Aristocratie et société cléricale dans l Italie chrétienne au temps d Odoacre et de Théodoric - article ; n°1 ; vol.93, pg 417-467
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Aristocratie et société cléricale dans l'Italie chrétienne au temps d'Odoacre et de Théodoric - article ; n°1 ; vol.93, pg 417-467

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Mélanges de l'Ecole française de Rome. Antiquité - Année 1981 - Volume 93 - Numéro 1 - Pages 417-467
Charles Pietri, ~~Aristocratie et société cléricale dans l'Italie chrétienne au temps d'Odoacre et de Théodoric~~, p. 417-467. Au début du VIe siècle l'opinion cléricale (comme en témoignent les apocryphes symmachiens) juge avec sévérité l'aristocratie, une aristocratie convertie, plus italianisée que celle dont Prudence célébrait la conversion. On ne peut expliquer cette attitude nouvelle en étudiant les conflits de deux institutions, le Sénat et l'Église. 1) En fait, l'évolution de l'évergétisme aristocratique illustre les réactions de deux groupes sociaux : l'aristocratie appauvrie s'inquiète désormais des effets d'une générosité qui l'affaiblit, même si celle-ci répond aux mobiles profonds d'une mentalité religieuse : de là, les tentatives tenaces pour contrôler la puissance économique grandissante de l'évêque, surtout de l'évêque romain. 2) Ces relations conflictuelles ne paralysent pas une sorte d'osmose entre les clarissimes et la société cléricale : plus (v. au verso) que d'une osmose sociale (limitée et tardive en Italie, à la différence de la Gaule), il faut parler d'une osmose culturelle, illustrée par les témoignages de la littérature et de l'épigraphie; le clerc voit s'accomplir dans l'évêque l'idéal de Yorator; le laïc manifeste de plus en plus une curiosité voire une compétence de théologien. 3) On peut, dans ce contexte, analyser les crises et les conflits qui déchirent les Églises italiennes de 483 à la reconquista byzantine; pour une large part, les interventions des sénateurs s'expliquent par la volonté de contrôler le pouvoir (et surtout le pouvoir économique) de l'évêque; aux conflits cléricaux se mêlent les rivalités traditionnelles des grandes familles; les élections pontificales deviennent un enjeu politique, en un temps où le Sénat voudrait tenir le rôle de César dans un césaropapisme renouvelé et introduit en Italie.
51 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1981
Nombre de lectures 51
Langue Français
Poids de l'ouvrage 3 Mo

Extrait

Charles Pietri
Aristocratie et société cléricale dans l'Italie chrétienne au temps
d'Odoacre et de Théodoric
In: Mélanges de l'Ecole française de Rome. Antiquité T. 93, N°1. 1981. pp. 417-467.
Résumé
Charles Pietri, Aristocratie et société cléricale dans l'Italie chrétienne au temps d'Odoacre et de Théodoric, p. 417-467.
Au début du VIe siècle l'opinion cléricale (comme en témoignent les apocryphes symmachiens) juge avec sévérité l'aristocratie,
une aristocratie convertie, plus italianisée que celle dont Prudence célébrait la conversion. On ne peut expliquer cette attitude
nouvelle en étudiant les conflits de deux institutions, le Sénat et l'Église. 1) En fait, l'évolution de l'évergétisme aristocratique
illustre les réactions de deux groupes sociaux : l'aristocratie appauvrie s'inquiète désormais des effets d'une générosité qui
l'affaiblit, même si celle-ci répond aux mobiles profonds d'une mentalité religieuse : de là, les tentatives tenaces pour contrôler la
puissance économique grandissante de l'évêque, surtout de l'évêque romain. 2) Ces relations conflictuelles ne paralysent pas
une sorte d'osmose entre les clarissimes et la société cléricale : plus
(v. au verso) que d'une osmose sociale (limitée et tardive en Italie, à la différence de la Gaule), il faut parler d'une osmose
culturelle, illustrée par les témoignages de la littérature et de l'épigraphie; le clerc voit s'accomplir dans l'évêque l'idéal de l'orator;
le laïc manifeste de plus en plus une curiosité voire une compétence de théologien. 3) On peut, dans ce contexte, analyser les
crises et les conflits qui déchirent les Églises italiennes de 483 à la reconquista byzantine; pour une large part, les interventions
des sénateurs s'expliquent par la volonté de contrôler le pouvoir (et surtout le pouvoir économique) de l'évêque; aux conflits
cléricaux se mêlent les rivalités traditionnelles des grandes familles; les élections pontificales deviennent un enjeu politique, en
un temps où le Sénat voudrait tenir le rôle de César dans un césaropapisme renouvelé et introduit en Italie.
Citer ce document / Cite this document :
Pietri Charles. Aristocratie et société cléricale dans l'Italie chrétienne au temps d'Odoacre et de Théodoric. In: Mélanges de
l'Ecole française de Rome. Antiquité T. 93, N°1. 1981. pp. 417-467.
doi : 10.3406/mefr.1981.1280
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/mefr_0223-5102_1981_num_93_1_1280CHARLES PIETRI
ARISTOCRATIE ET SOCIÉTÉ CLÉRICALE
DANS L'ITALIE CHRÉTIENNE
AU TEMPS D'ODOACRE ET DE THÉODORIC
Omnis curia a cruore dicitur : un pamphlétaire, qui œuvre au début du VIe
siècle pour la cause du pape Symmaque prête à l'évêque romain Silvestre1,
contemporain du premier empereur chrétien, une étymologie aussi fantaisiste
que féroce, éclaboussant le sénat du sang des idoles. En réalité, le faussaire
qui forge de toutes pièces les canons d'un concile, placé aux premiers temps
de l'empire chrétien, ne cherche pas particulièrement à exprimer les réactions
d'un clerc du IVe siècle. Son propos n'est pas de restituer une couleur locale,
mais de décocher contre une institution et surtout contre ceux qui lui
appartiennent, les traits barbelés de la polémique. De toute évidence, l'auteur
du VIe siècle ne partage pas les espérances chantées, au rythme de l'hexamèt
re, par Prudence - au demeurant grand seigneur espagnol - qui célébrait la
conversion du sénat, en évoquant ces toges prenant pour le baptême la
couleur de la neige2. Le poète trouvait quelque raison à son enthousiasme : la de l'aristocratie apporte, dans l'Italie et dans la Ville, à la fin du IVe
siècle, l'appui de grandes familles capables de résister, par leur richesse, par
leur culture et par leur influence aux assauts de la réaction païenne. Et
surtout l'Église - celle de Rome en particulier - lui doit l'enrichissement
qu'apporte un évergétisme chrétien, qui prend peu à peu le relai d'une
bienfaisance impériale essoufflée après les largesses constantiniennes. Entre la
1 Gesta Silvestri, 16 (Patrologia latina, éd. Migne citée désormais PL 8, 839, d'après
Coustant); sur cet apocryphe, v. L. Duchesne, Le Liber Pontificalis, Paris, 1955, I,
p. CXXXIII sq.; W. Le vison, Aus rheinischer und fränkischer Frühzeit, Düsseldorf, 1948,
p. 458-464.
2 Prudence, Contra Symmachum, I, 544-544 :
Exultare patres videas, pulcherrima mundi
Lumina, conciliumque senum gestire Catonum
Candidiore toga niveum pietatis amictum
Sumere, et exuvias deponere pontificales.
MEFRA - 93 - 1981 - 1, p. 417-467. 27 418 CHARLES PIETRI
société cléricale, mieux structurée, mieux définie dans ses privilèges et dans
ses devoirs et d'autre part, l'aristocratie, cette élite d'un peuple chrétien
devenu plus nombreux, s'établissent les liens complexes d'échanges récipro
ques. Celle-ci fournit à celle-là les instruments d'une culture politique, de
traditions juridiques que les clercs romains utilisent pour ébaucher un droit
chrétien ou pour forger une idéologie nouvelle de Rome, capitale sainte. Est-il
besoin d'ajouter à l'exemple de Pammachius ou de Melanie, celui d'Ambroise
de Milan, le plus illustre des clarissimes, passé totalement, au temps de
l'Église théodosienne, de la militia impériale au service du Christ? Bien
entendu, une note discordante, relevée parmi beaucoup d'autres dans les
apocryphes symmachiens, ne suffit pas à illustrer une évolution : elle traduit
au moins dans quelque courant de l'opinion cléricale un certain désenchante
ment, beaucoup moins d'optimisme sur les bienfaits de la conversion aristo
cratique.
Le polémiste vise évidemment une aristocratie bien différente de celle
que célèbre Prudence. Avec l'affaiblissement progressif, puis la disparition du
pouvoir impérial en Occident, le prince, depuis Constantinople, devient, un
partenaire plus lointain, moins directement contraignant dans le jeu des
relations sociales entre l'Église et l'aristocratie. Ce n'est pas que la déposition
en 476 ait été conçue comme une rupture définitive3. Les clercs, ceux-là
mêmes qu'une âpre polémique dresse contre la politique ou la théologie
impériales, en témoignent : sicut Romanus natus Romanum principem amo*,
écrit le pape Gélase à son vieil adversaire l'empereur Anastase. Au contraire,
après cette translation, jugée souvent provisoire par les Italiens, le Sénat,
l'institution autour de laquelle se cristallise l'aristocratie, représente plus que
jamais le symbole de la continuité romaine. Qu'il suffise d'évoquer l'œuvre du
dernier Symmaque composant une Histoire de Rome5, l'attitude de Boèce
3 M. A. Wes, Das Ende des Kaisertums im Westen des Römischen Reichs, dans Arch.
Studien ν. h. Nederlands Hist. Inst, te Rome, II, La Haye, 1967, p. 52 sq.; A. Momigliano,
La caduta senza rumore di un impero nel 476 d.c, dans Riv. Stor. hai., 85, 1973, p. 5-21;
V. Neri, // 476 nella storiografia moderna, dans Felix Rovenna, 111-112, 1976, p. 247;
E. Demougeot, Bedeutet das Jahr 476 das Ende des Rom. Reiches in Okzident?, dans Klio,
60, 1978, p. 371-381 ; L. Cracco Ruggini, Come Bisanzio vide la fine dell'impero d'Occidente,
dans La fine dell'impero Romano d'Occidente, 1st. di Studi Romani, Rome, 1978, p. 71-82.
4 Gélase, Ep., 12, 1, éd. A. Thiel, Epistolae Romanorum pontificum genuinae, Brauns-
berg, 1867, p. 350.
5 A. Momigliano, Cassiodorus and Italian Culture of his Time, dans Secondo Contributo
alla Storia degli studi Classici, Rome, 1960, p. 191-229; surtout p. 198 sq. (Symmaque).
On sait, d'autre part, tout ce que le mémoire de O. Jahn {Über die Subskriptionen in den ARISTOCRATIE ET SOCIÉTÉ CLÉRICALE 419
plaçant ce Sénat6, au-dessus des sénateurs qui l'abandonnent, comme le signe
d'une permanente romanité. Alors qu'il monnaie les sentences du roi barbare,
Cassiodore suggère à petites touches une image de la res publica qui maintien
ne la civilitas et avec elle, la Curie, organe privilégié de cette vie policée et
politique7. Au reste, cette œuvre qui tente de donner à l'activité du roi Amale
une dignité romaine -

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