Données sur les produits fabriqués dans une officine de Neapolis (Nabeul, Tunisie) - article ; n°1 ; vol.112, pg 135-153

Sternberg Myriam

Description

Mélanges de l'Ecole française de Rome. Antiquité - Année 2000 - Volume 112 - Numéro 1 - Pages 135-153
Myriam Sternberg, Données sur les produits fabriqués dans une officine de Neapolis (Nabeul, Tunisie), p. 135-153. Lors des fouilles archéologiques de la fabrique de salaisons de Nabeul, menées entre 1997 et 1999 par une équipe franco-tunisienne, un des bassins (bassin III) a li- vré des vestiges de production en place, sous forme d'une sédimentation sur 20 cm d'épaisseur de restes de petits poissons. Six espèces de poissons ont été déposées dans ce grand bassin pour obtenir un produit à base de poissons salés entiers. Parmi ces poissons, on dénombre surtout des anchois et des sardines. Les prélèvements effectués dans d'autres bassins ont permis de recueillir le même type de restes osseux, de constater une composition identique dans les espèces exploitées et un même traitement, au moins dans un autre bassin de dimension inférieure (bassin XXXIV). L'analyse attentive de prélèvements effectués dans les canalisations qui permettaient l'écoulement de deux grands bassins ovales vers un bassin central plus profond (bassins XXIX, XXX, XXXI) a également permis de remarquer la présence de minuscules résidus osseux de poissons. À partir de cette observation, on émet l'hypothèse que ces bassins à fort volume de production, ont pu servir à l'élaboration d'un produit liquide à base de poisson. La nature des produits fabriqués dans les bassins de Nabeul est alors discutée sur la base des traces ostéologiques retrouvées.
19 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

• Publié par: MELANGES_DE_L-ECOLE_FRANCAISE_DE_ROME
• Publié le: 01 janvier 2000
• Nombre de lectures: 143
• Langue: Français
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Extrait

Myriam Sternberg
Données sur les produits fabriqués dans une officine de
Neapolis (Nabeul, Tunisie)
In: Mélanges de l'Ecole française de Rome. Antiquité T. 112, N°1. 2000. pp. 135-153.
Résumé
Myriam Sternberg, Données sur les produits fabriqués dans une officine de Neapolis (Nabeul, Tunisie), p. 135-153.
Lors des fouilles archéologiques de la fabrique de salaisons de Nabeul, menées entre 1997 et 1999 par une équipe franco-
tunisienne, un des bassins (bassin III) a li- vré des vestiges de production en place, sous forme d'une sédimentation sur 20 cm
d'épaisseur de restes de petits poissons. Six espèces de poissons ont été déposées dans ce grand bassin pour obtenir un
produit à base de poissons salés entiers. Parmi ces poissons, on dénombre surtout des anchois et des sardines. Les
prélèvements effectués dans d'autres bassins ont permis de recueillir le même type de restes osseux, de constater une
composition identique dans les espèces exploitées et un même traitement, au moins dans un autre bassin de dimension
inférieure (bassin XXXIV). L'analyse attentive de prélèvements effectués dans les canalisations qui permettaient l'écoulement de
deux grands bassins ovales vers un bassin central plus profond (bassins XXIX, XXX, XXXI) a également permis de remarquer la
présence de minuscules résidus osseux de poissons. À partir de cette observation, on émet l'hypothèse que ces bassins à fort
volume de production, ont pu servir à l'élaboration d'un produit liquide à base de poisson. La nature des produits fabriqués dans
les bassins de Nabeul est alors discutée sur la base des traces ostéologiques retrouvées.
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Sternberg Myriam. Données sur les produits fabriqués dans une officine de Neapolis (Nabeul, Tunisie). In: Mélanges de l'Ecole
française de Rome. Antiquité T. 112, N°1. 2000. pp. 135-153.
doi : 10.3406/mefr.2000.2119
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/mefr_0223-5102_2000_num_112_1_2119MYRIAM STERNBERG
DONNÉES SUR LES PRODUITS FABRIQUÉS
DANS UNE OFFICINE DE NEAPOLIS
(NABEUL, TUNISIE) *
Que l'installation des fabriques de salaisons sur le pourtour de la Méd
iterranée soit liée au traitement des poissons migrateurs qui longent le li
ttoral en bancs importants au printemps (thons de «course») et à l'automne
(thons de «retour»), ne fait aucun doute1. La densité des installations le
long du détroit de Gibraltar2 et le long du détroit siculo-tunisien3 le montre
clairement. Il n'est cependant pas exclu qu'il existe une hiérarchie dans les
modes de production en fonction des capacités d'approvisionnement en
matière première, de la faculté des officines à exporter leur surplus4 et en
fonction de la demande extérieure. Si certains sites sont réputés pour leur
garum5, d'autres sont connus pour leur salsamenta6. Quant aux provinces
romaines d'Afrique, elles ne peuvent être appréhendées «comme un espace
économique unique»7.
Dans le cadre d'un programme franco-tunisien d'étude du littoral, une
prospection systématique effectuée le long des côtes de Tunisie de 1987 à
1994, a permis de faire le point sur la densité des vestiges archéologiques
liés à la production de salsamenta et de ces dérivés8. Sur les côtes du golfe
* Mes remerciements vont à Latifa Slim, Pol Trousset et Michel Bonifay, qui
m'ont permis de participer aux missions archéologiques de 1997 et 1999. Sans leur
disponibilité, leurs conseils et les connaissances qu'ils m'ont fait partager, ce texte
n'aurait pu prendre forme. Mes remerciements vont également à André Tchernia qui
a accepté de relire ce manuscrit.
1 Fages et Ponzévera 1899; Ponsich-Taradell 1965; Ponsich 1988.
2 R. Etienne et F. Mayet, dans Scialano 1997, p. 43.
3 Ben Lazreg et al. 1995.
4 Edmonson 1990.
5 Pline l'Ancien, H.N. XXXI, 94.
6 Strabon, Géogr. III, 4, 2; III, 4, 6; Pline, H.N. IX, 92; Polybe, Histoires IV, 38.
7 Ben Lazreg et al. 1995.
8 Paskoff et al., à paraître.
MEFRA - 112 - 2000 - 1, p. 135-153. 136 MYRIAM STERNBERG
de Gabès, du Sahel et du cap Bon, 38 points de production ont été recens
és, dont une dizaine de centres d'importance majeure. L'accent mis jus
qu'ici sur la production céréalière de l'Africa, considérée comme «grenier
de Rome», et sur sa production oléicole, s'est trouvé nuancé par les résul
tats de ces recherches récentes, soulignant l'importance du secteur de pro
duction halieutique dans cette Province9.
Si les quelques fabriques ou groupes de cuves partiellement connus
avant cette prospection (Salakta, Nabeul, Kélibia) ont servi à établir les cri
tères d'identification des lieux de production des salsamenta, l'étude détail
lée de l'une d'entre elles devait permettre de comprendre son évolution et
son fonctionnement. Le choix s'est porté sur l'une des mieux conservées,
celle de Neapolis «vraisemblablement centre de regroupement et de redis
tribution de marchandises et de produits agricoles aussi bien pour le mar
ché local que pour l'approvisionnement régulier de Rome» et qui a dû «bé
néficier des perspectives d'échanges qui lui permirent de développer, entre
autres, la production et la commercialisation des salsamenta»10.
Les premières fouilles des cuves de salaisons de ce site, ont été effec
tuées en 1965-1966", en même temps que celles de la Nymfarum domus12.
La reprise de l'étude d'une des unités de fabrication de salaisons, par
L. Slim, P. Trousset et M. Bonifay en 1995, a permis de compléter de man
ière décisive le plan de l'officine et de préciser son évolution : aménagée
dans les années 60-80, elle subit des transformations dans la deuxième
moitié du IIe siècle, avec l'aménagement de nouveaux bassins. Il apparaît
ainsi que dans son état ultime, elle s'organisait en deux ensembles étages
en terrasses. Sur la terrasse supérieure, une cour centrale était entourée
d'une galerie, flanquée de bassins de salaisons à laquelle on accédait par
une rampe venant directement de la grève13.
Nos connaissances de la première phase d'aménagement de la fabrique
sont limitées (fig. 1) : on sait qu'une série de cinq bassins marque la limite
orientale de l'ensemble dégagé (bassins II à VI). Ces ont été fouillés
par J.-P. Darmon en 1965. On peut y ajouter un petit bassin peu profond
(bassin XXXIV)14, plus à l'ouest. Au cours de la seconde moitié du IIe siècle
9 Ben Lazreg et al. 1995.
10 Slim et al. à paraître.
11 Darmon 1968.
121980.
13 Slim et al. à paraître.
14 II s'agit du bassin XXXIV, dont les dimensions conservées sont : 1,10 χ 2 m,
pour une profondeur de 30 cm. M. Bonifay
Fig. 1 - Unité de production de Nabeul (Tunisie). Fouilles 1995-1999. Phase 4A : vers 60/80 de n. è (M. Bonifay). 138 MYRIAM STERNBERG
de n.-è., la batterie est agrandie par l'adjonction d'un grand bassin (bas
sin I). Une série de bassins de formes et de capacités différentes sont
aménagés (bassin VII, Vili, IX, XXXII) plus à l'ouest, tandis qu'à la l
imite de l'unité étudiée, trois grands bassins accolés, de forme ovale sont
creusés (bassins XXIX, XXX, XXXI). Dans cette seconde phase, il
semble donc que la capacité de production de l'officine s'accroît (fig. 2).
L'ultime aménagement semble être l'installation des petits bassins (bas
sins XVIII a à g) entre les bassins VII, Vili et IX. On considère au
jourd'hui, que dans sa plus grande extension, cette unité fonctionnait
avec cette vingtaine de bassins. Certains, ont pu être abandonnés au
cours du IIIe siècle (bassins est); les autres l'ont été de manière progres
sive (?), plus tardivement, dans la seconde moitié du IVe siècle (Slim et
al. à paraître).
Plusieurs de ces bassins, ont livré des restes de poissons. Ces don
nées permettent de discuter de la fonction des bassins dans la chaîne
opératoire des productions et de préciser le(s) produit(s) traité(s) dans
cette fabrique. Toutes n'ont pas la même valeur : celles du bassin
XXXIV ont été, en partie, oblitérées par les aménagements postérieurs;
mais elles constituent le seul échantillon du IIe siècle (fig. 3). Celles du