La lecture à portée de main
Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement
Je m'inscrisDécouvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement
Je m'inscrisDescription
Informations
Publié par | REVUE_EUROPEENNE_DE_MIGRATIONS_INTERNATIONALES |
Publié le | 01 janvier 1995 |
Nombre de lectures | 13 |
Langue | Français |
Poids de l'ouvrage | 2 Mo |
Extrait
Daniel Delaunay
Familles mexicaines du pays et de l'exil
In: Revue européenne de migrations internationales. Vol. 11 N°2. Amérique Latine. pp. 47-72.
Citer ce document / Cite this document :
Delaunay Daniel. Familles mexicaines du pays et de l'exil. In: Revue européenne de migrations internationales. Vol. 11 N°2.
Amérique Latine. pp. 47-72.
doi : 10.3406/remi.1995.1463
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/remi_0765-0752_1995_num_11_2_1463Résumé
Familles mexicaines du pays et de l'exil
Daniel DELAUNAY
La présente étude tire profit de la simultanéité des recensements mexicains et américains au printemps
1990 pour comparer les populations mexicaines selon leur situation migratoire. L'analyse de la
composition par âge et par sexe est complétée d'une estimation du sous-enregistrement des migrants
omis par ces statistiques. Est ainsi mise en évidence l'ampleur de la reproduction des populations
mexicaines expatriées, laquelle dépasse désormais l'intensité du flux migratoire net. Deux aspects de
cette reproduction sont ensuite examinés. La fécondité des migrantes est comparée à celle des
Mexicaines restées au pays et à celle des Américaines d'origine mexicaine afin de spécifier les
changements provoqués par l'exil. Mais une des mutations les plus intéressantes touche aux
recompositions familiales aux États-Unis : les unités de résidence des migrants gagnent en complexité
par l'intégration de parents ou d'individus qui n'appartiennent pas à la famille nucléaire. Cela confirme
l'impact des filières migratoires, mais la nature des extensions familiales suggère que la cohabitation est
rendue nécessaire par la précarité économique de certains ménages, notamment monoparentaux.
Abstract
Mexican Families in Homeland and in Exil
Daniel DELAUNAY
The present study takes advantage of the Mexican and American census's simultaneity on Spring 1990
to compare the Mexican populations according to their migratory status. The analysis of their
composition by age and by sex is completed by an estimation of the undercount of migrants omitted by
these statistics. This enhances the vigor of the reproduction of the expatriated Mexican population,
which exceeds henceforth the net migratory flow. Two aspects of this reproduction are then examined.
The fertility of the Mexican immigrants is compared to that of the country of origin and to that of Mexican
Americans so as to specify changes induced by the exile. But one of the most interesting mutations
deals with the recomposition of the migrant's family in the U.S.: units of residence gain in complexity by
the extended integration of relatives or individuals that do not belong to the nuclear family. The impact
of migratory networks is notorious, as well as the domestic precariousness faced by some households,
especially of single parents.
Resumen
Familias mexicanas del país y del exilio
Daniel DELAUNAY
Este trabajo se aprovecha de la simultaneidad de los censos mexicano y americano en el inicio de
1990 para comparar las poblaciones mexicanas según su situación migratoria. Se complementa el
análisis de su composición por edad y sexo por una estimación del subregistro de los migrantes
omitidos por tales estadísticas. Así se evidencia el vigor de la reproducción de las poblaciones
mexicanas expatriadas, la cual rebasa ahora la intensidad del flujo migratorio neto. Luego se examinan
dos aspectos de esta reproducción. Se compara la fecundidad de las migrantes con la observada en el
país de origen y con la de las Chicanas, así se destaca los cambios provocados por el exilio. Pero una
de las mutaciones más interesantes se refiere a las recomposiciones familiares en los Estados Unidos :
las unidades de residencia de los migrantes se hacen màs complejas al integrar parientes o individuos
que no pertenecen a la familia nuclear. Obviamente se destaca el impacto de las redes migratorias, así
como una cohabitación que la precariedad socioeconómica de ciertos hogares, sobre todo
monoparentales, vuelve necesaria.Revue Européenne
des Migrations Internationales
Volume 1 1 - N° 2
1995
Familles mexicaines
du pays et de l'exil
Daniel DELAUNAY (!)
Depuis près d'un siècle, l'émigration des Mexicains vers les
États-Unis a été, et reste encore pour la majorité d'entre eux, le choix d'hommes
jeunes, célibataires, travailleurs souvent saisonniers, parfois clandestins. Les condi
tions adverses associées à leur venue ou leur séjour, les emplois temporaires offerts
dissuadaient l'installation de familles complètes, voire leur formation. Mais au cours
du siècle que dure ce va-et-vient de travailleurs, une population de souche mexicai
ne s'est peu à peu « sédentarisée » en territoire américain. Dans les années quatre-
vingts, la crise économique du Mexique et la loi Simpson de 1986 ont encore encou
ragé un peuplement qui marque de sa vitalité les états méridionaux des États-Unis.
L'impact démographique, maintenant considérable, a des implications politiques,
culturelles que la migration de travailleurs temporaires n'entraînait pas. L'ampleur
démographique des recompositions familiales à l'étranger, le fait que près du deux
tiers des migrants sont mariés (COLEF & al, 1993-94), interdit de voir dans la migrat
ion internationale une pratique individuelle, indépendante du contexte familial sus
ceptible de la motiver et de la supporter.
Cet article propose une observation comparative des familles mexicaines exilées
avec celles restées au pays, examen rendu possible par la simultanéité (au début du
printemps 1990) des recensements américain et mexicain. Ils dispensent une photo
graphie instantanée des populations en diverses situations migratoires - les non-
migrants, les expatriés et leurs descendants - qui devrait révéler les possibles rup
tures que l'exode a pu entretenir, et reconnaître certaines identités démographiques
de la communauté mexicaine au-delà des frontières. La famille est à la fois le lieu
intime et révélateur des comportements reproducteurs. En se focalisant sur la fécon-
(1) Le présent travail, l'usage des informations utilisées et la construction des outils employés résultent d'un
accord de coopération scientifique entre le Colegio de la Frontera Norte à Tijuana (21 calle Abelardo
Rodriguez, 22320 Tijuana, Mexique) et l'Institut Français de Recherche en Coopération pour le
Développement (ORSTOM, 213 rue La Fayette, 75 480 Paris Cedex 10, France). L'accès aux statistiques
censitaires (PUMS, 1 % & 5 %) produites et distribuées par le Bureau of the Census, a été permis par le
Population Research Center de l'Université du Texas à Austin. 48 Daniel DELAUNAY
dite des familles d'immigrants et les compositions parentales des ménages, nous
apporterons des données sur la vigoureuse reproduction naturelle des migrants aux
États-Unis, qui désormais semble l'emporter sur l'apport migratoire, croissance qui
échappe aux fluctuations conjoncturelles du marché de l'emploi ou des réglementat
ions. Une première section s'attachera à circonscrire certaines difficultés statistiques
et tentera de les corriger partiellement.
LES SOURCES STATISTIQUES
Sitôt passés « del otro lado », les Mexicains deviennent en partie invisibles. Au
Mexique, si on ne les a pas décomptés avant qu'ils ne passent la frontière (2), il fau
dra attendre leur retour ou interroger les parents restés sur place. Il a été abondam
ment démontré comment de telles mesures risquent d'être biaisées (3). Mais il est
sans doute plus déplorable que ces statistiques de flux se prêtent mal à l'analyse
démographique des populations de migrants (statistiques de stocks). Du Mexique en
effet, la perception de la migration internationale est déterminée par la fréquence des
passages frontaliers ou des retours. Elle dépend donc de la nature du flux, soit d'une
mobilité éminemment sélective : dans le cas présent, les migrations de travail des
hommes seuls se trouveront privilégiées, au détriment de celles, féminines ou famil
iales, d'accompagnement, par exemple (Delaunay, 1994). Le pays-hôte, quant à lui,
réalise régulièrement l'inventaire des étrangers qu'il accueille, mais on craindra que
leur enumeration soit incomplète car une proportion élevée d'entre eux s'y trouve en
situation irrégulière, ou séjourne le temps d'une saison ; ce sont des individus peu
enclins à remplir