Productivité relative et utilisation des emplois de courte durée dans les entreprises
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L'utilisation des emplois de courte durée (occupés moins d'un an) par les entreprises peut correspondre à deux objectifs, de flexibilité ou de sélection/incitation. Pour distinguer entre ceux-ci, la productivité de ces emplois est comparée à celle des travailleurs embauchés depuis moins d'un an mais restant dans l'entreprise et à celle des travailleurs embauchés depuis plus d'un an. Si les emplois de courte durée se révèlent plus productifs que les autres à ancienneté comparable dans le secteur des services, ce différentiel n'apparaît pas dans le secteur de l'industrie. L'utilisation d'emplois de courte durée n'y aurait pas la même signification. Dans l'industrie, les salariés récemment embauchés semblent occuper des emplois de productivité identique et donc de nature similaire, qu'ils soient appelés à rester ou non dans l'entreprise. Dans les services, les salariés occupant un emploi de courte durée occupent des postes immédiatement plus productifs pour l'entreprise. Cela pourrait refléter l'existence dans ces secteurs d'emplois devant être occupés moins d'une année, pour répondre à une variabilité infra-annuelle de l'activité de l'entreprise. Dans tous les cas, le fait que la productivité de ces emplois soit supérieure ou égale aux autres, à ancienneté comparable, laisse penser que le recours aux emplois de courte durée n'est pas principalement motivé par la volonté des entreprises de sélectionner ou d'inciter à l'effort leurs salariés.

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Nombre de lectures 21
Langue Français

Extrait

EMPLOI
Pr oducti vité r elati v e
et utilisation des emplois
de courte durée dans les entreprises
Marie Leclair et Sébastien Roux *
L’utilisation des emplois de courte durée (occupés moins d’un an) par les entreprises
peut correspondre à deux objectifs, de fl exibilité ou de sélection/incitation. Pour distin-
guer entre ceux-ci, la productivité de ces emplois est comparée à celle des travailleurs
embauchés depuis moins d’un an mais restant dans l’entreprise et à celle des trav
embauchés depuis plus d’un an.
Si les emplois de cour te durée se révèlent plus productifs que les autres à ancienneté
comparable dans le secteur des services, ce différentiel n’apparaît pas dans le secteur de
l’industrie. L’utilisation d’emplois de courte durée n’y aurait pas la même signifi cation.
Dans l’industrie, les salariés récemment embauchés semblent occuper des emplois de
productivité identique et donc de nature similaire, qu’ils soient appelés à rester ou non
dans l’entreprise. Dans les services, les salariés occupant un emploi de courte durée
occupent des postes immédiatement plus productifs pour l’entreprise. Cela pourrait
refl éter l’existence dans ces secteurs d’emplois devant être occupés moins d’une année,
pour répondre à une variabilité infra-annuelle de l’activité de l’entreprise.
Dans tous les cas, le f ait que la productivité de ces emplois soit supérieure ou égale aux
autres, à ancienneté comparable, laisse penser que le recours aux emplois de courte
durée n’est pas principalement motivé par la volonté des entreprises de sélectionner ou
d’inciter à l’effort leurs salariés.

* Au moment de la rédaction de ce document, les auteurs faisaient partie du Département des Études Économiques d’Ensemble,
Division « Marchés et Stratégies d’Entreprise » .
Les auteurs remercient Didier Blanchet, Pauline Givord, Éric Maurin, deux rapporteurs anonymes et les participants aux séminaires D3E
et Recherche de l’Insee et aux Journées de Microéconomie Appliquée (JMA) de 2004 pour leurs commentaires.
ÉCONOMIE ET STATISTIQUE N° 405/406, 2007 47 n 2000, 19 % des heures rémunérées étaient travailleurs en écartant ceux dont la productivité Ele fait de salariés restant moins d’un an se révèle trop faible. Une utilisation plus impor-
dans leur entreprise (Leclair et Roux, 2006). Ce tante de ces emplois par une entreprise pourrait
constat, issu de données administratives (cf. en- alors s’interpréter comme le signe d’une sélec-
cadré 1), rejoint celui de l’existence simultanée tion plus forte de ses salariés.
de fl ux importants d’embauches et de sorties
Le choix par l’entreprise du ni veau d’insta-d’emplois (Cahuc et Kramarz, 2005). Parmi les
bilité de ses emplois résulte donc d’un arbi-études s’intéressant à la mesure de la précarité
trage entre ces trois différents arguments (pour du travail et à son évolution au cours des der-
une formalisation de ceux liés à la fl exibilité, nières années, peu examinent directement les
cf. encadré 2). Pour les examiner, cet article va entreprises pour mesurer ce phénomène, l’ac-
considérer comme des facteurs de production cent étant mis le plus souvent sur les trajectoires
différents le travail effectué dans le cadre des d’individus dans et hors de l’emploi. Or, l’em-
emplois suivants : les emplois de courte durée , ploi précaire, imposé par les entreprises, crée
les emplois occupés par des salariés embauchés une situation diffi cile pour ceux qui le subissent
depuis moins d’un an et amenés à rester dans sans l’avoir choisi. Quelles sont les raisons pous-
l’entreprise, appelés par la suite emplois de sant les entreprises à utiliser ce type d’emploi ?
débutant , et les emplois occupés par des salariés
depuis plus d’un an, appelés emplois de salariés D’un côté, l’entreprise a besoin de salariés qua-
1lifi és, possédant un capital humain spécifi que f ormés (cf. tableau 1) (1) .
qui ne peut s’acquérir que par l’ancienneté dans
l’emploi. L’embauche de nouveaux salariés En s’appuyant sur une estimation de la produc-
génère ainsi des coûts fi xes de formation et le tivité relative du travail effectué dans le cadre de
licenciement de salariés anciens détruit le capital chacun de ces types d’emploi, cet article exa-
humain spécifi que de l’entreprise tout en géné- mine la pertinence des raisons citées précédem-
rant des coûts (coûts de licenciement, primes ment du recours aux emplois de courte durée.
de précarité). De ce point de vue, le turnover Ainsi, s’il est vrai que les entreprises valorisent
des salariés et l’instabilité des emplois semblent leur capital humain spécifi que, cela devrait se
nuisibles aux performances de l’entreprise. refl éter par une productivité du travail dans les
emplois de forte ancienneté, i.e. de salariés for -
D’un autre côté, les emplois de cour te durée
permettent d’accroître la fl exibilité et de mieux
1. On aurait pu également examiner la situation symétrique pour faire correspondre le volume de travail à la
les sorties : considérer les emplois occupés par des salariés courbe de l’activité de l’entreprise. La faible
d’ancienneté supérieure à un an devant partir dans l’année. Dans
durée de certains emplois permet de diminuer les établissements de plus de 50 salariés, ces sorties correspon-
dent à 15 % de l’ensemble des sorties. Ces fl ux étant beaucoup le chômage technique et de maximiser le profi t
moins nombreux que ceux liés à une perte d’emploi d’individus
présent de l’entreprise. employés depuis moins d’un an, nous avons préféré conserver
la classifi cation plus simple adoptée dans l’article. Par ailleurs,
l’information la plus pertinente selon nous concerne les fl ux de Par ailleurs, les emplois de courte durée permet-
sortie des individus récemment embauchés, prise en compte en
tent également de sélectionner les « meilleurs » isolant les emplois de courte durée.
Tableau 1
Concepts et défi nitions
Défi nition
L ’entreprise réunit des emplois de « courte durée » et des emplois « permanents »
Emploi de courte durée Tout emploi durant moins d’un an
T ravail de courte durée Quantité de travail (mesurée par le nombre d’heures) effectué par un individu occupant un emploi de
courte durée
Salarié permanent Salarié de l’entreprise amené à y rester ou y étant resté plus d’un an
Emploi permanent Tout emploi durant ou ayant duré plus d’un an
Les salariés permanents sont soit « débutants », soit « formés »
Salarié débutant Salarié embauché depuis moins d’un an dans l’entreprise, mais amené à rester dans l’entreprise. Il
est considéré comme formé une fois la première année écoulée
Emploi de débutant Emploi occupé par un salarié débutant
Travail de débutant Quantité de travail (mesurée par le nombre d’heures) effectuée par un débutant
Salarié formé Salarié embauché depuis plus d’un an dans l’entreprise
Emploi de salarié formé Emploi occupé par un salarié formé
Travail de salarié formé e d’heures) effectuée par un salarié formé
48 ÉCONOMIE ET STATISTIQUE N° 405/406, 2007Encadré 1
LES SOURCES
Pour cette étude, nous disposons d’une sour ce de et ceux qui continueront à être employés dans l’entre-
données qui n’a jamais encore été utilisée pour étu- prise. Le travail de courte durée correspond au travail
dier ce sujet, les Déclarations Annuelles de Données effectué par la première catégorie de salariés au cours
Sociales (DADS) , données administratives issues des de l’année. Il a deux caractéristiques : il est à

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