La programmation de la réception : une sociologie critique des contenus - article ; n°63 ; vol.12, pg 39-58
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Description

Réseaux - Année 1994 - Volume 12 - Numéro 63 - Pages 39-58
L'analyse critique des contenus de la télévision - idéologique ou sémiologique - a pour limite majeure le relativisme interprétatif introduit par les études de réception. Cependant, l'analyse de l'intégration des modes de réception dans les stratégies de programmation et dans la fabrication des émissions permet une critique plus sociologique. A travers l'étude de cas d'un reality show, on montre que la critique sociologique des contenus se fonde sur l'analyse d'une instrumentalisation, par la télévision commerciale, de l'expérience sociale qui fait se constituer les individus en « public » d'une émission.
The main limit of critical analyses - both ideological and semiological - of television contents is the interpretative relativism introduced by reception studies. Nevertheless, analysis of the incorporation of reception modes into programming strategies and programme production, also allows for a more sociological critique. A reality show case study demonstrates that the sociological critique of contents is based on the analysis of an instrumentalization, by commercial television, of the social experience that makes of individuals the « public » of a programme.
20 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1994
Nombre de lectures 38
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Eric Macé
La programmation de la réception : une sociologie critique des
contenus
In: Réseaux, 1994, volume 12 n°63. pp. 39-58.
Résumé
L'analyse critique des contenus de la télévision - idéologique ou sémiologique - a pour limite majeure le relativisme interprétatif
introduit par les études de réception. Cependant, l'analyse de l'intégration des modes de réception dans les stratégies de
programmation et dans la fabrication des émissions permet une critique plus sociologique. A travers l'étude de cas d'un reality
show, on montre que la critique sociologique des contenus se fonde sur l'analyse d'une instrumentalisation, par la télévision
commerciale, de l'expérience sociale qui fait se constituer les individus en « public » d'une émission.
Abstract
The main limit of critical analyses - both ideological and semiological - of television contents is the interpretative relativism
introduced by reception studies. Nevertheless, analysis of the incorporation of reception modes into programming strategies and
programme production, also allows for a more sociological critique. A reality show case study demonstrates that the sociological
critique of contents is based on the analysis of an instrumentalization, by commercial television, of the social experience that
makes of individuals the « public » of a programme.
Citer ce document / Cite this document :
Macé Eric. La programmation de la réception : une sociologie critique des contenus. In: Réseaux, 1994, volume 12 n°63. pp.
39-58.
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/reso_0751-7971_1994_num_12_63_2434LA PROGRAMMATION
DE LA RÉCEPTION:
une sociologie critique des contenus
Eric MACE
Réseaux n° 63 CNET - 1 994
39 — — 40 (3), on s'expose à tomber sous le coup de
la « loi d'airain » de la réception qui dis
sout « l'effet idéologique » de l'encodage
et la « désublimation répressive » des in
dustries culturelles dans la complexité du
pluralisme relativisté des modes de récep
tion (4).
Dans ces conditions, il n'y a pas d'ana
lyse critique possible des contenus : la
question des contenus ne serait désormais
plus affaire que d'opinion - même de la
part des chercheurs (5). La sociologie
n'aurait ainsi rien d'autre à dire sur les
contenus que ce qu'en disent les dirigeants
de la télévision: une « offre » de pr
ogramme rencontre des « réceptions », et
toute critique de contenu se voit opposer
les succès d'audience (6). Opinions contre
opinions, celles des responsables d'émiss
ion, des rédacteurs d'hebdomadaires po
pulaires de télévision et des courbes d'au
dience valent bien celles des « petits L'analyse critique des contenus de la
télévision rencontre les mêmes dif marquis du prê-à-penser » (7) dont la cri
tique des contenus est en réalité une crificultés que celles d'une sociologie
de la télévision : d'un côté, un système tique du public populaire de la télévision.
sans acteurs avec la théorie critique et la La critique des contenus ne serait ainsi que
la marque aigrie et négligeable de « clercs sémiologie, de l'autre des acteurs sans sys
tème avec les études de réception. L'objet dépossédés » qui ont le tort, comme le
de cet article (1) est de montrer que ce cl soulignait Serge Daney, de « regarder ce
qui ne les regarde pas » : « Si le télé-criivage entre le système et l'acteur dans le
rapport individu/télévision comme dans le tique éventuel a osé haïr une émission qui, émission/réception est dépassable de toute évidence, n'est pas ciblée pour
par une analyse sociologique plutôt que sé- lui, on lui fera honte de prendre des grands
airs pour stigmatiser des choses qui ne lui miologique ou ethnographique.
La difficulté essentielle d'une analyse sont pas destinées. Si bien qu'il se trouver
critique des contenus est la définition de ce ait dans la position peu enviable de celui
qui dénonce et qui non seulement dénonce qui la fonde. Si, à l'exemple des « Cultural
Studies » et de la sémiologie structurale, le produit mais, du même coup, le public
on traque l'idéologie des classes domi ciblé par le produit en question. Il faudrait
que le télé-critique éventuel ose se mêler nantes derrière l'apparente objectivité et
« l'allant de soi » des messages (2) ; ou des programmes qui ne le regardent pas.
Paradoxe de la télévision : elle veut bien bien, si, à l'exemple de l'Ecole de Francf
ort, on dénonce la réification de la culture être vue mais pas regardée et encore moins
et la domination culturelle des individus critiquée » (8).
(1) Son objet est détaillé : in MACE, 1994.
(2) BARTHES, 1964 ; HALL, 1977, 1980 ; WOLF, 1993
(3) HORKHEIMER et ADORNO, 1944 ; MARCUSE, 1964.
(4) MORLEY, 1980 ; KATZ, 1987 ; FISKE, 1990 ; DAYAN, 1992.
(5) KATZ, BLUMLER et GUREVITCH, 1974 ; KATZ et LIEBES, 1990 ; SCHRODER, 1993.
(6) CURRAN, 1 990 ; MORLEY, 1 993.
(7) Jacques Prádel, animateur de reality shows, Télé 7 jours, 9 novembre 1991.
(8) DANEY, 1988, 96.
41 ANALYSE DE LA TÉLÉVISION ET principes sociaux « ď activation » de la ré
ception qui aillent au-delà du culturalisme THÉORIES DU SOCIAL
et du psychologisme relativisté des travaux
La difficulté d'une critique des contenus issus du paradigme des effets limités.
qui soit autre chose qu'une opinion pro Toute analyse de la réception est en
vient de ce que les sémiologues d'un côté, même temps une théorie du social et de
l'individu : les théories critiques sont modles ethnologues de la réception de l'autre,
font comme si la relation des individus à la ernes, qui font correspondre la subjecti
vité des acteurs avec les intérêts du télévision n'était pas, comme le soulignait
système (c'est le postulat majeur de « l'ex- à juste titre Theodor Adorno, une relation
« d'intégration des consommateurs » (9) ; tro-détermination » (13) et de la dominat
c'est-à-dire comme si les contenus d'un ion culturelle) ; les théories libérales sont
côté et les individus de l'autre étaient post-modernes, qui dissolvent le système
étrangers les uns aux autres et qu'il fallait et fragmentent l'acteur (c'est le relativisme
interprétatif méthodologique ou « épique » soit une contrainte idéologique, soit un ef
fort de sélectivité pour les faire se rencont des études de réception).
rer. Si on accepte de considérer l'individu ni
En réalité, parce que le public est au comme le produit de la rationalité du sys
cœur des stratégies de programmation de tème social, ni comme pure subjectivité,
la télévision commerciale, il faut retourner mais comme le lieu de tension entre les l
les termes de l'analyse et considérer à la ogiques de rationalisation des appareils de
suite de John Fiske (10) que c'est la capac gestion du social et de la consommation, et
ité de la télévision à intégrer l'expérience une logique de subjectivation fondée sur la
sociale et culturelle de son public qui dé distance aux rôles et aux conduites strat
termine le succès dans un régime de égiques, alors l'individu n'est plus défini
par son « intro-détermination », son « ex- concurrence. C'est parce que la relation
des individus à la télévision ne se réduit ni tro-détermination » ou son cynisme, mais
aux contenus des messages, ni à la psychol par ce que François Dubet désigne comme
« l'expérience » sociale des individus (14). ogie ou aux particularismes culturels des
récepteurs, qu'une sociologie critique des Dans cette perspective, les enjeux so
contenus devient possible. ciaux et les rapports de domination se dé
Nous proposons de fonder cette analyse placent de la question du travail à celle de
critique des contenus sur la notion de l'individu : les rapports sociaux de domi
« programmation de la réception ». Cette nation opposent moins ceux qui monopolis
notion se fonde sur l'idée d'une double ca ent à leur profit la définition du progrès et
les moyens de production de biens matérpacité d'action autonome: celle des télé
iels en imposant aux autres à la fois le ba- spectateurs et celle des producteurs et pro
fouement

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