La séparation des églises et de la pharmacie. À propos de la Tisane du curé de Deuil - article ; n°346 ; vol.93, pg 235-246
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Description

Revue d'histoire de la pharmacie - Année 2005 - Volume 93 - Numéro 346 - Pages 235-246
À propos de la Tisane du curé de Deuil
En 1945, en application de la loi du 1 1 septembre 1941, la fameuse « Tisane du curé de Deuil » faillit être rebaptisée « Tisane de Deuil ». Quelques documents retrouvés dans les archives des Laboratoires Lesourd permettent de retracer, au moins partiellement, cet imbroglio administratif.
About the « Tisane du curé de Deuil »
In 1945, in application of the law of September 1 1, 1941, the first-rate « Tisane du curé de Deuil » were almost renamed « Tisane de Deuil ». Some documents found in the archives of Laboratories Lesourd allow to redraw, at least partially, this administrative imbroglio.
12 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 2005
Nombre de lectures 35
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Thierry Lefebvre
La séparation des églises et de la pharmacie. À propos de la
Tisane du curé de Deuil
In: Revue d'histoire de la pharmacie, 93e année, N. 346, 2005. pp. 235-246.
Résumé
À propos de la Tisane du curé de Deuil
En 1945, en application de la loi du 1 1 septembre 1941, la fameuse « Tisane du curé de Deuil » faillit être rebaptisée « Tisane
de Deuil ». Quelques documents retrouvés dans les archives des Laboratoires Lesourd permettent de retracer, au moins
partiellement, cet imbroglio administratif.
Abstract
About the « Tisane du curé de Deuil »
In 1945, in application of the law of September 1 1, 1941, the first-rate « Tisane du curé de Deuil » were almost renamed «
Tisane de Deuil ». Some documents found in the archives of Laboratories Lesourd allow to redraw, at least partially, this
administrative imbroglio.
Citer ce document / Cite this document :
Lefebvre Thierry. La séparation des églises et de la pharmacie. À propos de la Tisane du curé de Deuil. In: Revue d'histoire de
la pharmacie, 93e année, N. 346, 2005. pp. 235-246.
doi : 10.3406/pharm.2005.5803
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/pharm_0035-2349_2005_num_93_346_5803235
La séparation des églises et de la pharmacie
À propos de la Tisane du curé
E
T
de Deuil U
D
par Thierry Lefebvre *
Il se trouve, dans les archives du Laboratoire Lesourd, un étrange dossier que
Mlle Marie-Paule Vellutini a bien voulu nous ouvrir. Il concerne la Tisane du
curé de Deuil, une célèbre spécialité pharmaceutique définitivement aban
donnée depuis 1997. L'examen de ces documents, vieux de soixante ans et bien
que fragmentaires, va nous permettre de compléter notre connaissance des rap
ports décidément complexes entre la pharmacie et le clergé l.
La Tisane du curé de Deuil
Le 19 juillet 1901, le pharmacien argenteuillais
Achille-Marie Duvergier déposait au tribunal de
commerce de Versailles la marque de spécialité
« Tisane de santé du curé de Deuil ». Il pouvait
dorénavant se prévaloir d'être le « seul déposit
aire 2 » de ce remède alors très populaire.
Comment cet homme, diplômé en 1890, était-il
devenu propriétaire de cette spécialité tant convoi
tée ? Nous ne le savons pas et nous ne le saurons
peut-être jamais. Toujours est-il qu'en 1925,
Duvergier cédait au Berrichon Gabriel Lesourd
son officine désormais située à Paris, 117 ter rue
Ordener dans le XVIIP arrondissement. Six ans
plus tard, Duvergier mourrait ; et Lesourd devenait
* UF CCI, Université Paris 7, 2 place Jussieu, 75251 Paris cedex 05
REVUE D'HISTOIRE DE LA PHARMACIE, LUT, N° 346, 2e TRIM. 2005, 235-246. REVUE D'HISTOIRE DE LA PHARMACIE 236
l'unique propriétaire de la « Véritable Tisane du curé de Deuil », après l'avoir
rachetée à sa veuve.
Les années passèrent. La loi du 11 septembre 1941 se substitua bientôt à
celle de germinal an XI. Elle soumit les spécialités pharmaceutiques au visa.
Une circulaire, en date du 17 novembre 1942, précisa les nouvelles règles
imposées aux documents publicitaires conçus à l'attention du grand public. Il y
était précisé :«[...] le nom d'un médecin, d'un ecclésiastique, d'une commun
auté religieuse ou de toute personnalité marquante ne peut être mentionné
dans la dénomination et la représentation d'une spécialité que s'il est prouvé
que ce médecin, cet ecclésiastique, cette communauté religieuse ou cette per
sonnalité est bien à l'origine du produit. Toute illustration représentant un
ministre des cultes, un religieux, une religieuse ou une personnalité marquante
est interdite. 3 » Notre brave curé de Deuil allait-il sortir indemne de cette rude
épreuve ?
À l'évidence, son cas allait poser problème.
Gabriel Lesourd adressa en effet, à une date indéterminée, un dossier de
demande de visa à la Chambre syndicale nationale des fabricants de produits
pharmaceutiques, qui le transmit ensuite au Service central de la pharmacie du
ministère de la Santé publique comme l'y engageait la nouvelle loi.
Une petite note historique, tirée d'un journal de la Seine-et-Oise mais sans
référence précise, avait été jointe au dossier. Elle visait à prouver que le curé de
Deuil était bien à l'origine de la spécialité dont il s'agissait.
« La tisane du curé de Deuil. - Nous visitons aujourd'hui la belle église de
Deuil, monument historique des XIe, XIIIe et XVe siècles. Le clocher restauré
date du XIe. À l'entrée se trouve la remarquable pierre tombale de " Marguerite
de la Croix, veuve de feu Messire Charles Hotman, escuyer, en son vivant
conseiller et secrétaire de la reyne Elisabeth d'Austriche, laquelle décéda le 15e
jour de février 1621 ". Un peu plus loin, une inscription rappelle la mémoire
d'un homme qui fut célèbre dans toute l'île-de-France par sa science et sa charité.
C'est le fameux curé de Deuil, l'inventeur de la " tisane ", aujourd'hui encore
employée dans bien des familles.
« Jean-Rémy Hurel naquit le 2 février 1766, à Marly-lès-Saint-Germain
(Marly-le-Roi), et mourut, curé de Deuil, le 18 janvier 1830. Apôtre intrépide
pendant la Révolution, il n'échappa que par miracle à la guillotine ; il fut vicaire
de Deuil de 1803 à 1822, puis curé de 1822 à 1830 ; sa charité pour les malades
et les pauvres, sa science dans l'art de guérir par la médecine des plantes, et sa
fameuse " tisane ", lui firent une réputation extraordinaire.
« Sa tombe, au cimetière, est curieuse ; elle est même un peu païenne : il est
vrai que l'on était en 1830. Elle se compose d'une simple colonne surmontée
d'une urne, avec cette inscription : " L'humanité reconnaissante ". [Signé : B.] » DU CURE DE DEUIL 237 TISANE
Plaque émaillée, sans date. Coll. M.-P. Vellutini.
Imbroglio administratif
Cette coupure de presse anonyme ne sembla guère satisfaire les services admin
istratifs du ministère. Le 30 octobre 1944, la Chambre syndicale nationale des
fabricants de produits pharmaceutiques fit parvenir à Gabriel Lesourd la lettre
suivante :
« Messieurs,
Nous avons transmis au Ministère de la Santé, à fin de visa, le dossier concernant
votre produit : ** Tisane du curé de Deuil ", ainsi que la note historique ce
prêtre.
Or, le Service central de la pharmacie considère que cette note ne prouve pas que
le Curé de Deuil soit à l'origine de la spécialité actuelle et il l'estime insuffisante. REVUE D'HISTOIRE DE LA PHARMACIE 238
Veuillez donc compléter votre premier document par tout autre renseignement que
vous pourriez posséder pour justifier que le Curé de Deuil est bien à l'origine du pro
duit en question.
En attendant de recevoir ce complément [...].
[Signé : illisible.] »
Cette lettre était accompagnée du duplicata d'un courrier adressé le 19 octobre
1944 par le chef du Service central de la pharmacie, Vaille, à son alter ego de la
Chambre syndicale. Le ton y était moins conciliant :
« Monsieur, ,
J'ai l'honneur de vous accuser réception d'une note de M. Lesourd, relative à la
" Tisane du curé de Deuil ". Cette note paraît être la copie d'un article paru dans un
journal de Seine-et Oise de 1935.
Avant d'accorder une certaine valeur à ce document, il serait nécessaire d'en
connaître le signataire. Cette note n'était-elle pas, en effet, tout simplement une récla
me pour la tisane du " Curé de Deuil " ?
D'autre part, cette pièce ne prouve nullement que Jean-Rémy Hurel, vicaire de
Deuil, soit à l'origine de la spécialité actuelle. [...]»
L'affaire était décidément bien mal engagée et Gabriel Lesourd écrivit d'une
lettre à M. Peloux, haut responsable du ministère de la Santé publique. Ce docu
ment manuscrit (en fait un brouillon raturé) est conservé par Marie-Paule
Vellutini et porte, au coin supérieur gauche, la date du 2 décembre 1944. En voici
la retranscription intégrale :
« Monsieur,
Ayant reçu une lettre de la Chambre syndicale des fabricants de produits pharmac
eutiques et, jointe, copie de la lettre à

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