Faits et gestes du prédicateur dans l iconographie du XIIIe siècle au début du XVe siècle - article ; n°16 ; vol.8, pg 197-208
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Faits et gestes du prédicateur dans l'iconographie du XIIIe siècle au début du XVe siècle - article ; n°16 ; vol.8, pg 197-208

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Description

Médiévales - Année 1989 - Volume 8 - Numéro 16 - Pages 197-208
12 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1989
Nombre de lectures 23
Langue Français

Extrait

Marie-Paule Champetier
Faits et gestes du prédicateur dans l'iconographie du XIIIe siècle
au début du XVe siècle
In: Médiévales, N°16-17, 1989. pp. 197-208.
Citer ce document / Cite this document :
Champetier Marie-Paule. Faits et gestes du prédicateur dans l'iconographie du XIIIe siècle au début du XVe siècle. In:
Médiévales, N°16-17, 1989. pp. 197-208.
doi : 10.3406/medi.1989.1149
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/medi_0751-2708_1989_num_8_16_1149Marie-Paule CHAMPETIER
FAITS ET GESTES DU PRÉDICATEUR
DANS L'ICONOGRAPHIE DU Xffle AU DÉBUT DU XVe SIÈCLE
Quand le prédicateur et l'image se rencontrent...
Le christianisme est, fondamentalement, une religion de la parole :
« Au commencement était le Verbe / Et le Verbe était avec Dieu /
Et le Verbe était Dieu1. » II est aussi l'une des religions du Livre.
Mais celui-ci « est fait pour être dit. Dès l'origine, il y a à la fois
équilibre et tension entre le livre et la parole »2. Parallèlement, le
christianisme est, par essence, une religion missionnaire.
Ainsi, la prédication se trouve au cœur des enjeux du christia
nisme. Le prédicateur dit l'Écrit ; il le transmet aux fidèles. « Prê
cher, c'est faire un discours public fondé sur une révélation
divine3. » Du kérygme primitif aux sermons, en passant par les
homélies, la parole fut le grand mode de propagation de la religion
révélée.
Au tournant des XIIe et xme siècles, se produit une double mutat
ion, dans les mentalités et dans les faits, qui propulse le prédicateur
sur le devant de la scène chrétienne. D'une part la catéchèse est désor
mais « fondée sur une valorisation de la parole comme instrument de
médiation et de séduction »4 : dès le XII* siècle, le silence monastique
est rompu ; la parole doit être diffusée à tous les fidèles. Les Ordres
Mendiants sont ensuite les propagateurs par excellence de la « parole
nouvelle ». D'autre part, la dimension missionnaire du christianisme
atteint alors un paroxysme : dans la croisade contre les infidèles, dans
la conversion des hérétiques et dans la conduite des fidèles sur le che-
1. L'Évangile selon saint Jean, I, 1-2.
2. J.-C. Schmitt et J. Le Goff : « La parole nouvelle », dans Histoire vécue du
peuple chrétien, sous la direction de J. Delumeau, Toulouse, Privât, 1979, 1. 1, p. 2S7-279
(p. 258).
3. J. Longère : La prédication médiévale, Paris, Études augustiniennes, 1983,
p. 3.
4. A. Vauchez : Faire croire, Rome, École Française, 1981, p. 7-16 (p. 11). 198
min du Salut par la pratique de la morale du Christ — les Frères
mendiants accomplissant avec zèle ces deux dernières tâches.
Aux xme et XIVe siècles, la prédication adapte ses moyens ora
toires à ses nouveaux publics. Les traités sur l'art de prêcher mont
rent que l'on se préoccupe davantage des modalités de la diffusion
du message révélé5. Or, à la même époque sont aussi produites en
grand nombre des représentations figurées du prédicateur — celles des
Bibles moralisées notamment6. Le prédicateur et son image sont
donc, aux xme et XIVe siècles, des réalités et des enjeux mentaux
essentiels. Et l'apport de l'iconographie à l'histoire de la prédication
mérite d'être étudié...
L'observation d'une donnée iconographique, la gestuelle du
prédicateur7, peut nous permettre d'appréhender les modalités de la
transmission de la Parole divine par le prêche, et l'idée que l'on s'en
fait. Les images du prédicateur sont toutefois multiformes dans l'ic
onographie du XIIIe au début du XVe siècle. Comment les associer pour
construire une typologie ? Le critère majeur est d'ordre externe puisqu'il
dépend à nos yeux de l'époque de production des images8. C'est donc
en suivant la trame chronologique que nous observerons celles-ci.
5. Sur les Arles praedicandi, on se reportera essentiellement aux études de Th.-
M. Charland : Les Artes praedicandi. Contribution à l'histoire de la rhétorique du
Moyen Age, Paris, 1936 et « Les auteurs d'Artes praedicandi au xiii« siècle d'après les
manuscrits » dans Études d'histoire littéraire et doctrinale du xiw siècle, Paris, 1936,
t. I, p. 41-60 ; et aux études de J.-J. Murphy : Rhetoric in the Middle Age. A history
of rhetorical theory from Augustine to the Renaissance, Berkeley, 1984 et Medieval
eloquence studies in the theory and procerie of medieval rhetoric, Berkeley, Los Angeles,
Londres, 1978.
6. Notre étude repose essentiellement sur un corpus de Bibles moralisées, du
xiii' siècle (Bible dite de Saint Louis du chapitre de la cathédrale de Tolède, manusc
rits LAT. 11560 de la B.N. de Paris, Cod. 2554 de la B.N.A. de Vienne et Ms. 270B
de la Bodleian d'Oxford) et du début du xv siècle (manuscrits FR. 166-167 de la B.N.
de Paris) — soit 334 images. Les Bibles moralisées du xme siècle ont été produites dans
des ateliers dont on ignore la situation géographique exacte, alors que celles du début
du xv« siècle ont été commandées par Philippe le Hardi et Philippe le Bon, et enlu
minées en partie par les Frères Limbourg.
Pour une étude de ces Bibles moralisées, on pourra se reporter aux ouvrages sui
vants : F. Avril : « Un chef-d'œuvre de l'enluminure sous le règne de Jean le Bon :
la Bible moralisée FR. 167 de la B.N. », dans Documents et Mémoires de la fondat
ion Eugène-Piot, p. 91-125 ; F. Garnier : « L'imagerie biblique médiévale », dans
P. Riche et G. Lobrichon : Le Moyen Age et la Bible, Beauchesnes, 1984,
p. 401-428 ; K. Haussherr : Faksimilie-Ausgabe im original Format des Codex vide-
bonensis 2554 des Osterreichen National Bibliothek, Paris, 1973.
7. Sur les gestes dans l'iconographie médiévale, on se reportera aux études de
F. Garnier, et notamment : Le langage de l'image médiévale, Paris, Le Léopard d'or,
1982.
8. Une lacune apparaît dans notre corpus, qui semble correspondre à un arrêt,
au xiv siècle, dans la production des Bibles moralisées. Elle nous a contraints à part
ir de deux tranches chronologiques : l'une de la première moitié du xme siècle et
l'autre du début du xv siècle. Quelques Bibles, comme la Bible latine Ms. 21 de la
bibliothèque Sainte-Geneviève de Paris, ou les Ovides moralises, notamment ceux de
la de l'Arsenal à Paris et de la bibliothèque municipale de Rouen, nous
permettent toutefois d'avoir un aperçu des représentations du prédicateur au xiv siècle. 199
Au xm* siècle : une fonction de courroie de transmission du Verbe
divin
Dans les images du XIIIe siècle, le prédicateur est figuré comme
un intercesseur de la Divinité auprès des fidèles.
Le modèle mental du Christ prédicateur est fortement affirmé
dans les Bibles moralisées par un rapport spécifique entre le texte et
l'image. Lorsque, dans le texte, il est dit que Jésus-Christ est « prê
cheur », l'image peut le représenter ou non. Or, souvent, c'est un
moine ou un frère mendiant qui est figuré, alors même qu'il est ques
tion du Christ dans le texte. Comment peut-on mieux montrer cette
filiation entre le modèle et le personnage historique qu'en effectuant
cette filiation du texte à l'image ? « Le prédicateur, dit Humbert de
Romans, est la voix du Christ en ce monde9. » Dans les images,
celui-ci est, par excellence, Intermédiaire entre Dieu et le peuple de
Dieu, mi-homme, mi-dieu10.
Cette fonction fondamentale de médiateur est parallèlement sou
lignée par une forte présence du Livre dans les scènes de prédication
du XIIIe siècle. Celui-ci est alors l'attribut du prédicateur. L'orateur
le tient dans sa main gauche huit fois sur dix11. Un auditeur attent
if doit, en écoutant le prédicateur, revivre l'épisode biblique qui fait
l'objet du prêche ; il montre alors la scène biblique située au-dessus
de l'image dans laquelle il se trouve, désignant en même temps les
nuées12. Le livre ouvert ne comporte que des pages blanches. Il est
l'émanation de la Parole divine que le prédicateur transmet aux fidè
les : orienté vers les auditeurs, il leur manifeste la présence de la Divin
ité, donnant ainsi force et efficaci

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