Migrations et modernité de genre au marché de Poto-poto(Brazzaville)
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cet article présente le problème des migrations comme facteur du développent économique et culturel. il montre aussi que les apports des migrants créent du metissage culturel et de la modernité.

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Publié le 26 mars 2012
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Langue Français

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Migrations et modernité de genre au marché de Poto-Poto.  A RSENE E LONGO   Résumé  Cet article est consacré à la réflexion sur les migrations et le développement dans le pays d’accueil . Il choisit d’examiner dans le cadre commercial du marché de Poto -Poto les impacts des migrants sur le développement et sur les questions de genre . Il se propose de soutenir que les migrants masculins et féminins sont les figures potentielles du développement socioéconomique et les acteurs de la modernité culturelle et religieuse. Aussi défend-il que la culture, la religion et l’identité des migrants constituent souvent un facteur de préjugés qui conditionne les rapports entre les femmes et les hommes dans une position de dissymétrie. Il envisage d’exposer  une approche de la déconstruction pour corriger la vision androcentrique sur le primat de la masculinité dans le domaine de l’activité commerciale où la reproduction  symbolique de la domination masculine est manifeste. Cette approche vise une perspective constructiviste pour aboutir aux relations d’égalité, de mixité  et de modernité dans le domaine des activités professionnelles .  Mots clés :    migration, marché, modernité, mixité, déconstruction, égalité   Abstract  This article is dedicated to the reflection on the migratio ns and the development in the country of welcome. It chooses to examine in the commercial setting of the market of Poto-Poto the impacts of the migrants on the development and on the questions of kind. He/it intends to sustain that the masculine and feminine migrants are the potential faces of the socio-economic development and the actors of the cultural and religious modernity. As defends him that the culture, the religion and the identity of the migrants often constitute a factor of prejudices that conditions the reports between the women and the men in a position of dissymmetry. It considers exposing an approach of the deconstruction to correct the vision androcentrique on the primate of masculinity in the domain of the commercial activity where the symbolic reproduction of the masculine domination is manifest. This approach aims a constructivist perspective to succeed to
72 A RSENE E LONGO   the relations of equality, co-education and modernity in the professional activity domain. Key words  migration, market, modernity, co-education, deconstruction, equality,     Introduction  A la fin des guerres civiles de 1997 à 1999 et au cours de la première décennie du XXI e  siècle au Congo, Brazzaville connaît un phénomène de migrations interafricaines. La grande majorité des migrants masculins et féminins sont très jeunes. Après avoir passé dix ans d’activi tés dans le domaine du commerce (de 2000 à 2010) en investissant dans le domaine commercial et en participant à la reconstruction du pays dans le domaine du bâtiment, ces migrants deviennent une force économique anonyme. De ce point de vue, l’État ne les reconnaît pas afin de ne pas susciter une réflexion critique sur les migrations pendant les séances parlementaires et une éventuelle haine contre la réussite et l’intégration socioéconomique des migrants qui occupent de grands magasins dans toute la ville. Il est utile de montrer que le symptôme des migrations est perçu comme une composante de conflit, de mutation socioculturelle, une source du développement économique et une genèse de la modernité entre les sexes. Il est important de signaler que les migrations, le genre et la modernité dégagent une littérature si abondante dans le cadre des études africaines. Les études sur les migrations au Congo comme trait du développement restent un champ vide de réflexions chez les universitaires, les intellectuels et les politiques. Seulement l’État congolais s’inquiète de l’augmentation de la population étrangère dépassant les chiffres fixés par la convention internationale. Mis en filiation, le marché, le genre et la modernité semblent être un champ vide de la recherche où nous pouvons étudier les migrations comme un phénomène du métissage identitaire, de la tolérance culturelle, de la déconstruction des rapports entre les femmes et les hommes. Dans cette perspective, notre réflexion consiste à aborder les migrations et la modernité à travers le cadre commercial du marché de Poto-poto. Les Cahiers de l’IGRAC, n°5, 2010  
Migrations et modernité de genre au marché de Poto-Poto  73  Notre étude repose sur un double objectif général et spécifique. Ainsi, l objectif général que nous trouvons si intéressant, est d’analyser  les activités commerciales des migrants maliens, sénégalais, mauritaniens, béninois, kinois et chinois dans le marché de Poto-poto et de montrer comment des Brazzavillois acceptent une cohabitation sociale et culturelle avec eux dans l’unité et dans la di versité ide ntitaire. Sur ce point, il s’agit de réfléchir sur des apports du d éveloppement et de l’économie, de la mixité  et de vérifier les symptômes de la modernité reposant sur les nouvelles habitudes culturelle, identitaire et religieuse entre les allochtones et les autochtones . L’un des objectifs spécifique est d’ enquêter , d’observer  et d’analyser les activités professionnelles des migrants masculins et féminins au sein du marché et de s’interroger  comment la production commerciale des migrants engendre une signifiance sur le développement économique, la mixité et la modernité entre les sexes dans ce cadre commercial. Les trois notions de notre étude (migration, genre et modernité) reçoivent une signifiance de connotations s elon les domaines d’analyse. Nous les définissons dans une perspective de la sociologie. Dans le cadre de notre étude, nous ne faisons pas un état des lieux sur la définition de la notion de migration comprise comme un déplacement interne au sein d’un même pays (intramuros) ou un déplacement externe entre les pays(extramuros), nous la saisissons comme un déplacement de populations du pays d’ origine vers un pays d’accueil (Petit Robert, 2010). Elle est la traversée et le franchissement des frontières des États et elle souligne le capital humain d’un pays d’origine vers le pays de la destination (Castles, 2000 :313). Elle désigne le nouveau phénomène de transfert, de voyage et de déplacement des cultures, des coutumes, des identités et des religions entre les pays d’origine vers ceux de la destination. Elle annonce une nouvelle construction de pouvoir et de neuves relations sociales, culturelles et économiques entre les sexes dans le pays d’accueil. Selon cette dimension, il convient de dégager quelques acceptions cardinales sur la notion sur le genre. Par ses définitions, le genre reçoit de nombreuses acceptions. Nous exposons ici trois acceptions cardinales de genre. Les différences biologique, sociale et culturelle sont les premières caractéristiques de genre. Les études comme celle de Paugam (2010 :68-69), de Molinier (2004), de Mahon (2005), Bessin (2004) définissent le genre comme une marque de différence sociale et culturelle entre le sexe masculin et le sexe féminin. À cet égard, « Les sociétés   
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Migrations et modernité de genre au marché de Poto-Poto  75  culturel en accord avec la temporalité du présent et en rupture avec la tradition du passé en vigueur dans un espace. Dans son articulation avec le genre, la modernité est la déconstruction des anciens rapports sociaux et le rejet des relations traditionnelles entre les sexes, elle est l’ invention et la construction d’ une société fondée sur les nouvelles normes de mixité et d’ égalité non formelles mais réelles. Elle désigne une nouvelle manière de penser (Copans, 1990 :232) des problèmes de genre. Dans ce but , quel est l’enjeu de la problématique sur les migrations et la modernité de genre dans le pays d’ accueil ? La problématique de la modernité de genre doit montrer comment les rôles des hommes et les femmes issus des migrations interafricaines sont des facteurs du développement économique et des agents de la nouvelle construction des relations sociales, culturelles, identitaires et religieuses dans le pays d’accueil . De ce point de vue, notre étude illustre la modernité de genre à travers les activités commerciales des migrants masculins et féminins dans le cadre du marché de Poto-poto. Si nous prenons en compte des relations du multiculturalisme ou du pluriculturalisme, notre hypothèse est que le marché et les migrants sont les acteurs pour le développent économique du pays d’ accueil et les figures de la modernité. Car l’espace du marché est le lieu commun pour parler du développement économique, des échanges socioculturels, des interactions masculines et féminines entre les migrants et les autochtones. Il est le champ d’ observation pour réfléchir à la déconstruction des relations traditionnelles du dominant au dominé entre les hommes et les femmes. L’une de nos hypothèse s est que toute la ville de Brazzaville peut tomber dans le phénomène de ville morte et de pénurie alimentaire, au cas où les migrants décideraient à entrer en grève pendant une semaine. Sur ce point, une crise alimentaire sera évidente au sein de la population autochtone. Cette population ne pratique pas une activité commerciale dans le marché. Dans ce cas, il nous convient de présenter brièvement le cadre de l’étude dans une perspective de l’approche quantitative.   Dans son placement géographique, le marché commercial de Poto-poto est proche du centre-ville, il est occupé selon notre estimation personnelle à 90 % par la population des migrants maliens, sénégalais, béninois, congolais de la République démocratique, chinois contre 10 % des autochtones, il est le   
76 A RSENE E LONGO   premier espace de vente après celui du marché de Bacongo. Nous développons les enjeux sur la modernité de genre selon les modalités de l’approche qualitative en établissant une structure de grilles servant pour notre analyse. Migrants, marché et modernité économique  La modernité économique est tributaire de nouvelles stratégies de la culture universelle et de la mondialisation, elle dépend des transactions réalisées par les allochtone dans le commerce international et par les autochtones comme vecteurs de la consommation. Elle est pour l ’Etat congolais un facteur de rapport de profits. Au marché de Poto-poto, il est commode de montrer que les apports des migrations masculines et féminines contribuent au développement de l’économie du Congo , sous ce rapport, les performances économiques s’ élèvent annuellement à des milliards de francs CFA dans le domaine du commerce grâce aux activités des migrants. Ainsi, des magasins et des entrepôts des migrants donnent une émergence à de nouveaux phénomènes relatifs à la modernité et aux changements éco nomiques. L’objectif de ce point  consiste à examiner les phénomènes de la modernité commerciale dont les migrants masculins et féminins sont les acteurs décisifs dans le pays d’accueil en particulier dans le marché de Poto-poto. Les apports du développement portent sur : -Le profit économique et les nouveaux rapports entre les migrants et l’Etat ; -La liberté des migrants de faire les échanges commerciaux avec les marchés internationaux ; -De nouveaux nominatifs comme « patron » et « patronne » chez les migrants, -Les innovations chinoises sur les prix et sur les relations professionnelles entre les sexes.  De tels points peuvent s’examiner  sous l hypothèse selon laquelle le marché et les migrations sont les composantes du développement d’un économique moderne. En effet, le profit économique améliore le rapport entre le pays d’accueil avec les migrants . Leur intégration socioéconomique est bénéfique pour le développement de l’économie congolaise. Car leur investissement dans ce cadre commercial du marché de Poto-poto s’évalue à de Les Cahiers de l’IGRAC, n°5, 2010  
Migrations et modernité de genre au marché de Poto-Poto  77  milliards de francs CFA en produits vestimentaires, en matériaux de construction. Le marché dessine le circuit de l’interdépendance économique entre les producteurs (les migrants venant des pays comme le Mali, le Sénégal, la Chine, le Congo démocratique) et les consommateurs (les autochtones). Dans le cadre du marché, on constate la nouvelle reproduction de la domination masculine chez les migrants masculins. Les femmes des migrants maliens et sénégalais sont les exclues du marché, du développement et elles sont les objets passifs sous la responsabilité active de leur mari. Cependant, les femmes béninoises font les investissements pour la vente des produits cosmétiques et des articles pour l’embellissement des cheveux. Sur ce point, « la femme a un très grand rôle en ce qui concerne le développement, l’être humain » (Compétence, 2010 :14). Les activités commerciales modifient progressivement l’idé ologie du dominé et du dominant, selon laquelle la femme reste passivement au foyer et l’ homme activement au lieu du travail (Bourdieu, Id :68). En gros l’économie congolaise et la mairie centrale restent tributaires de l’argent sur de nombreuses taxes payées mensuellement voire annuellement les migrants. Si chaque boutique des migrants paie annuellement à la mairie 60.000 francs CFA et si on formule l’hypothèse  selon laquelle le marché de Poto-poto compte plus de 5000 boutiques, la mairie peut encaisser trois cents millions de francs CFA de la part des migrants masculins et féminins. Comme par tenaires de l’ Etat, les migrants contribuent à la performance économique du pays d’accueil . Les patrons et les patronnes issues des migrations deviennent les protégés de l’Etat et de la gent militaire contre le mécontentement de la population contre l’inté gration économique réussie des migrants. Les migrants composés d’hommes et de femmes  sont les acteurs économiques du Congo dans les achats des articles exotiques dans les marchés internationaux, ils voyagent en France, en Chine et dans d’autres pays pour commander les divers articles commerciaux. Les produits de leur exportation sont profitables à l’économie congolaise. Les recettes de douane du Congo évaluées en milliards de francs CFA dépendent des exportations des produits commandés par les migrants. Ces derniers apportent du nouveau dans le marché de Poto-poto , parce qu’ils cherchent à vendre les articles de l’innovation dans le domaine vestimentaire.  
  
78 A RSENE E LONGO   Le phénomène des patrons et des patronnes constitue une nouvelle construction des relations entre le genre masculin et féminin au sein du marché de Poto-poto. Ils sont des agents favorisant l’arrivée des nouveaux migrants jeunes. Ils les utilisent comme les travailleurs dans chacune des boutiques. Au cœur du marché,  une patronne béninoise possède de nombreuses boutiques. Chacune des boutiques est gérée par une jeune femme. Dans le Restaurant La Désirade , la patronne Miriam, de nationalité sénégalaise, emploie les hommes et les femmes sous son pouvoir. Le dernier phénomène de l’interaction économique  porte sur les innovations des migrants chinois au marché de Poto-poto. Le cadre commercial entre dans la porte de la modernité commerciale avec la nouvelle vision des migrants chinois. Ils déconstruisent l’idéologie du foyer. La boutique devient une gestion familia le. La femme occupe le rôle de caissière et l’homme, celui de recevoir les clients. Le modèle des migrants chinois peut apporter les changements dans la conscience des migrants masculins maliens et sénégalais conditionnant leur femme aux travaux domestiques. Sous cet angle, l’innovation commence à s’opérer chez les migrants sénégalais. Par exemple, madame N’d iaye gère la boutique de son mari en vente des articles musicaux. Les migrants chinois déconstruisent le fixisme des prix et fixent les prix selon le pouvoir d’achat des Congolais. Certains migrants sont contraints de s’adapter aux techniques de la vente pour attirer de la clientèle en employant la méthode de la publicité que diffusent les télévisions locales. D’autres impacts des migrations dans le marché de Poto-poto s’articulent autour de la modernité culturelle.    Migrants, marché et modernité culturelle  L’objectif de ce point vise à défendre comment les migrations masculines et féminines réalisent la mixité entre les femmes et les hommes et permettent de penser le métissage culturel et identitaire et pourquoi elles engendrent dans l’espace du marché les signifiances de la modernité culturelle. Le marché de Poto-poto vit au rythme de l’alternative axée sur la tradition et modernité portant la rupture des vieilles habitudes culturelles au profit des neuves règles de culture. Dans le cadre du marché de Poto-poto, les migrants et les autochtones forment souvent les figures divisées entre les traditionnistes et les modernes. Dans notre démonstration, nous adoptons l’hypothèse  de Les Cahiers de l’IGRAC, n°5, 2010  
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Hammouche selon laquelle le migrant et l’ artiste sont deux figures majeures de la modernité, puisqu’ils  incarnent « deux modes de détachement (aux groupes/institutions) et de singularisation »(Hammouche, 1998 :3). Dans une perspec tive de genre perçu comme une déconstruction d’une intemporalité fixant les rapports d’inégalité entre les hommes et les femmes, si  l’on réfléchit sur la possible articulation entre le migrant et le marché de Poto-poto, on aboutit au dualisme de la tradition et de la modernité dans de nouvelles relations entre les hommes et les femmes. Nous envisageons d’examiner les nouvelles habitudes engendrées dans les interactions commerciales entre les migrants béninois, sénégalais, maliens, mauritaniens et chinois. Cette modernité culturelle réside dans l’ambivalence  de la rupture et du nouveau dans le domaine alimentaire, vestimentaire, dans le phénomène de l’acculturation et dans la diversité des goûts relatif s à la musique. L’ambivalence de la tradition et de la mo dernité rapproche et désunit les migrants et la population autochtone. Les hommes comme les femmes provenant des migrations déconstruisent les habitudes traditionnelles pour accepter une intégration culturelle dans le pays d’accueil. Dans nos constats, les femmes maliennes et sénégalaises s’habillent aux modes des femmes congolaises. Une certaine rupture se crée chez leur fille scolarisée dans l’abandon  de la voile comme une marque de l’identité culturelle. Dans le processus du pluriculturalisme, les femmes sénégalaises et maliennes apportent une culture nouvelle dans le domaine de la mode vestimentaire. Les modes féminines d’origine sénégalaise deviennent une des spécificités de la modernité chez des femmes congolaises. Ces dernières s’ habillent en mode sénégalaise pendant les fêtes de mariage et des anniversaires. Les migrants sont aussi les figures de la modernité culinaire dans l’espace du marché de Poto-poto. Ils enrichissent le pays d’accueil par de nouvelles variétés de plats culinaires. Dans le Restaurant La Désirade , en fixant comme devise moderne « qualité, finesse et goût », Madame Mariam innove dans l’art culinaire. Elle est selon nous la figure de la modernité, parce qu’elle se spécialise dans les plats sénégalo-congolais. Les plats traditionnels de son pays d’origine comme « Thief bou-diem » ou « couscous moutons » apparaissent comme du neuf dans les habitudes alimentaires des Congolais fréquentant quotidiennement par centaine les prestiges alimentaires de ce restaurant considéré comme le lieu de la modernité et de la tradition. Sur ce point, la modernité culinaire chez les migrants est la récréation des plats traditionnels. Les nouvelles créations des plats entre le neuf par l’ancien chez les migrants   
80 A RSENE E LONGO   féminins répondent à l’acception de la moderni té chez Alain Touraine : « Nous pensons auj ourd’hui que l’on fait toujours  du neuf avec du vieux et que la modernité ne consiste pas à effacer le passé mais incorporer le plus de passé avec plus d’avenir » (Touraine, 1998 :192). L’acculturation des migrant s est un processus de la modernité et de l’intégration culturelle. La plupart des migrants d’origine ouest -africaine ne savent pas lire et parler le français. Dans le nouveau cadre, ils sont obligés d’apprendre la langue des affaires et du commerce, c’est -à-dire le français. Leur parler engendre une variété de français que nous analysons comme un phénomène de la modernité. Ce qui est si spécifique chez les femmes et les hommes analphabètes , c’est que les migrants inaugurent la rupture avec eux -mêmes en décidant de scolariser leurs enfants dans les écoles publiques et privées de la ville. Ces derniers défendent les droits de l’entreprise familiale contre les autorités administratives. Les migrants participent aussi à une nouvelle configuration de la modernité dans le domaine de la religion.   Migrants, religion et genre entre tradition et modernité   De nombreux travaux sur la religion (Merand, 1980 :203-221) et (Geffré, 2001 :135-156) analysent les conflits de la modernité du christianisme et de l’ islam dans la division idéologique du monde en Afrique noire. Dans le contexte de l’Afrique indépendante et contemporaine, ces deux grandes religions vulgarisent et perpétueraient les idéologies sur les inégalités entre les sexes, elles peuvent servir des enjeux de la modernité pour les migrants dans le pays d’accueil . Ainsi, en voyageant avec leur héritage religieux, les migrants masculins gardent souvent la vision d’inégalité entre les sexes , mais ils découvrent aussi des nouvelles relations sociales relatives à la modernité de genre dans le pays d’accueil . Dans le cadre du marché de Poto-poto, on assiste au dualisme entre la tradition et la modernité dans les relations entre les sexes. Sur ce point, notre hypothèse est que le marché et la religion perpétuent ou déconstruit les rapports de sexes entre les allochtones et les autochtones, ils participent à la reconstruction de l’identité individuelle  et collective vers une identité de la diversité religieuse permettant une intégration sociale des migrants. La percept ion de l’identité religieuse ne devient plus une source de division, d’ex clusion, mais une valeur culturelle de la tolérance. L’enjeu entre les migrants, la religion et le genre que nous voulons démontrer, repose sur la tolérance et la liberté individuelle comme une perspective de déconstruction des préjugés sociaux entre les sexes et comme une réalisation de la modernité Les Cahiers de l’IGRAC, n°5, 2010  
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sociale. Nous voulons montrer que la diversité culturelle libère les enfants des migrants de la servitude de la religion. Le statut d’une femme enveloppée dans les habits traditionnels connaît une nouvelle orientation. Nous développons ici quelques problèmes et perspectives entre les migrants, la religion, la modernité de genre à travers le marché de Poto-poto. Il convient d’exposer les traits dominants de genre construit par l’idéologie religieuse. En guise de rappel, le pays d’accue il laisse à chacun des migrants la liberté de pratiquer son culte et de respecter les croyances des autres. Le marché est un lieu laïque comme l’école  où il est strictement interdit de propager des doctrines religieuses. Dans la configuration professionnelle des activités dans le marché, il se dégage une inégalité entre les femmes et les hommes issus des migrations. Chez les migrants maliens, mauritaniens et séné galais, on remarque l’absence de la visibilité des femmes  au sein du marché. On retrouve chez eux la pratique de l’idéologie reposant le dualisme de l’homme actif et de la femme passive. Selon notre enquête, les groupes des migrants maliens sont alphabètes, car ils viennent souvent des villages et ils servent de la religion considérée comme l’instrument de l’instruction pour perpétuer les relations inégalités entre les sexes. Chez les migrants kinois, le marché est une spécificité des femmes. Selon l’idéolo gie des églises dites « de réveil », les femmes doivent vendre dans les marchés afin d’apporter les dîmes au le pasteur. De ce point de vue, certains pasteurs allochtones descendent dans le marché pour véhiculer chez les femmes vendeuses l’idéologie de la prospérité et du sortilège. La séparation du marché avec la religion semble être appliquée dans le groupe des migrants béninois. De nombreuses femmes qui vendent les produits cosmétiques dans le marché de Poto-poto sont de nationalité béninoise. Il y a chez ce groupe une nouvelle relation sociale construite sur le profit. La religion peut se traduire dans leur conscience comme la volonté de pratiquer le bien. La perspective que nous trouvons si utile consiste à condamner les discriminations subies par les femmes immigrées qui manquent selon notre analyse une intégration sociale. Elles sont comme les gardiennes des maisons. Leur mouvement public est limité entre les achats et la maison enfermée. Le moins de contacts avec le public les condamnent à la soumiss ion qu’on enseigne la religion. Il est commode d’examiner  les nouvelles perspectives relatives à la déconstruction des relations construites par les religions pour poser les bases d’une société reposant sur la norme de l’égalité.  Migrants, déconstruction des préjugés et égalité  Dans le contexte congolais, les marchés traditionnels furent une profession des femmes. Ainsi se forme le préjugé masculin selon lequel l’activité de la vente   
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