des autres". En d'autres termes, la réponse du débat est très limpide. C'est toujours le meilleur qui l'emporte à la fin.
