L'évêque Haëlrit - article ; n°4 ; vol.34, pg 492-503

F. Duine

Description

Annales de Bretagne - Année 1919 - Volume 34 - Numéro 4 - Pages 492-503
12 pages

Informations

• Publié par: ANNALES_DE_BRETAGNE
• Publié le: 01 janvier 1919
• Nombre de lectures: 16
• Langue: Français

Extrait

F. Duine
L'évêque Haëlrit
In: Annales de Bretagne. Tome 34, numéro 4, 1919. pp. 492-503.
Citer ce document / Cite this document :
Duine F. L'évêque Haëlrit. In: Annales de Bretagne. Tome 34, numéro 4, 1919. pp. 492-503.
doi : 10.3406/abpo.1919.1538
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/abpo_0003-391X_1919_num_34_4_1538F. DDINE
Ï/EVÊQUE HAËLRIT
J'avais fait une nomination épiscopale il y a quelques
années. Mais voici qu'un prélat d'une autorité considérable
veut enlever son siège à mon évoque.
Donc, dans mon étude sur le schisme breton d), j'avais
placé, en 842, sur la chaire de S. Samson (suivant la formule
ecclésiastique), l'évêque Haëlrit, que j'avais rencontré sans
titre d'évêché dans la charte 97 du cartulaire de Redon. Cette
réintégration d'un oublié dans le catalogue épiscopal de Dol
avait des conséquences assez notables. Elle achevait la déroute
des partisans de Ylndiculus de episcoporum Brittonum depo-
sitione, pamphlet tourangeau, qui attribue la fondation de
l'évêché dolois au coup d'état ecclésiastique de Noménoé, en
848x850. Or, Mgr Duchesne est le défenseur le plus persé
vérant de cette pièce. De là son manque de sympathie pour
mon évoque (2).
Voyons l'affaire.
D'abord, notre illustre compatriote suppose que je n'ai pas
lu la deuxième édition du tome IT de ses Fastes Episcopaux,
laquelle, pense-t-il, m'aurait empêché de prétendre (comme
M. René Merlet et M. Ferdinand Lot) que Ylndiculus procédât
de la Chronique de Nantes. Celle-ci date de 1050 environ. —
A mon tour, j'exprime le regret que Mgr Duchesne ait oublié
ma Métropole de Bretagne®) . Dans cet ouvrage, publié en
(1) Gf. Annales de Bret., 1915 (nov.).
(2) Cf. Mém. Soo.d'hist. et d'archéol. de Bret.. 1920 (nov.).
(3) Volume de 221 p. Paris, Champion. Sur VIndiculus et les origines de
l'évêché de Dol, p. 14 (note 21), et p. 180-2. La Métropole de Bret. a paru en
articles dans les Annales' de Bret. '
■
haëlrit. 493 l'évêque
1016, j'ai renvoyé à cette seconde édition qu'on m'oppose
maintenant. Et j'y ai montré que peu m'importait que Vlndi-
culus lût antérieur ou postérieur à la Chronique, puisque je
pouvais établir les circonstances du XIe siècle qui expliquaient
la doctrine et le rôle du libelle anti-dolois.
Dans ses Origines de V ancienne France (D, M. Flach consi
dère Vlndiculus comme « une source antique », sans oser
affirmer qu'elle soit « du IXe siècle plutôt que du Xe », —
très exactement comme Mgr Duchesne l2), qui soutient l'anté
riorité de cette même pièce par rapport à la Chronique de
Xantes, sans éprouver le besoin de « mesurer » l'espace plus
ou moins long qui sépare ces deux documents èonnexes. —
Mais cette question de temps est capitale. Pour se faire écouter
il' n'est dans l'histoire des événements bretons de 848x850,
XIe siècle. pas indifférent d'être du IXe, ou du Xe, ou du
Tant que Vlndiculus faisait figure d'écrit contemporain de
Noménoé, il s'imposait aux historiens de cette période. Mais,
depuis vingt-cinq ans qu'il a perdu son caractère ancien de
témoin autorisé, et qu'il est démasqué dans sa polémique
passionnée, on ne sauvera pas le .crédit de Vlndiculus en
concédant tout simplement qu'il est plus jeune qu'on ne
croyait. Après les travaux de MM. Merlet (3>. La Borderiez,
Lot*5), il était acquis que le facUiin tourangeau appartenait
probablement au XIe siècle^. Restait à « mesurer », d'une
manière plus précise, si c'était possible, les faits et les idées
qui avaient pu lui donner naissance et le rôle qu'il devait
jouer.
Revenons à Haëlrit.
Si je l'ai mis sur le siège de Dol en 842, — très contrai-
(1) T. IV, 1917, p. 188.
(2) F. E., II, 2<= édit., 1010, p. 261°.
(3) Chroniq. de Nantes, Introduct. et not., Paris, Picard, 1896.
(4) Hist. de Bret., II, 1898, p. 477 et sq.
(5) Mél. d'hist. bret., Paris, Champion, 1907, p. 92 et sq. Ce volume a paru
en articles dans les Annales de Bret.
(6) Bien qu'il s'éloigne de MM. Merlet et La Borderie, M. Levillain tient
ÏIndiculus pour un fragment contemporain de la Chronique. (Cf. Les
réformés eCClés. de Noménôé, étiide sur les sources narratives, dans le
Moyen Agé, juill.-aô'ût lflO2.)494 l'évêque haëlrit.
rement à la thèse de Vlndiculus, — j'en ai donné les raisons.
Dans ces années en gestation des gros événements politico-
religieux du milieu du IXe siècle, il est tout naturel de voir
le principal évêque de la Domnonée auprès de Noménoé et
de Gonwoion, dans une contrée où se trouvaient des localités
qui relevaient de Saint-Samson ou des églises qui lui payaient
une redevance. L'évêché de Dol était excellemment la fondat
ion bretonne aux nombreuses enclaves, et le culte de Samson
était le culte principal de la province celtique, le culte antique
et national : En augustum omnium nostrum caput, en pon-
tifex summus ...omnium Britaiinorum... en peritissimus
omnium ecclesifirum post apostolos lundator, disait la vita
Samsonis du VIIe siècle (D. — D'ailleurs, la charte 07, que
notre évêque souscrit à Redon, est de nature à l'intéresser
particulièrement. Il s'y agit du petit monastère de Castel-
Uwel, dont on transfère à l'abbaye de Gonwoion l'entière
propriété, mais en maintenant à la charge de cette maison
le cens dont le monasteriolum était grevé en faveur de Saint-
Samson.
Ici, Mgr Duchesne soulève une objection : payer le cens à
S. Samson, dit-il, ce n'est pas nécessairement le payer à Dol;
c'est peut-être le devoir à quelque monastère dédié au même
(1) Liber I, 9. — Sur le culte de S. Samson et les enclaves de Dol,
cf. Duine, S. Samson, Rennes, Bahon-Rault, 1909, p. 21-32; Saints de
Domnonée, même librairie, 1912, p. 11-12; S. Samsony dans les Annales
de Bret., avril 1902, p. 425, avril 1913, p. 335, janv. 1915, p. 123; Métropole
de Bret., 1916, p. 183-5, avec carte; Allenou, Hist. fëod. de Dol, 1917, p. 18.
L'annotateur de l'article de Mgr Duchesne (dans les Mém. Soc. hist. archéol.
de Bret.) aurait pu renvoyer à ces essais, s'il avait été plus au courant de
la question, dans laquelle il est intervenu avec beaucoup de zèle.
Pour couper court aux exagérations, disons que, si le culte de S. Samson
existait en Poufrécoët (partie sud du diocèse d'Alet), en Bro-werec (diocèse
de Vannes), en Cornouaille (diocèse de Quimper), en Léon, (diocèse de Saint-
Pol), les enclaves doloises se trouvaient essentiellement en Domnonée (Poul
et, partie nord du diocèse d'Alet; diocèses de Saint- Brieuc et de Tréguier:
extrémité est du de Sainit-Pol). Inspiré par la secundo, vita Turiavi
(avec l'interprétation du même passaga dans lo bréviaire dolois de 1519), j'ai
cru que le monastère de Balon, dans le pays de Redon (on Bains, d'après
M. de la Borderie; en Peillac, d'après M. de Laigue), relevait de Dol. Mais
j'observe que la prima Turiavi passe sous silence ce trait d'une dépendance
samsonienne, et je crains que l'affirmation de la secunda ne vienne pure
ment d'une assimilation injustifiée de BaJon avec Lan-Valon (on Lan-Volon).
Aussi je n'oserais pas insister sur l'existence d'enclavés dblbis'es' dans la
contrée reclonnatëe, non plus qiie dans le Poutr'ôcbèt. HAËLR1T. 495 l'ÉVÈQTJE
suint dans le Poutrécoët ou le Bro-werec. — A quoi nous
le*
répondons : N'était-il pas d'un usage courant de désigner
siège épiscopal par le nom du saint fondateur ? Dans l'acte
que nous analysons, s'il s'agissait d'un autre lieu que celui
de la cathédrale', l'on aurait pris soin d'éviter les confusions
possibles avec les diverses églises du bienheureux dolois, en
ajoutant un indice topographique. Ainsi, dans le cartulaire
de Redon, quand l'évêque d'Alet se dit évêque de S. Malo,
personne n'a besoin d'explication pour reconnaître le si