La responsabilité pénale des entreprises en droit français - article ; n°2 ; vol.46, pg 669-681
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Description

Revue internationale de droit comparé - Année 1994 - Volume 46 - Numéro 2 - Pages 669-681
13 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1994
Nombre de lectures 73
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Bernard Bouloc
La responsabilité pénale des entreprises en droit français
In: Revue internationale de droit comparé. Vol. 46 N°2, Avril-juin 1994. pp. 669-681.
Citer ce document / Cite this document :
Bouloc Bernard. La responsabilité pénale des entreprises en droit français. In: Revue internationale de droit comparé. Vol. 46
N°2, Avril-juin 1994. pp. 669-681.
doi : 10.3406/ridc.1994.4896
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ridc_0035-3337_1994_num_46_2_48962-1994 R.I.D.C.
LA RESPONSABILITÉ PÉNALE
DES ENTREPRISES
EN DROIT FRANÇAIS
Bernard BOULOC
Professeur à l'Université de Paris I
Le droit français tel qu'il avait été conçu en 1810, était d'abord un
droit légaliste et égalitaire, mais aussi un droit fondé sur la responsabilité
morale du délinquant (1). Aussi bien, si la volonté de ce dernier n'existait
pas et a fortiori si l'agent n'avait pas conscience, il n'y avait « ni crime
ni délit » (cf. la contrainte, la légitime défense ou la démence). La société
ne saurait punir en pareils cas, puisque le châtiment doit tenir compte
de la faute commise et décourager l'agent de recommencer. Le châtiment
n'aurait aucun sens.
De ces prémices, la jurisprudence devait tirer un principe, fondé
peut-être sur la règle de la personnalité des peines, celui de la responsabilité
pénale du fait personnel (2). Aussi bien, ce n'est qu'en cas de texte
particulier et précis que l'on pouvait envisager de retenir la
pénale d'une personne dans la participation à un fait collectif. C'est
qu'en effet, la criminalité collective — devenue très présente comme en
témoignent les bandes de jeunes délinquants, les bandes de gangsters, les
commandos de certaines organisations ou bien encore les organisations
spécialisées dans le trafic de la drogue, la traite des femmes, etc. —
n'était pas totalement ignorée en 1810. Les bandes criminelles étaient
connues, ce qui s'était traduit par certaines incriminations, comme l'asso-
(1) MERLE et VTTU, Traité de droit criminel, 1. 1, 6e éd., n°97.
(2) V. par ex. Crim., 16 déc. 1948, Bull. n°291; Crim., 26 févr. 1956, J.C.P.
1956.11.9304, note DE LESTANG. 670 REVUE INTERNATIONALE DE DROIT COMPARE 2-1994
ciation de malfaiteurs, la coalition de fonctionnaires ou certaines atteintes
à la sûreté de l'État. Par ailleurs, la loi avait spécialement incriminé la
participation occasionnelle à une infraction : c'est la théorie de la complic
ité qui permet de retenir contre tous les participants la même pénalité
objective, ce qui pouvait d'ailleurs être une cause d'aggravation de la
sanction du fait de la pluralité d'agents.
Pour importantes que puissent apparaître ces exceptions, elles confir
maient le principe : on est responsable de son fait personnel et un groupe
ment, en tant que tel, ne peut pas être responsable pénalement.
Néanmoins, sur le plan doctrinal, des critiques commençaient à poin
dre quant à l'irresponsabilité pénale des personnes morales. Puisqu'elles
ont un patrimoine, elles pourraient parfaitement subir des sanctions patr
imoniales. Par ailleurs, elles jouent un rôle non négligeable dans le domaine
économique, et elles peuvent être aussi nuisibles que des personnes physi
ques. C'est ainsi qu'en 1928 l'Association internationale de droit pénal
procédait à l'examen de ce thème et constatait que les morales
pouvaient, présenter un état dangereux se manifestant par la commission
d'infractions.
Concrètement, quelques expériences devaient être réalisées au lende
main de la deuxième guerre mondiale, notamment en matière d'entreprises
de pressse coupables de collaboration avec l'ennemi (ord. du 5 mai 1945),
ce qui devait faire apparaître quelques difficultés d'ordre procédural,
notamment quant à la représentation de la personne morale (3), ou quant
aux conséquences d'une mesure de grâce (4). Certaines autres devaient
être rapidement abandonnées, car elles emportaient une présomption de
participation à des agissements du seul fait que le groupement était présumé
avoir commis une infraction (cas de la loi du 15 septembre 1948 sur la
répression des crimes de guerre).
Quoi qu'il en soit, lorsqu'en 1974 a été mise en place une Commission
de réforme du Code pénal, la question de la place des groupements ou
des entreprises ne pouvait pas être éludée. C'est qu'en effet, différentes
affaires effectuées par l'intermédiaire de sociétés commerciales ou même
civiles défrayaient la chronique. Qu'il s'agisse des sociétés civiles foncières
faisant publiquement appel à l'épargne, ou bien de qui prenaient
le contrôle d'autres sociétés, les tribunaux avaient été amenés à se pronon
cer (5), et certains se demandaient s'il ne pouvait y avoir une cause de
justification tenant à l'existence d'un groupe dans le domaine du droit
pénal des sociétés (6). Et si l'existence d'une société dominante pouvait
(3) V. DAUVERGNE et HERZOG, « Problèmes de procédure concernant la responsabil
ité pénale des personnes morales », Rev. se. crim. 1962, p. 798.
(4) V. RYZIGER, « L'indemnisation des actionnaires de bonne foi des entreprises de
presse condamnées et le sort des actionnaires des entreprises graciées », Gaz. Pal. 1955.1.
Doc. 44.
(5) V. par ex. Crim., 27 juin 1972, D. 1972, p. 695 ; Rev. soc. 1973, p. 154, note
B. BOULOC ; Rev. se. crim. 1973, p. 114, note A. VITU ; Trib. corr. Paris, 16 mai 1974
(aff. Willot) ; Gaz. Pal 1974.11.288 ; Rev. soc. 1975, p. 657, obs. B. OPPETIT.
(6) V. LEAUTÉ, « La reconnaissance de la notion de groupe en droit pénal des
affaires », J.C.P. 1973.1.2551 ; TROCHU, JEANTIN et LANGE, « De quelques applications
particulières du droit pénal des sociétés au phénomène économique des groupes de sociétés »,
D. 1975, chr. p. 7. B. BOULOC : RESPONSABILITÉ PÉNALE DES ENTREPRISES 671
exclure la responsabilité, pourquoi cette société ne pourrait-elle pas être
personnellement responsable d'une infraction ?
Dans le même temps, le législateur français commençait à intervenir
en vue d'assurer la protection du consommateur contre les abus de la
grande distribution (lois du 22 décembre 1972, du 27 décembre 1973,
du 10 janvier 1978, etc.). Et surtout, la matière des ententes et des positions
dominantes donnait lieu à une refonte, les entreprises pouvant désormais
se voir infliger des sanctions par le ministre de l'Économie, selon la loi
du 19 juillet 1977 modifiant l'ordonnance du 30 juin 1945. On comprend,
dès lors, que stimulée par certaines législations étrangères (droit canadien,
notamment) comme par le projet de révision du Code pénal de 1934
(Projet Matter, art. 89 et 116), la Commission de réforme ait proposé
la responsabilité pénale des groupements dont « l'activité est de nature
commerciale, industrielle ou financière », en raison des infractions commis
es en leur nom et dans l'intérêt collectif par la volonté délibérée de
leurs organes. La proposition, sans être totalement novatrice, a été jugée
excessive, ou, au contraire révolutionnaire (7). L'avant-projet de 1983
proposait de retenir la responsabilité pénale des personnes morales, quelle
que soit leur nature (art. 30). Mais finalement, le projet de loi déposé en
février 1986 — et repris en 1989 — admettait la responsabilité des
personnes morales, à l'exclusion des collectivités publiques et des groupe
ments de collectivités publiques, dans tous les cas où la loi (ou le règle
ment) l'aurait prévu, étant admis que la responsabilité des personnes
morales n'exclut pas celle des personnes physiques pour les mêmes faits.
Après une relativement longue gestation parlementaire, ce dernier
projet, légèrement amendé, était adopté par le Parlement. Il figure dans
le livre Ier du Nouveau Code pénal par la loi du 22 juillet 1992.
Et, par suite de la loi du 16 décembre 1992 dite d'adaptation de la
législation en vue de l'entrée en vigueur du Nouveau Code pénal, dont
les effets ont été reportés de six mois, cette nouvelle disposition comme
d'aille

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