Edition de texte : Erec et Enide - article ; n°11 ; vol.5, pg 99-110
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Description

Médiévales - Année 1986 - Volume 5 - Numéro 11 - Pages 99-110
12 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1986
Nombre de lectures 63
Langue Français

Extrait

Anne Labia
Edition de texte : Erec et Enide
In: Médiévales, N°11, 1986. pp. 99-110.
Citer ce document / Cite this document :
Labia Anne. Edition de texte : Erec et Enide. In: Médiévales, N°11, 1986. pp. 99-110.
doi : 10.3406/medi.1986.1042
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/medi_0751-2708_1986_num_5_11_1042AnneLABIA
EREC&ENIDE
Tant que le Moyen- Age reste contenu dans les volumes réguliers aux
teintes sobres des éditions de référence, le problème d'une lettre reste accessoire : la
machine philologique a élaboré, entre 1850 et 1930 environ, des textes pour
l'éternité. Les outrages des ans — lacunes et feuillets disparus — les étourderies des
scribes — bourdons et omissions — ont été effacés, avec les graphies fantaisistes et
les traits dialectaux. L'étude des textes en vers ayant imposé sa norme à l'établiss
ement général des textes, la reconstruction d'une forme a entraîné la reconstruction
d'un fond, version idéale, moyenne et, nécessairement, parce que trop souvent
fictive, à jamais perdue. On a évincé les versions atypiques des familles de
manuscrits, les parents inavouables. De ce patient et admirable travail à jamais
inégalé, sortent la plupart de nos éditions courantes. Or, les conditions matérielles
qui président à l'élaboration — et donc à la lecture — d'un livre ainsi recomposé
n'ayant pas changé depuis le siècle dernier, nous n'avons que très rarement éprouvé
le besoin de sortir de ces sentiers balisés. •
Si nous lisons aujourd'hui comme au siècle dernier, à ce décalage s'ajoute
une autre distorsion. Ces érudits cherchaient encore. Un siècle après, le lecteur
moyen d'un roman de Chrétien de Troyes est persuadé que Chrétien c'est la copie
Guyot éditée par Mario Roques. Il ne lira jamais — sauf cas exceptionnel — les
introductions savantes qui la précèdent. Or, Chrétien, même dans la Troyes de
1150, c'était déjà un concept mouvant. Un siècle et demi plus tard, dans des copies
picardes ou anglaises, c'est pour ainsi dire méconnaissable. Si les éditions modernes
figent — faute d'outil matériel neuf — nos habitudes de lecture, elles figent aussi la
réalité textuelle médiévale.
Il est vrai que nous ignorons tout de cette mouvance littéraire. Nous ne
pouvons jamais dater un texte et sa copie avec certitude. Expertises graphiques et
chimiques ne sont pas toujours concluantes et le lecteur curieux, qui voulait juste en
savoir plus, est laissé seul, désemparé, devant une masse de manuscrits dépareillés.
Il est tenté de s'en remettre à l'autorité des copistes, transcrivant religieusement ce
qui est lisible, laissant l'illisible à jamais mystère; s'abstenant, par respect devant ce
qui a traversé les épreuves du temps, de poser les questions sacrilèges. 100
C'est pourquoi, éditer des textes dans des éditions photographiques ne
changerait rien au problème. On multiplierait notre lecture, mais on ne ferait pas les
rapprochements qui s'imposent, ceux qui s'imposaient aux copistes, parce qu'ils
avaient devant eux ce qu'ils avaient à copier, adapter et transformer (1).
Nous avons parlé d'un roman en vers. Nous proposons ici un texte en
prose, technique où la variante est autrement plus aisée. Nous n'avons certes pas la
prétention de tirer des conclusions, ni sur ce texte, ni sur ses moyens d'étude. La
question toute simple de son approche est déjà en soi un problème. Si Charles Mêla
supposait que les écrivains médiévaux anticipent leur tradition manuscrite (2); si
Bernard Cerquiglini confronte l'intuition et les textes (3), toute la littérature
médiévale ne serait qu'une formidable question sur sa propre existence. Et des
textes comme celui-ci devraient nous laisser sans voix.
En 1885, E. L0seth pour quelques mois à Paris part à la recherche, à la
demande de Gaston Paris, du roman perdu d'Yseut la Blonde dont Chrétien se
vante au début de Cligès. A la poursuite d'un "modèle poétique sous la forme de
vers restés à l'état pur" (4), il se lance dans un fabuleux travail de lecture et
d'analyse des romans en prose de Tristan, derniers livres de Lancelot du Lac ,
compilations anonymes, premières éditions et adaptations italiennes. Il note scrupu
leusement les épisodes les plus saugrenus, tel celui que nous considérons ici, et qui a
trait à Erec. Loin de rejeter cette version, il la considère comme un épisode
essentiel, malheureusement absent des autres copies. S'il note que dans le roman de
"de Chretien de Troies il ne se trouve aucune trace de cet épisode" (5) en prenant le
parti de ne pas le supprimer, il rend pratiquement impossible l'édition d'un roman
de Tristan, ce texte essentiellement multiple, changeant et déroutant.
Erec apparaît trois fois dans toutes les versions du roman en prose —
autant qu'on puisse en juger par ce qui nous en reste — à des endroits plus ou
moins fixes. On mentionne — le texte ou un personnage, c'est très variable selon les
cas — que :
1) il est un quêteur du Graal
2) il est l'époux d'Enide
3) il a pris part aux côtés de Tristan à la guerre finale contre le roi d'Irlande.
C'est à dire qu'il est un personnage éminemment secondaire, au même titre
que lès Bruns, Ségurant et Galehot noirs et blancs qui remplissent le paysage
chevaleresque. Cependant, parce qu'il est associé à Enide, il porte le prestige de
Chrétien de Troyes. Il n'a toutefois pas, on le voit, l'importance structurale de
1. Nous ne parions pas, ici du changement fondamental que l'informatique peu apporter à ta lecture des tottt
médiévaux.
2. La Reine et le Graal, Le Seuil,1984
3. La Parole Médiévale, éd. Minuit, 1981
4. Le Roman en prose de Tristan, le roman de Palamide et la Compilation de Rusticien de Pbe, Anatpe critique
d'après les manuscrits de Paris, Bouillon, Paris, 1890 ; Slatkine Reprints, 1974 p. XXV
5. Analyse, 1435 note 1 '
101
Perceval, de Lancelot ou même d'Yvain. Notons que, s'il y a un Alexandre, il n'y a
pas, à notre connaissance, de Cligès. Thématiquement, pourtant, il s'entrelace à
eux : on sait qu'il est "fils de Lac" comme Lancelot, que sa mère est une sorcière
comme celle de Gauvain, qu'il ne ment jamais, comme un vallet des contes de "bon
conseil". Erec apparaît comme le personnage central de deux épisodes — en plus de
la mise en prose du roman de Chrétien dont nous ne parlerons pas (6) — de grande
ampleur : l'interpolation éditée par C. Pickford (7) et la nôtre, celle du ms.757.
Comme quoi la recherche d'un trésor peut conduire à la découverte d'un autre, ce
qui est bien médiéval, et semble fait exprès pour les romans du Graal (8).
Pour peu qu'on s'habitue au style familier auquel un lecteur de Chrétien
n'est pas habitué et devienne attentif au jeu des noms signifiants, symboles et
mots-valise, on s'aperçoit que ce passage est mis dans la perspective du Graal.
Yseut, dit le conte, est importunée par Gauvain dont la "mauvestié", après son
désaveu par là Queste n'est plus à démontrer (9). Il cherche avec violence à la
séduire quand arrive Erec. Le début de l'aventure est nettement marqué, qui
substitue Erec à monseigneur Gauvain :
"Atant laisse à parler le conte de monseigneur Gauvain et retourne à Erec le
fib Lac."
On se trouve déjà dans un système d'entrelacement d'aventures Gauv
ain /Erec, où, comme toujours dans la littérature médiévale, Gauvain est référen
ce, mesure, fût-ce en "mauvestié", faire-valoir, comme, par exemple, dans le Conte
du Graal de Chrétien, le Perceval en prose attribué à Robert de Boron (10) pour
Perceval, ou dans la Queste (11) pour Galaad. Si ces rapprochements paraissent
arbitraires — comment prouver que le copiste ou l'auteur du ms.757 ont connu ces
textes et remarqué leur structure — on ne peut s'empêcher de remarquer que le
nom de l'épouse — Enide — est conditionné par son mariage, dans le 757 et dans
les simples allusions des autres manuscrits, comme chez Chrétien de Troyes (12) :
1975 qu'altrement n'est fame esposee,
1976 se par son droit non n'est nomee.
"et se aucuns me demandoit content la demoiselle avait nom. ge diroie qu'elle av

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