Les trois damiers de Buckquoy (Orcades) - article ; n°3 ; vol.80, pg 675-689
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Annales de Bretagne - Année 1973 - Volume 80 - Numéro 3 - Pages 675-689
15 pages

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Publié le 01 janvier 1973
Nombre de lectures 9
Langue Français
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Extrait

Claude Sterckx
Les trois damiers de Buckquoy (Orcades)
In: Annales de Bretagne. Tome 80, numéro 3-4, 1973. pp. 675-689.
Citer ce document / Cite this document :
Sterckx Claude. Les trois damiers de Buckquoy (Orcades). In: Annales de Bretagne. Tome 80, numéro 3-4, 1973. pp. 675-689.
doi : 10.3406/abpo.1973.2710
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/abpo_0003-391X_1973_num_80_3_2710STERCKX Claude
LES TROIS DAMIERS DE BUCKQUOY
(Orcades)
A peu près au moment même où devant le IVe Congrès
international des Études Celtiques à Rennes, nous déplorions
la rareté des damiers mis au jour dans les pays celtiques (1),
une mission de la Society of Antiquaries of Scotland, dirigée
par Mrs Anna Ritchie, découvrait trois plaques de pierre
gravées en fouillant les vestiges d'une petite exploitation agri
cole au Point de Buckquoy, à Birsay dans les Orcades.
Reconnaissant à juste titre des damiers, Mrs Ritchie
eut la bonté de nous soumettre sa découverte et de nous autor
iser à la publier comme suite à nos recherches sur les jeux
de damier celtiques.
L'intention des dessins gravés sur ces plaques de
pierre se laisse en effet facilement reconnaître. Ces graffites
rappellent les moments de loisir des anciens habitants du
site, il ne fait aucun doute que ces lignes qui se croisent bien
(1)C. STERCKX, Les jeux de damier celtiques dans EtCel' XIII. I972-1973
p. 725-741. — — 676
régulièrement ont été tirées pour servir de supports à des
jeux.
Tous les moments, tous les horizons de l'humanité
en ont connu de pareils, aux mille règles différentes mais ayant
en commun d'être fondées sur le déplacement de pions sur
un damier de forme et de dimensions variables (2).
L'identification des principes et des règles auxquels
correspondirent les damiers de Buckquoy s'avère assez aisée :
deux d'entre eux présentent en effet un schéma très carac
téristique, et le troisième cache sous des surcharges sans doute
anarchiques un dessin en tous points identique.
Le décalque de ce damier montre de fait qu'un dessin
pareil aux autres — deux rangées de sept lignes perpendic
ulaires l'une à l'autre et un cercle entourant l'intersection
centrale du motif (fig. 1) — a été dénaturé par un certain
nombre de lignes et de cercles (fig. 2) que, malgré de patientes
recherches, il ne nous a pas paru possible d'ordonner de façon
cohérente soit entre elles, soit avec l'ensemble ou une quel
conque partie du premier dessin.
Le fait qu'un cercle entoure l'intersection centrale des
trois damiers est une présomption que les pions — malheu
reusement absents des trouvailles de Buckquoy — se dépla
çaient sur les intersections des lignes, et non de case en case.
Cette présomption est suffisante car le schéma qui se découvre
ainsi est bien connu pour celui d'un jeu attesté dans tous les
pays celtiques, en Scandinavie et jusqu'en Laponie où le
botaniste Linné eut l'occasion de l'observer et d'en noter le
règlement.
Jouée sur un damier carré, comportant un nombre
impair — sept ou plus — de cases ou d'intersections, la partie
oppose un roi et ses défenseurs à quatre armées assiégeantes
(2) Voir les répertoires de H. J. R. MURRAY, History of Boarg-Games other thun
Chess, Oxford, 1952; R. C. BELL, Board and Table-Games from many Civili
sations, Londres, 1960. Fig. 1.
Fig. 2. — — 678
qui cherchent à empêcher la fuite du roi et à le capturer.
Celui-ci a son trône ou son palais sur la case centrale,
et il est le seul à y avoir accès. Toutes les pièces ont le mouve
ment de la tour aux échecs, c'est-à-dire qu'elles peuvent
avancer d'autant de cases qu'elles veulent, orthogonalement
et sans avoir le droit de sauter par-dessus une autre pièce.
La capture des pions se fait par étranglement entre deux
pièces ennemies, celle du roi lorsqu'il est coincé de tous côtés
par des pions adverses, ou entre trois de ceux-ci et son propre
trône. Le roi remporte la victoire lorsqu'il atteint la péri
phérie du damier sans être capturé.
En Laponie, le jeu observé par Linné le 21 juillet 1732
portait le nom de tablut et se jouait sur un damier de 9 x 9 cases,
entre un roi et huit soldats « suédois » et seize assaillants
« moscovites » (3).
En Scandinavie, on a retrouvé deux damiers fragment
aires, l'un de 18 x 18 cases à Wimose, l'autre de 13 x 13 cases
à Gokstad, et de très nombreux textes font allusion à ce jeu
sous le nom de (hnefa)tafl. Le damier de Wimose est anté
rieur au ve siècle de notre ère, et prouve donc l'extrême anti
quité de ce jeu dans le monde Scandinave (4).
Dans le monde celtique, au Pays de Galles l'érudit
Robert ap Ifan a laissé en 1587 le règlement et le dessin
d'un jeu appelé tawlbwrdd. Son damier a 1 1 x 1 1 cases et un
roi et douze défenseurs s'y opposaient à vingt-quatre advers
aires (5). De nombreuses allusions dans les textes nous assu
rent par ailleurs que ce jeu est bien plus ancien que sa descrip
tion par Robert ap Ifan.
D'Irlande, l'évêque Duibhinnsi apporta à la Cour du
roi anglais Athelstan (925-930) un jeu dénommé aléa euangelii,
(3) C. von LINNE, Lachesis laponica, Londres, 1811, II, p. 55.
(4) H. J. R. MURRAY, p. 56-68.
(5) C. STERCKX, p. 730-732. — — 679
de 18 x 18 cases et aux règles identiques d'après sa descrip
tion dans un manuscrit du xie siècle (6).
L'île de Man a produit enfin, au Xe siècle, un damier
de la plus grande beauté découvert lors de la fouille d'un
crannog à Ballinderry, non loin de Dublin (pi. IV) (7). Comme
les trois damiers de Buckquoy, il montre quarante-neuf inter
sections sur lesquelles pouvaient se mouvoir les pions. La
comparaison de divers textes irlandais a permis d'identifier ce
damier avec un jeu dénommé brandubh et a confirmé la
parenté de ses règles avec les autres (8).
Tous ces jeux ont en commun d'avoir la case centrale
décorée ou isolée des autres pour marquer que son accès
est réservé au roi. Avec leurs dimensions (7 x 7) identiques
à celles du damier de Ballinderry, ce détail est la preuve
que les damiers de Buckquoy appartiennent bien à la même
famille que tous ceux énumérés plus haut.
Le damier de Ballinderry présente toutefois cette sin
gularité que les quatre cases d'angle sont isolées des autres,
de la même façon que la case centrale. Ce détail n'a pas
grande importance : plusieurs textes irlandais démontrent
que les règles du jeu ont varié au cours des siècles et que la
trop facile supériorité du roi a pu être en partie compensée
par une obligation d'atteindre non plus n'importe quelle case
de la périphérie mais bien l'une des cases d'angle, voire même
toutes les quatre successivement (9). Par ailleurs, il semble
que cette petite différence dans les règles ainsi que les diffé
rentes dimensions des damiers aient correspondu en Irlande
à différentes dénominations. Le fait est surtout probable pour
le jeu appelé fidhcheall qui est le plus fréquemment attesté
(6) J. A. ROBINSON, The Time of saint Dunstan, Oxford, 1923, p. 69-71, 171-181 ;
C. STERCKX, p. 735-et pi. 8.
(7) H. ON. HENCKEN, Ballinderry Crannog m 1 dans PRIA sect. C, XLIII, 1935-
1937. p. 175-190; C. STERCKX. p. 733 (avec bibliographie).
(8) C. STERCKX, p. 732-735.
(9) C. p. 734. — — 680
dans les textes et qui porte un nom pan-celtique témoignant
vraisemblablement de la plus extrême antiquité (10).
Après avoir ainsi identifié la nature des damiers trou
vés à Buckquoy, la question se pose encore de leur situation
dans le temps et de leur origine dans l'espace.
Le site fouillé par la mission écossaise de Mrs Ritchie
est celui d'un petit établissement agricole comprenant un
bâtiment de ferme et plusieurs constructions adventices dont
l'édification s'échelonne entre le vie et le ixe siècle de notre ère.
Voici un résumé de son rapport de fouilles que Mrs Ritchie
a bien voulu me permettre de reproduire ici :
A long, low mound covered the remains of Pictish and Norse
homesteads dating from before the eight to the early tenth century AD. ;
dating is based primarily upôn the stratification in relation to a mid
tenth century Viking burial inserted into the mound created by the
ruined building beneath. This burial was that

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