La transposition du régime présidentiel hors des États-Unis : le cas de l Amérique latine - article ; n°3 ; vol.13, pg 577-600
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Description

Revue française de science politique - Année 1963 - Volume 13 - Numéro 3 - Pages 577-600
24 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1963
Nombre de lectures 30
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Monsieur Jacques Lambert
La transposition du régime présidentiel hors des États-Unis : le
cas de l'Amérique latine
In: Revue française de science politique, 13e année, n°3, 1963. pp. 577-600.
Citer ce document / Cite this document :
Lambert Jacques. La transposition du régime présidentiel hors des États-Unis : le cas de l'Amérique latine. In: Revue française
de science politique, 13e année, n°3, 1963. pp. 577-600.
doi : 10.3406/rfsp.1963.392731
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rfsp_0035-2950_1963_num_13_3_392731Transposition du Régime Présidentiel La
hors des Etats-Unis :
Le Cas de l'Amérique Latine
JACQUES LAMBERT
Lorsque l'Amérique latine a conquis son indépendance, dans
le premier quart du xixe siècle, elle conservait encore des
structures économiques et surtout des structures sociales très
archaïques que les colonisations ibériques avaient imposées au
xvid et au xvne siècle. Des vingt pays d'Amérique latine, dix-huit
sont indépendants depuis un siècle et demi ; ils ont donc une
expérience longue et variée des problèmes qui se présentent
aujourd'hui à tant d'autres pays qui viennent de conquérir leur
indépendance. Cette expérience politique latino-américaine devrait
être attentivement étudiée, car elle est la seule qui s'offre aux
pays qui sont à la recherche d'institutions politiques adaptées
aux besoins de sociétés en voie de développement rapide; mais
très inégalement développées.
Malheureusement cette expérience est généralement dédaignée
parce que la commune renommée tient pour acquis que la vie poli
tique de l'Amérique latine a toujours été incohérente et que le
seul exemple que puisse offrir cette partie du monde est celui
des erreurs qu'il ne faut pas commettre.
A première vue, en effet, l'expérience n'est pas encourageante :
l'Amérique latine a été et demeure la terre par excellence des
coups d'Etat et des dictatures. Pour ne citer que les proramcia-
mentos des armées, et ceux-là seulement qui ont été victorieux,
il est possible d'en énumérer une quarantaine entre 1930 et 1962 ;
si l'on remonte plus haut dans le passé, ce sont les méfaits des
caudillos qui emplissent l'histoire politique de l'Amérique latine.
577 Lambert Jacques
Mieux encore que par des coups d'Etat et par les dictatures,
la faillite politique de l'Amérique latine paraît démontrée, lors
qu'elle tente d'appliquer les institutions de la démocratie représent
ative, par l'incessant renouvellement de Constitutions qui n'ont
duré que quelques années ou quelques jours, ou qui n'ont même
jamais été appliquées. Les Constitutions latino-américaines sont
innombrables ; c'est là le terme propre puisqu'il est difficile de
décider si le nombre en est plus proche de cent-quatre-vingts ou
de deux cents. En un siècle et demi, Haïti a eu vingt-deux Consti
tutions et le Venezuela, qui en eut le même nombre, en a rédigé
quatre entre 1922 et 1929, sans, d'ailleurs, que la dictature de
Gomes, qui a duré de 1908 à 1935, ait permis l'application d'au
cune de ces Constitutions.
Le procès-verbal de carence qui paraît s'imposer de façon si
évidente serait cependant injuste : il n'est pas légitime, en effet,
de formuler des généralisations sur la vie politique de l'Amérique
latine d'après le seul nombre des pays dans lesquels cette vie
politique n'a été qu'une succession d'agitations incohérentes. Il
est vrai que les pronunciamentos répétés, les dictatures tyranniques,
le gaspillage de Constitutions inutilisées ont été le fait de la major
ité des pays latino-américains : Haïti, Nicaragua, Guatemala,
Honduras, Salvador, République dominicaine, Bolivie, Paraguay,
Venezuela, Equateur et, dans une moindre mesure, Pérou n'ont
connu que de brèves périodes de gouvernement constitutionnel
suivant les formes de la démocratie représentative. Mais, en
revanche, les Constitutions ont pu être régulièrement appliquées
pendant de longues périodes dans quelques pays, tels que le Chili.,
le Brésil, la Colombie, la République argentine et, depuis que la
révolution de 1910 y a été stabilisée, le Mexique. La vie politique
de ces pays n'a certainement pas été exempte de troubles, mais la
dictature, au lieu d'y être la règle, y a été l'exception et, lorsqu'elle
y prévaut encore aujourd'hui, elle prend des formes très modérées.
Or, si ces cinq pays, auxquels il faudrait ajouter les deux modèles
réduits de démocratie ordonnée que sont l'Uruguay et le Costa-Rica,
sont bien moins nombreux que les autres, ils contiennent plus de
cent cinquante millions d'habitants, les trois quarts de la populat
ion de Y Amérique latine. Ce sont donc ces pays qu'il faut tenir
pour représentatifs de l'Amérique latine, et c'est sur les caractères
de leur vie politique qu'il faut fonder les généralisations ; l'image
en apparaît bien différente de celle que l'on veut habituellement
tirer d'une douzaine de pays qui n'ont pas, à eux tous, plus
578 Le Régime Présidentiel en Amérique Latine
d'une quarantaine de millions d'habitants. Il n'eût pas été plus
absurde de prétendre juger des caractères de la vie politique en
Europe d'après les conditions qui prévalaient dans les pays bal
kaniques que de le faire pour l'Amérique latine d'après celles
qui prévalent en Amérique centrale et dans les Caraïbes, où neuf
pays se partagent vingt-cinq millions d'habitants.
En un demi-siècle, le Brésil a utilisé quatre Constitutions, la
Colombie, le Chili et l'Argentine, chacun deux, et le Mexique,
une seule ; c'est là, déjà, une longévité des institutions que bien
des pays européens pourraient envier. Mais cette longévité est
plus grande encore qu'il ne ressort de la liste des Constitutions.
En effet, si la vie politique de ces pays a été moins agitée que
celle des autres, ils n'en ont pas moins connu périodiquement de
graves troubles politiques et, après ces troubles, il est souvent
arrivé que, au lieu de rétablir la vieille Constitution, on ait préféré
en reproduire les dispositions dans une nouvelle Constitution, avec
des modifications souvent peu importantes- Dans ces pays, il est
ainsi arrivé que les changements de Constitution n'ont pas été, le
plus souvent, des de régime.
C'est ainsi que, si la Constitution présente de l'Argentine ne
date que de 1957, elle n'est que la remise en vigueur, après
l'aventure péroniste, des institutions de 1853 ; les fondements du
régime politique mexicain ne sont guère moins anciens puisque,
même après la profonde révolution sociale de 1910, on a pu
reprendre, en 1917, les principales dispositions de la vieille Const
itution de 1857 en leur ajoutant une longue déclaration des droits
économiques et sociaux d'inspiration socialiste. La Constitution de
la Colombie date de 1886 ; celle du Chili ne date que de 1925, mais
elle restaurait les institutions de 1833 après un malheureux inte
rmède parlementaire entre 1891 et 1920. Enfin le Brésil a adopté,
en 1946, une Constitution qui s'écarte peu dans l'organisation des
pouvoirs de la première constitution républicaine établie en 1891.
Etant donné que, dans ces divers pays, les grandes lignes des
institutions politiques sont très analogues, on doit reconnaître qu'il
existe une forme de régime politique caractéristique de l'Amérique
latine, dont le fonctionnement est parfois interrompu par des
troubles politiques, mais à laquelle ces pays tendent toujours à
revenir.
Pour juger de la valeur de ce régime et de l'intérêt que
présente l'expérience politique de l'Amérique latine, il ne suffit
pas de constater que les institutions n'ont pu ni empêcher les
579 Jacques Lambert
coups d'Etat, ni prévenir les dictatures : comment, en effet, la
vie politique pourrait-elle n'être pas agitée dans des sociétés qui
doivent, en quelques années, subir des transformations qui, en
Europe occidentale, se sont échelonnées sur plusieurs si&

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