La question du « matriarcat préhistorique » et le rôle de la femme dans la préhistoire - article ; n°1 ; vol.10, pg 7-18
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Description

Travaux de la Maison de l'Orient - Année 1985 - Volume 10 - Numéro 1 - Pages 7-18
12 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1985
Nombre de lectures 131
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Jacques Cauvin
La question du « matriarcat préhistorique » et le rôle de la
femme dans la préhistoire
In: La femme dans le monde méditerranéen. I. Antiquité. Lyon : Maison de l'Orient et de la Méditerranée Jean
Pouilloux, 1985. pp. 7-18. (Travaux de la Maison de l'Orient)
Citer ce document / Cite this document :
Cauvin Jacques. La question du « matriarcat préhistorique » et le rôle de la femme dans la préhistoire. In: La femme dans le
monde méditerranéen. I. Antiquité. Lyon : Maison de l'Orient et de la Méditerranée Jean Pouilloux, 1985. pp. 7-18. (Travaux de
la Maison de l'Orient)
http://www.persee.fr/web/ouvrages/home/prescript/article/mom_0766-0510_1985_sem_10_1_2026LA QUESTION DU «MATRIARCAT PRÉHISTORIQUE»
ET LE RÔLE DE LA FEMME DANS LA PRÉHISTOIRE
Jacques CAUVIN
L'idée de faire remonter le régime matriarcal à la préhistoire comme une
phase générale des sociétés humaines ayant précédé la «révolution paternelle»
et la prédominance masculine encore observée de nos jours est apparue pour
la première fois à la fin du XIXème siècle dans l'ouvrage de Bachofen, Das
Mutterrecht (1861). Elle est reprise en 1877 dans Ancient Society de l'a
nthropologue américain Morgan. Celui-ci, qui divisait l'évolution humaine en
trois phases principales (sauvagerie - barbarie - civilisation) correspondant, en gros,
à ce que nous appelons à présent le Paléolithique, le Néolithique et les civi
lisations à écritures, situait l'apparition de la famille monogamique et la fin du
matriarcat vers les derniers temps de la barbarie (Age des Métaux).
C'est Engels qui dans Les Origines de. la famille (1884) fit de cette thèse
une composante importante de la vision marxiste de l'histoire, lui assurant en
même temps une très large diffusion.
Il est certain que les théories de Morgan, élaborées dans une double per
spective evolutionniste et comparatiste passablement dépassée de nos jours,
reposait sur un double postulat : celui d'une évolution linéaire de l'humanité,
tous les peuples qui la composent devant passer par des stades similaires, et
celui de l'existence dans les sociétés archaïques actuelles, comme autant de
«fossiles vivants», de résidus conservés de ces divers stades qu'il suffisait de r
éordonner dans le temps pour reconstituer notre phylogénèse. Il s'agissait en fait
de reconstitutions du passé d'inspiration plus philosophique qu'archéologique,
comme Freud en tentait lui-même dans un autre esprit dans Totem et Tabou.
L'expérience d'ethnologie de Morgan en Amérique du Nord était assez riche pour
lui fournir maints exemples de ces résidus supposés du matriarcat primitif mais
la préhistoire comme discipline scientifique, encore à ses débuts, ne pouvait
guère apporter de documents à l'appui de ses thèses.
De nos jours la thèse du matriarcat préhistorique non seulement fait encore
«force de loi» dans certains pays communistes (1), mais reste à l 'arrière-plan des
interprétations de préhistoriens occidentaux, comme on le verra ci-après
à propos de Çatal Hüyük.
Mon propos ici n'est absolument pas de discuter la thèse du matriarcat
préhistorique sur le plan théorique ni d'opposer à cette hypothèse d'autres
1. Ainsi la Chine populaire.
La femme dans le monde méditerranéen
TMO 10, Lyon, 1985. 8 J. CAUVIN
hypothèses plus modernes, mais la considérant tout au plus comme un «modèle»
restant à vérifier par une approche plus directe, de présenter un aperçu de ce que
les recherches modernes des préhistoriens permettent ou non d'affirmer concer
nant le rôle de la femme dans la préhistoire.
Les documents sont de deux genres : les uns sont de caractère artistique ou
cultuel. Ce sont de beaucoup les plus nombreux, mais leur signification est d' or
dre symbolique, c'est à dire qu'elle nous renseigne plutôt sur l'imaginaire collectif
des groupes humains que sur leur vie quotidienne et sociale. La légitimité du passa
ge d'un plan à l'autre (par exemple : inférer de l'importance des représentations
féminines dans l'art ou d'un traitement privilégié des sépultures féminines à une
prédominance équivalente de la femme dans la société) n'est pas aussi évidente
qu'il y paraît. Gluckman (2) a pu présenter l'hypothèse contraire que, dans les
sociétés archaïques, moins la distinction économique et sociale entre homme
et femme est nette et différenciée, plus leur séparation dans l'ordre symbolique
(par ex. dans les rites funéraires) pourrait être, comme par compensation, sou
lignée et spectaculaire. Qu'il y ait dans bien des cas «homologie» (Lévi-Strauss)
entre le domaine du «conçu» et celui du «vécu» social, comme si une même
structure organisait les divers niveaux du réel et les mettait en correspondance,
n'empêche pas que dans d'autres cas les deux domaines puissent être en opposi
tion, lorsque c'est un vécu «refoulé» qui se compense au niveau des mythes (Bas
tide 1968). Il est donc toujours aventureux de déterminer dans quelle mesure les
deux plans se recoupent ou non, et s'ils le font, de quelle manière. On en verra des
exemples ci-après.
En principe la seule méthode pour répondre à notre problème serait de con
fronter très précisément les documents artistiques et religieux avec ce que l'on
sait directement de la répartition des fonctions économiques et sociales selon les
sexes. Mais sur ce second type de documents, la recherche préhistorique en est, on
le verra, à ses tout premiers débuts et n'a guère donné encore de résultats.
D'abord le Paléolithique, singulièrement le Paléolithique supérieur car il n'y a
guère d'informations pour les époques antérieures.
Entre 30.000 et 10.000 avant J.C., l'art franco-cantabrique nous fournit une
foisonnante information sur la religion des chasseurs tardiglaciaires. En ce qui
concerne l'art pariétal, il s'agit bien en effet, malgré le désordre apparent et le
réalisme des figurations, d'un art symbolique dont le rangement structuré com
pose des «sanctuaires», ainsi que l'a prouvé Leroi-Gourhan (1965). Peintures et
gravures, sauf exception, représentent des animaux. Or le règne animal y appar
aît divisé en deux moitiés aux affinités l'une masculine, l'autre féminine. Cette
bipartition apparaît tant dans les ou exclusions qui président au voisi
nage spatial des espèces que dans les signes schématiques, masculins ou féminins,
qui sont associés aux figures. Ce rangement symbolique de la nature en deux clas
ses antithétiques et complémentaires, en correspondance avec les deux sexes,
paraît, dans son essence, symétrique (tout comme le Yin-Yang chinois) et n'im
plique, à ce niveau mental, aucune prédominance d'un «sexe» sur l'autre.
2. Cité par Bartel 1982. « MATRIARCAT PRÉHISTORIQUE » 9 LE
Dans cet art pariétal la figure humaine proprement dite n'apparaît que
rarement, en position d'ailleurs toujours plus ou moins périlleuse et menacée.
Les représentations humaines sont un peu plus nombreuses dans l'art du mobilier,
notamment sur les plaquettes gravées de la grotte de la Marche (Pales et Tassin
de Saint-Péreuse 1967, 1974) où la silhouette féminine, parmi elles, paraît domi
nante. Mais la qualité esthétique de l'ensemble est très faible et sa signification
générale n'est guère encore élucidée.
Il n'en va pas de même pour les «Vénus» paléolithiques qui se rattachent
aussi à l'art mobilier. Outre leur extension géographique beaucoup plus étendue
que celle de l'art pariétal (toujours tributaire des grottes), puisqu'on les trouve
de l'Atlantique à la Sibérie, il s'agit bien là de représentations humaines à fort
investissement esthétique et ces représentations sont, pour une énorme majorité,
féminines. Delporte (1979) a opposé au dynamisme et au réalisme des images ani
males le «hiératisme» des «Vénus», et le système de «déformations orientées»
dont elles font l'objet : hypertrophie du bass

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