Le coffre et le revenant
27 pages
Français

Le coffre et le revenant

-

Le téléchargement nécessite un accès à la bibliothèque YouScribe
Tout savoir sur nos offres
27 pages
Français
Le téléchargement nécessite un accès à la bibliothèque YouScribe
Tout savoir sur nos offres

Description

En mai 1830, Stendhal publie dans la Revue de Paris une nouvelle intitulée « Le coffre et le revenant ». Cette nouvelle se passe en Espagne et raconte l’histoire de deux jeunes amants, don Fernando de la Cueva et doña Inès Arregui, qui se voient séparés par le mariage forcé de cette dernière avec don Blas Bustos y Mosquera, redouté directeur de la police de Grenade, moine défroqué et ancien galérien. Extrait : Les femmes regardaient avec terreur par un petit coin de leurs fenêtres ce terrible directeur de la police de Grenade. Le ciel a puni sa cruauté en mettant sur sa figure l’empreinte de son âme. C’est un homme de six pieds de haut, noir, et d’une effrayante maigreur 

Informations

Publié par
Nombre de lectures 56
EAN13 9782824711485
Langue Français

Extrait

ST EN DHAL
LE COF F RE ET LE
REV ENAN T
BI BEBO O KST EN DHAL
LE COF F RE ET LE
REV ENAN T
1927
Un te xte du domaine public.
Une é dition libr e .
ISBN—978-2-8247-1148-5
BI BEBO OK
w w w .bib eb o ok.comLicence
Le te xte suivant est une œuv r e du domaine public é dité
sous la licence Cr e ativ es Commons BY -SA
Except where otherwise noted, this work is licensed under
h tt p : / / c r e a ti v e c o m m on s . or g / l i c e n s e s / b y - s a / 3 . 0 /
Lir e la licence
Cee œuv r e est publié e sous la licence CC-BY -SA, ce qui
signifie que v ous p ouv ez lég alement la copier , la r e
distribuer , l’ env o y er à v os amis. V ous êtes d’ailleur s
encourag é à le fair e .
V ous de v ez aribuer l’ o euv r e aux différ ents auteur s, y
compris à Bib eb o ok.A V EN T U RE ESP A GNOLE
   matiné e du mois de mai 182., don Blas Bustos y
Mosquera, suivi de douze cavalier s, entrait dans le villag e d’ Al-P colote , à une lieue de Gr enade . A son appr o che , les p ay sans
r entraient pré cipitamment dans leur s maisons et fer maient leur s p ortes.
Les femmes r eg ardaient av e c ter r eur p ar un p etit coin de leur s fenêtr es
ce ter rible dir e cteur de la p olice de Gr enade . Le ciel a puni sa cr uauté
en meant sur sa figur e l’ empr einte de son âme . C’ est un homme de six
pie ds de haut, noir , et d’une effrayante maigr eur  ; il n’ est que dir e cteur de
la p olice , mais l’é vê que de Gr enade l ui-même et le g ouv er neur tr emblent
de vant lui.
Durant cee guer r e sublime contr e Nap olé on, qui, aux y eux de la p
ostérité , placera les Esp agnols du dix-neuvième siè cle avant tous les autr es
p euples de l’Eur op e , et leur donnera le se cond rang après les Français,
don Blas fut l’un des plus fameux chefs de guérillas. and sa tr oup e
n’avait p as tué au moins un Français dans la jour né e , il ne couchait p as dans
un lit  : c’était un v œu.
A u r etour de Ferdinand, on l’ env o ya aux g alèr es de Ceuta, où il a p assé
huit anné es dans la plus hor rible misèr e . On l’accusait d’av oir été
capucin dans sa jeunesse , et d’av oir jeté le fr o c aux orties. Ensuite il r entra
1Le coffr e et le r e v enant Chapitr e
en grâce , on ne sait comment. D on Blas est célèbr e maintenant p ar son
silence  ; jamais il ne p arle . A utr efois les sar casmes qu’il adr essait à ses
prisonnier s de guer r e avant de les fair e p endr e lui avaient acquis une
sorte de réputation d’ esprit  : on rép était ses plaisanteries dans toutes les
ar mé es esp agnoles.
D on Blas s’avançait lentement dans la r ue d’ Alcolote , r eg ardant de
côté et d’autr e les maisons av e c ses y eux de ly nx. Comme il p assait
devant l’église on sonna une messe  ; il se pré cipita de che val plutôt qu’il
n’ en descendit, et on le vit s’ag enouiller auprès de l’autel. atr e de ses
g endar mes se mir ent à g enoux autour de sa chaise  ; ils le r eg ardèr ent, il
n’y avait déjà plus de dé v otion dans ses y eux. Son œil sinistr e était fix é
sur un jeune homme d’une tour nur e fort distingué e qui priait dé v otement
à quelques p as de lui.
― oi  ! se disait don Blas, un homme qui, suivant les app ar ences,
app artient aux pr emièr es classes de la so ciété n’ est p as connu de moi  ! Il
n’a p as p ar u à Gr enade depuis que j’y suis  ! Il se cache .
D on Blas se p encha v er s un de ses g endar mes, et donna l’ ordr e
d’arrêter le jeune homme dès qu’il serait hor s de l’église . A ux der nier s mots
de la messe , il se hâta de sortir lui-même , et alla s’établir dans la grande
salle de l’aub er g e d’ Alcolote . Bientôt p ar ut le jeune homme étonné .
―  V otr e nom  ?
― D on Fer nando della Cue va.
L’humeur sinistr e de don Blas fut augmenté e , p ar ce qu’il r emar qua,
en le v o yant de près, que don Fer nando avait la plus jolie figur e  ; il était
blond, et, malgré la mauvaise p asse où il se tr ouvait, l’ e xpr ession de ses
traits était fort douce . D on Blas r eg ardait le jeune homme en rê vant.
― el emploi aviez-v ous sous les Cortès  ? dit-il enfin.
― J’étais au collèg e de Sé ville en 1823  ; j’avais alor s quinze ans, car je
n’ en ai que dix-neuf aujourd’hui.
―  Comment viv ez-v ous  ?
Le jeune homme p ar ut ir rité de la gr ossièr eté de la question  ; il se
résigna et dit  :
― Mon pèr e , brig adier des ar mé es de don Carlos Cuarto ( que Dieu
bénisse la mémoir e de ce b on r oi  !), m’a laissé un p etit domaine près de
2Le coffr e et le r e v enant Chapitr e
ce villag e  ; il me rapp orte douze mille ré aux (tr ois mille francs)  ; je le
cultiv e de mes pr opr es mains av e c tr ois domestiques.
― i v ous sont fort dé v oués sans doute . Ex cellent no yau de guérilla,
dit don Blas av e c un sourir e amer .
― En prison et au se cr et  ! ajouta-t-il en s’ en allant, et laissant le
prisonnier au milieu de ses g ens.
elques moments après, don Blas déjeunait.
― Six mois de prison, p ensait-il, me fer ont justice de ces b elles
couleur s et de cet air de fraîcheur et de contentement insolent.
Le cavalier en sentinelle à la p orte de la salle à mang er haussa viv
ement sa carabine . Il l’appuyait p ar trav er s contr e la p oitrine d’un vieillard
qui cher chait à entr er dans la salle à la suite d’un aide de cuisine app
ortant un plat. D on Blas cour ut à la p orte  ; der rièr e le vieillard, il vit une
jeune fille qui lui fit oublier don Fer nando .
― Il est cr uel qu’ on ne me donne p as le temps de pr endr e mes r ep as,
dit-il au vieillard  ; entr ez cep endant, e xpliquez-v ous.
D on Blas ne p ouvait se lasser de r eg arder la jeune fille  ; il tr ouvait
sur son fr ont et dans ses y eux cee e xpr ession d’inno cence et de piété
céleste qui brille dans les b elles madones de l’é cole italienne . D on Blas
n’é coutait p as le vieillard et ne continuait p as son déjeuner . Enfin il sortit
de sa rê v erie  ; le rép était p our la tr oisième ou quatrième fois les
raisons qui de vaient fair e r endr e la lib erté à don Fer nando de la Cue va,
qui était depuis longtemps le fiancé de sa fille Inès ici présente , et allait
l’ép ouser le dimanche suivant. A ce mot, les y eux du ter rible dir e cteur de
p olice brillèr ent d’un é clat si e xtraordinair e , qu’ils fir ent p eur à Inès et
même à son pèr e .
― Nous av ons toujour s vé cu dans la crainte de Dieu et sommes de
vieux chrétiens, continua celui-ci  ; ma race est antique , mais je suis
p auv r e , et don Fer nando est un b on p arti p our ma fille . Jamais je n’ e x er çai
de place du temps des Français, ni avant, ni depuis.
D on Blas ne sortait p oint de son silence far ouche .
― J’app artiens à la plus ancienne noblesse du r o yaume de Gr enade ,
r eprit le vieillard  ; et, avant la ré v olution, ajouta-t-il en soupirant, j’aurais
coup é les or eilles à un moine insolent qui ne m’ eût p as rép ondu quand je
lui p arle .
3Le coffr e et le r e v enant Chapitr e
Les y eux du vieillard se r emplir ent de lar mes. La timide Inès tira de
son sein un p etit chap elet qui avait touché la r ob e de la madone del pillar ,
et ses jolies mains en ser raient la cr oix av e c un mouv ement conv ulsif.
Les y eux du ter rible don Blas s’aachèr ent sur ces mains. Il r emar quait
ensuite la taille bien prise , quoique un p eu forte de la jeune Inès.
Ses traits p our raient êtr e plus régulier s, p ensa-t-il  ; mais cee grâce
céleste , je ne l’ai jamais v ue qu’à elle .
― Et v ous v ous app elez don Jaime Ar r egui  ? dit-il enfin au vieillard.
―  C’ est mon nom, rép ondit don Jaime en assurant sa p osition.
― Ag é de soix ante et dix ans  ?

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents