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Article paru dans Les Echos, le 15 juin 2005. Derrière les délocalisations, la mutation du système productif. Frédérique Sachwald. Les délocalisations sont ...

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Article paru dans Les Echos, le 15 juin 2005
Derrière les délocalisations, la mutation du système productif
Frédérique Sachwald
Les délocalisations sont souvent considérées comme des facteurs de désindustrialisation
inquiétants, alors qu’elles s’inscrivent dans l’évolution des économies avancées vers des
activités plus productives. Ce paradoxe s’explique par la forte visibilité des délocalisations et
la faible visibilité de leurs effets positifs sur l’économie. L’arbre des délocalisations tend ainsi
à cacher la forêt de la mutation des systèmes productifs des pays industriels.
Le débat public est d’abord influencé par la forte visibilité des délocalisations. L’entreprise
qui délocalise transfère la production d’un bien, de composants ou d’un service dans un pays
où les coûts sont plus faibles. Elle ferme une usine et en ouvre une autre à l’étranger pour
optimiser ses coûts, d’où l’impression qu’elle pourrait être incitée à revenir sur sa décision.
Les pertes d’emplois dues aux délocalisations dans les pays à bas salaires sont par ailleurs
concentrées sur les secteurs et les régions qui emploient une proportion importante de
salariés peu qualifiés. La visibilité des délocalisations a incité les observateurs à étendre la
notion, qui est devenue un bouc émissaire de l’accroissement du chômage. Certains
considèrent l’ensemble des investissements dans les pays émergents comme des
délocalisations, alors que l’attractivité de ces pays s’explique largement par le dynamisme de
leur marché local. La sous-traitance internationale, qui ne suppose pas d’investissement,
voire l’accroissement des importations en provenance des pays émergents est aussi parfois
considéré comme un indicateur des délocalisations. Cette extension à l’ensemble des
échanges avec les pays à bas salaires revient à contester le développement de ces
échanges, sans contribuer à résoudre le problème sous-jacent du chômage. De nombreuses
études ont en effet montré que les importations en provenance des pays à bas salaires
n’expliquent qu’une part modeste des pertes d’emplois non qualifiés, largement dues au
progrès technique et à la concurrence par l’innovation. Autrement dit, les délocalisations sont
une des manifestations de la mutation des systèmes productifs et non le déterminant unique
des difficultés rencontrées par les personnes les moins qualifiées.
La faible visibilité des effets positifs des délocalisations, joue un rôle tout aussi important
dans le débat public. Les effets négatifs des délocalisations sur l’emploi sont directs et
immédiats, alors que les effets positifs sont plus diffus et plus lents à se manifester. Les
consommateurs bénéficient de la baisse des prix des produits due à leur fabrication – totale
ou partielle – dans des pays à bas salaires. Cette baisse représente un accroissement du
pouvoir d’achat, qui peut susciter des dépenses sur d’autres postes. La baisse des prix peut
aussi avoir des effets positifs pour le système productif. Aux Etats-Unis, dans les années 90,
la baisse des prix des produits informatiques importés a stimulé l’équipement des
entreprises, avec un impact positif sur la productivité et la croissance. La croissance actuelle
des importations de services pourrait aussi stimuler la productivité américaine, comme le
suggère le cas des services informatiques : au début de la décennie 2000, les pertes
d’emplois de programmeurs ont été compensées par la création d’emplois plus qualifiés, tels
que des ingénieurs systèmes. Les analyses sont moins nombreuses pour les pays
européens, mais le processus de destruction d’emplois (peu qualifiés) et de création
d’emplois (plus qualifiés) y semble souvent moins dynamique.
L’enjeu pour les politiques publiques n’est donc pas de défendre les activités menacées par
la concurrence des pays à bas salaires en l’état. Il s’agit plutôt d’analyser comment la France
pourrait tirer parti de la mutation du système productif. Deux phénomènes en particulier
doivent être mieux étudiés pour prévoir la redistribution, sectorielle et géographique, des
activités et les conséquences sur l’emploi. D’une part l’intégration croissante entre les
activités industrielles et les services. Une meilleure connaissance du rôle des services aux
entreprises industrielles pourrait nous amener à réviser notre évaluation de la
désindustrialisation. Elle permettrait aussi de souligner l’importance de l’innovation dans les
services. D’autre part, l’analyse de la dynamique des réseaux mondiaux de production et
d’innovation permettrait de mieux comprendre les facteurs de compétitivité des entreprises et
d’attractivité des territoires.
Responsable des Etudes Economiques, IFRI
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