La nouveauté des Lyrical Ballads : mythe ou réalité ? - article ; n°1 ; vol.17, pg 139-159
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XVII-XVIII. Bulletin de la société d'études anglo-américaines des XVIIe et XVIIIe siècles - Année 1983 - Volume 17 - Numéro 1 - Pages 139-159
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Publié le 01 janvier 1983
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Langue Français
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Extrait

Jean Raimond
La nouveauté des Lyrical Ballads : mythe ou réalité ?
In: XVII-XVIII. Bulletin de la société d'études anglo-américaines des XVIIe et XVIIIe siècles. N°17, 1983. pp. 139-
159.
Citer ce document / Cite this document :
Raimond Jean. La nouveauté des Lyrical Ballads : mythe ou réalité ?. In: XVII-XVIII. Bulletin de la société d'études anglo-
américaines des XVIIe et XVIIIe siècles. N°17, 1983. pp. 139-159.
doi : 10.3406/xvii.1983.1027
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/xvii_0291-3798_1983_num_17_1_1027- - 139
LA NOUVEAUTE DES LYRICAL BALLADS
MYTHE OU REALITE ?
Si l'année 1798 est presque toujours tenue pour lfan I du roman
tisme anglais, c'est parce que le petit recueil des Lyricals Ballads a long
temps été considéré comme marquant un tournant décisif dans l'histoire de
la poésie britannique. Une solide tradition s'est établie, qui veut que la
parution de ces vingt- trois poèmes constitue bel et bien l'acte de naissan
ce du romantisme en Angleterre. Les Lyrical Ballads seraient au romantisme
anglais ce que les Méditations poétiques de Lamartine sont au
français. Les auteurs de manuels d'histoire littéraire sont, à l'évidence,
largement responsables d'un semblable cliché, tant il est commode de s'en
tenir à ce que David Daiches appelle, non sans humour, "a peaks and valleys
view of literature". La poésie anglaise, qui paraissait frappée de stagna
tion à la fin du XVII le siècle, s'est trouvée brusquement tirée de sa tor
peur quand parurent les Lyrical Ballads. Il est tentant de pasticher
Boileau : "Enfin Wordsworth et Coleridge vinrent"... Margaret Oliphant, avec
son histoire de la littérature anglaise publiée en 1882, a beaucoup
fait pour accréditer 1 ' idée que les auteurs des Lyrical Ballads avaient
imposé à l'Angleterre un credo poétique entièrement nouveau. La même antien
ne allait être reprise avec une remarquable constance. Pour Oliver Elton,
"there had been nothing of the sort before ; the very faults were new" (2~) .
Selon Elsie Smith, "the volume undoubtedly was a puzzle, for it marked a
complete change from anything that had appeared before" C31 . C'est sur une
affirmation dénuée d'ambiguïté que s'ouvre l'introduction écrite par H.
Littledale pour son édition des Lyrical Ballads :
The volume of Lyricals Ballads made its appeal in 1798
to a small and unprepared public ; it had to create the taste
by which it was enjoyed. (4) - - 140
1966, Margaret Drabble parlait encore de "révolution poétique" En
à propos des Lyrical Ballads :
The poems in this one small volume were a revolution in
poetry ; they were completely new (...) They were different
in language, in intention, and in subject matter. (5)
Tout porte à croire que la romancière nTavait pas connaissance d'un arti
cle de 1954 au titre pourtant accrocheur, "The Contemporaneity of the
Lyrical Ballads" ^ , dans lequel Robert Mayo montrait, preuves à l'appui,
que les principaux thèmes du recueil de 1798 n'allaient nullement à l' en
contre des goûts contemporains. Agissant comme un levain, cet article de
vait inciter quelques critiques à nuancer, voire à modifier certaines idées
reçues. En 1976 parurent deux livres qui se situaient dans le droit fil de
l'article de Robert Mayo : l'un, de John E. Jordan, s'intitulait Why the
Lyrical Ballads ?, l'autre, de Mary Jacobus, Tradition and Experiment in
Wordsworth's Lyrical Ballads (1798) . Est-ce à dire qu'il faille désor
mais refuser toute qualité novatrice aux Lyrical Ballads qui, loin d'être
à l'origine d'une révolution poétique, ne seraient que le point d'aboutis
sement d'une lente évolution remontant au début du XVIIIe siècle ? La vé
rité se situe probablement à mi-chemin. Le moment, en tout cas, paraît
venu d'essayer de faire le point sur ce problème de la nouveauté - réelle
ou supposée - des Lyrical Ballads.
Loin de clarifier la question, les gloses que les auteurs des
Lyrical Ballads ont consacrées à ce petit -volume de vers ne font- que l'obs
curcir. Wordsworth, à qui l'on doit 1 '"Avertissement" de 1798 ainsi que
la "Préface" de 1800, a d'emblée souligné le caractère insolite du recueil.
S'il faut en croire 1' "Avertissement", les poèmes des Lyrical Ballads
relèveraient d'une stratégie de rupture. On connaît la phrase : "The
C8) majority of the following poems are to be considered as experiments" .
Obnubilés qu'ils étaient par le substantif "experiments", assurément in
dissociable de l'idée d'innovation, les commentateurs n'ont pas toujours
prêté autant d'attention qu'il eût fallu à l'expression "the majority of
the following poems", qui semble pourtant impliquer que certains de ces
poèmes pouvaient, à l'époque, n'avoir rien de spécialement original, compte - - 141
tenu des modes littératires du temps. Il n'est peut-être pas interdit de
supposer, surtout si l'on se rappelle que Coleridge et Wordsworth ont sou
haité publier en commun un volume de poèmes afin d'amasser quelque argent,
que Wordsworth a délibérément exagéré, dans un but en quelque sorte "pu
blicitaire", le côté novateur du recueil. Le meilleur moyen de piquer la
curiosité du lecteur n'était-il pas, après tout, de lui laisser croire
qu'il se trouvait en face d'une oeuvre qui sortait résolument des sentiers
battus ? Tel ou tel poète contemporain de Wordsworth et de Coleridge, au
teur de vers depuis longtemps oubliés, n'éprouvait aucun scrupule à exal
ter l'originalité et la nouveauté de ses productions. Le Révérend John
Sharpe, par exemple, déclarait sans sourciller que le sujet de son The
Church, a Poem (1797) était "nouveau et sans précédent" v . A propos
de son Britannia : A Poem (1797), Samuel Wilcocke écrivait pour sa part :
The Author. here deprecates the severity of criticism towards
his present performance, in the first instance, with respect
to the execution, in consideration of its being an early
trial of skill in the Heliconian art ; and, secondly, with
respect to the novelty of the plan, and his deviation from
common rules, in consideration that it is more arduous, as
well as, if successful, more glorious, to climb the hill of
poetic fame by a nearly unfrequented and rugged path, but
which may, perhaps, be found to afford a firm and steady-
footing than to follow the more commodious, but more slippery
tracks which the numberless pilgrims, in all ages, towards
the exalted fane on the mountain- top , have worn bare and
broad, in continual progression. (10)
En proclamant hautement sa volonté d'innover avec les poèmes des Lyrical
Ballads , Wordsworth innovait sans doute moins qu'on pourrait le croire...
De surcroît, si le volume ne recueillait pas les faveurs du public, le poè
te pouvait toujours prétendre que ses lecteurs avaient été déroutés par le
caractère insolite des poèmes ! L'exemple de Samuel Wilcocke est assez ré
vélateur.
On n'oserait pas s'interroger ainsi sur la. sincérité des déclara
tions de Wordsworth dans 1 '"Avertissement" de 1798, si Coleridge, au cha
pitre IV de Biographia Literaria, n'avait clairement récusé le caractère ré
volutionnaire des Lyrical Ballads, dont il conteste qu'elles aient pu don
ner naissance à ce qu'il appelle "this fiction of a new school of poetry".
Le texte vaut d'être cité :
(...) the omission of less than a hundred lines would have
precluded nine-tenths of the criticism on this work. I hazard - - 142
this declaration, however, on the supposition that the reader
had taken it up, as he would have done any other collection
of poems purporting to derive their subjects or interests
from the incidents of domestic or ordinary life, intermingled
with higher strains of meditation which the poet utters in
his own person and character ; with the proviso that they
were perused without knowledge of, or reference to, the
author1 s peculiar opinions, and that the reader had not had
his attention previously directed to those peculiarities. (11 J
Non moins symptomatique est l1 extrait suivant du chapitre XIV de Biographia
Literaria :
With this view I wrote the 'Ancient Mariner ' , and was
preparing, among other poems, the 'Dark Ladie1, and the
'Ch

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