Les ridicules de l homme nouveau. Un groupe de satiristes sous la Révolution - article ; n°1 ; vol.48, pg 15-32
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Mots - Année 1996 - Volume 48 - Numéro 1 - Pages 15-32
LES RIDICULES DE L'HOMME NOUVEAU. UN GROUPE DE SATIRISTES SOUS LA RÉVOLUTION Au début des années 1780, se forme autour de Rivarol un groupe de rieurs (la « faction satyrique ») pratiquant avec virtuosité l'art de la pointe et du ridicule, le portrait charge, l'épigramme ironique. Parti en guerre contre les ambitions et la langue « triste et ennuyeuse » des philosophes, ce groupe se tourne bientôt contre le discours régénérateur des révolutionnaires. Il combat par la plume dans l'un des journaux les plus célèbres des débuts de la Révolution, Les Actes des apôtres.
RIDICULING THE NEW MAN. A GROUP OF SATIRISTS DURING THE REVOLUTION Around 1780, a group of laughers formed around Rivarol (the « satyrical faction ») ; they were virtuosi in the art of the witticism, ridicule, caricature, and the epigram. At war with the philosophers ' « sad and boring » language, they turned against the revolutionaries' regenerative discourse. This work can be found, at the beginning of the revolution, in the newspaper, « The Acts of the Apostles. »
LOS RÍDICULOS DEL HOMBRE NUEVO. UN GRUPO DE SATIRISTAS BAJO LA REVOLUCIÓN Hacia 1780, se formo en torno Rivarol un grupo de reidores (la «facción satírica ») virtuosos en el arte de la ironia, del ridiculo y del epigrama. En guerra contra las ambiciones y la « lengua triste y aburrida » de los filosofos, toma las armas contra el discurso regenerador de los revolucionarios. Lo volvemos a encontrar, al principio de la Revolución, en el periódico « Los Hechos de los Apóstoles ».
18 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1996
Nombre de lectures 28
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Antoine de Baecque
Les ridicules de l'homme nouveau. Un groupe de satiristes sous
la Révolution
In: Mots, septembre 1996, N°48. pp. 15-32.
Resumen
LOS RÍDICULOS DEL HOMBRE NUEVO. UN GRUPO DE SATIRISTAS BAJO LA REVOLUCIÓN Hacia 1780, se formo en torno
Rivarol un grupo de reidores (la «facción satírica ») virtuosos en el arte de la ironia, del ridiculo y del epigrama. En guerra contra
las ambiciones y la « lengua triste y aburrida » de los filosofos, toma las armas contra el discurso regenerador de los
revolucionarios. Lo volvemos a encontrar, al principio de la Revolución, en el periódico « Los Hechos de los Apóstoles ».
Abstract
RIDICULING THE NEW MAN. A GROUP OF SATIRISTS DURING THE REVOLUTION Around 1780, a group of laughers
formed around Rivarol (the « satyrical faction ») ; they were virtuosi in the art of the witticism, ridicule, caricature, and the
epigram. At war with the philosophers ' « sad and boring » language, they turned against the revolutionaries' regenerative
discourse. This work can be found, at the beginning of the revolution, in the newspaper, « The Acts of the Apostles. »
Résumé
LES RIDICULES DE L'HOMME NOUVEAU. UN GROUPE DE SATIRISTES SOUS LA RÉVOLUTION Au début des années
1780, se forme autour de Rivarol un groupe de rieurs (la « faction satyrique ») pratiquant avec virtuosité l'art de la pointe et du
ridicule, le portrait charge, l'épigramme ironique. Parti en guerre contre les ambitions et la langue « triste et ennuyeuse » des
philosophes, ce groupe se tourne bientôt contre le discours régénérateur des révolutionnaires. Il combat par la plume dans l'un
des journaux les plus célèbres des débuts de la Révolution, Les Actes des apôtres.
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de Baecque Antoine. Les ridicules de l'homme nouveau. Un groupe de satiristes sous la Révolution. In: Mots, septembre 1996,
N°48. pp. 15-32.
doi : 10.3406/mots.1996.2097
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/mots_0243-6450_1996_num_48_1_2097de BAECQUE0 Antoine
Les ridicules de l'homme nouveau
Un groupe de satiristes
sous la Révolution
En 1788, dans la présentation de son Petit Almanach de nos
grands hommes, Rivarol déplore la perte d'un des traits du caractère
français, la « gaieté ».
« La France ne rit plus, et la gaieté française a passé comme une ombre.
Cette révolution a coûté bien des volumes. On a appelé de l'Angleterre
la philosophie au secours de la nation française. Grâces en soient rendues
aux écrivains qui ont donné à notre langue l'accent anglais. Mais si la
France est grave et sérieuse, elle est tout aussi calme. Les prétentions
ont contracté entre elles ; les rangs sont assignés ; tout a son prix, et la
plus aimable harmonie règne dans toute la littérature française. Nous
n'entreprendrons pas de dire par combien de degrés il a fallu passer
pour amener la nation à cette sévérité d'humeur qui constitue la véritable
dignité de l'homme, et nous paraît le signe le plus certain de la félicité
publique»1.
Avec une ironie mordante, Rivarol dénonce la corruption de
l'esprit français par la raison philosophique qu'il dit importée
d'Angleterre. La « dignité de l'homme » dont il parle par antiphrase,
attachée à cette « sévérité d'humeur » propre aux philosophes, serait
en passe de transformer la langue et le caractère français, traditio
nnellement placés du côté du jeu d'esprit, du sous-entendu, de la
fantaisie et du maniement virtuose des mots2. Tout au long des
° Université de Saint-Quentin-en-Yvelines, 47 M. Vauban, 78047 Guyancouit
cedex.
1. Rivarol, Petit Almanach de nos grands hommes, s. 1., 1788, seconde édition.
2. Sur le caractère du « bel esprit » français revendiqué par les gentilshommes
du 18e siècle, voir Antoine de Baecque, «Le régiment de la calotte. Un groupe de
rieurs aristocrates (1702-1752) », Annales HSS, à paraître au printemps 1997.
Mots, 48, septembre 96, p. 15 à 32 15 années 1780, Rivarol et quelques proches, tels Champcenetz, Palissot,
Sabathier ou Dorât, n'ont cessé, dans leurs conversations de salons
ou dans leurs opuscules, de mener ce combat pour la préservation
du bel esprit, du persiflage, contre l'expansion de la langue politique
et des principes qui la sous-tendent, ce « charabia patriotique »
honni, ce «baragouin philosophique» moqué1. Le Petit Almanach
de nos grands hommes apparait comme une arme importante dans
ce combat, version burlesque du traité académique De V universalité
de la langue française, proposant une galerie savoureuse d'écrivains
méconnus, caricaturant leurs travers et leurs prétentions, ceux-là
mêmes qui, comme l'a souligné Keith Baker dans ses travaux,
diffusent la langue nouvelle des principes au nom de leur radicalisme
politique et de leurs revendications anti-absolutistes ou anti-acadé
miques.
La « faction satyrique »
Dès ces polémiques prérévolutionnaires, ce groupe de rieurs de
tradition est soupçonné d'opposition systématique aux idées nouvelles
et prend la dénomination infamante de « faction satyrique » 2. « Ces
histrions se croient chargés de monter sur la scène publique pour
divertir le spectateur», s'indigne, par exemple, Joseph- Antoine
Cérutti, un ex-jésuite pour qui la mission de l'écrivain est « d'ins
truire les citoyens» plutôt que de les distraire3. Selon Cérutti, cet
« esprit trop subtil » est dangereux car il « dénature la langue » non
par l'excès de raisonnement mais par la « décomposition de la
vérité ». La pointe, la dérision, le jeu sur les mots, l'éloge qui
déconsidère et le compliment qui abat une réputation, autant d'armes
maniées avec virtuosité par les satiristes, représentent la vraie
1. Sur ce groupe de satiristes d'Ancien Régime, voir surtout Gustave Desnoire-
terres, Gnmod de la Reynière et son groupe, Pans, 1877 ; Dorât et les poètes légers
au 18e siècle, Paris, 1887 ; André Le Breton, Rivarol, 1895 ; Jean Lessay, Rivarol.
Le Français par excellence, Pans, 1985.
2. François Groise, Traité de satyre, s. 1., 1801 ; Alfred Dinaux, Les sociétés
badines et comiques, Paris, 1867 ; Delisle de Sales, Essai sur le journalisme depuis
1735 jusque l'an 1800, Paris, 1811 ; Gustave Desnoireterres, La comédie satirique
au 18e siècle, Paris, 1885.
3. «Note sur la vie de Cérutti», La Feuille villageoise, 22, 1792. Sur Cérutti
et la guerre menée contre la satire, voir Antoine de Baecque, « La guerre des
éloquences. Joseph-Antoine Cérutti et les brochures révolutionnaires », History of
European Ideas, 1993, vol. 17, p. 191-214.
16 corruption de la langue car ils troublent les esprits, entretiennent la
confusion entre l'explicite et l'implicite, multiplient les sous-entendus
et s'emparent de tous les types de discours pour les parodier et
les ridiculiser. Cet art « vise à dépecer la vérité », poursuit Cérutti,
à « démettre la philosophie de ses principes lumineux » l. Cette
guerre de papier s'enfle alors d'ouvrages, de pamphlets et de phrases
assassines. Cérutti écrit La satyre universelle avec son ami Grouvelle
dans le but de retourner la dérision contre ses fauteurs, relayant
Ginguené, l'auteur de La satyre des satyres2. Autant que d'une
rivalité d'auteurs agitant la République des lettres, il s'agit
opposition de styles. Aux satiristes tentent en effet de répondre les
« pédagogues », qui ne se privent pas de l'arme du rire mais
refusent la dérision et l'esprit trop subtil. « Ton cerveau, cher ami,
me semble un peu malade, lance ainsi Ginguené au satiriste dans
son pamphlet. Il met en épigrammes ce qui est simple et tourne
en calembours ce qui est clair ». Cette « maladie » est une réponse
aux « idées folles » que dénoncent les satiristes chez les philosophes
et leurs disciples, attaques contre la religion, le clergé, l'autorité
royale. La « maladie » des uns semble donc être une question de
forme, la subtilité du maniement des mots jouant des multiples
pièges de la langue française. La « folie » des autres est un problème
de fond : leur prétention à « anarchiser le royau

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