Galilée et les taches solaires (1610-1613) - article ; n°4 ; vol.19, pg 307-370

Bernard Dame

Description

Revue d'histoire des sciences et de leurs applications - Année 1966 - Volume 19 - Numéro 4 - Pages 307-370
64 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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• Publié par: REVUE_D-HISTOIRE_DES_SCIENCES_ET_DE_LEURS_APPLICATIONS
• Publié le: 01 janvier 1966
• Nombre de lectures: 25
• Langue: Français
• Poids de l'ouvrage: 4 Mo

Extrait

Bernard Dame
Galilée et les taches solaires (1610-1613)
In: Revue d'histoire des sciences et de leurs applications. 1966, Tome 19 n°4. pp. 307-370.
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Dame Bernard. Galilée et les taches solaires (1610-1613). In: Revue d'histoire des sciences et de leurs applications. 1966,
Tome 19 n°4. pp. 307-370.
doi : 10.3406/rhs.1966.2508
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rhs_0048-7996_1966_num_19_4_2508Galilée et les taches solaires
(1610-1613)
SOMMAIRE
I. Introduction.
II. Premiers jugements sur les taches solaires.
Préhistoire de la découverte des taches solaires.
Premières observations de Galilée.
Publication de J. Fabricius.
Observation par le P. Scheiner (mars 1611).
Autres observateurs (fin 1611).
Les trois premières lettres d'Apelle-Scheiner
(12.11.1611, 19.12.1611 et 26.12.1611).
III. Première lettre de Galilée à Welser (4.5.1612).
Correspondance du 6.1.1612 au 4.5.1612.
Analyse de la première lettre de Galilée à Welser.
Galilée confirme son jugement.
Répercussions de cette première lettre.
IV. Deuxième lettre de Galilée à Welser (14.8.1612).
Analyse de cette lettre.
Répercussion de cette deuxième lettre.
Conclusion.
V. V « Accuratior Disquisitio » (13.9.1612) et V « Istoria e Dimostrazioni »
(22.3.1613).
U Accuratior Disquisitio d'Apelle.
Lettre d'Apelle à Welser du 16.1.1612. à du 14.4.1612.
» Lettre d'Apelle à Welser du 25.7.1612.
Galilée prépare sa réponse à VAccuratio Disquisitio.
Troisième lettre de Galilée à Welser (1.12.1612).
Publication de Ylstoria e Dimostrazioni.
VI. Conclusion.
Table des lettres utilisées. 308 revue d'histoire des sciences
I. — Introduction
La controverse des taches solaires constitue un moment import
ant, tant pour l'étude de la pensée de Galilée que pour l'analyse
de ce « phénomène d'extraversion » qui, se révélant au début du
xvne siècle, s'inscrit dans une nouvelle conception du monde et
nous marque encore aujourd'hui (1). Face au P. Scheiner, s. j.,
Galilée, plus indépendant vis-à-vis de la philosophie de son temps,
donnera, le premier, une juste explication de ces taches aperçues
en 1610 dans le ciel immuable des aristotéliciens ; en 1613, il publiera
ses observations et réflexions.
A notre connaissance, il n'existe pas de présentation récente,
en français, de cette controverse (2).
Par ses observations de la nova de 1604, qui était apparue dans
la constellation d'Ophiuchus, Galilée, astronome, constate que le
ciel n'est pas immuable comme le voulait Aristote. En mars 1610,
dans son Sidereus Nuncius (3), il décrit les montagnes de la Lune,
dénombre les étoiles qu'il découvre dans la Constellation d'Orion,
puis dans les Pléiades ; annonce la découverte des satellites de
Jupiter (ou « planètes médicées »). De 1610 à 1619, il poursuit
l'étude de ces satellites ; il observe Saturne, mais sa lunette ne
lui permet pas d'en distinguer les anneaux ; il remarque les phases
de Vénus ; il découvre les taches du Soleil.
Mais Galilée n'est pas le seul observateur de ces taches.
Avant lui, un Hollandais, J. Fabricius, et un jésuite allemand,
le P. Scheiner, ont publié leurs observations. Si nous ne nous
arrêtons pas à l'étude de l'écrit de Fabricius, dont, semble-t-il,
Galilée n'a pas pris connaissance, les trois publications qui ont
trait directement à la controverse sur ces phénomènes solaires
entre Galilée et le P. Scheiner se présentent selon l'ordre chrono-
(1) R. Lenoble exprime par ce terme « phénomène d'extraversion » une double évasion
de la société religieuse et de la représentation scolastique de la Nature ; ces deux évasions
sont « comme deux effets d'un même mouvement de l'inconscient collectif » : in La
science au XVIe siècle (Colloque international de Royaumont), Paris, 1957, p. 166. »
(2) Mgr Pio Paschini, dans son ouvrage sur la vie et l'œuvre de Galilée, a consacré
un chapitre à la découverte des taches solaires, mais son propos même ne lui permettait
pas de présenter longuement les écrits des tenants de la controverse (Pio Paschini,
Vila e Opere di Galilei, Pontifîcia Accademia délie Scienze, Citta del Vaticano, 1964,
v. 1, pp. 243-276). Voir également le mémoire de Lalande cité ci-dessous, p. 315,
n. 3.
(3) Ouvrage traduit et présenté par E. Namer, Paris, 1964. GALILÉE ET LES TACHES SOLAIRES 309
logique suivant : Le 5.1.1612 sont imprimées à Augsbourg
(Augusta) les Très epistolae de Maculis Solaribus scriptae ad Marcum
Velserum, dont l'auteur, le P. Scheiner, se cachait sous le pseudo
nyme ď « Apelles post tabulam latens ». Le 13.9.1612 paraît,
à Augsbourg également, sous le pseudonyme ď « Apelles latens
post tabulam, vel si mavis, Ulysses sub Aiacis clypeo », le De Maculis
Solaribus et Stellis circa Jovem errantibus Accuratior Disquisitio ad
Marcum Velserum Augustae Vind. II. Virum. perscripta, inter jectis,
observationum delineationibus, reprenant trois lettres écrites à Welser
les 16.1, 14.4 et 25.7.1612. Le 22.3.1613, est publiée à Rome
Г Istoria e dimostrazioni intorno aile macchie solari e loro accidenii
comprese in Ire lettere scritte al V Illuslrissimo Signor Marco Velseri
Linceo duumviro ď Augusta consigliero di sua Maesla Cesarea dal
Signor Galileo Galilei Linceo Nobil Fiorentino, Filosofo, e Mate-
matico Primario del Sereniss. D. Cosimo II Gran Duca di Toscana.
Si aggiungono net fine le Lettere, e Disquisizioni del finto Apelle (1).
Ces réflexions sont des écrits sous forme de lettres, plus ou moins
longues, adressées à Marc Welser, magistrat d'Augsbourg et
conseiller impérial ; le P. Scheiner, par ses écrits à Welser,
incite Galilée à répondre : la première et la deuxième lettre de
Galilée font suite à la première publication d'Apelle-Scheiner,
la troisième lettre de Galilée répond à VAccuratior Disquisitio
d'Apelle.
Les écrits de Scheiner, Galilée et les lettres de Welser à Galilée
sur cette question, sont rassemblés dans le volume V des Opere
de Galilée (éd. nazionale). L'étude de la correspondance de
l'année 1612 (v. XI), permet de mieux situer le contexte de la
controverse et de comprendre les difficultés soulevées par cette
découverte dans la mentalité de l'époque, certains philosophes
tenant d'autant plus obstinément à l'aristotélisme que se font plus
précis les efforts de Galilée en vue d'une nouvelle philosophie.
Si la découverte des taches solaires n'est pas déjà en 1613, pour
Galilée, une preuve du système de Copernic, l'on pourrait dire
(1) Voir dans J 'avertissement au volume V des Opere de Galilée, les sources utilisées
par Favaro pour établir le texte (editione nazionale sous la direction de A. Favaro,
20 vol., Florence, 1890-1909 ; 2e éd., 1929-1939). Le volume V, paru en 1905, a été réédité
en 1932 ; les modifications portent principalement sur les dessins des taches dans la
deuxième lettre de Galilée, cf. l'avertissement de la réédition, p. 435. Nous citerons dans
la suite cette édition par l'abréviation Opere, ed. naz., suivie du numéro du tome et de
l'indication des pages. Voir la page de titre de Vlstoria e Dimostrazioni : fig. I, p. 310. ISTORI A
E DIMOSTRAZIONI
MARCO INTORNO COMPRESE DVVMVIRO ALL' CONSIGLIERO E ILLVSTRISSIMO DAL LORO IN ALLE VELSERI TRE DI ACCIDENTI SIGNOR SVA MACCHIE LETTERE D'AVGVSTA MAESTA SIGNOR CESAREA LINCEO SCRlTTE SOLARI
GALILEO GALILEI LINCEO
Si Nobil aggiungono D. Fiorentino, COSIMO nel fine Filofofofe II. le GRAN Lettere, Matematico e DVCA Difquifizioni DI Primaňo TOSCAN del del finto Sertni/s, A, ApcIIe.
IN ROMA, Appreflo Giacomo Mafcardi . M D С X 1 1 1.
CON LIQENZA DE SVPERIO RI.
\ Fig. 1. — Page de titre de VIstoria e Dimostrazione... qu'on pourra comparer avec
celle du même ouvrage et de la même date, 1613, reproduite dans la Revue d'Histoire des
Sciences, XVII-4, oct.-déc. 1964, p. 367 : ci-dessus est ajoutée une ligne : « Si aggiungono
nel fine le Lettere, e Disquisizioni del finto Apelle ». GALILÉE ET LES TACHES SOLAIRES 311
qu'elle est une preuve par analogie (1) : puisque le mouvement
des taches indique une rotation du Soleil sur lui-même, pourquoi
la Terre n'aurait-elle pas une rotation identique ? Cette r