Le long voyage de « L’Homme et la Mort » - article ; n°1 ; vol.82, pg 49-70
22 pages
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Description

Communications - Année 2007 - Volume 82 - Numéro 1 - Pages 49-70
22 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 2007
Nombre de lectures 20
Langue Français

Extrait

André Burguière
Le long voyage de « LHomme et la Mort »
Quand jai rencontré Edgar Morin pour la première fois, en 1965, à loccasion de lenquête pluridisciplinaire sur la commune de Plozévet, javais déjà une idée précise de son uvre. Il était alors pour moi, à travers des livres commeLes StarsouLEsprit du temps, qui venait de paraître, le sociologue de la culture de masse et de limaginaire moderne. Il était également lintellectuel emblématique de la gauche critique et antistalinienne par le rôle quil avait joué dans la revueArguments, dont je me sentais proche, et surtout par son essaiAutocritique. Cette auto biographie politique mavait bouleversé sans avoir pour autant déraciné en moi toutes les illusions sur la place que le parti communiste était censé occuper dans la gauche française. Mais je navais pas luLHomme et la Mort. Ce livre issu dune recherche commencée par Edgar Morin avant même son entrée au CNRS, je lai découvert bien plus tard, dans les années 70, après avoir luLe Paradigme perdu. Jy ai donc dabord reconnu la matrice originelle des interrogations anthropologiques et épistémologiques qui loccupaient désormais. Jai lu LHomme et la Mortcomme une réflexion initiale dont Edgar Morin retrouvait le fil dansLe Paradigme perduet dans le colloque de Royau mont, « LUnité de lhomme » ; ce colloque quil a conçu et dirigé avec le soutien de Jacques Monod et dont on découvre aujourdhui, avec le recul, quil a représenté un moment de bascule décisif dans la réflexion théorique des sciences humaines et dans leur manière de se penser face aux sciences de la vie. Il a fallu que la préparation dune étude sur le cheminement du thème de la mort chez les historiens français de la fin des années 50 aux années 80 mamène récemment à me replonger dansLHomme et la Mort pour que je prenne toute la mesure de son importance fondatrice. Ce livre, lun des plus « écrits » dEdgar Morin, a gardé la fraîcheur et la force des commencements. Non parce quil est luvre dun débutant, 49
André Burguière mais parce quil propose une réflexion à la fois pionnière et aboutie sur la façon dont les civilisations ont construit et vécu la question de la mort ; une réflexion qui balise lensemble du champ anthropologique et histo rique. Le caractère pionnier de luvre peut sapprécier à lévolution du volume de publications sur le sujet. En 1951, au moment où paraît LHomme et la Mort, lédition universitaire et scientifique ne publie pas plus de un ou deux titres par an sur le sujet. La fréquence augmente après 1965 : 8 titres en 1968, 10 en 1970, 18 en 1975, plus de 50 en 1976. Cette amplification à partir des années 60 est confirmée par les relevés internationaux desPsychological Abstracts, qui incluent les arti cles de revues : 5 titres en 1948, 17 en 1960, 34 en 1965, 68 en 1968, 1 147 en 1970 . Loriginalité de cet essai qui se risquait sur un domaine à lépoque si peu abordé par les sciences sociales nest pas restée inaperçue. Le livre a été remarqué par des esprits aussi peu complaisants que Georges Bataille et Lucien Febvre. La qualité de cet accueil na pas eu cependant sur la notoriété dEdgar Morin leffet quon aurait pu attendre. Déjà connu pour son livreLAn zéro de lAllemagne, tiré de son expérience de soldat des forces françaises dans une Allemagne anéantie, il sest imposé ensuite au grand public avec sa double image de sociologue de la culture et de penseur de gauche antistalinien. Sa réflexion anthropologique sur la mort et sur les rapports de lhomme avec lordre naturel est restée à larrière plan, comme le confirme la perception que javais de son uvre au milieu des années 60. LHomme et la Mortna pourtant jamais cessé daccompagner lessor des recherches sur la question. Des synthèses marquantes comme LAnthropologie de la mortde LouisVincent Thomas etLes Vivants et les Mortsde Jean Ziegler, qui couronnent, au milieu des années 70, la première grande vague de travaux sur le problème de la mort, attestent, par leurs nombreuses références aux hypothèses dEdgar Morin et par la façon dont leurs analyses adoptent sa problématique, linfluence que son livre continue davoir dans les sciences humaines, plus de vingtcinq ans après sa parution. Une étude reste à faire de limpact du cadre théorique proposé par Edgar Morin sur le développement ultérieur de lanthropo logie et la sociologie de la mort. Jaimerais considérer pour ma part linfluence que le livre a pu avoir sur lhistoriographie de la mort. Car dans la longue suite des travaux que e le thème a inspirée aux historiens durant la seconde moitié duXXsiècle, et tout spécialement aux historiens français, il apparaît comme une réfé rence permanente. Quils le citent ou lignorent, quils le critiquent ou sen inspirent, tous ont marché dans ses pas. La façon dont ils se sont 50
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