Le bijuridisme dans un système fédéral ou d autononnie locale - article ; n°2 ; vol.42, pg 469-494
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Description

Revue internationale de droit comparé - Année 1990 - Volume 42 - Numéro 2 - Pages 469-494
26 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1990
Nombre de lectures 12
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

M. Pierre Ortscheidt
Le bijuridisme dans un système fédéral ou d'autononnie locale
In: Revue internationale de droit comparé. Vol. 42 N°2, Avril-juin 1990. pp. 469-494.
Citer ce document / Cite this document :
Ortscheidt Pierre. Le bijuridisme dans un système fédéral ou d'autononnie locale. In: Revue internationale de droit comparé.
Vol. 42 N°2, Avril-juin 1990. pp. 469-494.
doi : 10.3406/ridc.1990.1975
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ridc_0035-3337_1990_num_42_2_1975R.I.D.C. 2-1990
LE BIJURIDISME
DANS UN SYSTÈME FÉDÉRAL
OU D'AUTONOMIE LOCALE
par
Pierre ORTSCHEIDT
Professeur à la Faculté de droit et des sciences
politiques et de gestion de Strasbourg
1. — Aux yeux des constituants successifs, la cause est entendue : la
République française est une et indivisible. Souvent pris comme syno
nyme, ces deux termes, consacrés pour la première fois par un décret du
25 septembre 1792 et repris ensuite dans la Constitution du 24 juin 1793,
correspondent néanmoins à deux aspirations : celle de sauvegarder l'unité
de la France contre toute tentative de retour aux divisions organiques
caractéristiques de l'Ancien régime et celle de garantir l'indivisibilité
de la souveraineté française qui doit pouvoir s'exercer sans partage sur
l'ensemble du territoire national (1). Reprise par les Constitutions posté
rieures, la double affirmation est cependant amputée dans l'actuel article
2 de la Constitution du 4 octobre 1958 qui se contente d'affirmer l'indivisi
bilité de la République. Sans doute faut-il voir dans cette évolution une
reconnaissance au moins implicite de la diversité des normes applicables
sur l'ensemble du territoire français.
2. — Au regard du droit français, poser la question du bijuridisme
amène à une double constatation. L'indivisibilité de la République interdit
(1) M. H. FABRE, « L'unité et l'indivisibilité de la République, réalité ? fiction
R.D.P., 1982, p. 603. 470 REVUE INTERNATIONALE DE DROIT COMPARÉ 2-1990
au pouvoir législatif et réglementaire tout transfert de compétence qui
investirait une autorité locale d'un pouvoir concurrent ou complémentaire
de même nature. Le droit français rejette tout système qui consacrerait
la coexistence de pouvoirs normatifs autonomes. C'est ce que rappelle,
entre autres, la décision du Conseil constitutionnel rendue le 25 février
1982 à propos de la loi du 2 mars 1982 relative aux droits et libertés des
communes, des départements et des régions (2) : « Le principe de légalité
exige à la fois le respect des attributions du législateur et celui des règles
supérieures du droit par lesquelles la Constitution adoptée par le peuple
français a proclamé l'indivisibilité de la République, affirmé l'intégrité du
territoire et fixé l'organisation des pouvoirs publics ». Aucune place ne
peut donc être faite en France à un système qui se réclamerait d'un
quelconque bi j uridisme .
3. — En revanche, il est certain que le principe de l'indivisibilité ne
s'oppose pas à l'existence de normes dont l'application n'est pas générali
sée à l'ensemble du territoire français ou qui sont propres à telle ou telle
portion de ce territoire. L'unité du pouvoir normatif n'a pas pour corol
laire l'uniformité des droits applicables. Le Conseil constitutionnel a donc
pu estimer que la promulgation d'un statut particulier de la région Corse
n'était pas contraire à l'article 2 de la Constitution (3).
4. — Le cas de la Corse est une illustration d'un phénomène plus
général et plus ancien : le caractère unitaire de la nation française peut
être tempéré par la multiplicité des régimes législatifs applicables. Pour
l'essentiel, ce phénomène est le produit de l'histoire. C'est, en effet, en
recouvrant la souveraineté sur les trois départements de l'Est, en 1918,
que le législateur a décidé le maintien provisoire de certaines dispositions,
donnant ainsi naissance à ce qu'il est convenu d'appeler le droit local
d'Alsace et de Moselle. L'histoire coloniale est également à l'origine
d'une application territorialement diversifiée des lois et règlements. Plus
particulièrement, la situation des départements et territoires d'outre-mer
implique une législation qui leur soit adaptée. D'autres exemples de
« droits locaux » pourraient être trouvés, mais leur portée est incontest
ablement moindre.
5. — À s'en tenir à l' Alsace-Moselle et aux anciennes colonies, on
constate que l'évolution de leur particularisme juridique s'est faite en sens
contraire. Décidé à titre provisoire, le maintien du droit local propre
aux trois départements de l'Est a été suivi d'une politique législative et
jurisprudentielle d'intégration qui progressivement a conduit à son déclin.
À l'opposé, la disparition de l'empire colonial s'est évidemment accompa
gnée de profondes mutations avec notamment la création des départe-
(2) Décision 82-137 D.C., Rec, p. 38 ; A.J.D.A. 1982, p. 303, obs. J. BOULOUIS ;
Rev. adm. 1982, p. 271, obs. R. ETIEN ; R.D.P. 1982, p. 1259, obs. L. FAVOREU ;
L. FAVOREU et L. PHILIP, Les grandes décisions du Conseil constitutionnel, 5e éd. , Paris,
Sirey, 1989, p. 504.
(3) Décision 82-138 D.C. du 25 fév. 1982, Rec, p. 41 ; R.D.P. 1982, p. 1259, obs.
L. ; Rev. adm. 1982, p. 382, obs. R. ETIEN ; L. FAVOREU et L. PHILIP,
op. cit., ibid. P. ORTSCHEIDT : BIJURIDISME DANS UN SYSTEME FEDERAL 471
ments et territoires d'outre-mer. C'est à leur égard que l'on peut parler
d'un véritable essor des dispositions spécifiques, l'heure n'étant plus à
l'assimilation, mais à la prise en compte et au respect de leurs particularis
mes.
I. LE DECLIN DU DROIT LOCAL D'ALSACE-MOSELLE
6. — Les trois départements, Bas-Rhin, Haut-Rhin et Moselle passè
rent sous la souveraineté allemande au moment de la guerre de 1870 et
le Traité de Francfort du 10 mai 1871 confirma la cession de ces territoires
à l'Allemagne. L'Alsace-Lorraine devint « Terre d'empire », directement
placée sous l'autorité impériale ce qui explique sans doute que son ordre
juridique ne fut pas immédiatement abrogé pour être assimilé à celui des
autres composantes de l'Empire allemand. Ce n'est que progressivement
que le droit allemand vint se substituer au droit français. Ainsi, le droit
civil français resta en vigueur jusqu'en 1900, date à laquelle fut introduit
le nouveau Code civil (B.G.B.) (4).
7. — Lorsqu'en 1918, l'Allemagne abdiqua de tous ses droits sur les
trois départements de l'Est, ceux-ci étaient dotés d'un régime juridique
propre composé d'une part des dispositions de droit français qui n'avaient
pas été abrogées, d'autre part, de la législation allemande appliquée
pendant la période d'annexion. L'ensemble forme le droit local au sens
strict du terme. Mais il faut également y ajouter celui issu d'une troisième
législation spécifique à ces départements et prise par le législateur français.
L'application d'un droit local alsacien-mosellan tient donc essentiellement
au refus des autorités françaises d'abroger le droit en vigueur au moment
du retour des départements concernés à la France. Mais outre le fait que,
très rapidement, de nombreuses dispositions du droit allemand furent
écartées, le droit local a subi une lente érosion due à l'action conjuguée
du législateur et de la jurisprudence. Cette évolution conduit aujourd'hui
à s'interroger sur l'avenir de ce droit (5).
A. — La naissance du droit local
8. — Soucieux de respecter les particularismes auxquels les Alsaciens-
Lorrains étaient attachés, les autorités françaises prirent le parti de main-
(4) F. IGERSHEIM, « Le droit français comme droit local 1870-1918 : droit d'État
fédéré ou droit provincial », in La situation du droit local alsacien-mosellan, Paris, 1986,
L.G.D.J., p. 142.
(5) Sur l'ensemble de la question, V. notamment ; F. LOTZ, Droit civil alsacien-
lorrain, Paris, Litec, 1977 ; J. REGULA, Le droit applicable en Alsace et Lorraine, Paris,
Dalloz, 1938 et mise à jour

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