Métaphore et métonymie - article ; n°1 ; vol.38, pg 229-240
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Description

Cahiers de l'AIEF - Année 1986 - Volume 38 - Numéro 1 - Pages 229-240
12 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1986
Nombre de lectures 30
Langue Français

Extrait

Kathryn Grossman
Métaphore et métonymie
In: Cahiers de l'Association internationale des études francaises, 1986, N°38. pp. 229-240.
Citer ce document / Cite this document :
Grossman Kathryn. Métaphore et métonymie. In: Cahiers de l'Association internationale des études francaises, 1986, N°38. pp.
229-240.
doi : 10.3406/caief.1986.1979
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/caief_0571-5865_1986_num_38_1_1979METAPHORE ET METONYMIE
le Cas de « Han d'Islande » (1)
Communication de M™ Kathryn M. GROSSMAN
(Pennsylvania State University)
au XXXV IP Congrès de l'Association, le 25 juillet 1985
Ce centenaire nous offre l'occasion de nous pencher à
nouveau sur les débuts poétiques et romanesques de Victor
Hugo. Au moment d'aborder Han d'Islande en 1821, Hugo
s'était déjà exercé non seulement à la poésie, mais aussi à la
critique littéraire. S'il veut, de plus, rivaliser avec Walter
Scott, « dans l'intérêt de la littérature » (II, 1168) (2), c'est
que Je romancier écossais le passionne depuis au moins deux
ans, passion qui éclate dans les pages du Conservateur litté
raire.
Il lui faut presque deux ans encore, avant de pouvoir
accoucher de ce premier roman. Et c'est pendant ce temps
que sa mère meurt, qu'il se marie avec Adèle Foucher, que
son frère Eugène sombre irrémédiablement dans la folie.
Drame familial que rappelle la deuxième préface du livre,
ajoutée trois mois après sa publication en 1823, où l'auteur
s'identifie au texte Jui-même. Bien que certains retrouvent
dans Han d'Islande « le monstre du romantisme et du mauvais
(1) Voir mon chapitre, « Fathers and Children in Han d'Islande :
Reconciling Story and History », The Early Novels of Victor Hugo.
Towards a Poetics of Harmony, Genève, Droz (à paraître), pour une étude
plus détaillée de ce sujet.
(2) Victor Hugo, Œuvres complètes, éd. Jean Massin, 18 vol., Paris, le
Club Français du Livre, 1967-70. Toutes les citations de Hugo sont tirées
de cette édition. 230 KATHRYN M. GROSSMAN
goût », Hugo affirme « qu'il ne pousse pas encore la férocité
jusqu'à dévorer les petits enfants vivants » (II, 92). Au cont
raire, c'est un père dévoué, tout comme la plupart des pères
parmi ses personnages. Déçu par les fautes d'impression de
la première édition, il subit « le supplice d'un père auquel on
rendrait son enfant mutilé et tatoué par la main d'un iroquois
du lac Ontario » (II, 90). Qu'il y ait un rapport avec cet
enfant mutilé et les restes défigurés, non seulement des jeunes
soldats de Munckholm, mais aussi du fils de Han d'Islande
lui-même, cela paraît évident, mais ce rapport n'en demeure
pas moins énigmatique.
Aussi Hugo invite-t-il le lecteur à regarder de plus près
la thématique familiale de son roman. Cette œuvre —
« moitié d'histoire, moitié d'invention » (II, 1168) — semble
explorer à la fois sa propre généalogie et son existence fictive,
c'est-à-dire sa continuité et son originalité littéraires. C'est
dans cette perspective que je propose d'examiner les structures
métaphoriques et métonymiques dans Han d'Islande, la notion
de métonymie résumant les relations de contiguïté ou d'ex
tension dans le roman, et la notion de métaphore, celles de
ressemblance ou de permutation. En analysant les divers
rapports entre parents et enfants, nous essaierons de saisir
l'attitude de Hugo vis-à-vis de son entreprise romanesque.
L'univers moral de Han d'Islande nous permettra de mieux
comprendre à la fois l'esthétique de cette première grande
œuvre narrative et sa place parmi les grands romans à venir.
I. Paternité
Les pères foisonnent dans Han d'Islande : d'abord, le
héros éponyme, qui venge la mort de son fils unique, Gill
Stadt, en tuant tous les « fils d'hommes » possibles ; ensuite,
Schumacker, ancien grand-chancelier de Norvège, emprisonné
avec sa fille Ethel et poursuivi toujours par son ennemi mort
el, le comte d'AhlefeJd ; puis, d'Ahlefeld lui-même, qui
adore son propre fils unique, Frédéric, sans savoir que le
vrai père de cet héritier est Musdoemon, son secrétaire per
fide ; enfin, Levin de Knud, gouverneur de la forteresse de MÉTAPHORE ET MÉTONYMIE 231
Munckholm où languit Schumacker, et père adoptif du jeune
héros Ordener Guldenlew, amoureux d'Ethel. Dans chaque
cas, le père cherche à influencer le destin de son enfant en
le formant d'après sa propre image. Han d'Islande essaie de
léguer à Gill Stadt « l'esprit infernal » (II, 144) de son aïeul
Ingolphe l'Exterminateur. Il lui faut haïr le genre humain
tout entier. D'Ahlefeld compte sur Frédéric pour déshonorer
Ethel, l'entraînant ainsi dans des projets de vengeance irra
isonnés qui ne le concernent pas personnellement. Schumacker,
de son côté, enseigne à sa fille de maudire « dans leur exis
tence, et... dans leur postérité » (II, 347) les familles d'Ahle-
feld et Guldenlew, responsables de sa chute injuste. Le seul
parent qui refuse de transmettre cet héritage de haine et de
vengeance, Levin de Knud, fournit tout de même à Ordener
l'exemple d'un « second père » (II, 111) qui a « pour [le]
diriger une boussole qui ne [le] trompe jamais,... [sa]
conscience » (II, 224). Etant donné que les trois autres
« pères » d'Ordener — son grand-père, roi de Norvège et
de Danemark, son père véritable, le vice-roi, et Schumacker
lui-même — ne sauraient admettre son alliance avec Ethel,
l'exemple de Levin de Knud lui permet au moins de pour
suivre l'idée d'un devoir qui surpasse l'obéissance pure.
Tandis que Gill Stadt, Ethel et Ordener résistent donc à
l'influence paternelle en aimant ceux qu'il leur est défendu
d'aimer, Frédéric suit, sans se poser de questions, les traces
de son père. De même que d'Ahlefeld semble ignorer que
les intrigues qu'il trame avec Musdoemon contre Schumacker
sont horriblement conventionnelles, Frédéric essaie de séduire
Ethel à l'aide de formules amoureuses tout à fait précieuses
et démodées. Le cercle vicieux de la vengeance, perpétué de
génération en génération, correspond donc à un certain
manque d'imagination chez le scélérat. Dans le cas de Fré
déric, tomber dans le piège de la banalité a des conséquences
fatales. Pour impressionner Ethel, il se moque de « la série
d'héritiers uniques » (II, 144) qui constitue la race de Han
d'Islande, sans deviner que c'est lui-même « l'unique espé
rance » (II, 269) de ses propres parents, qui va bientôt périr
entre les mains du nain monstrueux. Affirmer que « les 232 KATHRYN M. GROSSMAN
aventures de Han pourraient fournir un roman délicieux,
dans le genre des sublimes écrits de la damoiselle Scudéry »
(II, 145), c'est prédire précieusement sa fin comme « délices »
de Han, lequel, ironiquement, boira le sang de Frédéric dans
le crâne de Gill Stadt.
Il est à noter que ni le comte d'Ahlefeld, ni Frédéric, ni
Musdoemon ne sont capables d'imaginer la taille du véritable
Han d'Islande, ce qui les empêche de le reconnaître en chair
et en os. En effet, Frédéric invente en badinant avec Ethel
une version latinisée du roman de Victor Hugo dont le héros
serait un géant. Musdoemon provoque au nom de Schumacker
une révolte des pauvres mineurs de Norvège contre le roi,
en engageant pour les mener « un farouche montagnard,
haut et dur comme un chêne, féroce et hardi comme un loup
dans un désert de neige ; il est impossible », selon lui, « que
ce formidable géant ne ressemble pas à Han d'Islande »
(II, 188). Quant à d'Ahlefeld, il préfère cette fiction-là à la
créature peu imposante qu'il découvre à sa place.
Mais ce n'est pas seulement sur l'apparence du vrai monst
re que ce mauvais magistrat se trompe ; c'est aussi sur sa
psychologie profonde. Comme c'était le cas pour Frédéric,
d'Ahlefeld considère Han comme une autre version de lui-
m&

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