Le Casale de Boccea, d'après les archives du Chapitre de Saint-Pierre (fin XIVe-fin XVIe siècle). II - article ; n°2 ; vol.97, pg 605-726

Robert Montel

Description

Mélanges de l'Ecole française de Rome. Moyen-Age, Temps modernes - Année 1985 - Volume 97 - Numéro 2 - Pages 605-726
Robert Montel, Le «Casale» de Boccea, d'après les archives du Chapitre de Saint-Pierre (fin XIVe-fin XVIe siècle). II, p. 605-726. La rente foncière de Boccea est analysée et comparée, au moyen de graphiques, avec celle d'autres domaines du Chapitre et avec les divers revenus de la Mense ; ses éléments non-monétaires (redevances en fromage et, surtout, en céréales), parfois importantes jusqu'en 1490, permettent une première approche des productions et des méthodes d'exploitation. Elles apparaissent mieux, toutefois, à travers l'examen des bâtiments du centre domanial qui témoignent de l'importance croissante de l'élevage bovin (« precoio »), orienté vers la production fromagère. À la fin du XVIe siècle, des témoignages de vachers, presque tous immigrés de plus ou moins fraîche date, permettent d'évoquer concrètement cette activité et la main-d'œuvre employée par les entrepreneurs. Ceux-ci, qui louaient le « casale » au Chapitre, étaient, au XVe siècle, solidement enracinés dans la noblesse «municipale» romaine; au XVIe siècle, dans une ville aux horizons brusquement élargis, ils seront davantage liés aux curialistes et aux milieux d'affaires de toute l'Italie.
122 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

• Publié par: MELANGES_DE_L-ECOLE_FRANCAISE_DE_ROME
• Publié le: 01 janvier 1985
• Nombre de lectures: 42
• Langue: Français
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Extrait

Robert MONTEL
Le Casale de Boccea, d'après les archives du Chapitre de Saint-
Pierre (fin XIVe-fin XVIe siècle). II
In: Mélanges de l'Ecole française de Rome. Moyen-Age, Temps modernes T. 97, N°2. 1985. pp. 605-726.
Résumé
Robert Montel, Le «Casale» de Boccea, d'après les archives du Chapitre de Saint-Pierre (fin XIVe-fin XVIe siècle). II, p. 605-726.
La rente foncière de Boccea est analysée et comparée, au moyen de graphiques, avec celle d'autres domaines du Chapitre et
avec les divers revenus de la Mense ; ses éléments non-monétaires (redevances en fromage et, surtout, en céréales), parfois
importantes jusqu'en 1490, permettent une première approche des productions et des méthodes d'exploitation. Elles
apparaissent mieux, toutefois, à travers l'examen des bâtiments du centre domanial qui témoignent de l'importance croissante de
l'élevage bovin (« precoio »), orienté vers la production fromagère. À la fin du XVIe siècle, des témoignages de vachers, presque
tous immigrés de plus ou moins fraîche date, permettent d'évoquer concrètement cette activité et la main-d'œuvre employée par
les entrepreneurs. Ceux-ci, qui louaient le « casale » au Chapitre, étaient, au XVe siècle, solidement enracinés dans la noblesse
«municipale» romaine; au XVIe siècle, dans une ville aux horizons brusquement élargis, ils seront davantage liés aux curialistes
et aux milieux d'affaires de toute l'Italie.
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MONTEL Robert. Le Casale de Boccea, d'après les archives du Chapitre de Saint-Pierre (fin XIVe-fin XVIe siècle). II. In:
Mélanges de l'Ecole française de Rome. Moyen-Age, Temps modernes T. 97, N°2. 1985. pp. 605-726.
doi : 10.3406/mefr.1985.2824
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/mefr_0223-5110_1985_num_97_2_2824ROBERT MONTEL
LE «CASALE» DE BOCCEA, D'APRÈS LES ARCHIVES
DU CHAPITRE DE SAINT-PIERRE
(FIN XIVe — FIN XVIe SIÈCLE)
II
La première partie de cet article1 retraçait les origines d'un grand
domaine de la Campagne Romaine, le «casale» de Boccea : simple lieudit
où le clergé de la basilique Saint-Pierre apparaît comme possessionné dès
854, nous le retrouvons, sans doute après Γ« incastellamento » de l'ensem
ble de la région2, sous la forme d'un castrum portant ce nom, déjà consti
tué en 1037, et dont les chanoines de Saint-Pierre vont réussir à demeurer
à peu près constamment les seigneurs, malgré les tentatives d'usurpation
de l'aristocratie laïque romaine. Après une période plutôt florissante, du
XIe siècle jusqu'au début des années 1300, ce village est subitement désert
é vers le milieu du XIVe siècle, conséquence à la fois d'une destruction
d'origine militaire en 1341 et de la dépression démographique qui suit la
peste de 1348; dès les deux dernières décennies du XIVe siècle, les chanoi
nes ne possèdent plus à Boccea qu'un grand domaine à peu près inhabité,
«olim castrum nunc casale», pour reprendre l'expression d'un notaire en
13893 - situation qui semble, du reste, avoir été très fréquente, pour ne
1 R. Montel, Le «casale» de Boccea, d'après les archives du chapitre de Saint-
Pierre. I, dans Mélanges de l'École française de Rome. Moyen-âge - Temps modernes
(= MEFRM), 91, 1979, 2, p. 593-617 (avec une carte hors-texte des «casali» du Chap
itre de Saint-Pierre).
2 Cf. P. Toubert, Les structures du Latium médiéval, Rome (BEFAR, 221), 1973,
1, p. 321-348. Le cas de la Campagne Romaine est beaucoup plus difficile à illus
trer que celui de la Sabine et du Latium méridional en raison du manque de docu
ments ; le cas de Boccea qui est, à cet égard, exceptionnel paraît, en tout cas, suivre
la même chronologie que dans les régions voisines.
3 II s'agit du notaire Nardo Venettini (Archivio Capitolino, Rogiti notarili, sezio
ne I, 785, 5, 62r), cité par C. Gennaro, Mercanti e bovattieri nella Roma della secon
da metà del Trecento, dans Bullettino dell'Istituto storico italiano per il Medioevo e
Archivio Muratoriano, 78, 1967, p. 174 n. 3.
MEFRM - 97 - 1985 - 2, p. 605-726. 41 ROBERT MONTEL 606
pas dire la règle, dans la Campagne Romaine de la seconde moitié du
XIVe siècle4.
C'est vraisemblablement l'ensemble du finage de cet ancien castrum,
devenu ainsi casale, que nous trouvons mentionné dans les premiers
registres de comptes du Chapitre, à partir de 1384, pendant longtemps,
d'ailleurs, toujours sous la rubrique, très révélatrice, de castrum Bucceie,
mais essentiellement, chaque année, pour la vente de ses « herbes d'hiver »
à des grands éleveurs romains, parfois, d'une manière exceptionnelle et
marginale, pour celle de ses «herbes d'été», quelquefois, enfin, pour des
concessions de pièces de terre, plus ou moins grandes, destinées à la
cerealiculture. La superficie de ce grand domaine ne nous est connue
qu'à partir de sa première mensuration en 1555, mais il ne semble pas
qu'elle ait varié depuis les premiers registres de comptes, pas plus, du
reste, qu'elle ne variera par la suite jusqu'en 1873, date de son aliénation
(forcée) par le Chapitre, la location séparée d'une partie du domaine sous
le nom de Pantano Secco de 1502 à 15545 n'ayant eu qu'un caractère tem-
4 Sur ces habitats désertés, cf. les ouvrages cités dans R. Montel, Le «casale»
de Boccea, I, art. cité, p. 610 n. 44; voir également S. Conti, Le sedi umane abbandon
ate nel Patrimonio di S. Pietro, Florence, 1980, p. 62 bien que cet ouvrage, pour
tant généralement bien documenté, n'évoque pas la désertion de Boccea au XIVe
siècle et lui attribue même 160 habitants en 1416, sans doute par une interpréta
tion erronée du vieil article de Pardi (ce que paraît du reste contredire la carte très
évocatrice de la p. 42 - comparée à celle de la p. 40). On trouvera une de la signification économique et sociale de ces désertions dans J.-C. Maire
Vigueur, Classe dominante et classes dirigeantes à Rome à la fin du Moyen Âge, dans
Storia della città, 1, 1976, p. 6 : s'il est vrai que «la disparition des villages va de
pair avec une transformation dans les formes d'exploitation du sol » et qu'« un prof
it de type capitaliste se substitue aux prélèvements d'origine seigneuriale», la
dépression démographique et économique a cependant pu jouer un rôle décisif
dans cette évolution et, du moins au départ, dans la nette prédominance de l'éleva
ge sur la cerealiculture, même si, par la suite, les entrepreneurs et les propriétaires
y ont trouvé leur compte, dans un cadre plus largement spéculatif (cf. infra
p. 636).
5 Cf. R. Montel, Le «casale» de Boccea. . ., I, art. cité, p. 615. La date de 1502
est celle de la première location connue de Pantano Seccho (ACSP [= Archivio del
Capitolo di San Pietro, aujourd'hui à la Bibliothèque Vaticane], Cens. XIX, 1502
(Censier = C), 1 5r : location au médecin allemand Rugerio pour 73 ducats et 45
bolognini); elle n'est, cependant, peut-être pas rigoureusement exacte, car la divi
sion du domaine paraît avoir eu lieu en fait en 1499 (cf. Cens XX, 1503-C, 3, Buc-
ceia loc. f. nob. ν. Johanni Bardella pro 6 annis, excepto Pantano Siccho pro 370 d.
de carlenis pro primis 3 annis et pro aliis vero 420; hoc fuit quartus annus = 420 d.
payés). La division prend fin en 1554 par la location des deux domaines désormais
réunifiés au chanoine Christophorus Cencius (ACSP, Priv. ed atti notar., n° 29, not.
Melchior de Valeriis II, lv-3v). LE « CASALE > DE BOCCEA, D'APRES LES ARCHIVES DU CHAPITRE DE SAINT-PIERRE 607
poraire et, somme toute, purement comptable. Cette superficie de 735
rubbii de terre (soit 1358 hectares) en faisait l'un des plus grands «casali»
de la Campagne Romaine6.
Dans cette deuxième partie, nous allons reprendre l'histoire de Boc-
cea à partir de 1384 : après cette date, qui est celle du premier registre de
comptes du Chapitre conservé jusqu'à nous, la documentation s'étoffe en
effet suffisamment pour que nous puissions commencer à évoquer avec
précision non seulement la rente foncière que les chanoines tiraient de
Boccea, mais aussi, jusqu'à un certain point, les modalités d'exploitation
du domaine, qu'il s'agisse de ses b