Les performances des entreprises françaises implantées à l étranger
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Cet article évalue les performances des firmes multinationales dans l'industrie manufacturière française, et les compare à celles des entreprises uniquement exportatrices et domestiques. Les primes à l'implantation s'avèrent très significatives et dépassent largement les primes à l'exportation, indépendamment de la taille, de la conjoncture et du secteur d'activité. Cette hiérarchie se vérifie en tous points de la distribution conditionnelle de chaque variable par une régression quantile. Par ailleurs, les primes à l'implantation s'accroissent avec le nombre de filiales à l'étranger et sont plus marquées pour les filiales de groupe (en particulier étranger). Les meilleures performances des entreprises implantées à l'étranger s'expliquent en partie par un effet de sélection : investir à l'étranger s'accompagne de coûts fixes importants et nécessite un niveau de productivité relativement élevé. Toutefois, les firmes qui s'implantent pour la première fois à l'étranger, les primo-investisseurs, connaissent également une croissance significative de leurs ventes, de leur valeur ajoutée, de leurs effectifs et de leurs exportations ex post. L'implantation à l'étranger récompense ainsi les meilleures entreprises, qui consolident leur avantage par rapport aux autres firmes. Ce constat semble particulièrement vrai pour les filiales de groupes, qui se caractérisent à la fois par un effet de sélection et des effets d'apprentissage accrus.

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Langue Français

Extrait

ÉCONOMIE
Les performances des entreprises
françaises implantées à l’étranger
Alexandre Gazaniol*, Frédéric Peltrault* et Jean-Marc Siroen*
Cet article évalue les performances des frmes multinationales dans l’industrie manu-
facturière française, et les compare à celles des entreprises uniquement exportatrices et
domestiques. Les primes à l’implantation s’avèrent très signifcatives et dépassent lar -
gement les primes à l’exportation, indépendamment de la taille, de la conjoncture et du
secteur d’activité. Cette hiérarchie se vérife en tous points de la distribution condition -
nelle de chaque variable par une régression quantile. Par ailleurs, les primes à l’implan-
tation s’accroissent avec le nombre de fliales à l’étranger et sont plus marquées pour
les fliales de groupe (en particulier étranger). Les meilleures performances des entre -
prises implantées à l’étranger s’expliquent en partie par un effet de sélection : investir
à l’étranger s’accompagne de coûts fxes importants et nécessite un niveau de produc-
tivité relativement élevé. Toutefois, les frmes qui s’implantent pour la première fois à
l’étranger, les primo-investisseurs, connaissent également une croissance signifcative
de leurs ventes, de leur valeur ajoutée, de leurs effectifs et de leurs exportations ex post.
L’implantation à l’étranger récompense ainsi les meilleures entreprises, qui consolident
leur avantage par rapport aux autres frmes. Ce constat semble particulièrement vrai
pour les fliales de groupes, qui se caractérisent à la fois par un effet de sélection et des
effets d’apprentissage accrus.
* Université Paris-Dauphine, LEDa, F-75016 Paris, France et IRD, UMR225-DIAL, F-75010, Paris, France
Nous tenons tout d’abord à remercier Matthieu Crozet ainsi que les rapporteurs anonymes pour leurs remarques qui ont considérable-
ment contribué à l’amélioration de ce travail. Nous remercions également le cabinet de conseil Pramex International (Groupe BPCE), qui
a été à l’initiative de cette recherche et l’a soutenue financièrement. Alexandre Gazaniol est employé par Pramex International dans le
cadre d’une convention CIFRE passée avec l’Université de Paris Dauphine. Nous remercions par ailleurs Lionel Fontagné et Farid Toubal
ainsi que tous les participants du groupe de travail du Conseil d’Analyse Économique pour leurs commentaires lors d’une présentation
de ce travail. Enfin, nous remercions Laurence Germond et tous les services statistiques qui nous ont procuré les données et les infor-
mations nécessaires avec beaucoup de réactivité.
ÉCONOMIE ET STATISTIQUE N° 435-436, 2010 149l’occasion du lancement des États supérieure de 11 % et cette prime se retrouve À Généraux de l’industrie le 15 octobre dans la différence de salaire moyen et de taux
2009, le ministre de l’Industrie évoquait l’ins- de marge. Pour Bellone et al. (2008), les frmes
tauration d’une prime à la relocalisation de la exportatrices produisent 2,5 fois plus que les fr -
production fnancée par l’État « en fonction des mes simplement domestiques ; elles sont deux
montants d’investissement et du volume d’em- fois plus grandes, plus intensives en capital de
plois recréés ». En pleine crise économique, 24 % et versent des salaires plus élevés de 10 %.
cette proposition met en exergue les craintes La productivité du travail serait supérieure de
récurrentes associées à l’implantation à l’étran- 40 % mais décroissante avec la taille de l’en-
ger des entreprises françaises : les investisse- treprise. En termes de Productivité Totale des
ments directs étrangers (IDE) sortants auraient Facteurs (PTF), la prime des exportateurs, qui
un impact négatif sur la production et l’emploi se situe autour de 5 %, tend à augmenter avec la
12domestiques. Pourtant, l’implantation à l’étran- part de la production exportée.
ger joue un rôle important dans la fragmentation
des processus de production qui expliquerait Si la littérature récente confrme les meilleu -
en partie les bonnes performances à l’expor- res performances des frmes exportatrices, elle
tation des entreprises allemandes (Fontagné et insiste sur l’« auto-sélection » à l’exportation :
Gaulier, 2008). les bonnes performances et, plus précisément,
un niveau de productivité plus élevé, précé-
deraient les exportations. La causalité inverse Dans ce contexte, ce travail compare les perfor-
d’une infuence positive des exportations sur mances des entreprises françaises implantées à
les performances, suite à des effets d’apprentis-l’étranger à celles des entreprises simplement
3sage (3) ou des transferts de connaissances, n’est exportatrices ou exclusivement domestiques.
pas démontrée. De bonnes performances, en ter-Nous savons déjà que les entreprises expor-
mes de productivité (productivité du travail et/tatrices sont plus performantes que les frmes
ou PTF), seraient ainsi un préalable et non une limitées au marché national (Wagner, 2007).
conséquence d’une stratégie d’exportation, ce Les premières sont d’ailleurs relativement peu
qui n’exclut pas, toutefois, l’hypothèse selon nombreuses et une minorité d’entre elles, les
laquelle cette amélioration des performances plus grandes, concentrent la plus grande part
constituerait la première étape d’une stratégie des exportations alors même qu’elles n’expor-
d’internationalisation (Bellone et al., 2008). tent souvent qu’une portion relativement faible
D’ailleurs, des travaux récents aboutissent à de leur production. Ce constat n’est pas nou-
des résultats plus optimistes sur la présence veau et avait déjà été dressé dans les années
d’effets d’apprentissage liés à l’activité d’ex-1970 et 1980 par des auteurs intéressés par les
portation, notamment dans les pays en dévelop-effets de l’internationalisation sur les perfor-
pement (Van Biesebrock, 2005, 2008 ; Isgut et mances : effets d’échelle statique et dynamique,
Fernandes, 2007 ; Lileeva et Trefer, 2007 ; De accès à l’innovation, contraintes concurrentiel-
Loecker, 2007). Les études montrent fréquem-les (X-efficiency), effets de segmentation des
ment que les frmes qui s’engagent à l’expor -marchés (1).
tation connaissent une croissance plus rapide
de la production et de l’emploi (Bernard et al, De nombreuses études récentes vérifent, en
2007).effet, les meilleures performances des entre-
prises exportatrices. Wagner (2007) recense
Les performances supérieures des entreprises ainsi 45 études micro-économétriques publiées
exportatrices et le sens de la causalité mis en entre 1995 et 2006 et portant sur 33 pays. Elles
évidence par ces travaux empiriques ont été confrment l’existence d’une « prime à l’expor-
tation » (écart de performance entre les frmes
exportatrices et les frmes non exportatrices) (2).
Ce constat s’applique à la France. Certaines 1. Pour l’état des lieux sur cette question dans les années 1970-
80, voir Siroen (1985).études recensent les entreprises de manière
2. Voir également le survey de Greeenaway et Kneller (2007).
quasi-exhaustive à partir de données douaniè- Parmi les études par pays, citons Bernard et Jensen (1995, 1999,
2004a, 2004b) Bernard et al. (2003) pour les frmes américaines ; res (Mayer et Ottaviano, 2007 ; Crozet et al.,
Bernard et Wagner (2001) et Wagner (2002) pour l’Allemagne ;
2008 ; Eaton et al., 2004). D’autres utilisent les Aw et al. (2003) pour Taiwan et la Corée ; Clerides et al. (1998)
pour la Colombie, le Mexique et le Maroc ; Girma et al. (2003, enquêtes annuelles d’entreprises (EAE) qui ne
2004) pour le Royaume-Uni. Yasar et al. (2006) appliquent la retiennent que les entreprises de plus de 20 sala- méthode des quantiles à des données turques.
3. Pour Clerides et al. (1998), les effets d’apprentissage liés à riés (Bellone et al. 2006, 2008 ; Isgep, 2008).
l’activité d’exportation résultent de l’expertise technique que les Pour Crozet, Méjean et Zignago (2008), les
acheteurs étrangers procurent aux exportateurs. Il en découle
exportateurs ont, en moyenne, une productivité une amélioration de la productivité.
150 ÉCONOMIE ET STATISTIQUE N° 435-436, 2010théorisés par plusieurs auteurs et tout particu- par le modèle de HMY avec néanmoins l’excep-
lièrement par Melitz (2003). Le modèle proposé tion de Head et Ries (2003) pour le Japon, mais
se place dans un cadre de concurrence mono- qui peut être attribuée à un échantillon limité à
polistique avec une différenciatio

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